Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

CONCLUSION

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Jésus est le même hier, aujourd'hui, éternellement
HÉBREUX XIII, 8

 

Si, dégagés des étreintes qui faussent nos jugements, nous comparons ce que la vie naturelle nous apporte avec ce que nous donne la piété, nous constatons sans peine qu'il est insensé de repousser les appels de l'Esprit.

Une des tristesses de l'existence a sa source dans la perpétuelle transformation des choses et de nous-mêmes. Rien ne demeure ici-bas. Le poète a beau s'écrier:

Quand tout change pour toi, la nature est la même
Et le même soleil se lève sur tes jours !

Nous savons que cela n'est pas vrai. L'immense nature paraît immuable, mais c'est parce que nous ne vivons qu'une heure en regard de ces lentes modifications. Les astres eux-mêmes naissent et meurent, et du fond de notre poussière, nous constatons l'aurore et le crépuscule des mondes, l'extinction des soleils et la mort de ce que notre imagination éblouie croyait au-dessus de la mort.
Et quelle singulière consolation que de se reposer sur l'apparente immuabilité de la nature ! Les hommes n'ont-ils pas toujours cherché à esquiver l'inévitable loi de la mort et de l'oubli. Ils ont tenté partout de dresser des oeuvres qu'ils voulaient éternelles, mais ces oeuvres ruinées ne font que renforcer, pour les vivants, le sentiment du temps qui fuit, emportant avec lui toutes nos ardeurs et tous nos rêves.

L'instabilité gouverne nos existences. Nous faisons des projets, mais la vie les ronge comme la vague ronge les bords où elle s'agite. Rien ne demeure intact que l'incertitude de nos âmes.
Et voici qu'en face du monde changeant, la religion dresse quelqu'un qui ne change pas. Quelqu'un ! Il ne s'agit plus de donner à l'âme une satisfaction artificielle par la contemplation d'une nature soi-disant immuable, en l'invitant à se fondre, à s'anéantir, dans la grandeur universelle ; quelqu'un ! un être pensant, un homme enfin, qui demeure quand nous passons, et qui vit aux siècles des siècles, alors qu'autour de nous, tout fait entendre le chant lugubre de la vie éphémère. Et ce quelqu'un qui demeure nous invite à demeurer avec lui. Vainqueur du changement et de la mort, il nous associe à son triomphe. Debout à l'horizon des âges, au-dessus de tous les espoirs, au-dessus de tous les blasphèmes, il reste la grande espérance des âmes tremblantes, seul immuable au milieu des formes mobiles et incertaines de la vie.

Alors que les plus grands noms de l'histoire s'estompent dans les brumes du passé, le nom de Jésus-Christ reste au premier rang. Dans le domaine moral et religieux qui commande tous les autres domaines de l'existence, il est tel qu'il était il y a dix-neuf siècles, il est et il demeure le Chemin, la Vérité et la Vie. Ce n'est certes pas que l'humanité subisse volontiers l'autorité de ses paroles et de sa personne. Ce n'est pas qu'après l'avoir crucifié, elle n'ait fait bien des efforts pour abattre son étrange pouvoir. Mais le Christ renié laisse les âmes désemparées, sans solution devant l'énigme du monde et de la vie, sans remède qui les restaure, qui les console, jusqu'à ce que, revenues de leurs erreurs, elles se rendent au Maître de l'Espérance et retrouvent en lui la paix et le salut.

Sur quoi repose cette souveraineté sans exemple? Sur un fait qui, pour l'âme croyante, est un sujet permanent de reconnaissance et de certitude: Jésus enseigne par sa parole et par sa vie, et l'une et l'autre portent la marque divine de la sainteté.

Tandis que nous tournons au pied de la montagne de l'idéal, regardant d'en bas son sommet dans les nues, tentant par mille chemins une ascension vite arrêtée, Jésus apparaît d'emblée sur la cime. Et cette cime, il l'a étreinte, toujours plus étroitement, à mesure que les forces adverses se coalisaient pour l'en arracher. Et il y reste à travers les siècles.

L'Église a fait quelques conquêtes sur le monde, elle a perçu et appliqué quelques conséquences nouvelles de la vérité qui est en Jésus-Christ. Mais ces conséquences, bien loin de dépasser les vues du Maître, restent inspirées par son exemple, par son Esprit. Il reste le même ; le même dont on dit encore, dont on dira toujours : « Jamais homme n'a parlé comme cet homme. » « Personne ne peut faire ce que tu fais, s'il n'est envoyé de Dieu. » Son enseignement reste et restera la pure lumière des hommes, et sa personne prendra toujours, comme aux jours de sa chair, la première place pour ceux qui sont amenés à la considérer. Et si nous nous détournons de lui, nous savons de source certaine que nous nous détournons alors et de notre devoir et de notre salut. Mais vienne l'heure où la vanité de nos recherches et de nos désirs apparaît, ou nous plions sous le poids de nos erreurs et de nos fautes, c'est Lui aussi qui nous apparaît, comme le seul guérisseur de nos âmes malades, dur pour le péché, compatissant pour le pécheur.

Jésus nous communique sa stabilité et sa permanence. Il forme notre personnalité. Ce n'est pas parce que nous portons un nom, que nous sommes inscrits dans un registre d'état civil, qu'une identité s'établit dans notre âme, au travers des variations incessantes que l'existence impose. Il y a des hommes qui peuvent dire : C'est à Jésus-Christ seul que je dois ma vie. Saint Paul regardait son passé comme un temps méprisable, tout chargé de promesses qu'il ait pu paraître. On peut dire de tous les chrétiens authentiques ce que le père de la parabole disait de son fils prodigue: « Il était mort et maintenant, il est revenu à la vie, il était perdu, et maintenant, il est retrouvé. » C'est que l'Esprit de Jésus-Christ reste le même, il ne va pas d'un pôle à l'autre, il ne cède pas aux mille pressions du dehors, c'est l'Esprit même de Dieu en qui il n'y a point de variation ni aucune ombre de changement. Que deviendrions-nous, et comme notre personnalité tomberait en poussière, si la lumière et l'ombre de Jésus-Christ - l'ombre pour les jours de trahison et la lumière pour les jours de victoire - ne demeuraient en nous comme l'élément nécessaire à notre vie? « Le monde passe avec sa convoitise ... » Mais, avec le Christ, nous avons une force à qui en appeler, un roc où nous appuyer, une puissance qui nous enracine dans l'invisible et dans l'éternel.




En communiquant aux croyants son Esprit, Jésus-Christ établit entre les hommes cet accord, cette communion si désirable et si désirée, que l'âme solitaire appelle en soupirant et qu'elle cherche en vain dans les rencontres passagères que l'existence nous apporte et dont la fragilité nous émeut.

Qui n'a subi, dans une grande ville étrangère, l'action déprimante de ces foules agitées, allant fiévreusement à leurs affaires. Il semble alors que pèse sur nous tout le poids des préoccupations de l'homme, banales ou poignantes. Chacun court à son travail ou a ses plaisirs, ou a ses tourments ou à ses vanités. L'âme souffre au spectacle incohérent de ces masses qui vont et viennent, où l'on ne perçoit que concurrence et conflits déguisés.

C'est dans ces sentiments que je suis entré un jour, dans une maison amie, loin de mon pays. J'y rencontrai toute une société bien différente de celle à laquelle j'appartenais, et m'y sentais seul avec mes préoccupations intimes, car malgré de multiples expériences, nous cédons vite aux apparences et nous oublions que tous les coeurs ont leur vie secrète. Les visiteurs partis, la maîtresse de la maison me dit: « Ces personnes, quoique catholiques, sont très près de vous, les protestants. Elles s'intéressent à tout ce qui se publie chez vous ; elles sont pieuses et actives, ce sont de nobles âmes. » Et je sentais monter en moi, avec le regret d'avoir mal jugé, la joie de rencontrer des âmes fraternelles. Le lendemain, j'entrais dans un temple, bien grand par les souvenirs qui y sont attachés. Et là, je retrouvais une foule, mais profondément recueillie au pied de la chaire d'où tombaient d'admirables paroles de foi et d'espérance. Et là encore mon âme s'est gonflée de joie à voir tous ces inconnus pour qui Jésus est le même, hier, aujourd'hui, éternellement; le même pour eux comme pour nous. Quelques heures après, j'entendais la lecture d'une lettre poignante, écrite par un homme plein de talent et de vertus, mais qui ne partage pas notre foi : « Je travaillerai, disait-il, de toutes mes forces, afin d'assurer l'avenir de mes enfants. C'est tout ce que je demande à cette existence douloureuse, après quoi je serai prêt à partir et je partirai sans regret. »

Il est doux de penser que là où Jésus n'est pas le Maître, Il est pourtant l'Attendu ; il est bon de le penser pour ceux qui ne le connaissent pas encore ; et les âmes droites le trouvent, Lui qui pardonne, qui console et sème la divine Espérance du bonheur.

 

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Prière

 

Au soir de sa journée - ou au soir de sa vie - suspendant sa tâche, l'homme relève son front fatigué, chargé de pensées et d'inquiétudes. Son regard se pose sur les choses prochaines, puis, suivant les lignes familières du paysage, s'étend, se prolonge et s'élève au-dessus de l'horizon, jusqu'au ciel où s'allume une première étoile.

Un apaisement descend dans son âme avec ce salut qui lui vient des profondeurs de l'espace. À mesure que pointent les astres et que se dessinent les constellations, sous ce ciel mystérieux qui partout et toujours a versé quelque grandeur et quelque consolation dans le coeur des hommes, il contemple, il médite, il devine : il pense à la solitude de notre pauvre terre, et à l'effroi de sa course dans l'abîme, s'il n'y avait pas, pour peupler cet abîme, ces brillantes constellations, révélatrices d'un ordre qui tellement nous dépasse, et qui pourtant nous rassure et nous réjouit.
Puis il revient à cet autre abîme, son propre coeur, et aux chaotiques ténèbres que nos contradictions y auraient amassées, et à l'effroi de l'homme devant sa propre misère, si Dieu n'avait allumé dans cette misère, cette autre constellation toute chargée de promesses: la triple étoile de la Foi, de l'Espérance et de l'Amour.

Ramené au mystère de sa destinée, il incline son front vers la terre, vers ce tout petit coin de terre qu'il a animé de son travail, de ses chants, de ses pleurs, de ses fautes, et, saisi du sentiment de la miséricorde divine, de la douceur du pardon, de la nécessité du sacrifice, il murmure de toute son âme : Que ton règne vienne !
Oui, Seigneur, que ton règne vienne!
Courbe-nous sous Ta loi, nettoie-nous de toutes nos souillures, anime-nous de toutes tes grâces! Que ton règne vienne, dans tous nos coeurs, pour le bien de la chère patrie, et pour le relèvement du monde si profondément fourvoyé !
Amen!

 

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CREDO

 

J'ai vu que le malheur des hommes est le fruit de leurs révoltes.

J'ai compris que l'Éternel règne, et que derrière tous les événements, il y a une parole, une sagesse, une volonté que rien ne corrompt, que rien ne désarme, que rien ne détourne de son but miséricordieux et rédempteur.

Qu'ai-je à faire, sinon de m'abandonner, avec une confiance entière, à cette sagesse souveraine ?

Qu'ai-je à faire, à cause de mon péché, sinon de m'attacher au Sauveur, écouter ses divins enseignements, et solliciter son Esprit, promis à qui le demande?

Et à espérer désormais, oui, à espérer dans la vie et dans la mort.

Et à vivre dans la certitude que « rien au monde ne peut nous séparer de l'amour que Dieu nous a témoigné en Jésus-Christ! »

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