Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

Lettre 3

Une cause de certaines conversions superficielles

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J'ai déjà souligné que nous n'avions pas fait assez d'efforts pour sonder le coeur des pécheurs, pour mettre à jour et exposer soigneusement sa nature dépravée, afin de lui faire sentir qu'il a besoin du remède de l'Evangile. Si je ne me trompe, on a souvent commis l'erreur de pousser les pécheurs à se soumettre à Christ, avant même qu'ils aient compris ce que signifie une véritable soumission. On les a poussés à se repentir, avant qu'ils aient réellement compris la nature affreuse du péché. On les a incités à croire, avant qu'ils aient compris leur besoin de recevoir Christ. On leur a demandé de se décider à servir Dieu, sans qu'ils aient compris quoi que ce soit au service de Dieu. On les a pressés de se décider à entrer immédiatement au service de Dieu. Mais on s'est contenté de leur enseigner qu'ils avaient seulement besoin de se décider à obéir au Seigneur. C'est pourquoi leur vie spirituelle n'a été qu'une religion de résolutions. Elle n'a finalement manifesté aucune foi, aucun amour, ni aucun brisement de coeur. Bref, il me semble que l'on n'a pas, bien souvent, présenté à l'intelligence des pécheurs la véritable nature de la religion. Voilà pourquoi le nombre des conversions superficielles est devenu désespérément élevé. Année après année, j'ai été de plus en plus surpris de constater le grand nombre de ceux qui s'engagent dans la foi, sans avoir manifestement la moindre idée de ce qu'est l'idéal véritable d'une foi pure. On oublie presque complètement, sinon totalement, l'idée que l'amour est l'essence et le coeur de la foi chrétienne.

Il y a deux extrêmes vers lesquels plusieurs groupes de personnes sont continuellement attirés. Le premier extrême est le perfectionnisme, l'autre est le légalisme. Ils sont manifestement aussi éloignés l'un que l'autre de la foi véritable.

La religion du légaliste est une religion de résolutions. Il prend la résolution de servir le Seigneur. Il prend "sa décision," comme il le dit lui-même. Il croit que servir le Seigneur, c'est accomplir des oeuvres. Il prie en famille. Il assiste aux réunions. Il fait des visites, il parle, il s'agite beaucoup. Pour lui, c'est cela "faire l'oeuvre du Seigneur." Mais il l'accomplit dans un esprit parfaitement légaliste, sans rien manifester de l'amour, de la bienveillance, de la douceur, de la patience et de tous les fruits de l'Esprit qui caractérisent le véritable christianisme. Il peut facilement se lancer dans une grande agitation. Mais il ne possède pas en lui les racines mêmes de la foi. Il ne parvient à accomplir "l'oeuvre de Dieu," comme il le dit, que pendant la durée d'une série de réunions. La limite extrême de sa piété ne dépasse probablement pas trois mois par an. Dans la plupart des cas, cependant, elle ne représente pas la moitié de ce temps.

La difficulté, pour une telle personne, réside dans le fait qu'elle n'a pas en elle-même les racines de la foi. La fontaine profonde de l'égoïsme n'a pas été tarie en elle. Elle n'a jamais été profondément convaincue de péché par le Saint-Esprit. Ses convictions de péché se sont limitées à ce que son intelligence a pu lui montrer, d'une manière naturelle et évidente, lorsqu'un prédicateur a clairement exposé la vérité. Mais il n'a jamais reçu de révélation surnaturelle apportée par l'Esprit de Dieu. Une telle personne n'a donc jamais eu que de très faibles lumières sur Dieu, sur le péché, sur sa propre culpabilité, sur la punition qu'elle mérite, sur son besoin d'un Sauveur, sur la nécessité d'être sauvée de ses péchés, bref, sur toutes les doctrines fondamentales de la foi chrétienne. Son intelligence est enténébrée et son coeur endurci.

Un tel converti n'a jamais été délivré de son entêtement et de sa propre justice. Il n'a donc jamais connu Christ, "la puissance de sa résurrection, et la communion de ses souffrances." Il n'a jamais été rendu conforme à Sa mort. Il n'a même aucune idée de ce que ces choses signifient. Il connaît peu de choses de Christ, à part Son nom. Il n'a qu'une idée obscure de Son oeuvre médiatrice. Il n'a jamais été mis à mort par la loi et ne s'est jamais vu dans la situation d'un pécheur mort, condamné et perdu, incapable de toute attirance pour Dieu. Il n'a aucune conscience profonde d'être dans la situation d'un hors-la-loi et d'un criminel condamné, vis-à-vis du gouvernement de Dieu. Il n'a pas encore perdu tout espoir en lui-même ou en quelque autre créature. Bref, il n'a aucune conscience de ses besoins et de sa véritable nature. Il a de toutes ces choses une compréhension tellement superficielle qu'il n'a pas compris la nécessité et la nature du salut apporté par l'Evangile. Il continue à faire des oeuvres pour Dieu, comme s'il servait un maître pour un salaire. Sa religion n'est pas celle d'un amour désintéressé et universel. Il a décidé de servir Dieu, comme il aurait décidé de faire tout autre chose, ou de rendre un service à quelqu'un, pour l'avantage qu'il en reçoit, ou qu'il attend d'en recevoir.

 

Un tel converti se reconnaît par les principales caractéristiques suivantes:

1. Sa vie chrétienne manque manifestement de douceur, d'humilité et de modestie. En réalité, il n'a jamais été humilié et brisé. Il ne peut donc pas manifester l'état d'esprit correspondant. Son comportement, sa conversation, son allure générale, ses prières et ses exhortations, sont entièrement imprégnés d'un esprit de propre justice.

2. Sa vie chrétienne manque manifestement d'amour. En d'autres termes, sa religion ne consiste pas à aimer. La manière dont il parle des anciens convertis, des chrétiens, des serviteurs de Dieu, et de tout le monde en réalité, démontre que la loi d'amour et d'amabilité n'est pas dans son coeur ni, par conséquent, sur ses lèvres. Il n'est pas tendre pour la réputation des autres, respectueux de leurs sentiments, sensible à leurs intérêts, aimable et courtois, comme le sont ceux qui sont motivés par l'amour. Observez-le, et vous verrez que sa vie chrétienne ne manifeste pas les attributs décrits par Paul dans 1 Corinthiens 13. Il ne possède pas cet amour patient, plein de bonté, qui n'est pas envieuse, qui ne se vante point, qui ne s'enfle point d'orgueil, qui ne fait rien de malhonnête, qui ne soupçonne point le mal, qui ne se réjouit point de l'injustice, mais qui se réjouit de la vérité. Vous ne trouverez pas en lui cet amour qui excuse tout, croit tout, espère tout et supporte tout.

3. Une autre caractéristique évidente de ce converti est qu'il n'a que très peu de Christ dans sa vie chrétienne. Dans sa conversation, dans ses prières ou dans beaucoup d'autres domaines, il manifeste qu'il n'a pas été vidé de lui-même et rempli de Christ.

4. Une autre caractéristique de ce converti est qu'il n'étudie pas la Bible. Somme toute, la Bible n'a pour lui aucune saveur. Ils ne la sonde pas profondément. En réalité, il la comprend, mais très superficiellement. Il ne n'est pas soumis à son autorité, au point que la langue des auteurs inspirés devienne le langage naturel de sa propre expérience. C'est la raison secrète de son manque d'amour et de compréhension de la Parole de Dieu. C'est pourquoi il ne la sonde pas. Personne ne peut réellement comprendre et aimer sa Bible, tant que son expérience personnelle ne s'accorde pas avec le langage de la Bible. Ce n'est que lorsque notre expérience s'accorde avec l'Ecriture inspirée que la Bible nous devient intelligible et profondément intéressante. J'ai remarqué qu'un grand nombre de ceux qui se disent chrétiens ne connaissent pas grand-chose de leur Bible, et ne s'en soucient pas beaucoup. Il y a même certains jeunes prédicateurs, ou supposés prédicateurs, qui ne connaissent presque rien de leur Bible, et qui, en réalité, passent dix fois plus de temps à lire autre chose que le Livre de Dieu. Une foule de prétendus convertis savent fort bien qu'ils n'ont qu'un intérêt très limité pour leur Bible. Ceux qui les connaissent bien peuvent le confirmer. Tout ceci nous permet de conclure que la religion d'un tel converti n'est pas la religion de la Bible. Il n'est pas établi sur le fondement des apôtres et des prophètes, et Jésus-Christ Lui-même n'est pas sa "pierre angulaire."

"Maintenant donc, ces trois choses demeurent: la foi, l'espérance, et la charité; mais la plus grande de ces choses, c'est la charité" (1 Corinthiens 13:13).


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Lettre 4

Les erreurs qui bloquent les réveils


Lorsqu'on recherche un réveil, on peut commettre une autre erreur, en manquant de sagesse dans les instructions données pour présenter à l'intelligence la véritable nature de la vie spirituelle. J'ai été très surpris, et fort attristé, de voir combien sont rares, parmi ceux qui se disent chrétiens, ceux qui ont clairement compris la nature réelle de la vie chrétienne. Beaucoup supposent que celle-ci ne consiste qu'à éprouver certains sentiments ou certaines émotions, ou à rester dans la passivité intellectuelle. Lorsqu'ils parlent de leur religion, ils parlent donc de leurs sentiments, et disent: "Je ressens ceci ou cela..." Ils semblent supposer que la vie spirituelle consiste essentiellement, sinon uniquement, à être guidés par certaines impulsions ou sensations. Mais cela n'a strictement rien à voir avec la vie spirituelle.

Des multitudes pensent que leur vie spirituelle n'est faite que de désirs. Ils ne croient pas que leur libre choix ou l'exercice de leur volonté doivent être concernés. Mais il ne peut y avoir aucune vie spirituelle dans un désir, si nous utilisons ce terme dans le sens d'un état psychique passif, et non volontaire.

D'autres supposent que la vie spirituelle se limite à une attitude purement légaliste. Leur intelligence est aiguillonnée par leur conscience, pour accomplir des oeuvres sous la contrainte, par ce que l'on appelle généralement "le sens du devoir." En réalité, presque toutes les erreurs et les séductions sont possibles, lorsqu'il s'agit de décrire ce qui constitue la véritable vie spirituelle. Les hommes ne semblent avoir aucune idée juste de la nature du péché ou de la sainteté. Beaucoup de ceux qui se disent chrétiens parlent souvent de l'égoïsme comme s'il ne s'agissait pas véritablement d'un péché, ou comme s'il ne s'agissait que de l'une des formes du péché. Lorsque j'ai eu l'occasion de prêcher sur le thème de l'égoïsme, en différents lieux, j'ai été étonné de découvrir que beaucoup de chrétiens découvraient avec surprise, comme si cela était nouveau pour eux, que l'égoïsme était totalement incompatible avec une attitude réellement spirituelle. Il semblait qu'il ne leur était jamais venu à l'esprit que l'égoïsme était incompatible avec la vie spirituelle.

Un jour que je prêchais dans l'une de nos cités, je m'efforçais de développer la véritable nature de la spiritualité chrétienne. Je voulais démontrer qu'elle ne consistait qu'en la pratique de l'amour, ou d'une bienveillance désintéressée, parfaite et universelle. L'idée que la vraie religion consiste en bienveillance semblait entièrement nouvelle à une foule de chrétiens. Après avoir présenté ce sujet, et l'avoir retourné en tous sens jusqu'à ce que l'assemblée le comprenne, le diacre de l'une des Eglises me fit remarquer, lorsque je descendis de l'estrade, qu'il ne pensait pas qu'il y eût dix chrétiens véritables dans cette ville. Une dame me dit qu'elle ne connaissait qu'une seule personne, dans son Eglise, qui pratiquait un amour semblable, et que tous les autres, pour autant qu'elle les connaissait, semblaient dominés par l'égoïsme. Sauf erreur de ma part, la plupart des églises de notre pays ont certainement grand besoin de comprendre cette vérité d'une manière claire et profonde. Ceci est spécialement vrai en temps de réveil. Voici réellement venu le moment d'exposer ce sujet, et de l'exposer avec force et clarté, jusqu'à ce la nature de la véritable religion soit parfaitement définie. Si nous ne le faisons pas, les chrétiens tomberont dans un nombre presque infini d'erreurs.

Dans une lettre ultérieure, je ne manquerai pas de décrire en détail certaines de ces erreurs. Il me suffit ici de dire qu'il est essentiel que l'on comprenne en quoi consiste la véritable religion. Elle se résume entièrement en un seul mot: l'amour. Toute forme de religion véritable n'est qu'un aspect de l'amour, ou de la bienveillance désintéressée. Tout ce qui ne procède pas de l'amour n'est pas la vertu, ni la véritable religion. Il faut dire à ceux qui cherchent le salut que la conversion consiste à aimer Dieu de tout son coeur, et que la repentance consiste à se détourner de l'égoïsme et à donner son coeur à Dieu. Bref, la première et unique chose que Dieu leur demande est d'aimer le Seigneur de tout leur coeur, et leur prochain comme eux-mêmes. Tant qu'ils ne manifestent pas l'amour, quoi qu'ils fassent, ils ne pratiquent pas la véritable religion. Ils ne la pratiquent que dans la mesure où ils sont animés d'un amour suprême pour Dieu, et d'un amour identique pour l'homme. On ne fera jamais assez d'efforts pour corriger les erreurs que les hommes commettent constamment à ce propos. Mais, bien qu'il soit d'une importance vitale de faire ces remarques, il ne faut jamais oublier que ce ne sont pas celles-ci qui convertiront les hommes à la véritable religion.

Si je ne me trompe, certains ont aussi commis une autre erreur. Ils ont dépensé toutes leurs forces à faire une prédication qui fait appel à la raison. Ils veulent expliquer la nature philosophique de la foi, de la bienveillance, de la repentance, et des différentes grâces chrétiennes. Leur paroles étaient peut-être justes, et leurs exhortations nobles et efficaces. Ils ont réussi à s'adresser à l'intelligence de leurs auditeurs. Mais ils ne sont pas parvenus, au bout du compte, à faire passer la véritable religion. Ils ont commis une erreur fondamentale. Ils se sont contentés de faire de bons raisonnements et de développer en quoi consistait la foi. Ils ne sont pas allés plus loin. Ils ont accepté que l'intelligence de leurs auditeurs se complaise à comprendre cette idée, sans que leur coeur soit touché. En d'autres termes, ils ne sont pas parvenus à présenter les grandes vérités de la foi, et à les maintenir fermement devant l'intelligence, jus-qu'à ce que celle-ci finisse par croire. Ils ont peut-être correctement expliqué quelle était la nature de la foi. Mais ils n'ont pas maintenu devant l'intelligence les vérités qui doivent être crues. Ils n'ont pas prêché la vérité avec suffisamment de fermeté pour qu'elle finisse par produire la foi. Ils ont réussi à faire comprendre aux hommes ce qu'était la foi, mais ne sont pas parvenus à les persuader d'exercer la foi. Ils se sont contentés de développer l'idée, sans insister sur la nécessité d'accepter la vérité par la foi. Ils ne sont pas parvenus à faire céder la volonté de leurs auditeurs, pour qu'elle s'engage à recevoir la vérité par la foi.

Il en est de même pour toutes les autres grâces chrétiennes. On a exposé la véritable idée de l'amour, mais sans faire en sorte que l'auditeur soit rempli d'amour. On ne lui fait pas abandonner complètement son égoïsme, pour qu'il se consacre entièrement à l'exercice de l'amour. La distinction que je viens de faire est certainement d'une très grande importance.

On peut comprendre la nature philosophique de l'amour, sans pour cela faire preuve d'amour. Si nous nous contentons d'expliquer la véritable nature de l'amour, nous n'arriverons probablement pas à faire pratiquer l'amour véritable, même si nous réussissons à faire comprendre en quoi il consiste. Il faut présenter Dieu, Christ, l'amour de Christ, les grands sujets d'intérêt de l'univers, et tout ce qui tend à nous remplir d'amour. Je le répète, certains se sont sérieusement trompés en ne présentant pas d'une manière juste la nature de la véritable religion. Des gens se sont convertis, mais ils sont partis dans une fausse direction, en croyant qu'ils s'engageaient dans la religion de Christ. Ils n'ont pas pu s'engager dans la véritable religion, parce que l'idée restait formée au niveau de leur intelligence, sans aller plus loin. Parce que leur intelligence avait clairement compris le message, ils ont pensé que cela suffisait pour pratiquer la vraie religion. Mais n'ont pas compris qu'ils ne la pratiquaient pas.

Pour s'assurer que les conversions obtenues soient véritables, il est donc nécessaire de veiller soigneusement à ce qu'une idée bien comprise soit suivie de pratique. Ceci est particulièrement vrai depuis qu'une fausse philosophie a engendré de fausses conceptions de la religion dans tellement d'esprits.

Ce qui est vrai de la foi et de l'amour est aussi vrai de la repentance, de l'humilité, de la douceur, et de toutes les autres grâces. Il faut certes en définir la nature, jusqu'à ce que l'idée soit bien formée dans l'intelligence. Mais ces vérités doivent être abondamment expliquées, retournées dans tous les sens, et maintenues devant l'intelligence, jusqu'à ce que le coeur soit motivé à mettre ces vertus en pratique.

Il faut bien comprendre que les explications intellectuelles qui présentent la nature de ces vertus ne suffisent absolument pas à les produire concrètement. La véritable religion ne peut être pratiquée qu'à partir du moment où ces vérités sont exposées d'une manière lucide et vigoureuse, jusqu'à ce qu'elles entrent dans le coeur.

Je voudrais ajouter ici que s'il fallait choisir de ne pas parler de quelque chose, je dirais que l'on pourrait, sans le moindre risque, éviter de faire tous les exposés théoriques dont je viens de parler. Mais si nous exposons avec force tout ce qui tend à produire la foi et l'amour, si nous présentons ces vérités avec puissance et vigueur, elles tendront à produire la repentance, la foi, l'amour, l'humilité, la douceur, etc... La plupart du temps, nous pouvons nous attendre à ce que ces vertus soient produites dans toute leur pureté, sans que l'ont ait besoin d'expliquer en quoi elles consistent.

Par exemple, en présentant Christ à une âme, celle-ci peut être conduite à croire en Lui, sans jamais avoir compris ce qu'était la foi véritable. En présentant le caractère de Dieu, on peut faire naître dans l'esprit de l'auditeur un véritable amour, sans que son intelligence saisisse quoi que ce soit de la nature de l'amour.

Ceci peut être vrai de toute autre grâce. De sorte qu'il vaut bien mieux se contenter de présenter les vérités qui tendent à produire ces grâces, en évitant de parler de leur nature philosophique. Ce n'est qu'ainsi que l'on parviendra à rendre les coeurs obéissants.

En présentant la nature de la véritable religion, on réussira à détruire les faux espoirs de ceux qui se disent chrétiens depuis longtemps, mais qui ne le sont pas réellement, ainsi que les illusions de ceux qui se sont convertis d'une manière superficielle. Un tel langage permettra aussi à ceux qui recherchent la vérité de ne pas tomber dans l'erreur.

Je supplie mes frères qui cherchent à produire des réveils spirituels, de ne jamais oublier et de mettre en pratique cette importante vérité: l'Evangile doit être exposé dans toute sa puissance irrésistible et brûlante. Il doit être présenté comme une vérité qu'il est nécessaire de croire, jusqu'à ce que les grâces chrétiennes se manifestent. Dans vos prédications de réveil, vous ne devrez parler qu'occasionnellement des aspects théoriques de ces grâces. Notre devoir est de bien expliquer en quoi consiste la véritable religion, et de barrer la route aux fausses espérances.


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Lettre 5

Les erreurs dans les messages de réveil


Je vais à présent parler d'une autre erreur qui, je le crains, a souvent été commise quand on cherche à produire un réveil. Je veux parler d'une prédication qui s'adresse à l'intelligence des auditeurs et qui tend à les enfler d'orgueil, au lieu de les conduire à l'humiliation et à l'obéissance. C'est une prédication qui explique intellectuellement en quoi consiste la vie chrétienne, mais qui laisse de côté les grandes réalités de la révélation divine. Je suis certain que je suis moi-même souvent tombé dans cette erreur.

Quand la prédication devient très métaphysique et intellectuelle, on donne l'impression que l'on peut tout comprendre. On fait croire que rien ne peut être accepté sans avoir d'abord été expliqué, sans que sa nature théorique ait d'abord été comprise. Il en est résulté de grands maux.

Je ne vais pas jusqu'à dire que certains ont commis l'erreur de déclarer que l'on ne doit rien recevoir par la foi, sans que l'on ait d'abord pu le comprendre intellectuellement. Cependant, sauf erreur de ma part, cette impression a bien été donnée. L'intelligence humaine est désespérément pervertie, imbue d'elle-même et incrédule. Elle est extrêmement flattée et remplie d'orgueil de pouvoir se lancer dans des spéculations métaphysiques. Elle aime philosopher sur les grandes vérités de la religion, au point de finir par se croire capable de comprendre presque toutes les grandes vérités concernant Dieu et Son royaume.

Cette attitude entraîne directement deux conséquences funestes. Tout d'abord, on remplace la foi par nos propres raisonnements oiseux. L'homme philosophe ou spécule sur une doctrine, jusqu'à ce qu'il la considère comme une simple idée. Il est alors extrêmement enclin à se reposer sur sa propre démonstration, ou sur sa philosophie, plutôt que de faire confiance au témoignage de Dieu. Cela n'est pas la foi. Quand on a pris cette habitude, on rejettera complètement toute doctrine que l'on ne peut expliquer ni comprendre intellectuellement. Ou alors on l'acceptera, mais d'une manière tellement superficielle, qu'il sera évident qu'on n'y attache aucune confiance réelle.

Tant que les prédicateurs s'attacheront à faire appel à l'intelligence des hommes, en voulant tout leur faire comprendre intellectuellement, ils trouveront des gens pour les suivre. Mais, si ceux-ci les suivent, ce sera manifestement parce qu'ils auront été convaincus par des raisonnements et des spéculations. Ce ne sera absolument pas parce qu'ils auront résolument mis leur confiance dans la Parole de Dieu et les réalités de l'Evangile.

Vous vous rendrez compte que ces chrétiens superficiels rejettent absolument certaines des doctrines les plus importantes et les plus précieuses de l'Evangile, comme celles de la divinité et de l'humanité de Christ, de la Trinité, des desseins divins, et bien d'autres encore. S'ils les acceptent, ce n'est que d'une façon très superficielle.

Une telle prédication n'aboutit pas à humilier l'orgueil de l'intelligence humaine. Elle ne transmet que la connaissance qui enfle, selon l'expression de Paul. J'ai souvent pensé à ce passage en observant l'esprit dont fait preuve ces chrétiens dont je parle. Ils sont manifestement sages à leurs propres yeux et remplis de suffisance. Ils comprennent ce qu'ils croient. Ils se glorifient d'être des philosophes, et de ne pas être assez faibles et ignorants pour croire ce qu'ils ne comprennent pas.

J'ai pu observer d'une manière très claire que ces personnes n'ont aucune foi réelle. Ils ne mettent absolument pas leur confiance en Dieu, en la Bible, ni en aucune de ses affirmations, simplement parce que Dieu les a faites. Ils se complaisent et se confient en leurs propres spéculations. Bien entendu, ils n'ont que très peu de respect pour Dieu et très peu de respect pour Son autorité. Ils n'ont aucune confiance réelle en Sa Parole.

Les conséquences funestes d'une telle prédication intellectuelle sont tout d'abord qu'elle ne crée pas la foi. Ensuite, même si la foi existait précédemment, elle ne tend nullement à la développer, à la fortifier et à la confirmer. Mais elle tend plutôt à la dessécher et à la détruire. C'est un fait remarquable que les auteurs inspirés ne font jamais de philosophie, mais tiennent comme acquise une juste philosophie. Ils affirment des faits dont la foi peut se saisir. Bien qu'ils ne fassent jamais de philosophie, il est évident que leur manière de présenter la vérité est parfaitement philosophique, quand on considère le but qu'ils ont en vue. Parmi toutes les méthodes possibles de présenter la vérité, il est clair que la méthode employée par l'Ecriture est la seule qui puisse permettre d'atteindre le but que Dieu recherche. Il sera toujours indispensable, dans notre monde comme dans l'autre, d'avoir foi dans le caractère et le témoignage de Dieu, pour Lui obéir de tout coeur. Certains prétendent que la foi ne sera plus nécessaire dans le ciel, parce qu'elle sera remplacée par la vue. Mais il n'en sera jamais ainsi. Il ne fait aucun doute que la confiance en Dieu, en Son caractère, en Sa sagesse, en Sa bonté, ainsi que dans l'universalité et la perfection de Sa bienveillance, sera tout aussi indispensable dans le ciel qu'elle l'est sur la terre, pour toute l'éternité.

Le gouvernement de Dieu est vaste, et Ses desseins nous sont impénétrables. Il est donc nécessaire qu'un grand nombre de dispensations divines, par leur nature même, nous soient profondément mystérieuses et difficiles à comprendre, à moins d'avoir la plus entière confiance en la bienveillance et en la sagesse de Dieu.

Dans notre monde, le grand objectif de Dieu est de restaurer la confiance en Lui-même et en Son gouvernement. Il veut créer et développer la foi jusqu'à sa perfection. Il présente donc des faits sans les expliquer. Le Seigneur n'entre absolument pas dans des raisonnements explicatifs, mais affirme simplement les faits qu'Il désire nous communiquer. Il nous demande de les saisir par la foi et de nous reposer sur eux. Nous ne pourrons jamais comprendre un grand nombre de ces faits. Nous pouvons comprendre qu'une chose est vraie, sans pouvoir expliquer sa philosophie. C'est certainement vrai d'une foule de faits que nous rencontrerons toujours dans le gouvernement de Dieu. Il est donc indispensable que nous soyons entraînés, dès le début de notre vie chrétienne, à ne pas hésiter à faire confiance à ces faits. Nous devons attendre qu'ils nous soient expliqués jusqu'à ce que nous soyons capables de recevoir ces explications. Je n'insisterai donc jamais assez sur la nécessité de présenter l'Evangile de telle manière que l'on permette un plein exercice de la foi. Je ne veux pas dire par là qu'il ne faut jamais expliquer les faits, s'ils admettent une explication philosophique. Mais je veux dire que nous ne devons pas prendre trop de peine à les expliquer, ni à en définir la philosophie.

Selon ma propre expérience, j'ai compris que j'ai porté gravement atteinte à ma piété en insistant trop sur le fait que nous devions comprendre toutes choses avant de les accepter. Cela signifie que, souvent, je ne me suis pas contenté d'accepter certaines choses qui m'étaient simplement présentées comme des faits, mais que je suis demeuré troublé, insatisfait et instable, tant que je n'avais pas compris et expliqué la logique de ces faits. Cela a certainement été mon expérience en ce qui concerne la doctrine de l'expiation. Je ne me contentais pas de la simple affirmation que Christ était mort à ma place, mais il me fallait comprendre le comment et le pourquoi. Je voulais que l'on m'explique les grands principes de la souveraineté divine et la politique du Royaume de Dieu, sur lesquels était fondée la grandiose transaction de mon rachat. Je suis satisfait de pouvoir m'expliquer la logique de cette transaction, et j'ai souvent réussi à l'expliquer aux esprits les plus sceptiques. Mais, après tout, et à la réflexion, je suis maintenant persuadé que si je leur avais présenté avec force les simples faits, et s'ils les avaient reçus comme des faits s'appuyant sur l'autorité du témoignage divin, cela aurait été plus profitable à leur âme.

Depuis un ou deux ans, j'ai été plus souvent conduit à respecter l'importance de la présentation des faits, jusqu'à ce qu'ils soient acceptés comme des faits, tout en expliquant occasionnellement leur logique. J'ai découvert que ceci était extrêmement profitable à mon âme, comme à l'âme de ceux qui ont d'abord cru les faits, sans qu'on leur en ait expliqué la logique. Ceci développe et fortifie la foi. Cela conduit les gens à ressentir la nécessité de faire confiance à Dieu, et à recevoir tout ce qu'Il dit, sur la seule autorité de ce qu'Il affirme.

Par la suite, quand on explique la logique de ces réalités, cela n'augmente pas la foi des auditeurs. Mais ils sont néanmoins très édifiés, et même ravis de comprendre les explications logiques apportées à des réalités qu'ils avaient d'abord crues sur l'autorité de Dieu. Je trouve cela excessivement profitable à mon intelligence, comme à l'intelligence des autres, autant que j'en aie l'expérience.

Il est aisé en vérité de constater que tout l'Evangile devrait être présenté et accepté de cette manière. C'est de cette manière que la Bible est systématiquement écrite. Il faut tout d'abord recevoir les faits comme des faits, simplement parce que Dieu les affirme. On doit ensuite expliquer ceux qui peuvent être expliqués et compris, pour l'édification et le développement de la connaissance des enfants bien-aimés de Dieu. Mais si l'on inverse le processus, en commençant par expliquer toutes choses, il ne reste plus beaucoup de place pour la foi. Et s'il en reste, vous découvrirez que ceux qui se seront engagés dans la foi chrétienne n'ont aucune foi réelle. Ils rejettent entièrement, ou n'acceptent que très superficiellement, avec beaucoup de doutes, toute vérité ou toute doctrine de la Bible qui n'admet aucune analyse ni explication logique. Je suis certain que ceci est le résultat d'une tendance à faire des prédications qui s'appuient trop sur la philosophie et les spéculations métaphysiques.

Permettez-moi de répéter que cette sorte de prédication est très appréciée par certaines catégories d'auditeurs. Ceux qui sont vraiment spirituels se rendront vite compte qu'ils ne profitent guère d'un tel régime. Cependant, les assemblées en seront souvent enflées d'orgueil et remplies de satisfaction. Elles croiront être hautement édifiées et favorisées, à chaque sermon. Alors qu'il sera en général évident que leur ferveur dans la prière ne grandit nullement. Elles ne deviennent pas plus humbles, ni plus consacrées à Dieu. Elles ne croissent pas dans la douceur d'un enfant ni dans la patience de Jésus-Christ. Leur croissance n'est pas véritablement une croissance chrétienne. Il s'agit plutôt d'une croissance intellectuelle. L'orgueil et l'égoïsme sont souvent les traits les plus évidents d'une assemblée nourrie de philosophie et de métaphysique, et non des réalités humiliantes de l'Evangile. Je suis certain d'avoir moi-même été assez coupable dans ce domaine. Je ne suis sûrement pas le seul à mériter cette condamnation. Mais ceux qui ont commis les mêmes erreurs que moi n'ont peut-être pas compris, aussi profondément que j'ai été contraint de le comprendre, à quel point ils se trompaient. Je veux que l'on me comprenne bien. Je ne cherche absolument pas à me faire l'avocat d'une présentation des réalités de l'Evangile qui ne laisserait aucune place aux explications. J'adopterais plutôt une position intermédiaire. Je souhaite d'une part ne pas encourager l'orgueil par un développement disproportionné de l'intelligence. Ceci ne laisserait presque aucune place à l'exercice de la foi dans la Parole de Dieu. D'autre part, je ne voudrais pas négliger tout appel à l'intelligence, en me contentant de ne présenter que les réalités sur lesquelles peut s'exercer la foi.

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