Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

L'Eglise devant Dieu

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JONAS : CHAPITRE IV.


Alors Jonas éprouva un grand déplaisir, et il fut irrité. Il adressa à l'Éternel cette prière : C'est bien là ce que je disais, ô Éternel, quand j'étais encore dans mon pays ! Voilà pourquoi je m'étais empressé de fuir à Tarsis. Car je savais que tu es un Dieu miséricordieux, compatissant, lent à la colère, riche en bonté et que tu reviens sur tes menaces. Maintenant donc, prends ma vie, ô Éternel, car la mort vaut mieux pour moi que la vie.
L'Éternel lui répondit : Fais-tu bien de t'irriter ?

Alors Jonas, étant sorti de Ninive, s'établit à l'orient de cette ville. Là, il se fit une cabane, à l'ombre de laquelle il s'assit, dans l'attente de ce qui allait arriver à Ninive. Or, l'Éternel fit croître une plante qui s'éleva au-dessus de Jonas, pour projeter de l'ombre sur sa tête et le consoler de son chagrin. Et Jonas éprouva une grande joie à cause de cette plante.
Mais le lendemain, dès le lever de l'aurore, Dieu envoya un ver qui piqua la plante en sorte qu'elle sécha. Puis, au lever du soleil, Dieu fit souffler un vent brûlant d'orient, et le soleil darda ses rayons sur la tête de Jonas, de sorte qu'il tomba en défaillance. Et il demanda la mort, en disant : la mort vaut mieux pour moi que la vie !
Alors Dieu dit à Jonas : Fais-tu bien de t'irriter à cause de cette plante ? Il répondit : Je fais bien de m'irriter au point de désirer la mort. L'Éternel reprit : Tu as pitié d'une plante pour laquelle tu n'as pris aucune peine, que tu n'as point fait pousser, qu'une nuit a vu naître et qu'une nuit a vu périr. Et moi, comment n'aurais-je pas pitié de Ninive, la grande ville, dans laquelle il y a plus de cent vingt mille créatures humaines qui ne savent pas distinguer leur main droite de leur gauche, ainsi qu'un très grand nombre d'animaux !



 

Le dernier chapitre du livre de Jonas nous ramène au premier, et c'est comme si rien ne s'était passé entre ces deux chapitres. Nous pensions que Jonas « avait dépouillé le vieil homme » qu'il l'avait laissé au fond de l'abîme ; nous pensions avoir affaire à un homme repenti, désormais obéissant à la Parole de Dieu, reconnaissant d'avoir été retiré des flots, joyeux de voir que le message de l'Eternel avait été accueilli et pris au sérieux par les Ninivites - et nous retrouvons le vieil homme, l'homme naturel, avec son coeur et sa tête dure, avec ses désirs et ses prétentions, l'homme qui n'aime pas et se refuse à aimer les Assyriens, ces impurs, ces païens, qui n'appartiennent pas à l'Alliance de Dieu, qui ne sont pas du peuple élu ! Nous pensions, après avoir vu tout ce que Dieu avait fait pour le prophète infidèle et pour Ninive, que le livre de Jonas se terminerait par un chant de reconnaissance, un hymne de joie, une seconde prière qui louerait l'Éternel d'être « miséricordieux, compatissant, lent à la colère et riche en bonté » - et nous lisons ceci « Alors Jonas éprouva un grand déplaisir et il fut irrité »

Telle est la reconnaissance de l'homme. Telle est son attitude devant l'oeuvre de Dieu.

Nous entendons bien une prière, mais elle est un reproche : « C'est bien là ce que je disais, ô Éternel, quand j'étais encore dans mon pays ! Voilà pourquoi je m'étais empressé de fuir à Tarsis. Car je savais que tu es un Dieu miséricordieux, compatissant, lent à la colère, riche en bonté, et que tu reviens sur tes menaces. Maintenant donc, prends ma vie, ô Éternel ; car la mort vaut mieux pour moi que la vie ! »

Jonas est déçu par Dieu, non pas, comme nous pourrions nous y attendre, à cause de Sa sévérité, de Sa rigueur ! Il est déçu par l'excès de Son amour ; il est irrité de voir que Dieu est trop lent à la colère, trop riche en bonté - pour les autres !
Jonas l'avait pressenti : Dieu ferait grâce aux Ninivites - et c'est pourquoi il n'avait pas voulu aller à Ninive... Dieu épargnerait les Assyriens, les ennemis d'Israël, et c'est ce que Jonas ne saurait pardonner à Dieu !

Et il faut bien, encore une fois, que nous nous reconnaissions dans le prophète, nous, les croyants, nous, les chrétiens, nous qui pensons avoir dépouillé le vieil homme, nous qui croyons nous être repentis, nous qui, pourtant, sommes marqués du signe du baptême...

Où est notre reconnaissance ? Où est notre joie pour tout ce que Dieu a fait pour nous et pour les autres en envoyant Son Fils dans le monde ? La joie et la reconnaissance ne manquent-elles pas dans notre vie comme elles manquent dans le quatrième chapitre du livre de Jonas ? Et nos prières, ne ressemblent-elles pas souvent à la dernière prière du prophète, qui est un reproche ?

Nous savons prier quand nous sommes dans l'abîme ; mais sitôt dehors, nous oublions que nous sommes des pécheurs pardonnés. Nous oublions que, si Dieu n'était lent à la colère et riche en bonté, nous serions encore dans l'abîme...

Encore et toujours, nous qui sommes des chrétiens, nous devons reconnaître que nous vivons, parlons, agissons comme si Dieu n'avait pas fait pour nous un miracle ; nous avons déjà cessé de nous repentir...

Nous sommes Jonas, précisément ce Jonas du dernier chapitre : il est un miroir que Dieu nous tend. Nous savons que Dieu est « miséricordieux, compatissant, lent à la colère, riche en bonté », mais nous ne savons pas nous réjouir de Son amour ! Bien plus : Sa compassion, Sa miséricorde, Sa lenteur à la colère, nous irritent, nous exaspèrent parce qu'elles sont aussi pour nos ennemis, pour les Ninivites de ce temps, pour les Assyriens qui triomphent et qui règnent aujourd'hui ! Eux aussi vivent de Son amour ; d'eux aussi Il a compassion ; sur eux aussi Dieu fait lever Son soleil, car « Il le fait lever sur les méchants et sur les bons, il l'ait pleuvoir sur les justes et sur les injustes » et « Il est bon pour les ingrats et pour les méchants ». Cela, nous ne le pardonnons pas à Dieu !

Mais qui nous dit que nous sommes les bons et les justes ? (N'est-ce pas le serpent ?) En tous cas, le seul fait d'oser le penser devrait nous convaincre du contraire ! N'est-ce pas la pensée que nous sommes seuls dignes de l'amour de Dieu qui nous empêche d'être reconnaissants et de nous réjouir de Son amour ? N'est-ce pas parce que nous sommes empoisonnés par l'idée d'être, nous, les justes et les bons que nous ne pouvons pas souffrir que Dieu soit riche en bonté ? Riche en bonté pour tous, même et surtout pour les pécheurs et les perdus. Et lorsque nous nous en irritons, n'est-ce pas nous qui sommes les ingrats et les méchants ?...

Mais il y a plus : dans notre irritation, nous ne voyons plus que ce que Dieu fait en faveur des autres, et nous pensons qu'Il ne fait rien (ou pas assez) pour nous, les justes et les bons ! Nous oublions que, pour nous aussi, Dieu est miséricordieux et lent à la colère ! Nous oublions qu'Il ne nous traite pas selon nos péchés et que, sans l'amour qui laisse subsister Ninive, nous ne subsisterions pas non plus !... Aussi est-ce à chacun de nous que Dieu dit ce qu'Il disait à l'ouvrier de la première heure qui murmurait contre son maître : « Mon ami, je ne te fais point de tort : n'avons-nous pas convenu ensemble que tu aurais un denier ? Prends ce qui est à toi et va-t-en ! Je veux donner à ce dernier autant qu'à toi. Ne m'est-il pas permis de faire ce que je veux de ce qui m'appartient ? Ou bien vois-tu de mauvais oeil que je sois bon ? » (Matthieu 20: 13-15).

Dans ce quatrième chapitre, le péché de Jonas, ce n'est plus de fuir loin de la face de l'Éternel, c'est de se mettre à la place de Dieu. Jonas juge. Il ne juge pas seulement Ninive, il juge Dieu. Il trouve Sa conduite déraisonnable, il trouve que Dieu ne fait pas bien Son métier. Et alors, parce que l'Éternel n'a pas voulu se mettre en colère, Jonas, lui, va se mettre en colère ! Il fera ce que Dieu aurait dû faire ! Ridiculement, ce petit bonhomme (qui serait au fond de l'abîme si Dieu n'avait pris soin de lui), monte sur le trône de son irritation et dit à Dieu ce qu'il pense !

« L'Éternel lui répondit : fais-tu bien de t'irriter ? »

La colère de l'homme contre Dieu est toujours une chose ridicule. Et il est bien étonnant que Dieu fasse attention à cela. Mais, nous le voyons, l'Éternel est un Dieu compatissant, lent à la colère et riche en bonté. Il pourrait ne pas répondre : non seulement Il répond, mais Il répond sans colère à la colère de l'homme : « Fais-tu bien de t'irriter ? »

Écoutons : c'est aussi à nous que Dieu dit cela. À nous qui sommes irrités de voir tout ce qui se passe, impatientés de voir que Dieu patiente et « laisse fléchir Son ardente colère » ; à nous qui, comme Jonas, aimerions être à la place de Dieu pour détruire la puissance et l'insolence de Ninive, et qui, si souvent, faisons les petits dieux en nous gonflant de courroux.

Dieu nous voit tels que nous sommes, et Il voit bien que nous ne sommes pas heureux quand nous nous irritons. Il voit que nous ne faisons pas bien. Nous jouons là un rôle qui ne nous convient pas, pour lequel nous ne sommes pas faits. « Laissez agir la colère divine, car il est écrit : C'est à moi qu'appartient la vengeance, c'est moi qui rétribuerai - dit le Seigneur ». (Romains 12:19.) À Dieu seul, il appartient de se mettre en colère. Lui seul en a le droit. Lui seul peut vraiment le faire. Et il faut avouer qu'Il aurait des raisons de le faire, précisément à notre égard ! - Fais-tu bien de t'irriter ? Non, nous ne faisons pas bien ! Laissez-moi faire, dit l'Éternel ; laissez venir ma colère ; cela vaudra mieux. Vous ferez plus d'avance en me laissant agir qu'en voulant faire vous-mêmes ma besogne qui ne vous regarde pas. Ou bien auriez-vous oublié que je suis le Tout-Puissant ?

En effet, celui qui s'irrite se prive de Dieu. Il est seul, enfermé dans sa colère, si malheureux, si profondément déçu, que nous voyons Jonas préférer la mort à la vie. C'est que la vie n'a plus de sens pour celui qui se révolte contre Dieu...
Et pourtant ! Dans cet homme qui trouve que la mort vaut mieux que la vie, subsiste un désir, une espérance : « Jonas étant sorti de Ninive, s'établit à l'orient de cette ville. Là, il se fit une cabane, à l'ombre de laquelle il s'assit, dans l'attente de ce qui allait arriver à Ninive ».

Attendre : c'est tout ce qui reste à Jonas ! Et à nous, après toute notre irritation, nous reste-t-il autre chose ? Ne devons-nous pas aussi, tôt ou tard, en venir là ?
Si Jonas attend, c'est qu'il pense que Ninive n'échappera pas toujours au jugement de Dieu. Il pense qu'il n'est pas possible que ce jugement ne vienne pas un jour.

Et Jonas a raison. Ce jugement viendra. Un jour viendra où le grand empire des Assyriens s'écroulera sous les coups des Mèdes et des Babyloniens ; et c'est ce jour que le prophète Nahum annonce : « Ainsi parle l'Éternel : bien qu'ils soient robustes et nombreux, les Assyriens seront fauchés et exterminés. Je t'humilierai tellement, ô Ninive, que je n'aurai plus à t'humilier une seconde fois. » (Nahum 1: 12.) - Mais ce jour qu'il attend et qu'il voudrait voir tout de suite - Jonas ne le verra pas ! L'Éternel n'agit pas selon nos désirs, Il est moins pressé que nous !

Cependant, si Dieu n'exauce pas maintenant le désir de Jonas, Il lui donne dès maintenant une consolation, un adoucissement à sa peine : « L'Éternel fit croître une plante qui s'éleva au-dessus de Jonas, pour projeter de l'ombre sur sa tête et le consoler de son chagrin. Et Jonas éprouva une grande joie à cause de cette plante ».

L'avez-vous remarqué ? L'Éternel est au commencement comme à la fin du livre de Jonas. Il est là, toujours. C'est Lui qui suscite la tempête pour arrêter Son enfant qui fuit loin de Sa face. C'est lui qui envoie le grand poisson dans lequel Jonas sera à l'abri des vagues et des flots. C'est Lui qui entend la prière du prophète au plus profond de l'abîme. C'est Lui qui donne l'ordre au poisson de rejeter Jonas sur la terre. Et maintenant, dans ce quatrième chapitre, Il est encore, Il est toujours et inlassablement Celui qui veille, Celui qui aime, Celui qui se penche vers l'homme irrité, et qui répond avec douceur à ses reproches. Il est Celui qui connaît notre déception et notre attente et qui nous console de notre chagrin. C'est Lui qui fait croître la plante qui adoucira l'amertume de Jonas !
Cette plante, elle s'élève, elle fleurit aussi dans notre vie!
Pour nous aussi, les mécontents de Dieu, Dieu fait encore cela !

« Mais le lendemain, dès le lever de l'aurore, Dieu envoya un ver qui piqua la plante, en sorte qu'elle sécha. Puis, au lever du soleil, Dieu fit souffler un vent brûlant d'orient, et le soleil darda ses rayons sur la tête de Jonas, de sorte qu'il tomba en défaillance. Et il demanda la mort, en disant : la mort vaut mieux pour moi que la vie ! »

Dieu se lasserait-Il d'aimer Jonas ? Perdrait-Il patience et s'irriterait-Il à Son tour ?... Non, Dieu patiente encore. Il veut faire comprendre à Jonas qu'il en coûte à l'Éternel de détruire une grande ville et que « ce n'est pas volontiers qu'Il afflige les enfants des hommes » (Lamentations 3: 33). La tristesse de Jonas a cause de la plante périe, elle n'est rien devant la tristesse de Dieu, quand Il voit détruit ce que Lui seul a créé ! Jonas devrait comprendre pourquoi Dieu ne veut pas anéantir Ninive ; s'il le comprenait, sa colère cesserait et, avec sa colère, son chagrin. Et c'est dans ce seul but (encore un geste de Son amour !) que Dieu fait périr la plante que Jonas aimait et sur le sort de laquelle il s'apitoie. « L'Éternel reprit : tu as pitié d'une plante pour laquelle tu n'as pris aucune peine, que tu n'as point fait pousser, qu'une nuit a vu naître et qu'une nuit a vu périr. Et moi, comment n'aurais-je pas pitié de Ninive, la grande ville, dans laquelle il y a plus de cent vingt mille créatures humaines qui ne savent pas distinguer leur main droite de leur gauche, ainsi qu'un très grand nombre d'animaux ! »

... Et moi, comment n'aurais-je pas pitié de Ninive ?... pitié de ces hommes qui sont si stupides qu'ils ne savent pas distinguer le bien du mal, et qui se font plus de mal que de bien ! Comment n'aurais-je pas compassion de ces créatures qui se croient très intelligentes, très puissantes, très capables de se conduire elles-mêmes, et qui ne voient pas qu'elles sont aveugles, qui ne comprennent pas qu'elles ne vivent que de Ma compassion, Ma patience, Mon amour ?

Mais ce n'est pas seulement des hommes que Dieu a pitié !

Il aime Sa création tout entière ; les animaux comptent aussi pour Lui ! Ils sont aussi Ses créatures ! « Tous les animaux attendent de Toi que tu leur donnes, en temps opportun, leur nourriture. Tu la leur donnes et ils la recueillent. Tu ouvres ta main et ils sont rassasiés » (Psaume 104: 27-28), et Jésus-Christ nous dit que pas un seul passereau ne tombe à terre sans la volonté de Dieu!

Mes frères, nous sommes ces hommes de Ninive qui ne savent pas distinguer leur main droite de leur main gauche, et vous savez comment Dieu a eu pitié de nous. Vous savez jusqu'où est allé Son amour. « Dieu a tellement aimé le monde qu'il a donné son fils unique... »

Et nous aussi, nous nous sommes irrités contre le Saint et le Juste, tellement irrités qu'Il est mort sur la croix ! ...
Mais Christ est ressuscité ! Christ triomphe de notre colère : Il la change en reconnaissance ! Il change notre tristesse en joie et notre attente en certitude !

Par Jésus-Christ qui vit et qui règne, nous ne sommes plus ces hommes irrités et déçus qui pensent que la mort vaut mieux que la vie. En Jésus-Christ, nous sommes des hommes nouveaux, réconciliés avec Dieu, des hommes qui peuvent dire ce que disait l'apôtre Paul : « Christ est ma vie et la mort m'est un gain » (Philippiens 1:21) - et qui peuvent chanter le cantique de reconnaissance qui manque au dernier chapitre du livre de Jonas

Amen.

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