Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

L'Église de la fin des temps

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DANIEL, chap. XII

Dieu, dans sa volonté sainte, se sert d'un homme politique pour en faire son prophète. Daniel est homme d'État des pieds à la tête. Il n'a pas davantage choisi sa vocation divine de prophète que sa vocation terrestre. Tout jeune, sa vie a été orientée dans l'activité politique. Dès le jour où il vit sa ville natale assiégée et prise d'assaut par les armées étrangères et fut emmené avec d'autres otages de choix à Babylone, il mit ses capacités de travail au service d'un roi étranger, d'abord en qualité de page, et plus tard comme ministre. Il est le bras droit de différents tyrans. Il est à tel point homme d'État que sa pensée est constamment préoccupée par les grands problèmes de politique mondiale. Aussi peut-il dire après les grandes heures de sa prophétie : «Puis je me levai, et je m'occupai des affaires du roi» (DANIEL VIII, 27).

Il n'est pas surprenant que le livre entier dont nous avons médité la parole vivante, chapitre après chapitre, ne traite que de politique et d'histoire mondiale. Toujours à nouveau, des rois et leurs peuples, des peuples et leurs rois, se rangent en bataille. Nous entendons parler d'intrigues de cour et d'abdications, de guerres et de défaites, de victoires et d'ivresse de la victoire. Nous nous trouvons tantôt au banquet royal, tantôt dans la chambre du roi et nous jetons un coup d'oeil sur ses affaires privées et ses pensées les plus secrètes. Ce n'est nullement surprenant si, au cours de cette série de prédications durant laquelle il n'a été question que de Daniel, l'un on l'autre de nos auditeurs se soit retiré, tenu à distance, ou se soit douloureusement posé la question : « La politique ressort-elle du domaine de la chaire ? » « Parler politique, méchant parler. » Qui veut oublier derrière les murs de l'église les réalités de ce monde, les voiler derrière des nuages d'encens et se noyer dans des paroles onctueuses interprète mal la Bible et spécialement le prophète Daniel. Car cet homme se tient les deux pieds campés sur terre et se charge de voir les choses en face et de les interpréter.

Daniel est un enfant du monde, un homme du monde dans le meilleur sens du terme. Il exerce sa charge là où la politique est la plus vile et la plus sanglante. Il a certainement été toujours à nouveau tenté de résilier ses fonctions et de s'enfuir là où la résistance contre Dieu serait moins grande et où il eût été plus facile d'être pieux. Mais Dieu n'a pas permis qu'il y parvînt. Ainsi, il a rempli la fonction qui lui était assignée, non en soutane, ni sous le manteau du prophète, mais en simple civil. Il s'est tenu à la cour du roi étranger dans un état de faiblesse et de grande impuissance, mais sans céder. Dieu soit loué, cet homme a résisté aux conflits surhumains provoqués par les problèmes qui, aujourd'hui, commencent à nous étreindre, les rapports entre l'Église et l'État, l'Église et le monde, le royaume de Dieu et les royaumes humains! Dieu soit loué, Daniel a traversé les périls de son temps, du nôtre et de tous les temps - jusque dans la fournaise et jusque dans la fosse aux lions - dans la présence de Dieu! Dieu soit loué, le Maître des peuples et des souverains nous a montré cet homme qui se tient les deux pieds sur la terre et en même temps les deux mains élevées vers le ciel et qui écrit, avec des lettres de feu, la volonté sainte de Dieu dans la conscience des peuples et des souverains!

Ce qui se passe, maintenant, dans ce dernier chapitre du prophète Daniel, nous apparaît comme si Dieu voulait accorder une sorte de récompense pour sa conduite à cet homme qui est resté, jusqu'à la fin, si passionnément attaché au monde. Dieu lui révèle ce qu'il adviendra de cette terre, à la fin des temps. Il est accordé au prophète de contempler encore la dernière période de l'histoire du monde, dont le cours l'a toujours préoccupé. C'est pourquoi il plane sur ce dernier chapitre, qui semble cependant banal, comme un lustre solennel. Il s'y passe quelque chose de semblable à la sonnerie des cloches du samedi soir, après une dure semaine de travail.

Le sabbat n'est pas encore venu, le jour du repos n'est pas encore là. Une longue nuit sépare encore ce soir du dernier matin. Ce que Daniel voit de la dernière période de l'histoire du monde est une nuit profonde. * Ce sera un temps de détresse, tel qu'on n'en aura jamais vu de pareil depuis qu'il existe des nations jusqu'à ces jours-là» (1). C'est comme si une dernière fois la terre voulait bien être encore la vieille terre; comme si elle voulait jouir et profiter du temps qui lui est accordé avant de céder la place à la nouvelle terre. Toutes les puissances des ténèbres pressent le pas et redoublent d'efforts, comme si elles tentaient d'échapper à leur perte imminente. À la fin des temps, le monde se parera des teintes les plus riches comme la nature en automne. Lorsque l'enfer bat la générale il le fait par peur devant celui qui est plus fort que lui. « Les démons croient en lui, et ils tremblent.» Lorsque le mal sera déchaîné et que les hommes vivront une époque de détresse «telle qu'il n'y en eut point depuis que les nations existent », le dernier assaut de l'enfer sera sur le point de se déchaîner. Il nous est dit: «En ce temps-là, ceux de ton peuple qui seront trouvés inscrits dans le livre seront sauvés» (1).

La première caractéristique des derniers temps est une détresse telle qu'il n'y en eut jamais de mémoire d'homme. Plus loin, il est dit que: «Plusieurs de ceux qui dorment dans la poussière de la terre se réveilleront » (2). La mort sera supprimée, deuxième caractéristique des derniers temps. La mort est la marque de ce monde. Nous marchons tous sous sa bannière internationale. La dernière chose à laquelle nous pouvons penser est la mort. Mais cette puissance majestueuse sera entravée et affaiblie dans son oeuvre. Les morts entendront de la part de Dieu un appel à la vie, et les sépulcres qui, de par sa volonté, étaient tenus scellés sous la puissance de la mort, s'ouvriront. Ainsi viendra la délivrance après la grande tribulation. C'est une révélation inouïe qui est faite au prophète. Il peut entendre et voir ce que personne avant lui n'avait vu et entendu avec une pareille clarté. Pouvons-nous nous étonner de ce que Daniel reconnaisse humblement : « J'entendis mais je ne compris pas» (8) ? Comprenons-nous mieux ceci, nous qui pourtant connaissons Jésus-Christ, « prémices de ceux qui sont morts» ? Cette résurrection des morts ne surgit-elle pas comme un dernier miracle devant lequel nous devons nous incliner ?

La troisième caractéristique des derniers temps est qu'ils n'apporteront pas l'harmonie universelle, l'apaisement de toutes les oppositions. Les contrastes et les différences subsisteront: «Plusieurs seront affinés, purifiés, passés au creuset; mais les impies agiront avec méchanceté, et aucun d'eux n'aura la sagesse de comprendre» (10). L'iniquité contre Dieu ne cessera pas, elle augmentera plutôt, «l'holocauste perpétuel cessera et le culte abominable du dévastateur sera établi » (11). Mais il y aura une séparation, un triage et un choix des plus mystérieux. Le triage révélera ceux qui sont «inscrits dans le livre» et ceux qui ne le sont pas. Dieu lui-même n'unira pas ce qui est séparé, mais séparera ce qui est uni. «Plusieurs de ceux qui dorment dans la poussière de la terre se réveilleront. » Plusieurs ! Mais parmi ceux qui se réveilleront, « les uns se réveilleront pour la vie éternelle, et les autres pour l'opprobre, pour la honte éternelle » (2). Cette séparation qui aura lieu à la fin des temps n'est pas moins mystérieuse que la résurrection des morts. Qui peut comprendre ces choses ?

Il en est un qui a parfaitement compris la signification de ce chapitre : Jésus-Christ, le Seigneur. D'après tout ce que nous savons sur les derniers événements, d'après les révélations de Christ, nous pouvons affirmer que les yeux de notre Seigneur se posèrent souvent sur ce dernier chapitre du livre de Daniel. Ce qu'il nous dit sur les derniers temps correspond dans les grandes lignes - souvent même mot à mot - à ce que Daniel voit ici. Les Évangiles, eux aussi, parlent de « ceux qui sont bénis de Dieu et des maudits», d'une grande séparation et d'un jugement, d'une résurrection des morts, de persécutions, de guerres, de soulèvements et d'époques de détresse qui précéderont les derniers temps. Jésus aussi dit aux siens : «Réjouissez-vous de ce que vos noms sont écrits dans les cieux».

Un détail du tableau des derniers temps qui fut montré à Daniel nous frappe. C'est que les docteurs de l'Église soient mentionnés; «ceux qui auront été intelligents resplendiront comme l'éclat du firmament, et ceux qui en auront amené plusieurs à la justice brilleront comme les étoiles, à toujours et à perpétuité» (3). Comment faut-il comprendre ceci ? Jésus dit un jour à la multitude : « Alors les justes resplendiront comme le soleil dans la maison de mon Père». Cette parole étrange de Daniel, relative aux docteurs de l'Église, est éclairée par les paroles que Jésus répète à maintes reprises : dans les derniers temps, le danger de séduction, de fausses doctrines et d'apostasie sera particulièrement grand. De faux prophètes se présenteront en vêtements de brebis, mais ce seront des loups ravisseurs qui en séduiront beaucoup. Le ministère de docteurs de l'Église prend par là une signification spéciale. Ne méprisez pas la doctrine !

N'exposez pas votre salut en jouant avec elle, c'est dangereux! Dans les derniers temps, la doctrine sera une protection contre l'erreur. Ne mésestimez pas les docteurs qui établissent, par des veilles et par la prière, la pureté de la doctrine et s'appliquent à des problèmes théologiques ! 0 Dieu, donne à ton Église, en ces temps de détresse, des docteurs responsables ! Allume toi-même les flambeaux qui éclaireront la voie à travers les troubles et les égarements de ces jours ! «Et ceux qui auront été intelligents resplendiront comme l'éclat du firmament, et ceux qui en auront amené plusieurs à la justice brilleront comme les étoiles, à toujours et à perpétuité. »

Après cette vision du prophète sur la dernière période de l'Église, Daniel se rend compte que c'est sa dernière vision et que sa fin approche. Nous voyons une inquiétude étrange le saisir (6, 8). C'est l'homme d'État qui s'agite une fois encore et se demande avec inquiétude si les documents sont en ordre, au moment où il abandonne son poste et va entrer dans le dernier repos. Ce ne sont pas des soucis personnels qui le préoccupent, mais ce sont, jusqu'à la fin, des soucis positifs pour ce monde. Le premier problème qui se présente à lui est de savoir ce qu'il adviendra des visions qui lui furent accordées. Il a, certes, bien réglé et classé ses actes, mais nulle archive ne peut être prémunie contre la teigne et assurée contre le feu et l'humidité. Qu'adviendra-t-il du message qu'il a délivré pour toutes les nations ? À l'égard de son message, il est comme un père qui, tenant son enfant dans les bras, sent qu'il trébuche et dit: «Pourvu qu'il n'arrive pas de mal à l'enfant! » Dieu accorde encore à Daniel une vision sur l'avenir de son message. Il peut confier son message de prophète au cours rapide du temps, comme la mère de Moïse abandonna son enfant au courant du Nil. Dieu fera aborder ce message en temps voulu à bon port: «Toi, Daniel, tiens secrètes ces paroles, et scelle le livre jusqu'au temps marqué. Beaucoup de gens l'étudieront, et leur connaissance en sera augmentée» (4).

Nous nous sommes pénétrés du message éternel que Daniel adressa aux peuples. Nous avons attendu pendant des jours et des semaines, parfois même pendant des mois, dans la prière et l'intercession jusqu'à ce qu'un des sceaux se descellât légèrement et qu'une partie infime de son mystère nous fût révélée. Nous avons reçu, ici et là, quelque clarté. Nous devons reconnaître, avec humiliation, combien peu nous en avons reçu. À la fin de notre essai d'interprétation, nous savons que nous ne sommes qu'au début et que, dans les années et décades à venir, nous devrons ouvrir souvent ces pages pour recevoir l'intelligence de ce qui nous paraît, aujourd'hui, incompréhensible.

Mais une question tourmente encore le prophète «Mon Seigneur, quelle sera l'issue de ces événements ? (8). Comme s'il voulait demander: Ce que j'ai vu des derniers temps, cette parole mystérieuse, « ce réveil pour la vie éternelle et pour l'opprobre et la honte éternelle » sera-ce réellement ton dernier mot ? Dieu lui répond : « Va, Daniel, car ces paroles demeureront cachées et scellées jusqu'au temps marqué» (9). De même qu'une mère serre doucement contre elle son petit enfant, qui pose encore bien des questions, en lui disant gentiment pour conclure: «Dors, maintenant, mon enfant ! » - de même, il est dit à Daniel, dors, maintenant; va, c'est le moment de dormir. Ensuite quelques chiffres mystérieux - qui voilent le problème plus qu'ils ne l'éclairent - sont indiqués à Daniel: «Et l'ange leva vers le ciel sa main droite et sa main gauche; et il jura, au nom de Celui qui vit éternellement, que ce serait dans un temps, des temps, et la moitié d'un temps» (7). Finalement les chiffres 1290 et 1335 sont indiqués. Nous ne comprenons pas ces chiffres et ne les devons pas mieux comprendre que Daniel lui-même. L'intelligence de ces choses nous sera donnée lorsque notre connaissance ne sera plus partielle, mais que nous verrons face à face. Alors le dernier sceau de ce livre scellé sera enlevé. Jusqu'à ce moment, l'Église doit se contenter de cette réponse paternelle fut, à la fin, qui donnée à Daniel, en réponse à ses questions: «Quant à toi, Daniel, marche vers ta fin; tu prendras du repos, puis tu te lèveras pour recevoir ton héritage à la fin des jours» (13).

Ainsi la nuit est venue pour le prophète. Samedi soir. Si grande et profonde que soit la nuit qui précède le jour de fête, il reste au prophète le jour éternel et l'héritage promis. Par cette dernière parole, le jour du repos est déjà annoncé à l'homme mourant et l'éternel sabbat resplendit.

Le prophète meurt. Il meurt en exil. Il meurt comme «l'un des prisonniers de Juda ». Mais il meurt en prophète. C'est-à-dire qu'il peut jeter un coup d'oeil sur la Terre promise, même si son pied n'a pas la permission d'en fouler le sol. «Sa vue n'était point affaiblie, et sa vigueur n'était point passée.» Les voyants de Dieu ne deviennent pas myopes et dans la vieillesse, leur horizon ne se restreint pas. Au contraire! La vue la plus perçante est accordée à un Daniel jusqu'à l'heure de la mort. Maintenant son regard peut se porter au delà de l'horizon rétréci où point la dernière aube, avant que n'apparaisse le jour éternel. «Quant à toi, Daniel, marche vers ta fin; tu prendras du repos, puis tu te lèveras pour recevoir ton héritage à la fin des jours » (13).

«Pourquoi nous tenons-nous ici et regardons-nous vers le ciel ?» L'heure du repos n'a pas encore sonné pour nous. Peut-être ne sommes-nous pas encore en route pour Babylone, et peut-être tout ce qu'a vécu Daniel est-il encore devant nous. « Nous nous trouvons jour et nuit dans le combat », l'époque de détresse se place devant plutôt que derrière nous. Daniel nous demande si nous voulons appartenir corps et âme à la vie et à la mort, au royaume de Dieu et à sa cause. Désirons-nous l'héritage éternel ? Cherchons-nous la perle de grand prix et soupirons-nous après le royaume de Dieu et sa justice ? En un mot, désirons-nous être inscrits dans le livre de ceux qui seront sauvés ? Daniel à qui est promis l'héritage éternel n'est pas celui qui suit de loin. Il est «membre inscrit».

Où se fait-on « inscrire membre» ?

À la croix et nulle part ailleurs.

Ton nom est inscrit, avec du sang, dans les livres éternels. Celui qui aura été inscrit entendra, un jour, ces paroles, à la fin des temps :

«Venez, vous qui êtes bénis de mon Père; prenez possession du royaume qui vous a été préparé dès la fondation du monde! »

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