Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

Charles G. FINNEY




Le feu du réveil

Lettres sur les réveils,
à tous les amis de
notre Seigneur Jésus-Christ,
tout particulièrement
à Ses ministres.


© Editions Parole de Vie 1996



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Traduit par H. Viaud-Murat

ISBN 2-909100-17-0

Traduit du texte publié par

DIMENSION BOOKS,

Bethany Fellowship, Inc.

Minneapolis, Minnesota (U.S.A.)





Table des matières

Introduction

Lettre 1 Les réveils superficiels

Lettre 2 L'excitation malsaine au cours des réveils

Lettre 3 Une cause de certaines conversions superficielles

Lettre 4 Les erreurs qui bloquent les réveils

Lettre 5 Les erreurs dans les messages de réveil

Lettre 6 L'excitation pendant les réveils (1)

Lettre 7 L'excitation fanatique

Lettre 8 L'excitation pendant les réveils (2)

Lettre 9 Pourquoi y a-t-il si peu de réveils?

Lettre 10 Les causes du déclin des réveils

Lettre 11 L'inutilité d'efforts spasmodiques

Lettre 12 Les obstacles à l'esprit de réveil

Lettre 13 Les objections faites aux séries de réunions

Lettre 14 Les obstacles aux réveils

Lettre 15 L'attitude pernicieuse de l'Eglise par rapport aux réformes actuelles

Lettre 16 La folie de vouloir entretenir la véritable religion sans réveils

 


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Introduction

 

A tous les amis de notre Seigneur Jésus-Christ, tout particulièrement à Ses serviteurs.

 

Bien-aimés dans le Seigneur,

Plusieurs années se sont écoulées depuis qu'une série de conférences données sur le sujet des réveils a été publiée dans les colonnes du journal de New-York, "l'Evangéliste." Beaucoup d'entre vous le savent. J'ai eu l'occasion de prêcher ces conférences devant ma propre congrégation de New-York. Elles furent publiées par l'éditeur de ce journal. Depuis la publication de ces conférences, mes observations et mes expériences concernant les réveils se sont continuellement développées et ont mûri, si bien que je suis désireux de dire bien d'autres choses à mes frères sur ce sujet.

Lorsque j'ai commencé à donner ces prédications, je n'avais ni connaissance ni expérience en matière de réveils. Mon expérience chrétienne était elle-même très limitée. Le Seigneur m'a conduit sur un chemin que je ne connaissais pas. Récemment, j'ai pensé qu'il pouvait être utile de communiquer aux Eglises mon expérience et mes convictions.

Je souhaite tout particulièrement que mes frères comprennent que je ne prétends à aucune infaillibilité dans ce domaine. Je ne veux que présenter mes opinions, avec la modestie qui convient à mon ignorance, et que réclame aussi la nature du sujet.

Depuis environ vingt ans, j'ai bénéficié d'une continuelle expérience en matière de réveils. En acquérant cette expérience, j'ai observé de très près et avec une grande sollicitude les différents réveils, leur développement, leurs résultats, et tous les phénomènes qui les accompagnent, ainsi que leurs conséquences. J'ai parfois lu les remarques faites par certains journaux, prétendant que, depuis mon installation à Oberlin, j'avais cessé de voir de puissants réveils associés à mon ministère ou à celui de mes collaborateurs. Mais il s'agit là d'une grave erreur. Mes frères auraient été informés de la réalité, si certains des journaux auteurs de ces remarques avaient porté à la connaissance du public les faits tels qu'ils se sont passés. Je ne mentionne cela ni pour censurer ces éditeurs, ni pour me vanter du succès de mon propre ministère ou de celui de mes collaborateurs. Je veux simplement attirer votre attention objective sur mes propos. Ne croyez pas que ceux-ci soient faits par un homme dont les observations et l'expérience concernant les réveils ont cessé depuis longtemps. Bien au contraire, mes observations et mon expérience se sont développées dans toute leur fraîcheur jusqu'à cette heure même.

Ma position dans ce pays et les observations que j'ai pu faire à l'étranger m'ont donné des avantages particuliers pour juger de l'efficacité ou de l'inefficacité de certaines pratiques. J'ai été témoin de puissants réveils ici même. Ils se sont produits de temps en temps tout au long des dix années écoulées. Ce qui s'est passé ici aurait pu être qualifié de réveil partout ailleurs. Il s'écoule rarement une semaine, sinon un jour, sans que je puisse observer un certain nombre de signes de l'intervention divine. J'ai encore pu constater l'influence des réveils sur la vie de jeunes hommes se préparant pour le ministère, sur la vie de serviteurs de Dieu, et sur l'Eglise en général, des années après que ces réveils se soient produits. J'ai pu étudier avec le plus profond intérêt leur commencement, leur progression, leur déclin temporaire, puis leur reprise, ainsi que leurs diverses formes et les circonstances de ces modifications.

Je désire attirer l'attention de mes frères sur un nombre considérable de sujets. Par la providence de Dieu, j'ai pu observer une grande variété de mesures employées pour conduire des réveils. Quand j'ai commencé à les connaître, au cours des dix premières années de mon ministère, nous ne connaissions pas ce que nous appelons aujourd'hui "les séries de réunions." Depuis lors, ces séries de réunions, appelées tout d'abord "rassemblements d'Eglises," sont devenues une pratique courante. Elles ont pu prendre la forme de réunions étalées sur trois ou quatre jours, ou leur forme actuelle de "séries de réunions" programmées sans interruption sur plusieurs semaines. En ce qui concerne l'efficacité de ces différentes méthodes, j'ai beaucoup de choses à dire, et j'invite tous les chrétiens à considérer ces remarques dans la prière. Je veux aussi souligner le soin extrême que nous devons prendre pour éviter que ces réveils ne dégénèrent en fanatisme et en confusion, comme cela s'est produit dans certains cas. Je désire aussi attirer l'attention de mes frères sur certains résultats désastreux qui ont pu se produire à cet égard.

Votre frère, C.G. Finney


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Lettre 1

Les réveils superficiels


Depuis au moins dix ans, j'ai observé que les réveils sont progressivement devenus de plus en plus superficiels. Une multitude d'autres observateurs sont parvenus à la même conclusion. Tous les phénomènes qui accompagnent les réveils actuels en témoignent comme d'un fait général. Il y a beaucoup moins de conviction profonde de péché et de brisement profond du coeur, beaucoup moins d'humilité véritable, et beaucoup moins de puissance dans toutes les grâces manifestées dans la vie de ceux qui se sont convertis au cours des derniers réveils. Ce n'était pas le cas de ceux qui se sont convertis lors des réveils survenus en 1830, 1831, et un certain temps auparavant. J'ai observé, comme d'autres l'ont fait, que les réveils avaient une durée beaucoup plus courte, et qu'ils provoquaient une réaction beaucoup plus soudaine et désastreuse qu'auparavant. J'ai noté également qu'un nombre plus faible de convertis devenaient des chrétiens stables et efficaces. Quant à ceux qui persévèrent, ils semblent être moins remplis de l'Esprit de Christ que lors des réveils précédents. Ils n'ont pas autant l'esprit de prière, ils ne sont pas aussi modestes ni aussi humbles. Bref, si j'en juge par ma propre expérience et les observations d'autres témoins, tous les phénomènes accompagnant les réveils les plus récents ont revêtu un caractère bien moins souhaitable qu'auparavant. Je considère ce propos comme modéré.

Au cours des réveils actuels, les chrétiens sont bien moins spirituels, moins persévérants dans la prière, moins profondément humiliés et vivifiés, et moins puissamment baptisés dans le Saint-Esprit qu'auparavant. Je suppose que ces observations ne doivent pas être appliquées à l'ensemble des réveils, mais je crois qu'on peut les appliquer à la grande majorité d'entre eux. Je crois que les serviteurs de Dieu ne sont pas aussi désireux qu'auparavant de voir des réveils se produire dans leurs Eglises, et qu'ils n'ont pas d'aussi bonnes raisons de l'être. Quant aux serviteurs de Dieu qui n'ont connu que les réveils récents, ils en sont presque venus à craindre les réveils. Ils ont tellement vu les effets désastreux des réveils modernes qu'ils se demandant honnêtement s'il est finalement désirable d'avoir un réveil. Ceux qui ont assisté aux réveils d'il y a dix ou vingt ans préfèrent nettement les réveils de ce type. Ils sont affligés du caractère superficiel de beaucoup de réveils récents. Je fais là une remarque générale et non universelle, et n'exprime que mon opinion personnelle. J'ai souvent entendu des serviteurs de Dieu et des chrétiens dire: "Nous languissons de voir revenir le jour où nous verrons des réveils comme ceux que nous avons eus il y a des années!" J'ai très attentivement observé l'évolution des choses. J'ai recherché avec le maximum de soin et de prière quelles étaient les causes de ce déclin. Si mes informations sont bonnes, et si j'ai bien compris la situation, j'énoncerai déjà les causes suivantes:

 

1. On sonde aujourd'hui beaucoup moins profondément le coeur humain. On n'expose pas de manière complète la dépravation de la nature humaine. On constate généralement que les pécheurs impénitents n'ont manifesté ces dernières années qu'une opposition très faible aux réveils. Ceci m'a été confirmé par un frère qui a exercé longtemps le ministère d'évangéliste. Je ne crois pas que les pensées charnelles des hommes ne soient plus en conflit avec Dieu. Mais je crains que l'on n'ait pas complètement mis en lumière dans les coeurs les raisons profondes de ce conflit. Je crains que l'on ne mette pas entièrement à nu l'indescriptible dépravation du coeur humain, comme on le faisait auparavant. On prêche bien quelques sermons dans chaque réveil sur le thème de la dépravation morale. Mais je crains que cela ne soit aucunement le grand thème de la prédication. Cela devrait l'être, si l'on veut profondément labourer la jachère du coeur du pécheur comme de celui du chrétien. D'après ma propre expérience et mes observations, comme d'après la Parole de Dieu, je suis pleinement convaincu que la nature des réveils dépend beaucoup de l'accent placé sur la dépravation du coeur humain. Son orgueil, son inimitié contre Dieu, son caractère tortueux, et tout ce que Dieu trouve haïssable, doivent être exposés à la lumière de Sa loi parfaite.

 

2. Je crains que l'accent ne soit pas assez placé sur l'horrible culpabilité entraînée par cette dépravation. On ne fait pas assez d'efforts, par des messages clairs et tranchants, pour montrer au pécheur que son coeur est irrémédiablement corrompu et coupable, et qu'il est inexcusable. Aucun réveil ne sera véritablement profond tant que les pécheurs et les chrétiens rétrogrades n'auront pas été sondés et mortifiés à un point tel qu'ils seront incapables de garder la tête haute. Tant que des pécheurs et des chrétiens rétrogrades pourront assister à des réunions de réveil en gardant la tête haute et en vous regardant en face sans être rouges de confusion, je suis absolument convaincu que l'on aura la preuve qu'une inspection minutieuse des coeurs n'a nullement été faite. Ceux-ci ne sont nullement prêts à être entièrement brisés devant Dieu et à se convertir. Je souhaite tout particulièrement attirer l'attention de mes frères sur ce fait. Quand des pécheurs et des chrétiens rétrogrades sont réellement convaincus de péché par le Saint-Esprit, ils ont profondément honte d'eux-mêmes. Tant qu'ils ne manifestent pas une profonde honte, on doit savoir que leurs coeurs n'ont pas été suffisamment sondés, et qu'ils ne se voient pas eux-mêmes comme ils devraient se voir. Quand je me rends à une réunion où les coeurs doivent être sondés, et que je parcours du regard la foule, si je vois les assistants ayant la tête haute, me regardant et se regardant les uns les autres, je comprends tout de suite ce qui me reste à faire. Au lieu de les presser immédiatement à venir à Christ, je dois m'efforcer de les convaincre de péché. En général, il suffit à un serviteur de Dieu de regarder la foule pour savoir qui est convaincu de péché et qui ne l'est pas, et qui est assez profondément convaincu de péché pour être prêt à recevoir Christ.

Certains parcourent la salle du regard, et ne manifestent aucune honte. D'autres ne peuvent pas vous regarder en face, mais peuvent encore garder la tête haute. D'autres encore ne peuvent plus garder la tête haute, mais restent silencieux. D'autres enfin, par leurs sanglots, leurs profonds soupirs, et l'agonie qu'ils traversent, révèlent immédiatement que l'épée de l'Esprit les a touchés au plus profond de leur coeur. J'ai appris qu'un réveil ne prend jamais une direction désirable et convenable, tant que la prédication et les moyens utilisés ne tendent pas tous à produire cette véritable et profonde conviction de péché. C'est cette conviction qui brise complètement le pécheur et le chrétien rétrograde, et qui produit en eux une honte et une confusion indescriptibles devant le Seigneur. Ils sont alors totalement dépouillés de toute excuse, et acceptent entièrement de se condamner eux-mêmes en donnant raison à Dieu.

 

3. Je pense que l'on ne souligne pas assez en général l'action nécessaire de Dieu dans le coeur des chrétiens et des pécheurs. Je sais que je me suis moi-même quelquefois trompé à ce sujet. Dans le désir de déloger les pécheurs et les rétrogrades des refuges où ils pouvaient continuer à se justifier, j'ai moi-même, comme d'autres l'ont fait, trop insisté sur les efforts personnels que devaient accomplir les pécheurs. J'aurais plutôt dû leur montrer à quel point ils dépendaient de la grâce de Dieu et de l'influence de Son Esprit. Ceci a attristé l'Esprit du Seigneur. Il S'est donc abstenu d'agir, parce que Son oeuvre n'a pas été honorée ni suffisamment mise en avant. Il n'a donc pas pu être glorifié pour Son action. Dans le même temps, des multitudes ont été surexcitées par l'emploi de toutes sortes de moyens destinés à provoquer une excitation. Elles ont conçu des espérances, mais sans jamais connaître la nécessité de la présence et de l'action puissante du Saint-Esprit. Inutile de dire que de telles espérances sont plus faciles à rejeter qu'à conserver! Il serait étonnant, en réalité, que l'on puisse mener une vie chrétienne en se fondant sur une expérience avec laquelle le Saint-Esprit n'aurait manifestement rien à voir.


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Lettre 2

Les excitations malsaines dans les réveils


Quand on a recherché un réveil, on a très souvent commis l'erreur d'encourager l'excitation, jusqu'au point où elle devient malsaine. Un certain degré d'excitation est inévitable. Quand on veut pousser un pécheur à se tourner vers Dieu, il faut lui faire comprendre et apprécier des vérités qui produiront nécessairement un degré considérable d'excitation dans ses pensées. Mais il ne faut jamais oublier que l'excitation, en particulier quand elle est très vive, expose le pécheur à de grandes séductions. La vraie religion consiste à obéir de coeur à la loi de l'intelligence, en veillant à ce que celle-ci ne soit pas influencée par les émotions ou la crainte. Quand les sentiments sont surexcités, la volonté est presque obligée de leur céder. Je ne dis pas qu'il en est nécessairement toujours ainsi. Mais des sentiments exacerbés exercent une influence tellement puissante sur la volonté qu'ils parviennent presque toujours à la dominer. Il faut savoir que notre intelligence n'est jamais spirituelle quand elle est contrôlée par nos sentiments, car on agit alors par impulsion. Quels que soient nos sentiments, si notre âme accepte de se laisser contrôler par eux, au lieu de se soumettre à l'Evangile de Dieu, nous quittons le domaine de l'intelligence spirituelle. Or la vérité nous est révélée par l'intelligence. En outre, plus l'excitation grandit, plus il est difficile d'obéir à la loi de l'intelligence. Plus les sentiments sont fortement excités, plus ils tendent à gouverner la volonté. Et plus ils gouvernent effectivement la volonté, moins l'âme se trouve, et peut se trouver, dans un état spirituel. Ceci est vrai quels que soient nos sentiments.

Il faut toutefois souligner qu'un certain degré d'excitation est nécessaire dans les réveils, pour attirer et fixer soigneusement l'attention de l'intelligence sur la vérité. Mais il n'en faut pas plus. Quand l'excitation dépasse cette limite, elle devient toujours dangereuse. Quand l'excitation est très vive, au point de dominer la volonté, ceux qui éprouvent cette excitation sont invariablement séduits et se trompent eux-mêmes. Plus ils sont contrôlés par leurs sentiments, et plus il leur semble qu'ils sont spirituels. Ils sont conscients d'éprouver des émotions très profondes. Ils agissent en conséquence, simplement parce qu'ils éprouvent ces émotions. Ils ont conscience d'être sincèrement motivés par leurs émotions. Et ils croient être alors réellement spirituels. En réalité, s'ils sont contrôlés par leurs émotions et non par leur intelligence, ils ne sont pas du tout spirituels.

Nous devons sans aucun doute trouver là le secret de tant d'espoirs déçus, dans des réveils où l'excitation a été très grande. Il faut absolument que cette vérité soit comprise. Sinon, cette grande excitation ne sera pas tenue en bride, mais sera plutôt encouragée. Chaque fois que l'on a cru qu'un réveil n'était grand que si l'excitation était grande, on a invariablement causé de grand dommages à la cause de Christ. On peut certes s'attendre à ce qu'une grande excitation accompagne souvent les réveils véritables. Mais si l'on arrive à retenir soigneusement l'attention des assistants, on veillera alors à n'encourager que l'excitation nécessaire pour permettre à l'intelligence de contrôler pleinement la volonté. Il ne faut pas que celle-ci soit troublée par des émotions profondément excités. J'ai souvent vu certaines personnes dans un tel état d'excitation que leur intelligence semblait presque abrutie. Leur volonté semblait être dominée par tout autre chose que la raison. Ce n'est pas une attitude spirituelle, c'est de l'excitation! Cela a souvent fini par prendre la forme du fanatisme, ainsi que j'aurai l'occasion de le montrer dans ces lettres. Je le répète, il est dangereux dans les réveils de s'adresser trop exclusivement aux espoirs et aux craintes des hommes. Pour la simple raison que l'homme est un être égoïste. Le fait de s'adresser presque exclusivement à ses espoirs et à ses craintes va tendre à produire en lui une soumission égoïste à Dieu. Il s'engagera dans une religion égoïste dont les deux motivations seront d'une part la crainte d'être puni, et d'autre part l'espérance d'être récompensé. Certes, il est vrai que le Seigneur fait appel aux espérances et aux craintes des hommes. Il les menace d'être punis s'ils désobéissent, et Il leur offre des récompenses s'ils obéissent. Mais si le coeur n'est motivé que par l'espoir d'une récompense ou la crainte d'une punition, il ne manifeste aucune puissance. Quand des pécheurs commencent à aimer le Seigneur d'une manière désintéressée, et qu'ils se consacrent au bien universel, Dieu leur promet une récompense pour leur service désintéressé. Mais Il ne leur a jamais promis de récompense s'ils Le suivent pour des pains et des poissons. Une telle attitude n'est que de l'égoïsme pur.

Si des pécheurs se repentent et se détournent de leurs péchés, s'ils se consacrent d'une manière désintéressée au bien universel et à la gloire de Dieu, le Seigneur leur promet de pardonner leurs péchés. Mais cette promesse n'est pas faite à ceux qui abandonnent leurs péchés par motifs d'intérêt. On peut cesser de pratiquer ouvertement le péché pour des motifs égoïstes, mais ce n'est pas ainsi que le péché sera ôté du coeur. C'est de l'égoïsme. Il est insensé et absurde de prétendre réellement abandonner le péché en ayant des motifs égoïstes. Tout effort égoïste pour donner notre coeur à Dieu n'est qu'une confirmation de l'égoïsme. Tout effort d'abandonner le péché simplement par la crainte d'une punition ou l'espoir d'une récompense est de l'hypocrisie. Bien plus, cela ne tend qu'à confirmer, fortifier et perpétuer l'égoïsme du coeur.

Sans aucun doute, quand les pécheurs sont insouciants, le fait de faire appel à leurs espoirs et à leurs craintes est le moyen le plus rapide de les réveiller et d'attirer leur attention sur le salut. C'est peut-être le seul moyen de procéder. Mais quand on a ainsi retenu leur attention, on ne doit jamais oublier la nécessité absolue de les empêcher de s'engager d'une manière égoïste. Il faut alors leur exposer avec force tout ce qui tend à les détourner d'eux-mêmes, et les pousser à consacrer leur être entier au Seigneur. Nous devons présenter à leur intelligence le caractère de Dieu et Sa souveraineté. Nous devons leur expliquer Christ, le Saint-Esprit, et le plan du salut. Nous devons leur présenter ce qui peut les détourner de leurs péchés et du besoin de satisfaire leurs propres intérêts, tout en les incitant à manifester un amour désintéressé et universel.

Par ailleurs, il faut puissamment mettre en lumière à l'esprit du pécheur sa propre laideur, son égoïsme, son entêtement, son orgueil, son ambition, son inimitié contre Dieu, ses convoitises, sa culpabilité, sa nature repoussante et odieuse, sa mort spirituelle, son esclavage, et tout ce qui concerne sa nature réelle. Face à son égoïsme, à sa rébellion, à son entêtement et à sa repoussante culpabilité, il faut mettre en contraste l'amour désintéressé et infini du Dieu béni éternellement, Son infinie compassion, Sa douceur, Sa grâce, Sa pureté, Sa sainteté, Sa fidélité, et Sa justice. Ces vérités doivent lui être présentées comme un miroir, jusqu'à ce qu'elles l'écrasent de tout leur poids et lui brisent le coeur. Il est très aisé de comprendre que tout ceci ne peut être fait sans produire un certain degré d'excitation, parfois considérable. Mais il ne faut jamais oublier qu'une forte excitation n'est qu'un mal occasionnel. Elle ne doit jamais être regardée comme hautement favorable à la conversion du pécheur. Plus l'âme pourra être conservée calme lorsqu'elle contemple ces vérités, et plus la volonté sera libre d'accepter de se soumettre à ce que lui révèle l'intelligence.

Il est certain que l'on s'est exagérément opposé à l'excitation souvent rencontrée dans les réveils spirituels. Je le répète, une vive excitation est souvent inévitable. Mais je ne doute pas non plus que l'excitation ait souvent atteint un niveau qui n'était pas nécessaire, et même que l'on a déployé beaucoup d'efforts pour provoquer une irrésistible et profonde excitation. J'ai parfois été témoin d'efforts qui tendaient manifestement à créer une excitation aussi grande que possible. On a bien souvent employé des moyens qui ne tendaient nullement à faire plier la volonté des pécheurs, ou à leur faire intelligemment comprendre les termes du salut. Au contraire, ces moyens me semblaient produire une sorte de suffisance, par la puissance d'une irrésistible excitation. Je ne peux croire que cela soit sain, ni sans danger, dans les réveils. En réalité, chaque fois que de tels efforts ont été déployés, je crois que tout le monde a admis qu'il en est résulté du mal et non du bien. Plus j'observe les réveils, et plus je suis impressionné par la nécessité de garder l'excitation au plus faible niveau possible, en tout cas au niveau compatible avec une pleine exposition de la vérité.

Souvent, par un effet de résonance, l'excitation se répand rapidement au sein d'une assemblée. Pour cette raison, il est souvent nécessaire, quand le réveil est puissant, de faire preuve d'une très grande discrétion. Il faut une grande sagesse pour maîtriser la situation sans blesser personne, quand quelqu'un ne peut plus se maîtriser, est saisi d'une brusque excitation, se met à pousser de grands cris, éclate en sanglots ou commence à gémir, en proie à une vive émotion. Quand un tel comportement est sévèrement réprimé, il se produit aussitôt chez les chrétiens une réaction qui étouffe l'action de l'Esprit. En revanche, quand ces comportements sont ouvertement encouragés, quand on souffle sur la flamme, on encourage souvent une irrésistible surexcitation dans toute l'assemblée. Peut-être que beaucoup d'âmes sembleront être entièrement gagnées au Seigneur, et que des multitudes feront ouvertement leur soumission à Dieu. Mais, finalement, presque personne n'aura agi intelligemment et ne s'avérera être réellement converti.

On dit parfois qu'il n'est nullement gênant que l'excitation soit grande, pourvu qu'elle soit produite par la vérité.

Certes, il est souvent vrai que la compréhension de la vérité produit une grande émotion. L'intelligence est alors confondue, la sensibilité s'enflamme et devient exacerbée, les émotions explosent, et l'intelligence est presque étouffée et annihilée par un torrent d'excitation. Mais un tel état est très défavorable à une réelle conversion. J'ai très souvent pu assister à des cas semblables. Avant d'avoir acquis de l'expérience dans ce domaine, j'étais favorable à de tels comportements. J'en pensais même le plus grand bien. Mais j'ai appris à les considérer à une autre lumière, et à accorder une confiance bien supérieure à des conversions qui se produisent lorsque l'intelligence est bien plus calme. J'aimerais être bien compris. Il n'est pas raisonnable de prétendre que de grandes émotions soient entièrement à proscrire dans les réveils. Mais je veux être clairement compris sur le point suivant: il ne faut en aucun cas s'efforcer de produire la moindre excitation, au-delà de celle produite par une lucide et puissante ex-position de la vérité. Toute autre mesure employée pour éveiller l'intérêt, tout ce que nous pourrons faire pour entretenir cet intérêt lorsqu'il est éveillé, ne doit jamais troubler l'action de l'intelligence, ni distraire son attention de la vérité, à laquelle le coeur doit se soumettre.

Je souligne à nouveau que tous les débordements émotionnels qui sont pris pour des réveils spirituels ne produisent, en fin de compte, qu'une piété très superficielle, pour la simple raison que l'excitation est trop grande. On fait trop appel aux émotions. On s'adresse trop exclusivement à l'espoir et à la crainte. La prédication veut stimuler les émotions et les sentiments, plutôt que l'intelligence. Il en résulte une tornade d'excitation, qui exclut toute action intelligente du coeur. La volonté est annihilée par le flot impétueux des émotions. L'intelligence est momentanément rendue inopérante et confuse. Elle ne sert plus d'instrument capable de discerner clairement la vérité. Il ne peut certainement en résulter le moindre bien.

Je ne crois pas me tromper en disant qu'une telle erreur a souvent été commise quand on a voulu produire un réveil parmi des enfants. Ils ont toujours nettement tendance à se laisser emporter par les émotions, et l'on ne peut avoir la moindre confiance en des réveils où l'on a déployé beaucoup d'efforts à exciter les enfants, et non à les instruire. Ils peuvent se trouver engagés dans de véritables tempêtes émotionnelles, à la suite desquelles la plupart d'entre eux affirmeront et sembleront être convertis, alors qu'ils ont seulement été remués dans leurs émotions. Ils n'ont absolument pas compris ni assimilé correctement la vérité. La conséquence de tels efforts et d'une telle excitation chez des enfants est de les rendre incrédules. Il en est en vérité de même chez tous ceux qui sont passés par une semblable excitation émotionnelle, et qui n'ont pas reçu d'enseignement suffisamment solide pour leur permettre de tourner leur coeur vers Dieu.



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