Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

PRÉFACE

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Le présent volume prend l'histoire du Christianisme au lendemain de la mort de Charlemagne, et la conduit jusqu'au seuil de la Renaissance. À cette longue période de six siècles et demi, nous avons donné le nom de Moyen Age.

Ce terme, on le sait, n'est pas clair, et il a reçu des acceptions diverses. Pour nous, la question est nette et tranchée. L'histoire de l'Église, à partir du grand empereur jusqu'au milieu du XVe siècle, forme un tout et se résume en celle d'une institution qui, de Rome, s'applique, avec une obstination inouïe et au prix de billes tragiques, à dominer à la fois les âmes et les rois. Enhardi par la donation territoriale qui lui a été imprudemment octroyée, le pape, qui a la conviction croissante d'être le chef de l'Église et le défenseur de son prestige et de son idéal, lente d'abord de réaliser son grand rêve par une collaboration avec les deux Empires franc et germanique, alliance inégale où l'État, assumant le rôle de tuteur, fait payer ses services par une sujétion pénible, secouée parfois par de grands pontifes tels que Nicolas 1er et Nicolas Il. À celle période de tâtonnements (que nous étudions dans notre Livre 1er), succède celle de l'essor triomphal du catholicisme romain, de Grégoire VII à Boniface VIII. Elle vit l'humiliation de l'Empire à Canossa, la pleine floraison de la chevalerie, le déroulement des croisades, l'apparition des Universités et de là Scolastique, la naissance des cathédrales gothiques et des deux Ordres mendiant, mais sur ce beau manteau de gloire tombèrent, comme des taches de boue et de sang, les hontes de la débauche et de la simonie et les horreurs de l'Inquisition. Puis, après le rêve, le réveil et la réalité (c'est notre Livre III). Le superbe édifice lézardé s'ébranle, et c'est la décadence de la papauté... De Paris, d'Oxford et de Prague, les protestations s'élèvent. Lu Scolastique, reconnue puérile, est écartée. L'esprit des croisades est mort, et c'est en vain que Pie Il s'assied sur les rochers d'Ancône, attendant les galères des croisés qui lardent à venir. Les grands conciles réformateurs, sapant l'oeuvre hardie de Grégoire VII et d'Innocent III, placent leur autorité, au-dessus de celle du pape, déjà attaquée par Wyclif, Jean Huss et les pionniers de l'humanisme. L'Esprit du Moyen Âge s'effondre, et sur ses ruines va refleurir l'Évangile, débroussaillé par les mains puissantes des Réformateurs.

Dans ce cercle, dont Rome est le centre, s'agitent des foules inquiètes, aux sentiments divers et même contraires, aspirations élevées et superstitions vulgaires renoncement ascétique et relâchement sensuel, tendre charité et intolérance barbare, humilité apostolique et ambitions qui rie pardonnent pas... C'est celle histoire touffue, tourmentée et créatrice, que nous avons essayé de raconter. Ne pouvant être complet, nous avons lâché d'être clair, exact et impartial. Nous voulons aussi être reconnaissant envers hi science contemporaine, dont on trouvera ici les résultats. Une mention spéciale est due au professeur David Schaff, de Pittsbourg (États-Unis), et au pasteur Jacques Marly, licencié en théologie, dont nous avons largement utilisé les travaux.

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