Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

CHAPITRE III.

PROPHÉTIES CONCERNANT TYR.

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Tyr était la ville la plus célèbre de la Phénicie, et pendant longtemps elle fut la première ville de commerce de l'univers. C'était le théâtre d'un commerce et d'une navigation immense, dit Volney, le berceau des arts et des sciences, et la patrie du peuple le plus industrieux peut-être et le plus actif qui ait jamais existé (1). Le royaume de Carthage, cette rivale de Rome, était une des colonies de Tyr. Ce fut lorsque ce centre du commerce du monde avait atteint son plus haut degré de puissance et d'opulence, et au moins 125 ans avant la destruction de l'ancienne Tyr, que le prophète Isaïe annonça sa chute irrévocable.
La nouvelle Tyr, bâtie sur une île, succéda à la ville continentale ; elle fut habitée par le même peuple, conserva le même nom, et son sort fut également compris dans les mêmes prédictions. Le prophète assigne comme causes de la malédiction prononcée contre elle son orgueil et sa méchanceté, la joie qu'elle éprouva des malheurs des Juifs, et sa cruauté en les vendant comme esclaves. Toute la destinée de Tyr fut prédite.

L'évêque Newton nous montre comment les prophéties suivantes ont été aussi exactement accomplies qu'elles ont été clairement énoncées, c'est-à-dire que Tyr devait être prise et détruite par les Chaldéens, qui, à l'époque de la prophétie, n'étaient qu'un peuple obscur et peu important, et que cette destruction devait se faire par le moyen de Nabuchodonozor, roi de Babylone ; que les habitants de Tyr s'enfuiraient sur l'île voisine et se répandraient dans les contrées environnantes, mais qu'ils n'y trouveraient aucun lieu de repos ; qu'après un intervalle de 70 ans la ville serait reconstruite, et que le peuple retournerait à son commerce et à ses richesses ; qu'après un certain temps le peuple renoncerait a l'idolâtrie et se convertirait au culte du vrai Dieu, et qu'enfin la ville serait entièrement détruite et qu'elle ne serait plus qu'un lieu pour étendre les filets.

Mais au lieu de les passer toutes en revue, nous nous contenterons d'en présenter au lecteur quelques-unes des plus remarquables, qui furent accomplies après l'époque des derniers prophètes de l'Ancien Testament, et dont l'accomplissement repose sur des témoignages non équivoques.

Le siège de Tyr, par Alexandre-le-Grand, est un des plus singuliers événements de l'histoire. Irrité de ce qu'une ville solitaire comme Tyr pût aussi longtemps arrêter la marche de son armée victorieuse, exaspéré par le meurtre de quelques-uns de ses soldats, et jaloux de sa renommée, rien ne put faire consentir le jeune vainqueur à en lever le siège.
La prise de Tyr fut encore plus étonnante que le plan d'attaque ne fut audacieux, car la ville était entourée d'une muraille haute de 150 pieds, et sa position sur une île éloignée d'un demi-mille du rivage semblait la rendre inaccessible.
On forma, pour ainsi dire, une chaussée qui s'étendait du rivage à l'île, et les ruines de l'ancienne Tyr (2), détruite depuis 250 ans, en fournirent les matériaux. Une entreprise aussi gigantesque sembla pendant quelque temps au-dessus des efforts mêmes d'un Alexandre. Les ouvrages commencés furent brûlés par l'ennemi, et ensuite détruits par un orage ; mais leurs restes ensevelis sous l'eau formèrent une barrière sur laquelle il recommença ses travaux. Il fallut encore rassembler une immense quantité de matériaux ; on ramassa la terre et jusqu'aux décombres ; et ce même conquérant, qui ne parvint jamais à rebâtir les murailles de Babylone, jeta celles de Tyr dans la mer et en enleva même la poudre de dessus la place qu'elles occupaient (3). Il ne laissa pas vestige d'une seule ruine, et l'emplacement de l'ancienne Tyr est inconnu (4).

Qui est celui qui a enseigné au prophète à dire : « Elles détruiront les murailles de Tyr, et démoliront tes tours, et jetteront ton bois, tes pierres et ta poussière au milieu des eaux. »
« Je raclerai sa poussière hors d'elle, je ferai qu'on sera tout éperdu à cause de toi, de ce que tu ne seras plus ; et. quand on te cherchera, on ne te trouvera plus à jamais, dit l'Éternel (5). »

Après la prise de Tyr, le conquérant fit incendier la ville. Quinze mille Tyriens s'échappèrent dans des vaisseaux ; mais une grande partie des habitants furent massacrés, et 230,000 vendus comme esclaves.
De tous ces faits, les plus saillants de l'histoire de Tyr, il n'y en a pas un seul qui ne soit l'accomplissement d'une prophétie.
« Voici, le Seigneur l'appauvrira, et en la frappant il jettera sa puissance dans la mer, et elle sera consumée par le feu (6). »
« Je ferai sortir du milieu de toi un feu qui te consumera, et je te réduirai en cendre sur la terre (7). »
« Passe en Tarsis, lève-toi, traverse en Kittim (8). »
« Les îles qui sont dans la mer seront éperdues à cause de ton issue (9). »
« Tu mourras au milieu de la mer, de la mort de ceux qui sont tués (10). »
« Vous avez vendu les enfants de Juda et les enfants de Jérusalem ; voici, je ferai retourner sur votre tête votre salaire (11). »

Mais que dit encore le prophète de la première ville de commerce de l'univers, dont les marchands étaient des princes, et les facteurs des grands de la terre ? « Je te rendrai semblable à une pierre sèche, un lieu pour étendre les filets (12»
Il est encore répété ailleurs avec la même force et la même vérité : « Je la rendrai semblable à une pierre sèche. Elle servira à étendre les filets au milieu de la mer, car j'ai parlé (13). »

Cependant, quoique privée de ses anciens habitants, Tyr ne tarda pas à redevenir une ville commerçante. Elle était populeuse et florissante au commencement de l'ère chrétienne. On y trouvait du temps des apôtres plusieurs disciples du Christ ; on y construisit plus tard un temple élégant et plusieurs églises ; elle fut le siège épiscopal du premier archevêque soumis au patriarche de Jérusalem.
Tyr fut prise par les Sarrazins au septième siècle, et au douzième par les croisés, époque à laquelle elle était une ville de commerce riche et importante. Les Mameloucks s'en rendirent maîtres plus tard, et depuis 300 ans elle est demeurée au pouvoir des Turcs.
La cruauté et les spoliations continuelles des Turcs ne lui ont pas permis d'échapper au sort qu'elle a du reste partagé avec une multitude d'autres villes et avec plusieurs autres pays, et sa désolation avait été prédite 2,000 ans avant l'existence du peuple qui a été l'instrument de sa destruction et de sa ruine. Il est vrai que dernièrement la ville a paru sortir un peu du milieu de ses ruines, grâce à un court intervalle de repos ; cependant les dernières punitions prononcées contre elle ont été parfaitement accomplies d'après le témoignage que nous en rendent Maundrell, Shaw, Volney et Bruce.

Il ne reste aucun vestige de son ancienne splendeur ; elle n'est plus qu'une ville de murailles brisées, de colonnes tronquées et détruites, et de caveaux. Toute sa population consiste en quelques pauvres familles qui se logent dans les souterrains, et dont la pêche est le principal moyen de subsistance ; elles ne semblent y être que pour servir de témoignage vivant à l'accomplissement de la parole de Dieu (14).

Le port de Tyr, déjà très petit, est tellement obstrué par le sable et par les décombres que les bateaux de pêcheurs, qui de temps à autre visitent ce marché jadis si renommé, et viennent sécher leurs filets sur ses rochers et sur ses ruines, n'y pénètrent qu'avec beaucoup de peine (15). Et Volney lui-même, après avoir cité la magnifique description que fait Ezéchiel de l'ancienne grandeur de Tyr, de la destruction de la ville et de son commerce, reconnaît expressément : que les révolutions du sort ou plutôt la barbarie des Grecs du Bas-Empire et des Mahométans ont accompli ces oracles.
Au lieu de cette ancienne circulation si active et si vaste, Sour (Tyr), réduit à l'état d'un misérable village, n'a plus pour tout commerce qu'une exportation de quelques sacs de coton et laine, et pour tout négociant qu'un facteur grec au service des Français de Saïde, et qui gagne à peine de quoi soutenir sa famille. Ensuite, sans remarquer dans ses détails l'accomplissement de la prophétie, il ajoute cependant des faits plus précieux qu'aucune opinion, et qui sont le témoignage le plus puissant de l'accomplissement des prédictions. - Toute la population du village de Tyr consiste en 50 à 60 pauvres familles qui vivent obscurément de quelques cultures de grains et d'un peu de pêche. Les maisons qu'elles occupent ne sont plus, comme au temps de Strabon, des édifices à trois ou quatre étages, mais de chétives huttes sur le point de s'écrouler (16). Bruce parle de Tyr comme d'un « rocher sur lequel des pêcheurs sèchent leurs filets. »
Peu nous importe par quels moyens ces prophéties ont été accomplies ; il était aussi impossible à l'homme de prévoir ces moyens que de prévoir l'événement lui-même. Le fait est positif, les prédictions ont été accomplies ; donc les prophètes ont annoncé la vérité.
On peut les mépriser, mais on ne peut rien changer à leurs paroles ; il n'y a jamais eu de faits plus frappants et moins probables, et jamais il n'y a eu de prédictions plus précises et plus claires.


(1) Voyages de Volney. - Steph. Dicl. p. 2039. - Strabon.

(2) « Magna vis saxorum ad manum erat, Tyro vetere praebente. » Quint. Curt., 1. IV, cap. IV. - Prideaux, Rollin, etc.

(3) Humus aggerebatur. Quint. Curt., cap. XI. Arrian. de Exp. Al., I. H, cap. XXI-XXIV. Quint. Curt., I. IV, cap. VII-XIX.

(4) Volney, vol. II. - Description de l'Orient, par Pococke, 1. I, ch. XX. - Buckingham, p. 46.

(5) Ezéchiel, XXVI, 4, 12, 21.

(6) Zacharie, IX, 4.

(7) Ezéchiel, XXVIII, 12.

(8) Esaïe, XXIII, 6, 12.

(9) Ezéchiel, XXVI, 18.

(10) Ezéchiel, XXVIII, 8.

(11) Joël, III, 6, 7.

(12) Ezéchiel, XXVI, 14, 15.

(13) Ibid., 4, 5.

(14) Voyages de Maundrell, p. 82.

(15) Voyages de Shaw, vol. II, p. 31.

(16) Volney, Voyage en Syrie, vol. II, ch. XXIX.
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