Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

PREFACE

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Bien que le nom du Révérend C.-H. Spurgeon ait déjà acquis en France une certaine célébrité, cependant, comme quelques-uns de nos lecteurs pourraient ne pas le connaître, nous croyons devoir dire ici quelques mots touchant l'éminent prédicateur, dont la parole saisissante et originale cause depuis quelques années en Angleterre une si profonde sensation.

Encore dans la fleur de l'âge, M. Spurgeon a acquis un degré de popularité auquel bien peu d'orateurs chrétiens sont jamais parvenus. Souvent il annonce l'Évangile devant des auditoires de cinq, dix et quinze mille personnes. Toutes les classes de la société se pressent pour l'entendre, et quoique sans doute son talent oratoire soit très diversement apprécié, il n'y a qu'une voix pour reconnaître la puissance d'entraînement qu'exerce sur les masses l'éloquence incisive et énergique du jeune prédicateur. Un grand nombre de ses discours ont été publiés; ils sont recherchés avec empressement: aux États-Unis, il s'en est répandu, assure-t-on, cent quarante mille exemplaires.


La doctrine de M. Spurgeon, comme on le verra dans les pages suivantes, est nette, précise, fortement accentuée. Quel frappant contraste ne présente-telle pas avec les spéculations vagues, nuageuses, insaisissables, de la moderne théologie! L'inspiration des Ecritures, la corruption radicale de l'homme, la divinité de Jésus-Christ , l'expiation par son sang, la nécessité de la régénération, en un mot, toutes les grandes vérités qui ont fait dans le passé et qui feront jusqu'à la fin des âges la force de l'Église de Dieu, — toutes ces vérités, disons-nous, M. Spurgeon y adhère de la manière la plus complète, la plus absolue, la plus rigoureuse. C'est justement par cette raison, nous ne le cachons pas, que nous avons éprouvé le désir de faire passer dans notre langue quelques-uns des discours du prédicateur anglais. Le favorable accueil que le public religieux de France a accordé aux excellents Traités de Ryle, en nous prouvant une fois de plus qu'il sait apprécier la netteté dans la doctrine, nous fait espérer que la voix si profondément évangélique de Spurgeon saura également exciter ses sympathies. Si notre espoir n'est pas déçu, le sermon dont nous publions aujourd'hui l'imparfaite traduction sera bientôt suivi, Dieu voulant, par d'autres sermons du même auteur.

Nous plaçons notre humble travail sous la puissante protection de notre Dieu. lui demandant de ne pas regarder à la faiblesse de l'ouvrier, mais de bénir abondamment l'œuvre elle-même, pour la gloire de son grand Nom, pour le triomphe de la vérité et pour le salut des âmes!

LE TRADUCTEUR.

Toulouse, septembre 1858.


LE CIEL ET L'ENFER

I

Je vous dis que plusieurs viendront d'Orient et d'Occident et seront assis à table, au royaume des cieux, avec Abraham , Isaac en Jacob; et les enfants du royaume seront jetés dans les ténèbres de dehors: il y aura là des pleurs et des grincements de dents.

(Matth., VIII, 11 , 12.)


Ce soir, mes chers auditeurs, j'espère vous encourager à chercher le chemin du ciel. Ce soir aussi j'aurai à exprimer devant vous de très rudes vérités concernant le sort de ceux qui seront jetés dans l'abîme de la perdition.

Ces deux sujets, je vais tâcher de les traiter avec l'assistance de Dieu. Mais auparavant, laissez-moi vous supplier, pour l'amour de vos âmes, de peser avec soin ce que vous allez entendre. Voyez si mes paroles sont, oui ou non, selon la vérité de Dieu: si elles ne le sont pas, rejetez-les entièrement; mais si elles le sont, prenez garde de quelle manière vous les écoutez, — car aussi vrai que vous comparaîtrez un jour devant Dieu, le grand Juge du ciel et de la terre, aussi vrai vous ne sauriez mépriser impunément la voix de son serviteur, la voix de son Évangile!

Les versets que je vous ai lus renferment deux idées. La première est d'une douceur infinie, et je me plais à y arrêter mon esprit; la seconde est terrible au plus haut degré; mais l'une et l'autre étant également vraies, l'une et l'autre doivent être prêchées. La première idée de mon texte est contenue dans ces mots:

Je vous dis que plusieurs viendront d'0rient et d'0ccident et seront assis à table, au royaume des cieux, avec Abraham , Isaac et Jacob.
L'autre, sombre, menaçante, effroyable, est ainsi formulée: Les enfants du royaume seront jetés dans les ténèbres de dehors: il y aura là, des pleurs et des grincements de dents.


Reprenons la première de ces idées. — Voici une glorieuse promesse: Plusieurs viendront d'0rient et d'Occident et seront assis à table, au royaume des cieux, avec Abraham, Isaac et Jacob. J'aime ces paroles, parce qu'elles me disent ce qu'est le ciel, parce qu'elles m'en laissent entrevoir les charmes. Elles m'apprennent, tout d'abord, que c'est un lieu où je serai assis, c'est-à-dire où je me reposerai. Quelle douce pensée! Qu'elle est douce surtout pour le travailleur, pour celui qui mange son pain à la sueur de son visage! Souvent, en essuyant son front humide, il se demande avec tristesse s'il n'aura jamais ni trêve ni relâche. Ou bien , le soir, en se jetant brisé sur sa couche, son cœur laisse échapper ce cri d'angoisse : « N'y a-t-il donc point un lieu où je pourrai me reposer, où mes membres fatigués ne seront plus contraints d'agir , où je trouverai enfin la paix après laquelle je soupire? »

Oui, enfant du travail et de la peine, oui, il est un heureux séjour où peine et travail sont inconnus. Au-delà de la voûte azurée, il est une cité belle et radieuse: ses murs sont de jaspe, sa lumière est plus éclatante que le soleil. Là, les méchants ne tourmentent plus personne, et ceux qui ont perdu leur force se reposent. Là habitent des esprits immortels qui sont pour jamais à l'abri de la fatigue. Ils ne sèment ni ne moissonnent; ils n'ont plus ni rude labeur, ni tâche excessive à accomplir. Que l'homme de loisir se plaise à envisager le ciel comme un lieu où son activité trouvera un constant aliment, je le conçois, et je suis persuadé qu'il ne sera pas déçu dans son attente. Mais pour le travailleur, — et par ce mot j'entends tout homme qui travaille, soit de son intelligence, soit de ses mains, — quelle délicieuse, quelle consolante perspective que celle d'un éternel repos! O bonheur! bientôt cette voix, si souvent épuisée par de longs efforts, pourra se taire; bientôt ces poumons fatigués ne s'exerceront plus au-delà de leur pouvoir; bientôt ce cerveau excité ne sera plus harcelé par des pensées sans nombre; bientôt, paisiblement assis au banquet de Dieu, je me reposerai de mes travaux...

Oh! fils et filles d'Adam qui fléchissez sous le poids de la vie, prenez courage! Au ciel, vous n'aurez plus à tracer de pénibles sillons dans un sol infertile; vous n'aurez plus à vous lever matin, à vous coucher tard et à manger le pain de douleur; vous n'aurez plus ni fardeau, ni souci, ni agitation; tous vous serez paisibles, riches, heureux. Les mots de labeur, de fatigue, de souffrance n'existent même pas dans la langue du ciel.

Et remarquez dans quelle illustre société les élus se trouveront. Ils seront assis, nous est-il dit, avec Abraham, Isaac et Jacob. Ces paroles me semblent réfuter de la manière la plus positive l'opinion de certains chrétiens qui pensent que dans l'autre vie on n'aura pas la faculté de se connaître. En effet, puisqu'il nous est déclaré ici en toutes lettres que nous serons assis avec Abraham , Isaac et Jacob, ne devons-nous pas nécessairement en conclure que nous connaîtrons ces patriarches et par conséquent aussi les autres habitants du ciel?

On raconte qu'une digne chrétienne, avancée en âge, demanda à son mari, au moment de mourir: «Mon ami, penses-tu que tu me reconnaisses quand tu viendras dans la gloire? — Si je te reconnaîtrai? répondit celui-ci; ne t'ai-je pas toujours connue ici-bas? et crois-tu donc qu'au ciel je serai moins clairvoyant?»

Ce raisonnement me paraît sans réplique. De même que nous avons connu ici-bas, de même nous connaîtrons là-haut. Pour ma part, j'ai la douce assurance que lorsque, par la grâce de Dieu, je poserai mon pied sur le seuil du ciel, les bienheureux amis qui m'y ont précédé viendront me prendre par la main et me diront: « Salut, bien-aimé! te voici enfin.» Les proches retrouveront leurs proches; les amis leurs amis. Tu retrouveras ta pieuse mère, toi, mon cher auditeur, qui pleures encore sur elle, si toutefois tu marches sur les traces de Jésus: il me semble la voir venant à ta rencontre à la porte du paradis, et quoique sans doute les liens de la nature auront perdu beaucoup de leur force, je ne puis me défendre de la pensée que son visage brillera d'une joie nouvelle lorsque, s'avançant vers le Seigneur, elle lui dira: Me voici, moi et les enfants que tu m'as donnés.

Mari, tu reconnaîtras ta femme. Mère, tu reconnaîtras ces chers petits êtres dont tu suivis avec angoisse la longue agonie et sur lesquels tu entendis tomber, avec les froides mottes de terre, ces terribles paroles: L'argile à l'argile, la cendre à la cendre, la poudre à la poudre. Oui, tu les retrouveras; tu entendras encore leurs voix chéries; tu sauras que ceux que tu as tant aimés, Dieu les a aimés mieux encore que toi.

Qu'il me semblerait triste et glaçant le monde à venir, si je ne devais ni connaître ni être connu! En vérité, il n'aurait pour moi que bien peu d'attraits! Mais quelle douceur, au contraire, dans la pensée que le ciel est la réalisation parfaite de la communion des saints, et qu'entre les croyants de tous les temps et de tous les pays, il s'établira pour l'éternité des relations étroites et personnelles! Souvent, je me plais à anticiper sur le bonheur que j'éprouverai à connaître Ésaïe; il me semble qu'à peine arrivé à la cité céleste, je demanderai à le voir, parce qu'il a parlé de Jésus plus qu'aucun autre prophète. Il me semble aussi que je m'empresserai de chercher au milieu de la foule George Whitefield, ce grand serviteur de Dieu, qui avec un zèle digne d'un esprit angélique, dépensa toute sa vie en prêchant le salut. Oh! oui, nous aurons une société choisie dans le ciel. Et cependant toute distinction humaine sera abolie: riches et pauvres, savants et ignorants, ministres et laïques, nous fraterniserons tous ensemble. J'ai ouï raconter qu'une dame, visitée sur son lit de mort par un ministre de l'Évangile, lui posa cette étrange question:

«Ne pensez-vous pas qu'il existe dans le ciel deux lieux bien distincts pour les différentes classes de la société? J'avoue que je ne pourrais endurer l'idée de vivre éternellement en compagnie de ma servante.»

À cela, le ministre répondit:
«Ne vous mettez pas en peine à ce sujet, madame; car aussi longtemps que ce diabolique orgueil existera dans votre cœur, vous n'avez point à craindre d'aller au ciel.»

Il disait vrai. Non, l'orgueil n'entrera pas dans le ciel. Il faut que nous nous abaissions nous-mêmes, que nous voyions dans tout homme un frère, que nous sentions qu'aux yeux de Dieu nous sommes tous égaux, avant de pouvoir espérer d'être admis dans la gloire. Quant à moi, je bénis mon Dieu de ce qu'au banquet céleste il n'y aura qu'une seule table. Le Juif et le Gentil s’assoiront côte à côte; le grand et le petit paîtront dans le même pâturage: tous, nous serons assis avec Abraham , Isaac et Jacob.

Mais les paroles que nous méditons ont une signification plus douce et plus profonde encore. À en croire certains esprits étroits, le ciel serait un lieu de dimensions fort restreintes, auquel ne trouveraient accès que les seuls chrétiens qui fréquentent leur lieu de culte.

J'avoue qu'un ciel aussi mesquin m'est antipathique, et j'aime au contraire à lire dans les Écritures qu'il y a plusieurs demeures dans la maison de mon Père. De ce qu'il est écrit dans l'Évangile: La porte est étroite et le chemin est étroit qui mène à la vie, et il y en a peu qui le trouvent, on en a souvent conclu que le ciel sera moins peuplé que l'enfer. Cette opinion me semble inadmissible.
Comment! la part de Christ serait moins grande que celle du diable? Satan l'emporterait sur Christ?
Non, cela ne peut pas être!

D'ailleurs, Dieu nous déclare expressément qu'une grande multitude, QUE PERSONNE NE POURRA COMPTER, sera sauvée. Combien cette pensée est réjouissante, mes chers amis! Quelle bonne nouvelle pour vous et pour moi! Si le salut n'était le privilège que de quelques-uns, nous pourrions craindre, et non sans raison, de ne pas y avoir part; mais puisque le Seigneur affirme qu'une multitude innombrable sera sauvée, pourquoi vous et moi, pourquoi tous, tant que nous sommes ici, ne le serions-nous pas?

Courage donc, pauvre pécheur, qui que tu sois; courage, âme craintive et timorée, ouvre ton cœur à l'espérance! Il n'y a pas sur la terre d'âme vivante dont on puisse dire qu'elle soit en dehors de la grâce de Dieu. Il est, il est vrai, quelques infortunés qui, ayant commis le péché irrémissible, sont abandonnés de Dieu; mais à part cette exception, je me plais à le proclamer, la souveraine miséricorde embrasse l'humanité tout entière.

Plusieurs viendront et seront assis à table, au royaume des cieux, avec Abraham, Isaac et Jacob.
Et d'où viendront-ils, ces heureux convives qui prendront place à la table du Père de famille?

Mon texte nous l'apprend: Ils viendront d'Orient et d'Occident. Les Juifs prétendaient que tous viendraient de la Palestine, en d'autres termes, qu'il n'y aurait au ciel personne qui ne fût Juif. Renchérissant encore sur cette étroitesse de vues, les Pharisiens soutenaient que, hors de leur secte, le salut était impossible. Mais voici Jésus-Christ qui tient un tout autre langage: il affirme que de l'Orient et de l'Occident, il viendra des âmes au royaume de Dieu. C'est ainsi qu'il en viendra, n'en doutons pas, de ces lointaines contrées de la Chine, où le Seigneur semble actuellement ouvrir une si large porte à l'Évangile. Il en viendra de notre vieille Europe comme de la jeune Amérique; des régions tropicales de l'Australie comme des froides zones du Canada, de la Sibérie, de la Russie. De toutes les extrémités de la terre, il en viendra qui seront assis au banquet de Dieu.

Mais outre ce sens naturel et que j'appellerai géographique, les paroles qui nous occupent me semblent avoir un sens figuré et spirituel. Selon moi, cette expression, l'Orient et l'Occident, désigne moins les points les plus reculés du globe, que cette classe d'âmes qui, en apparence, est, pour ainsi dire, aux antipodes du royaume de Dieu. Il y a tels pêcheurs dans le monde, du salut desquels chacun désespère.

On se dit: «A quoi bon raisonner avec eux?
Quel bien pourrait-on leur faire? Tout est inutile; ils sont trop dépravés, trop avilis, trop endurcis pour qu'ils puissent jamais être ramenés à Dieu.»

O vous qui passez ainsi condamnation sur quelques-uns de vos semblables, sans vous douter qu'aux yeux de Celui qui juge justement, vous êtes peut-être plus coupables que le plus coupable d'entre eux, écoutez ce que dit Jésus-Christ dans les paroles de mon texte: Plusieurs viendront d'Orient et d'Occident et seront assis à table dans le royaume des cieux. Oui, sachez-le: des dernières limites du royaume de Satan, des derniers degrés de l'échelle du vice, plusieurs viendront qui feront partie de la multitude des rachetés, acquise au prix du sang de l'Agneau. Il y aura dans le ciel plus d'un pécheur, qui, à une époque de sa vie, s'est plongé dans la fange des passions; il y aura des intempérants; il y aura des femmes de mauvaise vie, qui, par la puissance de la grâce divine, renoncèrent, ceux-ci à leur intempérance, celles-là à leurs débordements, et vécurent pendant le reste de leurs jours sobrement, justement et religieusement.

Vous souvient-il d'un remarquable incident du ministère du grand Whitefield? Un jour, prêchant devant un nombreux auditoire, il dit que «Jésus-Christ était prêt à sauver même les rebuts du diable, c'est-à-dire les âmes que Satan lui-même trouvait à peine assez bonnes pour lui.» Le service fini, son amie, lady Huntingdon, fit comprendre à l'éminent prédicateur que cette hardiesse de langage ne lui avait point semblé tout à fait convenable. À peine venait-elle de hasarder cette remarque, lorsqu'on vint dire à Whitefield que quelqu'un désirait lui parler. Il y va, et remonte un instant après. — Madame , dit-il à lady Huntingdon, devinez qui m'attendait en bas! C'était une pauvre femme, tombée au dernier degré de l'abjection. — Oh! M. Whitefield, m'a-t-elle dit, vous nous avez assuré que Jésus recevrait les âmes même qui sont comme les rebuts du diable, et moi je suis une de ces âmes !... »
Cette parole fut le moyen de sa conversion.

Que personne ne trouve donc mauvais si les serviteurs de Christ s'adressent aux péagers et aux gens de mauvaise vie. J'ai été accusé, je le sais, d'attirer autour de moi «la vile multitude.» À cela, je réponds: Que Dieu la bénisse, cette «vile multitude,» que Dieu la sauve par mon moyen, et je serai trop honoré!

D'ailleurs, si elle est «vile,» comme on le dit, qui a plus besoin de l'Évangile qu'elle? Qui a plus besoin que Christ lui soit annoncé? Certes, ce qui manque dans notre siècle dégénère, ce ne sont pas des prédicateurs du grand monde, ce sont des hommes qui portent la bonne nouvelle du salut à ceux que l'on appelle la lie du peuple. Pour ma part, je trouve dans cette déclaration de mon texte: plusieurs viendront d'Orient et d'Occident, un puissant encouragement a annoncer l'Évangile aux plus grands des pêcheurs.

Je crois, ainsi que je l'ai déjà dit, qu'à l'exception de ceux qui ont commis le péché contre le Saint-Esprit, il n'est pas d'homme sur la terre assez éloigné de Dieu pour que la grâce ne puisse l'atteindre. Je crois qu'il n'est pas jusqu'à l'un de ces malheureux, opprobre de l'espèce humaine flétris, dégradés, abrutis presque par le vice, qui, par un effet de la souveraine miséricorde, ne puisse briller un jour dans la gloire, comme la splendeur de l'étendue.

Trouvez-moi donc le dernier, le plus vil des pécheurs, je ne dédaignerai point de lui prêcher l'Évangile, car je sais que son âme immortelle est susceptible de salut, et de plus, je me souviens de cet ordre de mon Maître: Va, dans les chemins et le long des haies, et presse d'entrer ceux que tu trouveras, afin que ma maison soit remplie. — Plusieurs viendront d'Orient et d'Occident, et seront assis à table au royaume des cieux, avec Abraham, Isaac et Jacob.

Il y a un mot encore dans ce beau passage sur lequel je désire attirer votre attention, avant de passer outre. Observez qu'il n'est pas dit: Ils pourront venir, ou: Ils viendront peut-être, mais: Ils VIENDRONT. Oh! que j'aime ces affirmations si pleines, si positives de mon Dieu!
De la part d'un homme, affirmer, c'est presque une dérision. Il promet, et le plus souvent il ne peut tenir sa promesse; il jure, et le plus souvent il viole son serment. Mais avec Dieu, quelle différence! S'il dit: «Je ferai,» il fera; s'il affirme une chose, elle a lieu. Or, il déclare ici que plusieurs viendront dans son royaume; et quand même Satan s'écrierait avec rage: «Ils n'iront pas!» — quand même leurs propres péchés leur diraient: «Vous ne pouvez y aller!» — bien plus, quand ils diraient résolument en leur cœur: «Nous ne voulons pas y aller!» ILS DIRONT, car Dieu l'a dit. — Oui, parmi ceux-là même qui aujourd'hui se moquent du salut et insultent l'Évangile, il en est, je ne crains pas de le dire, qui, tôt ou tard, seront amenés captifs à l'obéissance de Jésus-Christ.

«Mais quoi? s'écrient peut-être quelques-uns de mes auditeurs, Dieu peut-il faire de nous des chrétiens?»
Oui, vous dis-je, et c'est précisément là qu'éclate l'admirable puissance de l'Évangile. La grâce divine ne sollicite pas le consentement de l'homme, mais elle l'obtient; elle ne lui demande pas s'il la veut, mais elle lui donne de la vouloir; elle ne s'impose pas à lui, mais elle transforme tellement sa volonté que, reconnaissant sa valeur, il se prend à soupirer après elle, et la poursuit jusqu'à ce qu'il l'ait atteinte. Et comment expliquer autrement la conversion de tant d'incrédules, qui avaient dit à une époque de leur vie: «Jamais nous n'aurons rien à faire avec la religion?» 0n raconte qu'un jour un impie déclaré entra dans un lieu de culte pour entendre les chants sacrés, et qu'aussitôt que le ministre prit la parole, il mit les doigts dans ses oreilles, déterminé à ne pas écouter. Mais au bout de quelques instants, voici qu'un petit insecte vient se poser sur son visage, ce qui l'oblige, pour le chasser, à déplacer une de ses mains. À ce même moment, le ministre prononçait ces paroles: Que celui qui a des oreilles pour ouïr entende.

Surpris, remué dans sa conscience, l'incrédule écoute, et Dieu touche son cœur à salut. En sortant, il était un nouvel homme. L'impie se retira pour prier; le railleur alla verser des larmes de contrition. Celui qui était entré dans la maison de Dieu par manière de passe-temps, retourna chez lui, pressé de rechercher la communion de son Créateur. Le sceptique devint croyant; le pécheur devint un saint. — Et la transformation qui s'est produite chez cet homme, peut se produire également chez tous. La grâce divine, je le répète, n'a pas besoin de votre consentement préalable: elle saura vous donner la volonté et l'exécution selon son bon plaisir. Du cœur le plus rebelle qui s'écrie dédaigneusement: «Je n'ai que faire de l'Évangile,» elle peut, quand elle le veut, faire surgir cette humble supplication: «Seigneur, sauve-moi, ou je péris!» Mais peut-être pensez-vous que vous pouvez vous convertir sans que votre âme subisse l'action prévenante de la grâce de Dieu. Erreur, erreur funeste, mes amis. Supposons qu'en cet instant même Jésus-Christ se présentât au milieu de nous, quel accueil pensez-vous que lui ferait le plus grand nombre? «Nous le couronnerions roi,» me répondez-vous. Hélas! je n'en crois rien;  et je suis persuadé, au contraire, que la plupart d'entre vous le crucifieraient de nouveau, s'ils en avaient l'occasion. Oui, se tînt-il là, devant vous, et vous dît-il: «Me voici, je vous aime,» pas un de vous, abandonné à sa propre volonté, ne répondrait à ses avances. Fixa-t-il sur vous un de ces puissants regards capables de dompter les lions eux-mêmes; vous parlât-il avec cette voix d'où se sont échappés des flots d'une incomparable éloquence, pas un de vous, laissé à lui-même, ne deviendrait son disciple.

Ce qu'il faut, pour fléchir les résistances de notre cœur, c'est la puissance de la grâce, c'est l'influence du Saint-Esprit. Nul ne peut venir à moi, a dit Jésus-Christ, si le Père qui m'a envoyé ne l'attire. Mais d'une fois que de pauvres pêcheurs ont éprouvé ces attraits divins, oh! alors, ils viennent, ils accourent de l'Orient et de l'Occident. Que le monde s'agite, que le monde se moque, il n'empêchera pas le Fils de Dieu de recueillir le fruit de ses souffrances et de sa mort. Si, parmi vous, il est des âmes qui le rejettent, d'autres l'accepteront; s'il en est qui seront perdues, d'autres seront sauvées. Quoi qu'on dise et quoi qu'on fasse, Jésus-Christ se verra de la postérité, il prolongera ses jours et le bon plaisir de l'Éternel prospèrera dans sa main. Quand le ciel, la terre et l'enfer se ligueraient ensemble, ils ne sauraient retenir loin de Jésus une seule des âmes que le Père lui a données!

Et maintenant, toi, mon frère, qui te reconnais le premier des pêcheurs, écoute-moi: je suis chargé d'un message pour toi de la part de Jésus. Il y a une âme dans cette assemblée qui se juge la plus indigne qui ait jamais existé. Il y a une âme qui se dit à elle-même: «Je ne suis pas digne que Christ m'appelle à lui...»

Âme! c'est toi que j'appelle! Toi, vile, souillée, misérable, aujourd'hui, en vertu de l'autorité que j'ai reçue de Dieu, je te presse d'aller à mon Sauveur! Il t'invite par ma voix, il te cherche, il veut te sauver. Hâte-toi donc. Jette-toi à ses pieds. Touche le sceptre de sa miséricorde, afin que tu vives. Va, essaie de mon Sauveur, essaie de mon Sauveur, te dis-je! Que s'il te rejette après que tu l'as cherché, publie en enfer qu'il a failli à ses promesses! Mais non, cela ne sera pas, cela ne peut pas être!

Jamais Dieu ne mettra dehors celui qui vient à lui, car ce serait déshonorer son alliance de grâce. Il ne repoussera pas un seul pécheur repentant, aussi longtemps qu'il sera écrit dans sa Parole: Plusieurs viendront d'Orient et d'Occident et seront assis à table, au royaume des cieux, avec Abraham, Isaac et Jacob.

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