(1) À côté de cette mélancolie dont
nous avons vu le voile s'épaissir toujours plus sur le Moyen Âge
finissant, on découvre, comme des lueurs dans la brume, des clartés
éparses qui, dès le XIVe siècle, annoncèrent la venue d'un astre
vainqueur, de ce soleil qui fut la Renaissance.
Ce qui caractérise l'esprit du Moyen Âge, d'après
Huizinga (Déclin, ch. XVI et XVII), c'est, avec son abdication devant
l'autorité, l'idéalisme systématique qui envisage tout sous l'angle de
l'absolu, glorifie l'amour chevaleresque pour la dame élue et suscite
l'élan déraisonnable des croisades, c'est encore le simplisme des
jugements poussé jusqu'à la crédulité et même la cruauté, le respect
de la forme, en particulier de la formule, magique ou judiciaire,
tenue pour efficace, c'est enfin - trait inattendu - le goût immodéré
du détail, la manie de développer jusqu'au bout
chaque pensée et chaque image (2).
En morale, ce qui distingue les théoriciens du Moyen Âge, c'est leur
dédain pour la vie présente et la plupart des aspirations
humaines ; en religion, c'est, comme l'a fait observer Ch.
Guignebert, la piété stagnante où se montrent parfois des
« rapides tumultueux » (excès des Flagellants et autres),
contenus à grand'peine par « des digues toujours ébranlées »
(3). Quelle faillite !
« La Scolastique, dit Jules Michelet dans sa
magnifique Introduction à son livre sur la Renaissance (Histoire de
France, T. IX), avait fini par la machine à penser. La religion
semblait finir par la machine à prier. » À tous ces mécanismes,
la Renaissance substitua l'homme.
Émancipation de l'intelligence, elle enseigna l'art de
bien user de la raison, d'appliquer le souci du détail à l'observation
scientifique et historique, et elle inspira le goût des chefs-d'oeuvre
classiques. Elle défendit le patrimoine humain (de là son nom
d'humanisme), méprisé par le moine (4),
et au-dessus de la vie ascétique, grande sans nul doute, mais
artificielle, souvent dangereuse et parfois révoltante, elle replaça
la vie normale, plus grande encore et autrement féconde si elle
s'applique à réaliser l'idéal social. La Renaissance n'a pas été sans
défauts : il lui a manqué d'être vraiment morale et religieuse,
mais la chrétienté a eu l'inappréciable privilège
de la voir complétée et corrigée par la Réformation.
Le mouvement d'idées qui la prépara, aux XIVe et XVe
siècles, a reçu le nom de Prérenaissance.
Son animateur fut l'empereur allemand Frédéric II, que
son adversaire, Grégoire IX, appelait « roi de pestilence »,
mais que Burckhardt a proclamé « le premier homme moderne ».
Despote à la musulmane, ennemi fervent des libertés collectives et
individuelles, avide de régenter l'Eglise qu'il appelait d'ailleurs
« sa mère » et dans le giron de laquelle il mourut, il eut
la singulière fortune d'encourager l'indépendance d'esprit. Sa cour
fut une académie philosophique où Michel Scot, chrétien régulier,
introduisit en 1227 les commentaires rationalistes d'Averroès sur
Aristote. Elle propagea le dédain du miracle et l'étude de la nature,
ardemment poussée par la fameuse École de médecine de Salerne.
Le premier chantre de la Prérenaissance a été Dante
Alighieri (1265-1321) (5). Sa
Divine Comédie (ou Poème) est, dit un de ses commentateurs,
Scartazzini, « le chant du cygne du Moyen Âge et, en même temps,
le lied inspiré qui annonce la venue d'un temps
nouveau » (Prolégomènes, p. 350). Que de contrastes, en effet,
dans la grande âme tourmentée de ce Florentin génial, père de sept
enfants et adorateur exalté de Béatrice Portinari entrevue deux ou
trois fois, idéaliste mystique porté au ravissement béatifique et au
symbolisme et en même temps apôtre de la raison, guelfe devenu gibelin
par réaction contre Boniface VIII, membre du gouvernement de Florence
exilé avec menace du bûcher s'il y revenait, pauvre coeur
désillusionné errant à travers l'Italie, « l'hôtellerie de la
douleur », et finissant par mourir à l'ombre des basiliques
byzantines de Ravenne où il s'est réfugié !
Dante est bien un fils du Moyen Âge. Ce chrétien austère
vit dans le surnaturel. Il ne croit pas seulement, il voit. Il est
visionnaire. Comme Ozanam l'a montré, il accepte les dogmes et les
rites de l'Eglise, et Raphaël a pu le placer, dans sa Dispute du
Saint-Sacrement, à côté des Pères et des grands docteurs. « Il
n'y a chez lui, dit Moore, aucune trace d'hérésie » (ouvrage
cité, T. II, p. 65). Il s'incline devant l'autorité du pape et rend un
culte à Marie. Il approuve la répression des Albigeois. Nourri
d'Augustin, de saint Bernard et de Thomas d'Aquin, il transpose leurs
doctrines en langage figuré dans son Enfer. Sur ses confins, il
relègue les enfants morts sans baptême... Et, d'autre part, Dante
dépasse le Moyen-Age et prépare la Renaissance. Sa Divine Comédie
renouvelle les lettres italiennes. Elle est, a-t-on dit, « le
poème chrétien qui ouvre la littérature européenne comme l'Iliade
ouvrit celle de la Grèce ». Lecteur assidu d'Aristote, Cicéron,
Sénèque et Boèce élève de Brunetto Latini dont le Trésor était émaillé
des plus nobles maximes antiques, il devient, selon l'expression de
Gebhart, « une sorte d'Epictète florentin, visité souvent par des
visions paradisiaques » (6).
Il prélude au rationalisme avec son Banquet (Convito),
oeuvre
de libre examen. « Vivre sans user de la raison, s'écrie-t-il,
c'est être mort ! » Il annonce la Réforme par sa
prédilection pour la religion du coeur (Convito, IV, 28) et par sa
révolte contre le Saint-Siège déconsidéré, dont il condamne le pouvoir
temporel. Il prépare Luther en mettant dans son Enfer Boniface VIII,
Clément V et toute une cohorte de papes coupables de simonie.
Le second héraut de la Prérenaissance a été François
Pétrarque (1304-1374), grand patriote italien d'origine florentine,
poète couronné par le sénat romain sur le Capitole (7),
auteur de 317 sonnets et de 29 canzoni (chants), où il célébra les
paysages, les grandes villes d'Italie et surtout Laure de Noves, qu'il
avait aperçue en Avignon. Comme Dante, mais avec plus d'ampleur, il
attira l'attention sur la littérature antique. Ouvrant la période de
recherche des manuscrits et des oeuvres d'art, il découvrit des
lettres de Cicéron et des fragments de Quintilien. Il réunit une
bibliothèque de deux cents volumes et collectionna des médailles et
monnaies d'autrefois. Il s'attacha surtout à célébrer Rome et son
génie dans les biographies de son De Viris et dans une épopée
artificielle et inachevée, Africa, qui passe pour être du Tite-Live
mis en vers.
Pétrarque fut le père de l'humanisme d'inspiration
païenne. Après une jeunesse dissipée, il était devenu chrétien.
« Elle me remplit, écrivait-il à son grand ami Boccace, de honte
et d'horreur. » Il ajoutait :
« Jésus-Christ m'a tendu la main et m'a tiré à
lui. » Dans son Mépris du Monde, composé en 1343 à Vaucluse sous
la forme de trois dialogues, il s'humiliait en déplorant son extrême
passion pour la gloire. Il écrivit un livre sur les Loisirs des Moines
et un traité sur la Vie solitaire (Milan 1354). Il réclama comme
Dante, la réforme de l'Eglise (8).
Et, d'autre part, l'esprit païen éclate dans l'épicurisme de ce
dernier ouvrage et dans le pessimisme absolu de ses Remèdes à tous les
Hasards du Sort (Venise 1366). « Il se crut aussi chrétien que
Dante, dit Renaudet, et en même temps voulut vivre comme les
anciens... Jamais il n'a cessé d'exiger de la vie la plupart des joies
qu'elle peut offrir ni de poursuivre la gloire... Il était réservé à
ce romantique de fonder la tradition classique, à ce chrétien de
démontrer aux hommes du Moyen-Age le génie du paganisme »
(ouvrage cité, p. 278-279). Son grand mérite, comme l'a établi Pierre
de Nolhac, a consisté dans son individualisme, son sens de l'harmonie
qui l'a poussé à jouir de la langue de Cicéron et à la répandre, son
haut esprit hostile au charlatanisme des alchimistes et des médecins.
Ajoutons, avec Carducci, qu' « il a fondé une puissance nouvelle,
la République des lettres ».
Son disciple et ami, Jean Boccace (1313-1375), fut lui
aussi un grand humaniste (9), Il
est, avant tout, le père de la prose italienne populaire et aisée.
Fils illégitime d'un Florentin, il eut une jeunesse dissolue. Pendant
un séjour à la cour de Naples, il séduisit la princesse Marie et la
célébra dans son livre l'Amorosa Fiammetta. Il écrivit, entre 1348 et
1353, en un style tantôt grave, tantôt familier et savoureux, un
recueil de cent histoires, le Décaméron (Livre des dix Jours),
où s'étale la corruption des ecclésiastiques et des laïques de son
temps, et qui tourne en ridicule l'hypocrisie des moines, le culte des
reliques et le confessionnal. Vers 1355, sous l'influence d'un
chartreux, il dit adieu à la vie dissipée pour se consacrer à l'étude.
Il prit pour guide Pétrarque, dans lequel il saluait un sage antique
instruit par l'Évangile. Très épris des vieux classiques, il en copia
un grand nombre. On devine sa stupeur quand, au Mont-Cassin, il vit
des moines arracher les pages des manuscrits pour les vendre comme
amulettes... Il apprit le grec et chargea un lettré de traduire
l'Iliade et l'Odyssée. Comme Pétrarque, il entreprit de proposer le
génie et les vertus de la Grèce et de Rome à l'imitation des modernes,
et il composa dans cet esprit deux ouvrages latins, la Vie des Femmes
célèbres et les Aventures des Hommes illustres. En 1373, la Seigneurie
de Florence lui confia la chaire consacrée à commenter la Divine
Comédie, mais il mourut sans avoir pu dépasser, dans ses explications,
le XVIIe chant de l'Enfer. Il avait eu, heureusement, le temps
d'écrire la Vita di Dante (10).
L'humanisme de Pétrarque se répandit peu à peu en Italie,
supplantant l'idéal à la fois scolastique et mystique de la Divine
Comédie. Il se heurta d'abord à la tendance réaliste des historiens
florentins : Compagni, qui rédigea la Chronique de son temps
(1312), Jean Villari, dont nous avons déjà signalé l'oeuvre
importante, Velluti (mort en 1370), auteur d'une Chronique sur les
grandes familles de sa cité. L'humanisme fut contrarié aussi par le
goût du théâtre sacré et des chansons de Gestes. La poésie lyrique
cultivée par les Franciscains, auteurs de nombreux cantiques, entretint,
en effet, l'amour des représentations religieuses. Vers 1440, on joua
la Passion sur l'arène du Colisée, et quelques années plus tard, à
Florence, la scène du Jugement dernier. Dans cette ville, des
contastorie (chanteurs d'histoires) célébraient Charlemagne, Lancelot
et Tristan. Le cycle de la Table ronde était également goûté à Ferrare
et à Mantoue. Malgré ces obstacles, la culture nouvelle progressa,
surtout à Florence (11). Coluccio
Salutati (12), devenu chancelier
de la Seigneurie (1375), rechercha, comme Pétrarque, les vieux
manuscrits (13) et répandit le
goût de l'antiquité. Chez les Augustins de Santo Spirito, Louis
Marsili aimait à recueillir les sentences des philosophes païens. On
discutait littérature et philosophie dans la villa (il Paradiso) du
poète Alberti et dans la cellule de Traversari, hébraïsant et amateur
de manuscrits. En 1397, l'humanisme pénétrait dans l'université, avec
Jean Malpaghini, de Ravenne, professeur de rhétorique, et le Byzantin
Manuel Chrysoloras, qui fit la première grammaire grecque rédigée en
latin (imprimée en 1484). Léonard Bruni, surnommé
« l'Arétin » (d'Arezzo), chancelier de la Seigneurie
(1427-1444), écrivit une histoire de Florence et des biographies de
Dante et de Pétrarque, et traduisit divers livres grecs. Poggio
Bracciolini (14), chancelier de
la Seigneurie (mort en 1459), auteur d'une histoire de Florence et
d'un Dialogue contre l'Hypocrisie, très dur pour les moines, découvrit
dans la bibliothèque de Saint-Gall et ailleurs des discours de
Cicéron, le traité de Lucrèce sur la Nature et
d'autres ouvrages classiques. Il y eut des professeurs renommés, tels
que Victorin de Feltre, à Mantoue, pieux et de bonnes moeurs, et
François Filelfo, avide et licencieux, qui enseignait l'éloquence et
le grec à Florence et composa des Propos de table milanais.
L'humanisme eut de grands protecteurs. Cosme de Médicis
(mort en 1464), le plus riche banquier de Florence, gouverneur de
cette ville pendant trente ans, encouragea Fra Angelico et le
Spartiate Pléthon, qui écrivit à sa demande, en 1439, un traité où il
mettait Platon au-dessus d'Aristote. Nicolas de Niccoli, ministre de
Cosme, attira les lettrés et réunit huit cents manuscrits (15).
Son palais était un musée plein de fresques et de statues. Nommons
encore le roi Alphonse de Naples, qui s'entoura de savants grecs,
Montefeltro, duc d'Urbin, savant et artiste, fondateur d'une
bibliothèque, et Lionel d'Este, prince de Ferrare, dont l'université
fut organisée par Guarino de Vérone.
Avec Laurent Valla (16)
s'affirme l'humanisme critique, fondé sur la philologie et l'histoire.
Ce penseur pénétrant fut professeur d'éloquence à Pavie, puis
secrétaire d'Alphonse de Naples, et il mourut à Rome en 1457.
« Il fut, dit Renaudet, le véritable fondateur de la linguistique
latine. » On lui doit un traité sur les Élégances du latin. Il
rejeta la philosophie d'Aristote (Discussions dialectiques), déclara
insoluble l'antinomie entre la prescience et la liberté (Le libre
Arbitre), et taxa le stoïcisme de frivolité (dans son dialogue Le
Plaisir). Appliquant ses redoutables facultés critiques à l'Acte de
donation de Constantin (17), il
en prouve la fausseté par sa contradiction avec
l'histoire et par le caractère médiéval de sa langue. Il en profite
pour attaquer avec violence le pouvoir temporel. Il accuse le pape
d'avoir changé Pierre en Judas cupide et dur et de porter la
responsabilité des guerres civiles de l'Italie, et il reconnaît aux
princes le droit de lui arracher ses néfastes possessions. En 1442,
dans son traité sur la Profession des Religieux, il fait le procès de
la fausse perfection qu'ils prétendent réaliser, il montre le
caractère apocryphe de la lettre d'Abgar, roi d'Edesse, a Jésus,
admise par Jérôme, et il nie l'origine apostolique du Credo. Ses
hardiesses l'amenèrent devant l'Inquisition épiscopale. La protection
du roi Alphonse le sauva, mais il dut déclarer qu'il partageait la foi
de l'Eglise. À Rome, il rédigea sur la Vulgata du Nouveau Testament,
traduction à ses yeux inexacte et mal écrite, des notes critiques
(Annotationes) qu'Erisine devait publier en 1505, en y puisant la
méthode qu'il allait suivre dans son édition princeps du Nouveau
Testament.
Les autres pays (18)
furent plus lents à s'ouvrir à l'humanisme. En France, les savants
réunis par Charles V au Louvre et à l'Hôtel Saint-Paul répandirent le
goût de la littérature antique. Laurent de Premierfait traduisit le
traité de Cicéron sur l'Amitié, Gerson appréciait la belle latinité.
Pourtant, les écrivains s'intéressèrent à (des sujets plus personnels
et plus actuels, à la poésie (Christine de Pisan, Alain Chartier,
Charles d'Orléans), à la chevalerie batailleuse et vaine (Froissart),
au théâtre religieux (Gréban), à l'histoire (Joinville). D'autre part,
on voit se dessiner un esprit nouveau favorable à la Renaissance,
moqueur avec Rutebeuf, auteur de fabliaux, et Jacquemart Gelée, dont
le livre Renart le nouveau (Lille 1288) critique
les clercs et les nobles, réaliste et païen avec le sensuel et
sceptique Jean de Meung (mort vers 1305), qui continua le Roman de la
Rose. En Espagne, on note un goût très vif pour les lettres italiennes
et pour la poésie antique. Avant la fin du XIVe siècle, on y lit
Dante, Pétrarque et Boccace. En 1446, Alvaro de Luna imite ce dernier
dans son Livre des femmes célèbres et vertueuses. Lopez de Mendoza,
marquis de Santillane, introduit en Espagne le sonnet « à la mode
italienne », et son ami, le poète Jean de Mena, traduit l'Iliade
en castillan, En Angleterre, l'humanisme n'inspire guère que Chaucer
dans ses Contes de Cantorbéry, pleins d'art et d'ironie. En Allemagne,
il est ignoré à cette époque. On y cultive le lied, cher aux petits
dont il exprime les souffrances, les chansons d'amour et à boire, avec
les chants religieux,
Un esprit nouveau, orienté vers la lumière et la vie, pénétra
également l'art chrétien à partir du XIIIe siècle.
Le style ogival (19),
appelé à tort « gothique », apparut dans l'Ile de France et
en Picardie avec ses deux caractères généraux,
hauteur des voûtes et clarté des nefs, et ses trois traits techniques,
voûte d'ogive, arc-boutant et décoration empruntée aux plantes et aux
fruits (Salomon Reinach).
La tâche des artistes était alors très malaisée. Il
fallait, comme l'a fait observer Émile Lichtenberger, agrandir les
nefs et le choeur et multiplier les passages pour contenir un public
toujours plus nombreux, éclairer l'édifice et lui donner un caractère
d'aspiration vers le ciel. Les architectes français y réussirent. Ils
conservèrent la disposition en longueur de la basilique et mirent une
rangée ou deux de bas-côtés (nefs latérales) qui firent le tour du
choeur. Ils y ouvrirent des chapelles latérales, dont la principale,
consacrée à la Vierge, fut placée derrière le maître-autel. La chaire
fut suspendue à l'un des piliers de la nef centrale, les stalles du
clergé s'étalèrent sur les côtés du choeur, à l'entrée duquel on fit
une tribune (jubé) supportant un buffet d'orgues. On installa les
cloches dans deux grandes tours, et la grande tour centrale des
églises romanes fut remplacée par une flèche légère en charpente. Les
voûtes reposèrent sur des arcs en ogive, qui reportaient leur poids
sur les piliers intérieurs et les contreforts extérieurs reliés à eux
par ;des arcs-boutants. On ouvrit largement les murs latéraux, et
les fenêtres devinrent si grandes qu'il fallut les diviser par des
meneaux verticaux, réunis dans le haut par des rosaces et des ogives.
De grandes rosaces subdivisées de la même façon furent posées dans les
pignons des façades, au-dessus des portails d'entrée. La lumière
devint alors si vive qu'on dut l'atténuer par des vitraux, sur
lesquels on peignit la vie du Christ et l'histoire des saints. Les
sculpteurs dressèrent des statues sur les montants des grands portails
et ailleurs.
Le style gothique se modifia d'un siècle à l'autre. Il
fut d'abord lancéolé (à lancettes), avec les architectes (dont Jean de
Chelles au XIIIe siècle), qui, à partir de l'an 1163, bâtirent
Notre-Dame de Paris sur les ruines des églises de Sainte-Marie et de
Saint-Etienne, avec le maître champenois Pierre de Montereau, qui fit
la Sainte-Chapelle de Paris (consacrée en 1248), etc., et Robert de
Luzarches qui éleva la cathédrale d'Amiens (achevée en 1288). Sous
Philippe le Bel, ce style prit le nom de rayonnant. Les voûtes
s'allègent, les arcs-boutants s'amincissent, les meneaux plus grêles
dessinent des arabesques géométriques. Ses oeuvres principales ont été
les cathédrales de Strasbourg et de Cologne. Vers la fin du XIVe
siècle apparaît le style flamboyant, ainsi nommé à cause des dessins,
ondulés comme des flammes, tracés par les meneaux où s'encadrent les
verrières. Il s'étale sur la cathédrale de Rouen, et, au début du
siècle suivant, sur celles du Mans, de Quimper et de Nantes et sur le
choeur du Mont-Saint-Michel, et il finit par revêtir des formes
compliquées, d'une gracilité inquiétante.
Dès la seconde moitié du XIIIe siècle, l'art français se
répand, propagé surtout par les moines de Cîteaux, Les cathédrales de
Cologne, Bamberg, Tolède et Upsal imitent respectivement celles
d'Amiens, Laon, Saint-Etienne de Bourges et Notre-Dame de Paris. Le
célèbre Erwin de Steinbach, aidé par ses fils, élève celle de
Strasbourg (20). Matthieu d'Arras
entreprend en 1342 la construction de celle de Prague, demandée par
Charles IV de Bohême. L'influence française s'exerce aussi à Vienne
d'Autriche, Fribourg de Suisse et Bâle. Quant à l'Angleterre, patrie
du gothique flamboyant, elle y renonça vite pour adopter
les baies divisées en cadres rectangulaires, monotonie rachetée par la
fantaisie de nervures. Ce style se montre au choeur de la cathédrale
d'York achevé en 1408, et à celui de Cantorbéry terminé en 1411. En
Allemagne, l'architecture se caractérisa par la maigreur et la
sécheresse de son style, atténuées par l'adoption de formes
flamboyantes et la complication des nervures des voûtes. Ce type,
qu'on peut voir à Saint-Jean et Sainte-Elizabeth de Breslau, prévalut
en Autriche, dans les Pays scandinaves et aux Pays-Bas (cathédrales de
Malines et d'Anvers). En Espagne, le style flamboyant apparût sur
celles de Burgos et de Valence et ailleurs.
En Italie, l'art français vint se heurter à la résistance
des architectes, conduits par l'étude attentive des ruines à mépriser
l'artifice des arcs-boutants et à remettre en honneur les traditions
romaines, conservées par Byzance, du plein cintre et de la coupole. Si
le gothique subsiste encore dans la cathédrale de Milan (commencée en
1387), remarquable par son marbre blanc et le nombre de ses clochers,
le Florentin Brunelleschi (21),
vainqueur au concours de l'année 1420, asseoit audacieusement une
coupole sur le transept de la cathédrale gothique de Florence (22),
et
il met d'élégantes arcades en plein cintre aux églises de San Lorenzo
et de Santo Spirito de la même cité. Alberti (23),
fameux théoricien qui composa trois traités sur l'architecture, la
sculpture et la peinture, s'inspire aussi de modèles antiques dans la
reconstruction de l'église San Francesco, à Rimini. C'est d'Italie que
devait partir le mouvement qui allait remplacer
l'art gothique par le style de la Renaissance.
À la sculpture romane, assez souvent puissante et décorative, mais
conventionnelle (24), succéda, au
XIIIe siècle, la sculpture gothique (25),
qui, s'inspirant de la nature, reproduisit la flore du pays, par
exemple sur le célèbre Chapiteau des Vendanges de Notre-Dame de Reims.
Art admirable, dit S. Reinach, avec ses figures vivantes, ses Vierges
souriantes et la sérénité majestueuse qu'il prête au Christ (le Beau
Dieu d'Amiens). Un siècle plus tard, on le voit se modifier. Amené à
satisfaire à la fois les esprits attirés vers l'expérience et les âmes
tourmentées de cette époque douloureuse, il offrit, dit Renaudet,
« une image plus réaliste de l'homme, une représentation plus
émouvante du drame divin ». Ce changement se révèle dans les
portails du transept de Rouen et le pourtour du choeur de Notre-Dame
de Paris, où Jean Ravy et Jean Le Bouteillier sculptent, avec un
réalisme encore modéré, des scènes bibliques (1351). Sur les statues
de la Vierge se montre « la mère douloureuse ». Ce réalisme
apparaît aussi dans d'autres sculptures : les
Vierges folles d'Erfurt (1358) et les grandes figures d'apôtres
taillées, de 1342 à 1361, pour le choeur de Cologne, et un peu plus
tard à la Chartreuse de Champmol, près de Dijon, fondée par Philippe
le Hardi, duc de Bourgogne, pour abriter les tombes de sa famille. De
belles oeuvres y furent exécutées sous la direction de Jean de
Marville, puis du célèbre hollandais Claus Sluter (26).
Au trumeau du portail, seul reste de celle abbaye, on voit le duc,
dans son long manteau à collet d'hermine, et la duchesse agenouillés
en prière, sous la protection de saint Jean-Baptiste et de sainte
Catherine. Claus de Werve, neveu de Sluter, sculpta pour Champmol le
tombeau de Philippe le Hardi (achevé en 1411), statue de marbre blanc
couchée sur une dalle de marbre noir, entourée de pleureurs d'aspect
tragique.
En Italie, la sculpture se montra indépendante du genre
gothique. Au XIIIe siècle, les derniers artistes de la famille des
Cosmati élevèrent des tombeaux et des tabernacles d'autel d'un style
nouveau : le sarcophage antique fut remplacé par un lit de parade
(tombeau de Guillaume Durante, évêque de Mende, dans l'église de Santa
Maria sopra Minerva, à Rome, etc.).
L'imitation de l'antique ne tarda pas à prévaloir, avec
le sculpteur florentin Arnolfo di Cambio, avec Giovanni Pisano, qui
construisit l'enceinte et les arcades du Campo Santo de Pise. Son art
véhément s'adoucit avec Andrea Pisano (ou le Pisan) et Andrea di
Cione, surnommé l'Orcagna (27).
Ce dernier exécuta, après la Peste noire, dans l'église d'Or san
Michele, des bas-reliefs sur l'histoire de la Vierge, où la grâce
s'unit au tragique. Pisano et l'Orcagna, avec d'autres artistes,
sculptèrent sur la façade de la cathédrale d'Orvieto des épisodes
empruntés à la Genèse et aux vies des prophètes et du Christ, ainsi
que la scène du Jugement dernier.
L'inspiration de l'art romain se fit sentir aussi chez
quatre grands artistes italiens du XVe siècle (28).
Lorenzo Ghiberti, par l'élégance de ses bas-reliefs et la
qualité de sa fonte, avait obtenu le prix au concours ouvert en 1401
pour décorer la seconde porte du Baptistère de l'église romane de San
Giovanni Battista, la principale de Florence avant la construction de
la cathédrale. La première porte, ornée par Andrea Pisano, portait en
relief, sur vingt-huit panneaux, des scènes de la vie et de la mort de
ce saint, Ghiberti exécuta, de 1403 à 1424, sur vingt-huit panneaux,
des épisodes de la vie du Christ, ainsi que les figures des
évangélistes et de quatre Pères de l'Eglise, dont celles de Jérôme et
d'Augustin. Chargé par la Seigneurie de décorer la troisième porte, il
élabora, de 1425 à 1452, une oeuvre magnifique. Il orna les deux
vantaux de dix larges expositions, riches en figures et en feuillages.
C'étaient des scènes de l'Ancien Testament, depuis la Création jusqu'à
la visite de la reine de Saba. Ghiberti coula aussi en bronze le saint
Jean-Baptiste, de saint Matthieu et le saint Étienne de l'église d'Or
san Michele, à Florence.
Jacopo della Quercia, de Sienne, exécuta, sur l'ordre de
Martin V, à la nef centrale de San Petronio, à Bologne, dix
bas-reliefs d'une plastique expressive, où s'annonçait la manière
grandiose de Michel Ange, qui fut son disciple. Donatello, de
Florence, se signala par la décoration d'Or san Michele : son
saint Marc, coulé en 1412, reçut les éloges de Michel Ange. Il tailla
pour la cathédrale de sa ville un saint Jean assis dans une attitude
de stupeur sacrée, et, pour la face occidentale du campanile, édifice
très élevé, aux lignes gracieuses, aux fenêtres ogivales déliées,
construit par Giotto, Pisano et Talenti, il sculpta un Jean-Baptiste
viril
et des figures de prophètes d'un réalisme hardi. Pour les fonts
baptismaux de Sienne, il termina en 1425 le bas-relief tragique du
festin d'Hérode. De retour à Florence après un séjour à Rome (1432),
il acheva son harmonieuse Annonciation pour Santa Croce, belle église
ogivale franciscaine, lieu de sépulture des Florentins illustres, et
il fit pour la sacristie de San Lorenzo, célèbre par les chapelles où
sont ensevelis les Médicis, sur les bas-reliefs des portes de bronze,
des figures vivantes d'apôtres et de Pères de l'Eglise. Puis il vint
décorer à Padoue la basilique de saint Antoine, dont il représenta les
miracles sur quatre bas-reliefs de bronze.
De son côté, Luca della Robbia éleva une tribune pour les
chanteurs (cantoria) dans la cathédrale de Florence (elle est
conservée dans son Musée). Au portail du couvent dominicain d'Urbino,
il mit des figures polychromes en terre cuite émaillée. Disons enfin
que Venise fut aussi un centre artistique, qui attira des sculpteurs
florentins, décorateurs de Saint-Marc et du palais ducal.
Vers la fin du XIe siècle, la peinture chrétienne (29),
ranimée
par les artistes byzantins appelés au Mont-Cassin
par l'abbé Désidérius, produisit des livres à miniatures d'un dessin
délicat, les fresques de Sant' Angelo in Formis, près de Capoue, et de
San Clement à Rome, des pavements, d'églises romaines en marqueterie
de marbre, et plus tard les mosaïques absidales du Latran et de Santa
Maria Maggiore (dues au franciscain Torriti). Il y eut même à Rome, au
XIIIe siècle, une Renaissance (Bertaux, Rome, T. II, p. 80 ss), dont
les plus belles oeuvres furent les fresques, d'une réelle ampleur
dramatique, de Pietro Cavallini à Saint-Paul hors les Murs et dans la
basilique d'Assise, et les figures d'anges et de prophètes dont le
Florentin Cimabue orna le transept de cette dernière église.
Au siècle suivant surgirent deux grands artistes, Giotto
et Duccio, qui fondèrent, l'un l'École de Florence, l'autre celle de
Sienne.
Giotto di Bondone, ou simplement Giotto, né en 1267,
travailla d'abord, avec Cimabue son maître, aux peintures d'Assise. En
1298, il aida Cavallini à décorer de mosaïques le portail principal de
Saint-Pierre : il y évoque la nef de l'Eglise, battue par la
tempête et sauvée par le Christ marchant sur les eaux. On le voit
aussi orner de fresques la loge du Latran, construite par Boniface
VIII. Vers 1301, il retrace la légende de saint Martin et le Jugement
dernier dans la chapelle du podestat de Florence. Son oeuvre capitale
est l'histoire de la Vierge et du Christ, peinte après 1306 dans la
chapelle de la Madonna de l'Arena, à Padoue. Entre 1310 et 1320,
Giotto décora l'église basse d'Assise : on y admire le mariage de
François avec la Pauvreté, la victoire de l'Obéissance et de la
Chasteté. Il orna aussi deux chapelles à Santa Croce de Florence.
Écartant les conventions orientales, il cherchait le vrai et le grand.
C'était une peinture nouvelle, d'un dessin parfois défectueux, mélange
de réalisme tendu vers la clarté et la vie et de noble idéalisme
religieux. « Le Christ de Giotto, dit Gebhart, a rejeté la
majesté formidable du Christ byzantin ; c'est bien le Fils de
l'homme, supérieur à ses disciples par la grâce
solennelle de sa démarche, la pureté mélancolique de ses traits »
(30).
Tout autre fut la peinture siennoise. Plus pittoresque et
plus byzantine, elle rechercha les harmonies subtiles et le jeu des
couleurs. Duccio, dans son retable de la cathédrale de Sienne, la
Vierge de majesté (achevée en 1311), cultiva un genre tout en nuances
et en rêveries. Même inspiration chez Simone Martini, dit Memmi, son
élève, qui peignit Laure pour Pétrarque. D'Avignon, où cet artiste
décora pour Benoît XII, le Palais des papes, l'art siennois se
répandit à la cour des ducs de Bourgogne et sans doute jusqu'en
Bohême. À Sienne même il fut modifié par les frères Ambrogio et Pietro
Lorenzetti, élèves de Duccio, qui introduisirent la manière vivante de
Giotto dans leurs fresques (1331) dans la salle du chapitre de saint
François (martyre des Frères mineurs au Maroc). Pourtant, les madones
d'Ambrogio gardent la douceur pénétrante de la peinture siennoise.
Giotto fut continué à Florence par son filleul Gaddi, qui orna de
fresques à Santa Croce la chapelle Baroncelli. Son influence se fit
sentir aussi sur l'Orcagna, à la fois peintre et sculpteur, connu par
les fresques saisissantes, inspirées par la Divine Comédie, dont il
décora le Campo Santo de Pise : le Triomphe de la Mort, le
Jugement dernier et l'Enfer.
Au XVe siècle surgit la peinture flamande (31),
pleine de dignité et de joie fervente mais dépourvue parfois de
symétrie et de sobriété. Elle eut pour représentants les frères Hubert
et Jean van Eyck, remarquables par la vivacité et la transparence de leurs
couleurs. L'aîné mourut en 1426 à Gand, où il résidait ; le
cadet, à Bruges, en 1441. Hubert conçut le fameux polyptique, achevé
par Jean en 1432, qui à Saint-Bavon de Gand célèbre, d'après
l'Apocalypse, « l'adoration de l'Agneau ». Dans une vaste
prairie se dresse un autel drapé de blanc, qui porte le Vainqueur.
Vers lui s'acheminent, nombreux et recueillis, martyrs, prophètes,
ecclésiastiques, ermites, chevaliers du Christ, d'autres encore. Au
dessus, Dieu le Père, la tiare au front, bénit le monde... Sur les
volets on aperçoit huit anges qui chantent au lutrin, ainsi qu'Adam et
Eve portant la misère de l'humanité. Même prodigalité de détails dans
la Madone au chancelier Rolin (de Bourgogne), chef-d'oeuvre de Jean
Van Eyck. Derrière les visages de la Vierge et de Nicolas Rolin, on
découvre une ville, une grande église, une vaste place sillonnée de
promeneurs, les méandres d'un fleuve couvert de barques, une ligne
lointaine de montagnes neigeuses, un ciel où s'estompent de flottantes
nuées. On doit aussi à Jean une autre Vierge et un Homme à l'oeillet,
où éclate son génie de portraitiste et de paysagiste. À l'École des
Pays-Bas se rattache Roger de la Pasture, qui peignit les panneaux de
l'Hôtel de Ville de Bruxelles, et le polyptique du Jugement dernier
commandé par Rolin pour l'hospice de Beaune. On y admire l'émotion
dramatique et la précision des portraits. L'École flamande s'adonna
également à la miniature avec Jacquemart de Hesdin qui peignit les
Grandes Heures du duc de Berry (1409), et mieux encore avec Paul de
Limbourg et ses deux frères, auteurs des Très riches Heures du duc de
Berry et des Heures de Turin, remarquables par le sens du costume et
du paysage.
En Allemagne, il n'y a guère à noter, au XVe siècle, que
la peinture grave et douce, mais peu expressive, d'Étienne Lochner, de
Cologne. En France, on cultive alors la miniature, qui exécute le
Livre d'Heures du duc de Bedford, mais la technique flamande se fait
sentir à la cour du roi René d'Anjou, surtout dans
ses domaines de Provence, et, en Touraine, elle inspire Jean Foucquet,
qui peint, à la façon des Van Eyck, des portraits tels que celui de
Charles VII.
En Italie, la peinture prend des formes nouvelles.
Masolino enrichit de compositions délicates telles que la tentation
d'Adam et d'Eve, la chapelle Brancacci dans le monastère del Carmine
(des Carmes) à Florence. Tommaso di Guidi, ou Masaccio, son élève,
génie plus vigoureux, place en face de son tableau Adam et Eve fuyant
nus et tragiques sous la malédiction. Guido di Pietro, dominicain à
Fiesole, qui prit le nom de Fra Giovanni auquel ses admirateurs
devaient ajouter celui d'Angelico, peignit dans sa ville le
Couronnement de la Vierge et le Jugement dernier, d'une splendeur
dantesque. Il fit aussi des fresques suaves sur les murs d'un cloître
de Florence, où Cosme l'avait appelé en 1436 : Jésus pèlerin,
saint Pierre martyr, Dominique en oraison. Sur l'invitation d'Eugène
IV, il vint décorer la chapelle Pauline, au Vatican, de scènes
empruntées à la vie du Christ, et plus tard, en 1449, il représenta
l'histoire de saint Laurent dans l'oratoire de Nicolas V au même
Palais.
Vers le milieu du XVe siècle, la Prérenaissance prit une
grande ampleur avec la protection ouverte de Nicolas V (1447-1455)
qui, selon l'expression de Pastor, fut le « fondateur du Mécénat
papal », et avec la ruée vers l'Ouest des savants grecs chassés
d'Orient, en 1453, par la chute de Constantinople. Arrêtons-nous ici,
au seuil de la Renaissance, à la veille de la Réformation.
Fin du tome III
Chapitre précédent | Table des matières | - |