Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

CHAPITRE PREMIER

PREMIÈRE ENFANCE

ASNIERES 1834-1846

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Souvenirs huguenots à Asnières-lès-Bourges. - La famille Coillard. - La mère Bonté. - Les colporteurs. - De l'influence du chant. - La veillée. - A Beauregard. - Retour à Asnières. - Ami Bost. - Marie Bost. - Première exécution du Gloria et du Magnificat. - Un arbre de Noël. - Au marché de Bourges. - A douze ans .



Je suis un enfant du Berry (1). Je suis né au coeur même de la France, dans un grand village qui n'a jamais été érigé en commune distincte, mais qui fait partie de la banlieue de la ville de Bourges. C'est Asnières. Paysan, fils de paysan, je possède pourtant un de ces titres de noblesse dont je me suis toujours senti fier: je suis issu de la vieille roche huguenote. C'est à Bourges que Calvin a professé le droit. C'est là que son influence s'est d'abord fait sentir, et qu'elle a donné naissance à la petite église où j'ai droit de cité. On montre encore, sur le Moulon, petite rivière qui serpente à travers les ombrages des ormes et des saules, un vieux pont que franchissait souvent le futur réformateur dans ses promenades à la campagne, ou en allant visiter et instruire les humbles villageois d'Asnières. Pour cette raison sans doute, on lui a donné, parmi la population catholique et bigote, le nom de « Pont-du-Diable » et on l'a entoure de légendes à faire dresser les cheveux sur la tête.


Pont de Calvin

 

Mais, parmi nous, enfants de la Réforme, c'est plus qu'une, relique, c'est un témoin d'un glorieux passé, que l'on ne considère et ne franchit pas sans sentir le coeur palpiter et sans chercher inconsciemment un rayon de l'auréole dont notre affection l'entoure. C'est le pont de Calvin !

C'est donc à Asnières que, sous les soins du docte professeur, s'est formé un des premiers noyaux protestants, ainsi qu'à Sancerre, à sept lieues de là, petite ville devenue célèbre dans l'histoire du protestantisme. Les liens qui, de tout temps, ont uni les deux églises, ont été des plus intimes; de fait, ces liens étaient des liens de famille. Les protestants de Sancerre et d'Asnières s'entre-mariaient, si bien que la parenté qui embrassait les protestants d'Asnières s'étendait à ceux de Sancerre, et, sans plus se connaître, on était encore « cousin ». Dans mon enfance, c'eut été un manque de respect entre protestants que de ne pas s'appeler cousins.

C'était à Sancerre que résidaient les pasteurs. Ils faisaient à Asnières des visites périodiques qui s'annonçaient à l'oreille et de proche en proche, comme cela se pratiquait dans les Cévennes pour les pasteurs du Désert. Alors, au jour, plutôt à la nuit fixée, dans quelque taillis retiré du bois de Contremoret, on se réunissait sans bruit pour le prêche, pour l'administration des sacrements et la célébration des mariages. Plus tard, on eut plus de liberté; ma mère m'a montré un petit bois, puis une chambre haute et me disait: « Quand j'étais jeune c'était là notre temple. » Elle me racontait aussi une tradition qui s'était encore conservée parmi les protestants d'alors. Quand je lui demandais comment nos aïeux avaient échappé aux massacres de la Saint-Barthélemy : « Des officiers de la maréchaussée, disait-elle, étaient un jour venus dans la ville et on avait observé qu'ils avaient marqué à la craie toutes les maisons protestantes. Pour des gens toujours traqués, mais toujours en éveil, cela ne disait rien de bon. Aussi, dès qu'il fit assez sombre, quelques-uns de ces braves villageois, qu'on prend aisément pour des simples d'esprit, s'avisèrent de marquer de la même manière toutes les maisons catholiques des environs. Lorsque le tocsin sonna, quelle ne fut pas la stupéfaction des catholiques de trouver que leurs précautions n'avaient pas abouti et que tous étaient exposés au même danger de la part d'une soldatesque et d'une populace qui avaient reçu le mot d'ordre du massacre? Du reste, bon nombre de familles étaient partie catholiques et partie protestantes; en pareilles circonstances, les sentiments naturels se réveillèrent et protestèrent intérieurement contre les horreurs des persécutions dont mes pères, eux aussi, ont été honorés. Un grand feu de joie fut immédiatement allumé à mi-chemin de la ville (2). La soldatesque se dit : « Bravo ! La besogne est achevée ! » et elle rentra chez elle. Ainsi, dit la tradition, passa la Saint-Barthélemy a Asnières. »

Ce n'est pas à dire pourtant qu'il n'y ait pas eu de martyrs. La tradition, que personne n'a sérieusement songé à recueillir et à conserver, mais qui vivait encore toute palpitante dans le coeur de ma bonne mère, parlait, comme ailleurs, de nobles confesseurs brûlés à petit feu, torturés; leurs noms, ceux des familles existantes alors, n'ont pas franchi les limites de leur petit monde et sont inconnus à l'histoire; mais, soyez-en sûrs, ils sont écrits au livre d'or du ciel - le Livre de vie - et ont leur place parmi cette multitude que personne ne peut compter, de toutes langues, de toutes nations, qui formeront au ciel la garde d'honneur du Roi des rois. (Apoc. VII, 9 et suiv.)

Le Berry est une des provinces de France les plus asservies au joug de Rome. Bourges même regorge de petits et grands séminaires, couvents et autres institutions de ce genre. C'est une des citadelles de la papauté. En maints endroits, un protestant était un être inconnu et représenté par les prêtres sous des couleurs telles que les pauvres campagnards le croyaient sérieusement un phénomène vivant, avec un oeil au milieu du front, des cornes, un démon incarné. Dans ce milieu-là, nos pères maintenaient pure la foi de leurs enfants. Pour eux, pour nous, le pape c'était l'antéchrist et nous ne concevions pas de plus grand malheur que celui de devenir un apostat et de passer au catholicisme. Je n'en ai connu qu'un seul cas et, bien que le sujet n'occupât pas une bien haute place dans l'estime des honnêtes gens, il produisit une grande commotion. Je me souviens de l'étrange impression que j'éprouvai en me trouvant pour la première fois dans une église catholique où se disait la messe. Il me semblait que le parquet brûlait sous mes pieds et le rouge me montait au front. Le village lui-même était partagé en deux quartiers bien tranchés : le quartier catholique et le quartier protestant. Mais, tout de même, nos rapports de bon voisinage ne laissaient rien à désirer. Souvent telle voisine, qui avait fait dire une messe, apportait à ma mère un morceau de pain bénit qu'elle recevait par courtoisie. Mais, en le mangeant, je me demandais si c'était bien, et je cherchais à découvrir quel singulier goût la bénédiction du prêtre et l'eau bénite pouvaient lui avoir donné.

Mes parents étaient des propriétaires fort à leur aise, des vignerons comme tous nos villageois, et une des principales familles de l'Église; elle déployait un grand zèle pour les intérêts de la petite communauté protestante. Vers 1836, un ingénieur en chef, de fortune et surtout d'une grande piété et d'un grand coeur, M. Dutens, se trouvait, avec sa famille, résidant à Bourges. Il s'intéressa à ces épaves de l'oeuvre locale de Calvin; une place de pasteur fut créée et, par son infatigable activité, son inépuisable libéralité, un pasteur y fut élu à poste fixe, un temple fut construit à Bourges, un presbytère et un vaste bâtiment d'école furent élevés à Asnières (3). J'étais très jeune, c'est un de ces souvenirs qui se perdent pour moi dans la brume de l'horizon lointain, mais je vois encore les voitures charriant les pierres pour l'érection d'un bâtiment que longtemps je crus monumental Il y avait de l'entrain et de la vie.


Maison où Coillard est né

Un autre souvenir contemporain de celui-là, c'est une foule de gens qui, pleurant et sanglotant, entouraient un cercueil dans notre maison. Ce cercueil était celui de mon père.

C'était le jour du nouvel-an 1837. J'étais né le 17 juillet 1834 (4). A deux ans et demi j'étais orphelin !

J'étais le plus jeune d'une famille de huit enfants. Deux de mes frères et une de mes soeurs étaient mariés et avaient une famille. Je suivais la plus jeune de mes soeurs, Françoise, à neuf ans de distance.


Maison où Coillard est né (vue de l'autre côté)

C'est la seule que j'aie jamais tutoyée. Aussi, dans le langage de ces bonnes gens du Berry, m'appelait-on « le trop tard venu ! » Trop tard venu ! hélas! ce n'était pas sans raison qu'on le disait. Mon père, d'une grande respectabilité dans notre petit cercle protestant, était, au dehors, ce qu'on appelle dans le monde, un bon vivant c'est-à-dire un homme de coeur et de sentiments généreux qui se fait de nombreux amis à son détriment. Sa mort fut une calamité pour ma mère. Elle découvrit, seulement alors, qu'il s'était porté caution pour des sommes considérables, et elle eut bientôt après elle toute une meute de créanciers qu'il fallait satisfaire à tout prix. C'étaient de sombres jours que ceux-là; elle versa des larmes bien amères. C'était une nouvelle phase de sa vie, le commencement de dures expériences. Elle avait alors cinquante ans.

Je compris plus tard qu'elle aurait pu légalement se soustraire à certaines obligations et sauver de cette catastrophe au moins ce qui était sa propriété personnelle. Elle ne le fit pas. C'est sa propriété personnelle qui y passa d'abord, pour sauver les intérêts de ses enfants. Champs, vignes, prés furent vendus, pièce après pièce; puis vint le tour de la maison, avec ses quelques dépendances, alors une des meilleures maisons du village. Quand tout fut liquidé, nous occupions une toute petite chaumière où ma mère avait entassé, ou plutôt arrangé avec goût, les débris de son mobilier : ses lits a quenouilles ou à baldaquin, avec d'épais rideaux de couleurs, et si élevés qu'il. fallait se servir d'une chaise Pour y monter, son armoire, son bahut, son pétrin, toutes pièces qui. avaient leur histoire respective. La chaumière, ou étaient réunies ces reliques d'une prospérité passée, avait un immense foyer, une toute petite fenêtre, une petite écurie pour une vache et une chèvre, un grenier, un poulailler, un cellier et une grange en commun avec les voisins: voilà le palais où j'ai grandi.

Après la débâcle, il restait encore à ma mère des pièces de terre, des vignes et une prairie. Mais ces terres et ces vignes, il fallait les faire cultiver; pour cela il fallait de l'argent; les années étaient souvent mauvaises. C'était, d'année en année, une lutte constante et désespérée. Mais ma mère comprit ses nouvelles circonstances et, se ceignant de courage et de force, elle y fit face sans murmurer. De riche, car tout est relatif, elle était devenue pauvre; son état était voisin de la misère. N'importe : « Pas de honte à gagner sa vie » disait-elle, et, malgré de dures humiliations, elle la gagnait pour elle et pour son petit « trop tard venu ».


Maison où Coillard enfant a vécu avec sa mère .

Elle allait travailler à la journée : ici laver la lessive, là travailler dans les vignes, et, sous par sous, elle ramassait ainsi, à la sueur de son front, de quoi payer ses impôts et faire cultiver ce qui lui restait de bien foncier que mes frères, eux-mêmes dans la gêne, ne pouvaient pas cultiver pour elle. Ah ! ce n'est pas à dire qu'il n'y ait pas eu parfois des orages dans son coeur et des nuages sur son front. Je l'ai vue souvent, le soir, fondre en larmes au coin de cette grande cheminée où fumait une mèche de résine, la chandelle des pauvres, qui ajoutait sa lueur enfumée à notre désolation. Mais, le matin, les larmes étaient essuyées, et, rassérénée, elle partait pour son travail.

Tant de malheurs touchèrent deux familles riches qui venaient occasionnellement à Asnières, à l'époque des grandes fêtes chrétiennes. L'une, une famille anglaise (Kirby), résidant en Sologne, prit un de mes frères à son service, et l'autre (Pillivuyt), plus près de nous, se chargea, au même titre, de mes deux soeurs non mariées. Et je restai seul avec ma bien-aimée mère. Qui dira la lutte pour l'existence de cette veuve réduite ainsi à la misère, lutte de chaque jour, lutte, sans répit comme sans espoir de soulagement, pour le pain quotidien !

Les sympathies ne lui manquèrent pas. Ma mère, dans une position aisée, avait su gagner l'estime générale de la communauté; elle ne la perdit pas en devenant pauvre. Au contraire, ses malheurs émurent tout le monde, et son courage héroïque, si l'on me permet de me servir de ce mot dont on a tant abusé, lui assurèrent une considération, un respect dont elle jouit jusqu'à la fin de ses jours.

Il est de coutume, dans nos villages, de donner des sobriquets qui s'attachent à un nom comme l'estampille de l'opinion publique. Jamais, que je me souvienne, si ce n'est peut-être par des étrangers, je n'ai entendu appeler ma mère par le nom de mon père; pour tous elle était la « mère Bonté ». Elle devait être singulièrement. bonne, même dans la pauvreté, dans un milieu où chacun est si connu, la femme à qui, d'un commun accord et de son vivant, on avait décerné ce beau titre et rendu cet hommage comme personnifiant l'idéal que ces bonnes gens se faisaient de la bonté. A plusieurs lieues à la ronde, en ville comme à la campagne, ma mère était la « mère Bonté ». Je me sens fier de cette appréciation, due à un public très compétent, de la plus excellente des femmes et de la meilleure des mères. Elle méritait le titre que l'opinion publique lui avait décerné ; elle l'a porté avec dignité, pendant ses jours de prospérité, pendant les longues années de son très dur veuvage et jusqu'à la fin de sa vie, comme une couronne que les détresses et les angoisses de la pauvreté n'ont jamais flétrie. Comment ne sentirais-je pas le privilège d'être le fils d'une mère si bonne, la « mère Bonté » 1 Et quand j'aurai conté mon histoire, je laisserai mes lecteurs juger par eux-mêmes si cette femme à qui, après Dieu, je dois tout, même ma vocation, n'était pas digne du plus beau des titres qu'on puisse décerner à une femme, d'un titre qu'envieraient les plus grands philanthropes du monde. Je suis sur que, loin de le lui contester, mes lecteurs seront unanimes à reconnaître en ma mère la « mère Bonté ».

Notre intérieur, tout humble qu'il était, devint bientôt un petit centre. L'excellent pasteur Duvivier, qui avait connu ma mère en de meilleurs temps, la visitait fréquemment et lui prodiguait les consolations de l'Évangile. C'est chez nous aussi que les colporteurs avaient leur pied-à-terre. Leur arrivée était toujours un événement. On se doute peu de l'influence que ces humbles évangélistes exercent sur le peuple, dans des localités comme la nôtre : chaque soir, notre chambre se remplissait de gens qui prenaient intérêt aux choses de Dieu et la soirée se passait en chants et en conversations sérieuses. Ces pionniers missionnaires furent les premiers à introduire le chant des cantiques, car, jusqu'alors, on ne connaissait que les Psaumes de David et les Paraphrases. Mais les Chants de Sion de César Malan avaient paru; ils faisaient leur chemin, ils pénétraient partout, portant avec eux leur semence de vie, et leurs accents si pleins de fraîcheur, d'espérance et de joie.

C'est ainsi que, sur les genoux d'un de ces hommes de Dieu, ou assis à ses pieds, pendant qu'il tirait de son accordéon des sons qui 'me paraissaient sublimes, j'apprenais à fredonner :

Non ce n'est pas mourir que d'aller vers mon Dieu !
et
C'est toi Jésus que recherche mon âme !

Sans doute, je ne saisissais pas la portée de ces sublimes paroles, mais c'était une semence jetée dans le terrain vierge de mon âme. Que de souvenirs doux, et pour moi sacrés se rattachent à ces cantiques!

On a remarqué que chaque réveil a ses cantiques. Les vieux, tout vénérables qu'ils sont, ne suffisent plus; il faut une expression nouvelle pour rendre des expériences nouvelles pour nous, lors même que d'autres les aient, avant nous, déjà senties et exprimées. C'est à ce besoin que les Chants de Sion, les Chants chrétiens., les Chants du Réveil, pour ne parler que des plus connus en France, et les Chants et Solos de Sankey dans le monde entier, doivent leur popularité. Et plus j'avance dans la vie, après trente-cinq ans de ministère, plus je suis frappé de l'importance du chant comme moyen d'évangélisation. Pour moi, le programme de l'éducation chrétienne en pays païens et en pays civilisés, dans une certaine mesure, est bien simple : mettez à la base l'enseignement biblique, cela va sans dire, puis en première ligne la lecture, puis l'écriture, puis le chant, et le reste viendra petit à petit et de soi. Mais le chant, voilà un puissant moyen de modeler les jeunes âmes. Ce sont des canaux qui portent au loin les vérités de l'Évangile.

Voyez donc cet arbre du Zambèze chargé d'un fruit qui ressemble à une petite poire. Il n'est pas comestible, ce fruit, mais étudiez-le : il renferme une leçon. Parvenu à sa maturité, vous l'entendez, par une de nos belles nuits d'hiver, éclater avec une détonation qui rappelle celle d'un coup de fouet. A l'intérieur, dans ses quatre cellules charnues, se trouvent autant de graines munies de longues ailes. Le vent les emporte, qui sait où? Dans quelque forêt lointaine, un cotylédon sort de terre, grandit, d'arbuste devient arbre. D'où vient-il? Celui-là seul le sait qui a donné des ailes à la graine, et fait souffler le vent pour l'emporter à destination. Tel est le chant, tels sont les cantiques que vous enseignez à l'enfance qui vous est confiée. Oh ! chantez donc avec les enfants, chantez avec joie, chantez avec foi, semez ainsi au vent, et, un jour, là où vous vous y attendrez le moins, vous trouverez que la semence a germé à la gloire de Dieu et pour le salut d'une âme !

Vous étonnez-vous maintenant qu'à la distance où je suis, je me reporte vers la chaumière de ma mère comme vers un Béthel? Ce mystérieux instrument dont s'accompagne l'homme de Dieu, ces mélodies si douces et si belles, ce sont de ces souvenirs sacrés qui touchaient mon coeur et mon intelligence d'enfant et me faisaient croire que c'était là la porte du ciel.

Je me disais et je disais souvent à ma mère : « Quand je serai grand, moi aussi, j'aurai un accordéon, et je vous chanterai des cantiques. » C'était une grande ambition. Et je n'oublierai jamais le jour où je venais de loin, pour passer mes vacances à la maison maternelle. Je marchais d'un pas allègre, courant même et tout essoufflé, portant à la main une précieuse petite boite. Et le soir, quand nous eûmes longtemps causé, ma mère me dit : « Et qu'as-tu dans cette boîte-là? » - « Oh ! lui dis-je, vous allez voir. »

Et l'ouvrant, je sortis mon instrument, je me mis à jouer et à chanter quelques-unes de nos vieilles mélodies. L'émotion et la joie de ma mère furent ma plus grande récompense, la seule que je désirasse.

 

Les visites fréquentes de ces braves colporteurs, secondant le zèle et l'activité de notre digne pasteur M. Duvivier, avec d'autres éléments d'une grande importance locale, fomentèrent un réveil général. Un jeune homme, M. Peaudecerf, converti par le moyen de ces colporteurs, devint colporteur lui-même, et, pendant de longues années, il fut un des meilleurs ouvriers de la Société biblique. A Asnières, son nom était, à tous les foyers, entouré d'un grand respect et d'une grande affection.

 

Ces simples apôtres avaient aussi créé le goût, la faim et la soif des choses de Dieu, et un intérêt tout nouveau pour les progrès du royaume de Dieu dans le monde. C'est ainsi que ma mère recevait régulièrement la Feuille religieuse du Canton de Vaud et le Journal de l'Unité des Frères. Et ces doyens de tous nos journaux religieux étaient lus avec avidité et circulaient parmi la communauté réveillée. C'étaient de nouveaux horizons, pour ces simples gens, et un nouvel aliment.

1. L'unique document sur l'enfance de François Coillard étant son autobiographie, c'est elle qui remplit presque en entier les trois premiers chapitres. (Bd. F.) 

2. Ce feu fut allumé , suivant la tradition, sur la route de Bourges à Asnières, au nord du pont sur le Moulon, à un carrefour où s'élève aujourd'hui une croix. (Ed. F.)

3. Le temple d'Asnières est plus ancien, il fut inauguré en 1816. (Ed. F.) 

4. Extrait du registre des baptêmes : « 1834. - J'ai baptisé le 5 octobre, dans le temple d'Asnières, François, né le 17 juillet du légitime mariage de Coillard François [le Rouge] avec Magdeleine Dautry [Bonté]. Le parrain est Clavier François, la marraine est Jeanne Coillard. [Signé.] Duvivier pasteur. » (Bd. F.).

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