Les prédications du pasteur Walter Luthi
n'attirent pas seulement de très nombreux
fidèles à l'Oekolampadhaus de
Bâle; imprimées dans toute une suite
de recueils (citons entre autres les
méditations sur Daniel, Amos, Habakuk et
Jean), elles ont connu un profond retentissement en
Suisse alémanique et bien au delà. On
s'étonne qu'il ait fallu attendre six
années avant de voir paraître en
français les remarquables
prédications sur le prophète Daniel,
qui ont vu se succéder pendant ce temps
treize éditions en allemand et plusieurs en
d'autres langues. Il est vrai que le style de M.
Luthi est très particulier, simple, dru,
puissamment évocateur; une traduction
française ne saurait en rendre toute la
saveur; les langues nordiques, proches de
l'allemand, ont facilité les autres
traductions.
Ce qui est plus étonnant
encore, c'est de voir que les six années qui
séparent la première parution en
langue allemande de la version française -
six années combien bouleversantes - n'ont
pas davantage ébranlé
l'actualité de ces prédications que
les siècles n'ont affaibli la portée
du message de Daniel lui-même. Nous sommes
toujours dans le présent
enchevêtré et troublant, qui
s'éclaire étrangement au contact de
la parole biblique. M. Luthi nous conduit de
façon sûre à travers le livre
prophétique, parce qu'il s'est laissé
conduire le premier. Avec lui nous sommes sur sol
ferme, et non dans les sables mouvants de
prédictions hasardeuses.
Comme cela est tonique et propre
à édifier l'Église! Comme nous
voilà loin des seules fouilles
archéologiques, et comme nous voilà
loin du faux genre prophétique à
tumultueuse propagande! Nous sommes ici dans le
vrai : «le témoignage de Jésus
est l'esprit de la prophétie»
(Apocalypse
XIX, 10). Daniel annonce
Jésus-Christ, et c'est pourquoi il est
toujours actuel. Mais il n'est pas possible
d'annoncer Jésus-Christ sans dénoncer
l'esprit du siècle, l'esprit de tous les
siècles; et c'est pourquoi la
prophétie devient aussi l'histoire humaine
radiographiée, décelée dans
ses remous les plus secrets : le
péché de l'incrédule et le
péché du croyant y éclatent
dans la grâce du Seigneur, qui est mort pour
l'un et l'autre sur la croix. Voici pourquoi nous
nous sentons, à la lecture de ce livre,
salutairement repris, dans le double sens du terme,
re-pris par notre Dieu.
Genève, avril
1943.
CHARLES BRUTSCH
Ce livre contient douze prédications
prononcées dans l'église
d'Oecolampade à Bâle (décembre
1935 à octobre 1936). Elles ont
été par la suite
légèrement remaniées.
L'interprétation de Daniel démontre
clairement que son message s'adresse, d'une
façon souvent saisissante, à notre
temps. Or le Seigneur nous dit de prendre garde
«aux signes des temps ». Le but du livre
de Daniel est de développer en nous
l'intelligence de ces signes.
Il ne s'agit ici que du message
du
prophète. C'est une limitation voulue du
sujet. L'auteur a pleinement conscience qu'il
existe au sujet de Daniel des points encore obscurs
aujourd'hui, et qui doivent rester insolubles
jusqu'au jour où «nous verrons face
à face ».
À travers ces douze
chapitres, le doigt du prophète
désigne celui qui est le même hier,
aujourd'hui et éternellement. Oui, ce n'est
pas trop s'avancer de dire que,
parmi les prophètes, Daniel est celui qui
nous a le mieux révélé le
Christ. Qu'il ait plu à Dieu d'accorder
à Daniel une vision prophétique au
VIme siècle ou de jeter un coup d'oeil
rétrospectif au IIme siècle ne change
rien au fait qu'il annonce le Christ. Nous avons
donc laissé de côté
intentionnellement la question du calcul des temps.
Le message de Daniel demeure prophétique
soit qu'on l'envisage du dehors et d'en-haut, ou
d'un coup d'oeil rétrospectif, ou d'une vue
d'ensemble.
Il ne s'agit pas ici d'un volcan
éteint, mais d'un volcan en éruption.
Celui qui pense jouer avec de la lave refroidie
s'apercevra qu'il joue avec le feu.
Bâle, janvier 1937.
WALTER LUTHI
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