Malgré les nombreux écrits qui
traitent d'eux, les Vaudois n'ont pas encore leur
histoire. La difficulté de composition d'un
tel livre tient à la dissémination
excessive des Vaudois, à la grande
variété des sectes issues d'eux, et
surtout, à la rareté des ouvrages
sortis de leurs plumes. On possède en effet
une lettre des Vaudois de Lombardie à ceux
d'Allemagne, touchant les difficultés qui
les séparent de leurs frères de
France. Cet écrit est de 1218
(1).
Il nous
reste des copies ou moins interpolées des
versions de l'Écriture de petits
traités mystiques ou religieux, contenus
dans des manuscrits du XVe siècle, mais qui
peuvent être de composition antérieure
(2), quelques
traductions ou compilations de sentences des
Pères de l'Église : c'est
à peu près tout ce que nous avons
conservé de l'ancienne littérature
vaudoise. Il est juste d'y ajouter quelques
morceaux de lettres échangées, entre
les Vaudois de Lombardie et ceux d'Allemagne,
à l'occasion de certains apostats de Styrie.
Ces lettres sont de 1638
(3). Quand,
après cette époque, les écrits
vaudois se multiplient, ils ont subi l'influence
hussite d'abord, l'influence protestante ensuite
(4) ;
ils ne
peuvent donc, au point de vue historique, rendre
que des services restreints.
On est obligé, pour parler des
Vaudois, d'avoir recours aux livres des
catholiques, leurs adversaires. Mais ces ouvrages,
soit chroniques
(5),
soit oeuvres
apologétiques, se ressentent naturellement
de la position prise par les Vaudois relativement
à l'Église ; on ne peut compter
sur leur impartialité absolue, même en
supposant qu'ils connussent parfaitement les
doctrines et l'organisation des
hérétiques, qu'ils voulaient
combattre.
Les directoires inquisitoriaux peuvent
fournir des renseignements fort précieux, si
on tient compte toutefois que leur confirmation par
la bouche des hérétiques a pu
être obtenue grâce à la torture,
moyen infaillible de faire dire au prévenu
tout ce que désirait le juge, conforme ou
non à la vérité.
En tout cas, ces documents de source
catholique nous donnent peu de détails sur
la vie intime des communautés vaudoises, sur
les noms des chefs, leurs personnes, leurs
relations avec les frères, leurs travaux
apostoliques, encore moins, sur leur psychologie ou
leurs pensées. Il nous faudrait cependant en
savoir quelque chose pour écrire l'histoire
adéquate et suivie d'une
société religieuse. Aussi les travaux
publiés jusqu'ici, malgré la valeur de certains
d'entre
eux, ont-ils été des essais ou des
monographies plutôt que des histoires. Les
pages qui suivent, simple chapitre de l'Histoire de
l'Inquisition en France, n'ont pas le but de
compléter les livres déjà
parus, mais bien de condenser en quelques pages,
d'abord, les résultats à peu
près acquis sur les origines et les
doctrines vaudoises ; puis, le tableau des
persécutions dirigées contre les
Vaudois français.
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