Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

CHAPITRE XIII.

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 Nous avons vu que le chapitre XII revient sur le passé, puis anticipe sur l'avenir, et rattache au Messie et même à sa naissance, le dessein de Dieu qui va être manifesté au dernier jour. C'est ainsi, qu'à mon avis, tandis qu'il est évidemment question du Seigneur Jésus-Christ dans l'enfant mâle, ce n'est pourtant pas de sa naissance, considérée simplement comme fait historique, mais de sa naissance en tant que liée avec le plan futur de Dieu que ce chapitre traite.
Du moment où il est fait ainsi allusion à Christ (c'est-à-dire à Christ envisagé comme la tête, non de l'Église, mais d'Israël, «paissant les nations avec un sceptre de fer,» et prenant  en main le gouvernement du monde, Satan intervient en personne pour faire une opposition ouverte.
Il serait inutile de chercher à appliquer la chose à un autre, c'est bien là ce à quoi nous aurions pu nous attendre, car Dieu lui-même a déclaré dans le jardin d'Eden qu'il mettrait inimitié entre le serpent et la femme, et entre sa semence et la semence de la femme. C'est là ce qui avait été révélé au commencement, et c'est ce que nous voyons s'accomplir à la fin.

Sans qu'il soit fait mention de son humiliation, le fils mâle est enlevé vers Dieu et vers son trône. Il est donc clair que ce n'est pas précisément l'historique de la vie du Seigneur que nous avons ici, mais que des faits pareils sont ainsi rappelés, -savoir: les deux faits si importants de sa naissance et de son enlèvement vers Dieu et vers son trône -dans le but de présenter des liens qui rattachent à ce que Dieu veut accomplir prochainement avec Israël. Tout ce que Dieu a opéré pour l'Église entre ces deux événements se trouve complètement omis, si ce n'est en tant que l'Église est envisagée comme comprise dans les destinées du fils mâle, lequel est maintenant caché auprès de Dieu quoique devant encore régner. Absolument comme ce qui est dit de Christ dans l'Ancien-Testament est appliqué à l'Église ou au chrétien dans le Nouveau. Mais quelque vrai et béni que cela soit, nous ne pouvons réellement en faire qu'un usage indirect.
C'est donc le Messie que avons ici rapport avec le plan futur de Dieu à l'égard d'Israël.

Venait ensuite la vision d'une bataille livrée dans le ciel, Ce n'est pas le Seigneur Jésus-Christ, mais bien une puissance angélique, que nous voyons employée de Dieu pour combattre contre les anges rebelles, Satan et son armée, et le vaincre. A partir de ce moment, Satan perd son pouvoir en haut, c'est-à-dire la portion la plus importante de son pouvoir, la plus sérieuse en elle-même, la plus déshonorante pour Dieu, et la plus redoutable pour le peuple de Dieu -sa puissance dans les lieux célestes à laquelle il est fait allusion en Eph.VI, et dans d'autres passages.
En conséquence, lorsque Satan perd sa place, il y a de la joie dans le ciel; une voix s'y fait entendre, disant: «Maintenant est venu le salut, la puissance, le royaume de Dieu et le pouvoir de son Christ.»
Cependant pour ce qui est de la terre, le royaume n'y est pas immédiatement établi; Satan a perdu sa place dans les cieux. le Seigneur, dans l'Évangile, fait allusion à cette chute de Satan. J'attire l'attention du lecteur sur ce passage parce que plusieurs en ont conclu que depuis longtemps Satan avait été chassé des cieux. ce passage se trouve en Luc X, lorsque les disciples reviennent au Seigneur pleins de joie parce que les démons qui étaient assujettis.  Le Seigneur leur répond qu'il contemplait «Satan tombant du ciel comme un éclair.» Quelqu'un pourrait opposer ces paroles de l'Évangile à celle qui décrivent comme encore future la chute de Satan dans l'Apocalypse. Mais ce serait là, évidement une fausse interprétation des Écritures.

Il nous faut toujours demeurer convaincu que la Bible s'accorde avec elle-même: Il y à ignorance ou incrédulité lorsqu'on présente un passage de la Parole de Dieu comme étant en contradiction avec un autre. Il doit être évident, je crois, pour un esprit impartial que la chute de Satan dans la prophétie est un événement futur qui précède de trois ans et demi  (de quelque manière qu'il faille les comprendre) la destruction de la bête et l'enchaînement de Satan.
C'est donc une chute qui, au moment, du temps de St-Jean, était encore future. Il fallait que la conséquence immédiate fut une affreuse persécution contre la femme et sa semence. Nous avons de plus présenté diverses considérations qui, à notre avis, démontrent clairement que les morts dont nous venons de parler sont précédés de l'enlèvement de l'Église. Nos lecteurs doivent se rappeler que c'est la conclusion que j'ai tirée uniformément de tous les premiers chapitres, IV-XI;  de sorte que la chute de Satan dont il est question se trouve être un élément postérieur à celui de l'enlèvement au ciel des saints glorifiés.

Qu'est-ce donc que le Seigneur Jésus-Christ peut avoir en vue lorsqu'il dit: «Je contemplais Satan tombant du ciel comme un éclair?» En voyant et en entendant ce que les disciples ont opéré en son nom dans leur service, la vision de la catastrophe de Satan se présent à ses yeux, et  toutes les conséquences de sa victoire sur l'ennemi sont anticipées dans les premiers gages qui viennent d'en être donnés.
Le Seigneur Jésus envisage la crise finale et la chute de l'adversaire, lorsque les disciples lui rapportent les merveilleux échantillons (si je puis m'exprimer ainsi) qu'ils ont reçus «des puissances du siècle à venir.»
C'était le premier grand coup porté par des hommes à la puissance de Satan, c'est pourquoi, dès le commencement de la chose, Jésus en entrevoit la fin, et ainsi dans une sorte de vision contemplative, il voit l'ennemi précipité du faîte le plus élevé de son usurpation.

Ce n'est pas là une chose rare dans les Écritures. Dans un autre évangile, lorsque les Grecs montent à la fête désirant voir Jésus, que dit-Il? «L'heure est venue pour que le Fils de l'homme soit glorifié.»
Il allait rencontrer la croix et la mort, et cependant il déclare que l'heure était venue pour qu'il fût glorifié. Comment cela? Si vous prenez ce passage dans un sens purement littéral, vous en perdez, ce me semble, toute la force. Jésus voit dans les Grecs qui se trouvaient devant lui le rassemblement des Gentils; et il savait parfaitement bien que ce n'étaient que sa croix et sa gloire dans les cieux qui les attireraient. De sorte qu'il embrasse d'un seul regard toute la scène qui est placée devant lui, car il devait encore accomplir la rédemption et monter en haut. Mais à cause de ce faible gage qu'il vient de recevoir, il rattache tout à sa glorification et en parle comme d'une chose actuelle.
Ailleurs lorsque Judas fut sorti et que le Seigneur Jésus-Christ répéta des paroles à peu près semblables c'est, je présume, d'après le même principe (Jean VIII. 31).
En Apoc. V. 13, nous avons vu quelque chose d'analogue. Un mouvement sensible se produit dans la vision qui affecte l'univers entier, lorsque l'Agneau prend le livre scellé des sept sceaux. Ce ne sont pas seulement les créatures vivantes qui se prosternent, les anciens qui entonnent un nouveau cantique et les myriades d'anges qui font entendre une puissante voix de louanges; mais un choeur est formé par la création tout entière. «Et j'entendis toute créature qui est dans le ciel, et sur la terre, et sous la terre, et les choses qui sont sur la mer et toutes les choses qui sont en eux, disant: A celui qui est assis sur le trône et à l'Agneau, louange, honneur, gloire et force aux siècles des siècles!»
C'est comme si l'on eût fait sonner une note qui ne devait cesser de vibrer que lorsque les bouts les plus reculés de la création auront été remplis de la gloire de Dieu et de l'Agneau.

Mais c'est le temps de la pleine bénédiction qui est ici anticipé; ces accents répétés d'adoration et de joie sont produits par le fait que l'Agneau vient de recevoir le livre de l'héritage. Après cela a lieu l'ouverture des sceaux, ce qui n'est que le prélude des jugements derniers, jugements qui doivent toujours redoubler d'intensité jusqu'à ce que Christ Lui-même vienne exécuter la colère (Apoc. XIX); et c'est après tout cela seulement qu'apparaît la gloire et que peuvent être réalisées ces anticipations (chap. XXI et XXII). Pourtant dès le premier anneau de cette chaîne d'événements, la fin en est saluée. C'est là la pensée de Christ, de même que dans le X me de Luc. Le Seigneur ne fait pas allusion à la chute de Satan comme à un fait déjà accompli, mais à travers ce qui se présente réellement à lui, il envisage sa future et plus complète humiliation qui nous est dépeinte ici. Cette chute de Satan elle-même n'est nullement la dernière preuve de la puissance de Dieu contre l'ennemi. Jusque-là pour ainsi dire, aucune atteinte n'a été portée à Satan, sauf pour la foi. Il est vrai que dans la croix de Christ il a été jugé en principe (Jean XII, 31), mais de fait il n'a pas encoreété renversé de son trôné sur le monde.

Sans nul doute, l'oeuvre de Dieu, en vertu de laquelle il doit être chassé du ciel, a été achevée à la croix, de sorte que pour que la chose s'effectue, ce n'est plus qu'une question de temps et de la volonté de Dieu. D'abord, Satan perd la portion céleste de la puissance qu'il a usurpée. Ensuite, il descend sur la terre en grande fureur, sachant qu'il a peu de temps. Cela nous amène au chap. XIII où nous avons le détail des actions de Satan ici-bas, savoir sur la mer et sur la terre, la mer, comme nous l'avons déjà dit, étant le symbole de ce qui est sans gouvernement établi, et la terre représentant cette partie du monde qui jouit d'un ordre reconnu. Les deux choses réunies composent le monde comme un tout, ou une sphère donnée du monde, quelle que soit sa condition.

Le prophète (1) est-il dit, se tenait sur le sable de la mer. Plus loin, au chap. XVII, il est transporté par l'Esprit dans le désert, et plus tard encore, (chap. XXI) sur une grandeet haute montagne. Ici, comme partout ailleurs, la situation est en rapport avec le sujet présenté. «Je me tins sur le sablé de la mer.»
La raison est évidente; Jean va voir une grande bête monter de la mer et, par conséquent il prend dans la vision une place qui convient.  «Et je vis monter de la mer une bête». Il faut vous rappeler que ces visions sont comme un grand panorama qui passe sous les yeux du prophète. La signification des symboles employés est ce que nous avons à découvrir par l'enseignement du Saint-Esprit.

La mer nous présente une foule de peuples dans un état de confusion, des peuples dans une agitation semblable à celle des vagues de l'Océan. En un mot, la mer nous montre les hommes dans une condition révolutionnaire. Et c'est de cette anarchie et de cette confusion que surgit une puissance impériale. Cette puissance est appelée «la Bête».
La même chose nous apparaît en Daniel VII, mais avec cette différence, que le prophète juif voit quatre bêtes sortir successivement de la mer, et non pas une seulement, comme c'est le cas au commencement du Chap. XIII de l'Apocalypse.

La première bête était comme un lion, la seconde comme un ours, la troisième comme un léopard, et la quatrième toute différente des autres. Et avant que l'interprétation fût donnée,voici comme le Fils de l'homme venant sur les nuées des cieux, en contraste avec ces puissances qui sortent de la mer agitée. C'est un royaume dont l'origine est céleste et un royaume qui doit exercer la puissance de Dieu sur la terre dans la personne du Seigneur comme Fils de l'homme; ainsi l'autorité ne demeurera pas entre les mains de ces bêtes féroces. Le fait que ces bêtes s'élèvent de la mer sur laquelle, viennent de se lever les quatre vents des cieux, symbolise probablement le bouleversement des peuples qui précéda la formation des quatre grands empires.

Il est intéressant de remarquer que la fondation de ces états, qui plus tard appartinrent à la puissance impériale, eut lieu à peu près au même temps. Ils surgirent de l'obscurité et du chaos politique presque simultanément; Dieu dans sa souveraineté, donna successivement puissance à chacun: d'abord, aux Babyloniens; puis, aux Médo-Perses; ensuite, aux Grecs ou Macédoniens, et en dernier lieu aux Romains.
Jean ne voit qu'une bête monter de la mer. La mer, symbole de l'état agité des nations, existe dans la vision de l'Apôtre et il en voit aussi sortir la quatrième et dernière bête du prophète Daniel. Les trois premières bêtes avaient eu leur temps et elles avaient disparu; la quatrième ou l'empire romain avait suivi et était alors revêtue de toute la puissance, car précisément à cette époque c'était par l'autorité de cette bête romaine que Jean se trouvait relégué dans l'île de Patmos.
Il paraîtrait que ce que Jean voit ici c'est le dernier effort de la puissance de la bête, précédant sa destruction; maïs ce qui doit se passer entre sa première apparition comme empire et sa réapparition n'est pas relaté ici.

D'après la description qui nous est faite, nous ne pouvons douter qu'il soit question de l'empire romain. Il nous est parlé d'une bête «qui avait dix cornes et septs têtes, et sur ses cornes, dix diadèmes». Les mêmes choses qui nous sont rapportées de Satan (chap XII, 3) alors qu'il est envisagé comme possédant la puissance du monde: «Je te donnerai toute cette autorité et la gloire de ces royaumes car elle m'a été donnée et je la donne à qui je veux» (Luc IV, 6.) maintenant il en fait don ici à la bête romaine.
Satan était évidemment un usurpateur, mais il est de fait le prince de ce monde et comme tel, il a sept têtes et dix cornes. dans son caractère de Satan, il ne se présente pas ouvertement aux hommes: il lui faut un agent ou un représentant; il se déguise et agit par le moyen d'un autre en se choisissant un instrument parmi les hommes.
Dieu avait aussi trouvé bon d'agir d'une manière semblable pour accomplir ses précieux desseins de grâce. Satan le fait également; terrible contrefaçon en malice de la bonté de Dieu en Christ!
L'agent duquel dont il est parlé et dont le diable se sert pour accomplir son oeuvre est l'empire romain dans sa dernière phase. L'ennemi profita de la convoitise de l'homme pour la puissance, car dans ce monde, c'est la convoitise qui est l'objet de l'ambition.

Ici nous avons un grand pouvoir impérial qui dans l'origine avait été reconnu de Dieu. En tant que sortant seulement de la mer, Dieu aurait pu encore le reconnaître, mais du moment qu'il est dit s'élever de l'abîme, sa source n'est plus aucunement providentielle, mais expressément de l'ennemi.
Outre ces sept têtes et ses dix cornes, il y a sur ces dernières dix couronnes. Qu'il me soit permis d'ajouter ici, que les cornes doivent, je n'en doute pas, être citées avant les têtes, avant «dix cornes et septs têtes, et sur ses cornes dix diadèmes, et sur ses têtes dix noms de blasphème» (vers. 1.)

Ce n'est pas que nous attachions une importance exagérée à un tel ordre, mais nous croyons seulement qu'il est toujours bon de demeurer dans le vrai; leurs deux membres de phrase qui terminent ce verset sont d'accord pour mettre les cornes en premier lieu; peut-être est-ce parce que la bête est envisagée ici comme exerçant de fait la puissance tandis que Satan ne la possède que virtuellement. C'est leblasphème, et non pas simplement le paganisme, qui caractérise ses têtes.

«Et la bête que je vis était semblable à un léopard.» C'était là la principale ressemblance de son corps, et cela a trait à l'empire macédonien que sa rapidité dans les conquêtes rendit si remarquable.
«Ses pieds étaient comme les pieds d'un ours,» - allusion à la domination perse; attestant une grande ténacité de prise,
«et sa bouche était comme la bouche d'un lion,» - image de sa voracité, comme dans la royauté et toute la carrière de Nébucadnetsar.

C'est ainsi que l'empire romain, dans sa dernière phase du moins, doit réunir les différents caractères des monarchies précédentes. Et telle a bien été effectivement la politique habituelle des Romains. Ils ne cherchaient pas à détruire les principes qu'ils découvraient chez les différentes nations qu'ils soumettaient; ils essayaient plutôt d'introduire dans leur propre système les principes qui avaient pu contribuer à la puissance des nations qu'ils s'étaient assujetties. Ils n'imposaient point leurs coutumes aux autres, mais cultivaient tout ce qu'ils jugeaient avantageux, et le tournaient à leur propre profit. De même ici, cette bête réunit les caractères de puissance qui avaient donné de l'importance aux précédentes monarchies impériales.

Il se trouve pourtant une différence notableentre celle-ci et les autres et cela dans l'origine de son existence.
«Le dragon lui donna sa puissance et son trône et un grand pouvoir» (vers. 2).
Cette distinction importante est subséquente à la chute de Satan auquel il faut un moyen, ou un intermédiaire, pour agir d'une manière universelle sur les hommes et au centre de la civilisation et de l'activité du monde durant le court espace de temps, pendant lequel il lui est permis de faire sa volonté sur la terre. Et à cause de cela il donne à la bête romaine, qui tenait déjà de la providence de Dieu l'autorité impériale, sa propre puissance de dragon.
Jusque là une telle chose ne s'était pas vue sur la terre, du moins dans son sens absolu -l'union de l'autorité impériale et de toute l'énergie satanique. Mais le prophète voit encore autre chose en rapport avec cet événement:
«Et je vis l'une de ses têtes comme blessée à mort et sa plaie mortelle fut guérie et toute la terre était dans l'admiration de la bête» (vers. 3).

Je suis porté à croire que cette tête blessée était la forme impériale de gouvernement (comp.,chap: XVII. 10), les têtes, qui étaient, comme nous l'avons vu, en rapport avec le dragon (chap. XII. 3.) aussi bien qu'avec la bête, représentant les diverses formes de puissance qui put existé successivement. Une d'entr'elles devait être blessée à mort, mais au même moment elle devait être vivifiée par un ministère satanique. Tout le monde est dans l'étonnement, et cela n'est point étrange. La réapparition de l'empire romain, avec une splendeur de beaucoup supérieure à celle dont il brilla jadis, surprendra excessivement l'univers entier.

Et maintenant si nous jetons un regard sur Daniel, nous y trouvons un fait remarquable en rapport avec l'état de division de cet empire à la fin, et en rapport aussi avec les divisions qu'il subit après avoir cessé d'exister comme empire. La statue du IIme chap. de Daniel a des pieds «en partie de fer, en partie de terre». Par conséquent il y a de la faiblesse.
Le métal représente l'élément romain original dans sa force, tandis que la terre est un élément étranger qui cause de la faiblesse en cherchant à se mélanger au fer.
«Mais ce que tu as vu le fer mêlé avec la terre de potier, c'est qu'ils se mêleront par semence humaine, mais ils ne se joindront point l'un avec l'autre ainsi que le fer ne peut point se mêler avec la terre» (v. 43).
Cela explique exactement l'état de choses existant dans l'Europe occidentale. L'histoire de cette partie du monde a été complètement changée par les invasions des Barbares au cinquième siècle environ après Jésus-Christ. Il fut un temps où un pouvoir vaste et solidement établi -le pouvoir defer de Rome -exerçait une domination universelle et incontestée.
Mais à l'époque dont nous venons de parler, des multitudes de hordes barbares, arrivées à la fois du nord et de l'est, fondirent sur l'empire et l'assaillirent presque sur tous les points: il tomba. Mais, quelque puissants que fussent ces barbares, ils ne purent établir que de petits royaumes séparés; et depuis, aucune main n'a été capable de rassembler ces fragments épars pour les unir solidement de nouveau. Il n'y a pourtant pas eu manque de volonté: au contraire, toutes sortes de moyens ont été essayés; parfois l'épée, d'autres fois la politique, ou bien des mariages entre ces différentes nations; mais tous ces efforts ont été faits en vain, et ainsi les choses sont demeurées sous l'arrangement providentiel de Dieu.

Il n'y a pas eu reconstitution de l'unité, de sorte que l'expression dominante et favorite de la politique a été et sera encore «l'équilibre du pouvoir»; ce qui signifie réellement qu'une distance respectueuse est gardée entre les membres épars de ce qui fut jadis un corps. Des jalousies réciproques et un esprit d'indépendance chez tous ont toujours fait efficacement obstacle à leur réunion. La tendance ordinaire a toujours été d'arrêter ou de prévenir la prépondérance d'une nation sur les autres par la formation de petits états entre les états plus puissants. Mais quoique cette blessure semblât être mortelle, elle fut pourtant guérie:
«et je vis l'une de ses têtes comme blessée à mort et sa plaie mortelle fut guérie».
C'est-à-dire, qu'à l'époque dont parle la vision, l'empire romain doit de nouveau être consolidé, mais non pas comme précédemment sous la bonne main de Dieu qui contrôlait tout, quelles que fussent les voies de certains empereurs; mais tout est abandonné alors à la volonté de la Bête comme instrument immédiat de Satan.

Satan ne peut accuser plus longtemps les saints devant Dieu, mais il est à l'oeuvre sur la terre pour faire blasphémer ouvertement contre Lui. Et cela se produit d'abord au moyen de l'influence politique. L'empire romain est réorganisé, la puissance impériale ravivée, et au-dessus se trouve une tête qui rassemble tout sous son contrôle; de sorte que le monde entier est dans l'admiration de la Bête à laquelle le dragon a remis sa puissance, son trône et son autorité. Mais nous voyons plus que cela dans le verset suivant; il nous apprend ceci, c'est qu' «ils rendirent hommage au dragon parce qu'il avait donné pouvoir à la Bête, disant: qui est semblable à la Bête et qui peut combattre contre elle?» (vers 4.)

Combien l'homme est inconstant et léger! Un état d'anarchie avait mûrement précédé, et la bête en surgissant devient un objet d'étonnement et d'adoration pour l'homme fatigué de l'agitation et des luttes antérieures. Quelque chose d'analogue s'est produit dans un pays voisin (2). Les hommes y étaient tout brisés et bouleversés par une révolution qu'aucune borne ne retenait et qui, par conséquent, remplissait les esprits d'anxiété et d'angoisse. Qu'en résulta-t-il? Une main puissante s'empara des rênes avec un despotisme militaire, une puissance quasi-impériale. Ce qui s'est opéré ainsi sur une petite échelle parce qu'il ne s'agissait que d'une nation, se produira bientôt dans toutes les parties occidentales de l'Europe. Et ainsi les hommes ne dirigeront plus les choses eux-mêmes, mais un chef vigoureux prendra en main le gouvernement; ce ne sera pas simplement la main d'un homme, mais plutôt la puissance du dragon.
Dieu lui permettra de faire sa propre volonté, et pour un peu de temps il déploiera au plus haut degré toute son énergie dans le mal. Ainsi, à côté des gouvernements distincts, et des chefs qui régneront sur leurs pays respectifs, il y aura unité impériale sous un grand chef qui disposera, lui, de la puissance des autres et sera souverain sur tous. Alors seront réalisés les désirs et les rêves de l'homme qui n'ont été jusqu'ici que de vaines chimères.

Il existe dans une des premières épîtres un passage sur lequel je voudrais faire une courte remarque; ce passage est en rapport avec ce qui a empêché et empêche encore le développement de ce mal et de bien d'autres aussi. Il se trouva en 2 Thess. II. 6. 7.
«Et maintenant, vous savez ce qui retient pour qu'il soit révélé en son propre temps. Car le mystère d'iniquité se met déjà en train seulement celui qui retient maintenant le fera jusqu'à ce qu'il soit loin. Et alors sera révélé l'inique.»

Dieu place un empêchement ou une entrave au développement de l'iniquité du monde. Et j'ai la pensée que le Saint-Esprit habitant dans l'Église, est ce dont il est fait mention dans ces mots: «Celui qui retient maintenant». Toutefois après l'enlèvement de l'Église, Dieu aura encore un témoignage ici-bas, quoique d'un caractère différent, et Satan sera encore, pour un temps, du moins, retenu dans une certaine dépendance. Cette entrave mise à l'action de l'Ennemi sera maintenue par l'opération du Saint-Esprit d'une manière providentielle. Lorsque cette dispensation de Dieu prendra fin, le Saint- Esprit ne retiendra plus et ne sera plus vu comme les sept esprits de Dieu envoyés sur toute la terre, c'est-à-dire que la puissance que le Saint-Esprit exerce maintenant, non pas seulement dans l'Église, mais aussi sur le monde, ne se déploiera plus alors pour tenir Satan en échec. «Celui qui retient maintenant le fera jusqu'à ce qu'il soit loin.»

On ignore généralement ce dont on est redevable à une telle entrave mise à l'activité de Satan. Mais le temps viendra où il ne sera plus sous aucune contrainte, et il agira alors sur la terre selon tous ses désirs. Un personnage sera, par lui, placé comme chef, et les hommes seront charmés d'une telle puissance d'énergie exercée, ainsi, sans conscience envers Dieu, -charmés de la tranquillité relative qui résultera du fait qu'il y aura quelqu'un élevé en dignité et autorité souveraine sur tous.
En un mot ils auront, sous plusieurs rapports, ce qui convient à l'orgueil et à l'idolâtrie du coeur. Les hommes comme les enfants, sont toujours mécontents de leurs plans et même de leurs succès. De plus, ayant rejeté l'amour de la vérité, ils sont tout prêts à se laisser prendre par les embûches que Satan place devant eux. De sorte qu'après avoir passé à travers un orage de révolutions, ils seront tout joyeux de se prosterner pour adorer la bête et le dragon qui a remis son autorité et sa puissance à la bête. Mais en outre, le caractère du culte rendu à la bête différera de celui de l'idolâtrie ordinaire. On ne l'adorera pas en rendant également hommage à beaucoup d'autres dieux et d'autres seigneurs comme autrefois les païens, mais il y aura rejet absolu de tout dieu au-dessus de celui qu'ils adoreront comme tel sur la terre. Cette misérable créature qui est l'habitation de Satan sera l'objet de l'adoration à laquelle le dragon participera aussi.

«Et il lui fut donné une bouche qui proférait de grandes choses et des blasphèmes; et le pouvoir d'agir quarante-deux mois lui fut donné.»
Personne, je suppose, ne met en doute le rapport qui existe entre ceci et le VII me chap. de Daniel. C'est le même langage qu'on entend, et il s'applique à la même époque. Si nous examinons ce chapitre, nous découvrons que les pensées que je viens d'exposer y sont confirmées. Il est dit en Dan. VII. 7., que la quatrième bête différait, quant à la puissance, de toutes celles qui l'avaient précédée. «Elle avait dix  cornes. Je considérais ces cornes et voici une autre petite corne» (v. 8).

Il n'y a rien de cela dans l'Apocalypse; la petite corne n'y est pas mentionnée comme telle. Mais ce n'est pas tout. Devant le prophète «trois des premières cornes furent arrachées par elle», et elle prend possession du terrain de  trois, de sorte que des dix n'en reste plus que sept.

«Il y avait en cette corne des yeux semblables aux yeux d'un homme» -symbole de l'intelligence «et une bouche qui disait de grandes choses», c'est-à-dire des paroles pleines d'orgueil et de blasphème contre Dieu (comp. le vers. 25).
C'est là ce qui amène le jugement de Dieu: non pas assurément le jugement du grand trône blanc où comparaissent les morts, mais bien le jugement des vivants et du monde habitable. C'est pourquoi il est écrit au verset 11. «Je regardais à cause de la voix des grandes paroles que cette corne proférait; je regardais donc jusqu'à ce que la bête fut tuée et que son corps fut détruit et donné pour être brûlé au feu.»

Maintenant remarquez que la différence qui existe entre la prophétie de Daniel et celle de Jean, c'est que, ce que le premier dit de la petite corne, le second le dit de la bête (comparez Apoc. XIII 5. 6. avec Dan. VII. 8 et 25). En voici la raison, Jean nous parle du caractère ou du principe, tandis que Daniel fournit le détail des faits historiques.
Dix rois devaient surgir de l'empire romain, mais trois d'entr'eux devaient disparaître devant la force ou la fraude d'un nouveau, la petite corne -puissance obscure à son origine mais qui arrivait à la possession de trois royaumes et devenait alors réellement la directrice de tous les autres. Dans l'Apocalypse, où il est supposé naturellement que les traits qui ont été fournis par Daniel sont déjà connus, le Saint-Esprit ne revient pas sur les faits historiques et il parle de l'empereur et de l'empire comme n'étant qu'un.

Je suis tenu de reconnaître «les puissances établies», mais lorsque Satan donne son autorité à la bête l'affaire est tout autre. Nous ne devons aucune déférence à Satan. De fait, c'est lui qui conduit la bête dans toutes les horribles profondeurs du péché. Car la bête «ouvrit sa bouche en blasphèmes contre Dieu pour blasphémer son nom et son habitation et ceux qui habitent au ciel.» (vers. 6.) L'empire romain est, si je puis employer une telle figure, comme le chariot dans lequel se promène ce cavalier furieux.
Mais, jetons encore un coup d'oeil sur Dan. VII. «J'avais regardé comme cette corne faisait la guerre contre les saints et les surmontait (ver. 21)..... Il proférera des paroles contre le Souverain et détruira les saints du Souverain et pensera de pouvoir changer les temps et la loi; et ils seront livrés en sa main jusqu'à un temps et des temps et une moitié de temps.»

C'est la même période de quarante-deux mois dont il est question en Apoc. XIII: -«un temps» signifiant une année, «des temps» deux années, et «la moitié d'un temps» une demi- année. Je n'ai pas le moindre doute que la puissance appelée par Daniel «la petite corne» soit celle qui nous apparaît dans notre chapitre comme la Bête. Là, elle a le nom de «corne» parce que Daniel nous présente la succession progressive de l'histoire et ajoute le côté spécial juif, la circonstance que les temps et les lois sont livrés en sa main; tandis qu'ici, nous apparaissant comme possédant toute la puissance et l'autorité du système impérial, elle est appelée «la Bête».

«Elle ouvrit sa bouche en blasphèmes contre Dieu pour blasphémer son nom et son habitation et ceux qui habitent au ciel.»
C'était là le grand but de Satan dont la bête n'est que l'organe. C'est du ciel qu'il a été précipité, et le Dieu des cieux et ceux aussi qui y sont en relation avec lui deviennent particulièrement odieux à Satan et à son orgueilleux représentant.
«Ceux qui habitent dans les cieux» leur sont insupportables. Aujourd'hui même rien ne bouleverse autant le monde que cela. Ce n'est pas qu'il déteste toujours la piété lorsqu'elle se rapporte aux choses d'ici-bas; par exemple, dans une certaine mesure, l'homme apprécie l'amour car il peut y trouver son propre avantage. Mais du moment où il s'agit d'une piété qui ne s'occupe pas des choses de la terre -non pas simplement qui rejette les choses mauvaises car cela encore pourrait être compris, mais qui rejette les meilleures oeuvres de l'homme naturel lorsqu'il s'efforce d'être religieux et d'honorer Dieu à sa manière, je le répète, rien n'excite autant que cela la haine des hommes, déjà maintenant, et à combien plus forte raison dans le jour à venir.
Car lorsque Satan  aura perdu sa puissance et sa place dans les cieux et qu'il ne pourra plus agir que sur la terre, la pensée d'un état de bénédiction dans les lieux célestes lui sera insupportable, il cherchera à persuader les hommes que la Bête est Dieu, et  il prendra, je suppose, avantages des prophéties de l'Écriture pour leur faire croire que le temps de la bénédiction est arrivé, que de nouveau Dieu habite sur la terre et qu'il ne reste plus qu'à jouir des délices qui s'y trouvent et de ces temps où Dieu a promis de disperser ses ennemis.

Satan cherchera a reporter la date de ces événements à sa propre époque, et cela en -mettant Dieu complètement en dehors, sachant pourtant ce qui est prêt à arriver et quels sont tes tourments qui l'attendent quand ce jour sera là.
Il s'efforcera de tirer profit des promesses mêmes de Dieu, pour abuser les hommes au point de leur faire croire que ces temps d'iniquité, sans pareils, sont les jours du règne des cieux sur la terre.

Les temps décrits dans les chapitres que nous étudions sont ceux durant lesquels la conscience sera complètement cautérisée quant à Dieu; et ce qui se passa sur une petite échelle dans l'histoire de Pharaon se vérifiera alors dans toute la chrétienté qui sera abandonnée à un endurcissement dont la fin sera la destruction.
C'est là précisément ce que l'Esprit nous enseigne (2 Thess. II. 11. 12) devoir se passer lorsque Dieu, irrité contre ce monde à cause de son rejet de la vérité, permettra que l'homme conjointement avec Satan se lance dans tout le débordement du mal. «Et à cause de cela Dieu leur enverra une énergie d'erreur pour croire au mensonge, afin que tous ceux-là soient jugés qui n'ont pas cru à la vérité mais qui ont pris plaisir à l'injustice.»
Je suis fermement convaincu que non seulement Dieu sera juste en agissant ainsi, mais, qu'en outre, la justice de ses voies sera pleinement reconnue de toute âme soumise à sa Parole.
Nous avons donc ici les moyens que Satan emploie pour l'accomplissement de ses desseins. Il a donné sa vaste puissance à la bête et il veut ensuite qu'elle devienne un objet d'adoration.

«Et il lui fut donné de faire la guerre aux saints et de les vaincre. Et il lui fut donné pouvoir sur toute tribu et peuple et langue et nation. Et tous ceux qui habitent sur la terre dont le nom n'a pas été écrit, dès la fondation du monde, au livre de vie de l'Agneau immolé lui rendront hommage (vers. 7,8).
Ici nous trouvons la même distinction à laquelle j'ai déjà fait allusion. «Tous ceux qui habitent sur la terre» forment une catégorie pire que les tribus, peuples, langues et nations, parce que ce sont ceux qui ayant complètement abandonnéle ciel et les espérances célestes, se sont pleinement livrés à l'énergie d'erreur du dernier jour.
Pour ce qui regarde «toute tribu et peuple et langue et nation,» autorité a été donnée à la bête sur eux; mais «ceux qui habitent sur la terre» sont soumis entièrement à la bête et à son influence maligne.
«Tous ceux qui habitent sur la terre lui rendront hommage.» Cela n'a pas été dit des autres, mais quant à ceux-ci ils se sont totalement livrés à la puissance satanique. Certaines traductions présentent ainsi le passage suivant: «Tous ceux qui habitent sur la terre dont les noms ne sont point écrits au livre de vie de l'Agneau immolé dès la fondation du monde», et quelques personnes en ont conclu que l'Agneau avait été immolé dès la fondation du monde, rapportant cela au conseil de Dieu comme en I Pierre I. 19, 20. Mais la pensée de Dieu n'est nullement celle-là.
L'interprétation véritable ou plutôt la lecture exacte de ce passage doit être celle-ci, «dont le nom n'a pas été écrit, dès la fondation du monde, au livre de l'Agneau immolé»: car en comparant ce verset avec le huitième du chap. XVII de l'Apoc., nous trouvons que l'Esprit a omis quelques mots dont l'absence rend parfaitement clair le reste du verset, nous montrant ainsi avec quel membre de phrase le rapport doit être établi. «Ceux qui habitent sur la terre dont le nom n'est pas écrit, dès la fondation du monde, au livre de vie.»
Le Saint-Esprit ne répète pas «l'Agneau immolé» mais Il place les mots de «dès la fondation du monde» immédiatement après ceux de «écrits au livre de vie». Le langage de Pierre, etc. (1 Pierre I. 20), où il parle du Seigneur Jésus comme d'un agneau sans défaut et sans tache «préconnu dès avant la fondation du monde,» a une tout autre portée.

Après cela viennent de solennelles paroles d'avertissement sur lesquelles je ne compte pas m'arrêter longtemps: «si quelqu'un a des oreilles, qu'il écoute! Si quelqu'un mène en captivité, il ira en captivité; si quelqu'un tue avec l'épée il faut qu'il soit tué par l'épée. C'est ici la patience et la foi des saints» (vers. 9, 10).
La maxime qui vient d'être posée est vraie pour tous, pour la bête même. Si elle a conduit en captivité elle aussi y sera envoyée, ou plutôt il lui arrivera quelque chose de pire. Si elle a mis à mort au moyen de l'épée, elle aussi sera tuée par l'épée. Mais ces paroles sont placées là pour enseigner aux saints quelle doit être leur conduite dans des circonstances où ils pourraient naturellement (en voyant la méchanceté de la bête unie au dragon) se croire autorisés à lui opposer résistance. Et c'est là, je crois, la raison pour laquelle cela est dit, afin que nul saint ne soit tenté d'oublier sa place ou la suprématie de Dieu et son jugement assuré.
Leur affaire n'est pas de s'armer pour leur propre défense. S'ils agissaient ainsi, quel en serait le résultat? Dieu, dans ce cas même, quel que soit le caractère de ceux qui ont agi ainsi, quel que soit même celui de la bête. Dieu, dis-je, maintiendrait ses principes. Chacun recevra selon ce qu'il a voulu infliger. C'est là, la loi du gouvernement rémunérateur de Dieu.
L'Apôtre Paul en Eph. VI ne se fait pas scrupule de tenir le même langage que la loi, quand il s'agit de l'honneur dû aux parents: «Honore ton père et ta mère... afin que bien te soit et que tu jouisses de longue vie sur la terre.»
Sûrement son intention n'est pas de proposer aux chrétiens comme récompense de devoirs accomplis envers des parents, une longue vie sur la terre. Mais c'était un principe posé par Dieu, et l'Apôtre y faisant allusion veut seulement montrer que, même sous la loi, une bénédiction particulière se rattachait à l'accomplissement de cet ordre. C'était le premier commandement avec promesse. De même ici, l'Esprit de Dieu pose un principe général, vrai en tout temps et applicable également aux ennemis et aux amis. «Si quelqu'un,» etc. -n'importe qui. Un chrétien quelconque est dans une position fausse lorsqu'il occupe une place de puissance dans ce monde. Ce qui rend la chose d'autant plus remarquable dans notre passage, c'est que les saints dont il est question sont Juifs et qu'eux, plus que tout autres, pourraient se croire autorisés à résister de tout leur pouvoir. Entendant la bête prononcer d'affreux blasphèmes, et se voyant de sa part les objets de cruelles persécutions, ils auraient pu dire: «Sûrement nous sommes autorisés à nous lever pour la défense de notre religion et de nos vies.» -«Non,» dit le Seigneur, «si quelqu'un a des oreilles qu'Il écoute..... Si quelqu'un tue avec l'épée il faut qu'il soit tué par l'épée.»

Si Dieu laisse la bête agir pour un peu de temps selon sa propre volonté, à quoi sommes-nous appelés? «C'est ici la patience et la foi des saints» -foi quant à Dieu, et patience pour ce qui regarde l'ennemi: et ainsi il sera rendu d'autant plus évident que Dieu intervient en faveur de ceux qui ont souffert pour son nom. Et si cet état de foi et de patience convient aux saints juifs dont la vocation est terrestre, combien plus doit-il nous appartenir à nous qui en avons une céleste. (Conf. Mat. XXVI. 52.)

Notre grande affaire, après notre jouissance de Christ et l'appréciation de son amour, devrait être de cultiver ce qui est selon sa volonté, de manière à rendre un témoignage vrai de ce qu'Il est et de ce qu'il a fait pour nous.
Nous ne sommes pas du monde, et du moment où nous nous rejetons sur les ressources de la nature, ou sur notre puissance, notre influence ou notre autorité personnelle, nous quittons le terrain chrétien. Quant à nos rapports de famille, il est parfaitement bien d'agir selon notre place d'autorité; et même la bénédiction de Dieu ne peut reposer sur ceux qui ne se maintienne pas dans les relations dans lesquelles Dieu les a placés, soit comme père ou comme enfant, comme mari ou comme femme. Les affections, quelle que soit leur importance, ne sont pas l'unique chose à considérer. Dieu veut être respecté par une soumission à l'ordre qu'Il établit et sanctionne. Ce sont là des choses qui ne sont pas changées ou dérangées par notre position céleste; bien au contraire, elle nous donne plutôt l'occasion de manifester que nous possédons en Christ une nouvelle puissance pour chaque relation légitime.
Mais, agir comme ayant nos intérêts dans ce monde, est une chose tout autre et qui ne regarde nullement le chrétien dont l'affaire est plutôt de passer légèrement là-dessus comme ayant la connaissance que sa portion est avec Dieu dans le ciel. Le Seigneur Jésus-Christ va venir pour juger le monde que Dieu tient comme coupable du sang de son Fils et mûrissant maintenant pour le jugement. Si nous gardions habituellement cette vérité devant nos âmes, nous serions préservés de bien des choses par lesquelles nous déshonorons le Seigneur comme chrétiens.

Que le Seigneur veuille se servir de tout ce que nous apprenons pour le bien de nos âmes, afin que nous soyons complètement séparés de tout ce qui doit prendre fin d'une manière aussi épouvantable. La conduite extérieure ne suffit pas. L'Église est considérée comme ayant la pensée de Christ, et nous sommes responsables envers Dieu de nous garder de ces pièges et de ces moyens que Satan met secrètement en exercice maintenant afin de faire éclater ensuite tout ce mal. Il agit envers nous avec beaucoup plus de subtilité qu'envers le monde. Puissions-nous ne jamais oublier ce que Dieu est pour nous, et cela à cause de ce que nécessite sa gloire. C'est maintenant que nous possédons la meilleure occasion d'être fidèles pour Christ. Ce serait en vain que nous regarderions aux autres, nous figurant que la chose nous serait plus facile dans leurs circonstances.
Dieu est suffisant pour les difficultés de notre position actuelle, et Il ne manque pas de donner la force lorsqu'on s'attend à Lui. La seule raison pour laquelle nous grossissons la difficulté de nos circonstances, c'est parce que notre oeil n'est pas simple envers Christ. Lorsque nous le voyons en toutes choses,le danger, les difficultés, la tentation, tout disparaît.

L'apparition de la seconde bête diffère grandement de l'apparition de celle que nous avons déjà étudiée. La première était vue sortant de la mer, mais voici ce que nous lisons de celle qui se présente à nous dans le verset 11: «Et je vis une autre bête monter de la terre.»

Nous avons eu occasion de remarquer constamment en parcourant te livre de l'Apocalypse que la terre est le symbole de ce qui, politiquement, se trouve dans un ordre établi et reconnu -c'est proprement la scène du témoignage et des voies de Dieu aussi bien que d'un gouvernement humain établi. Elle peut abuser de ses privilèges; comme aussi elle peut tomber dans un état effrayant de ténèbres morales, car c'est justement là où quelque bénédiction est confiée que se trouve le danger de la corruption et de l'apostasie.
La mer est, au contraire, cette partie du monde qui est dans un état révolutionnaire ou de désorganisation. Si nous examinons la chose au point de vue chronologique, nous pourrons en conclure ainsi que l'apparition de la seconde bête est subséquente à celle de la première. Lorsque le monstre à sept têtes paraît, tout se trouve dans un état d'agitation; mais lorsque nous voyons venir la seconde bête, les choses sont arrangées et consolidées d'une certaine façon.

Aussi, est-ce maintenant de la terre qu'il est question; il ne s'agit plus des eaux, scène tourmentée de tous les vents. Le personnage annoncé comme montant de la terre n'est pas un simple particulier. C'est un pouvoir politique, oppresseur, qui agit sans conscience envers Dieu -une Bête (3). Il se peut, et je ne doute pas qu'il en soit ainsi, qu'un individu particulier exerce la puissance, comme cela a été le cas avec la première bête; mais l'expression, «la bête», n'implique pas l'idée d'un individu comme tel, mais bien celle d'une puissance impériale environnée parfois de satellites qui lui sont assujettis. Il est évident, en outre, que cette bête est d'un caractère très extraordinaire, car ce qui la signale c'est une ressemblance ou plutôt une imitation du Seigneur Jésus-Christ.

«Elle avait deux cornes semblables à un agneau.»
Le Seigneur ainsi que nous avons dû le remarquer en lisant l'Apocalypse est souvent désigné comme «l'Agneau». Assis sur le trône de Dieu endécrit comme la grande victime sympathisant puissamment avec les souffrances du peuple de Dieu, il nous est montré comme «un Agneau». Mais lorsque les saints sortent ici-bas de la position d'étrangers et de rejetés, qui constitue leur lot propre, le Seigneur Jésus cesse aussi d'être symbolisé de cette manière. Il semble honteux de les avouer, aussi se tient-il à distance et le voyons-nous comme un ange et non plus comme un agneau.

La chose si extraordinaire dans ce passage c'est que la bête prétend ressembler à Christ. Elle possède deux cornes semblables à un agneau; c'est-à-dire qu'elle a une certaine prétention de ressembler à Christ dans son pouvoir officiel. Si une corne est quelquefois employée comme le symbole d'un roi, elle peut aussi signifier simplement la puissance. C'est là le cas lorsqu'il est dit de David «la corne de son oint» etc.; mais une telle signification est beaucoup plus évidente encore lorsque nous regardons au Seigneur Jésus-Christ présenté dans ce livre comme ayant sept cornes et sept yeux.
Assurément il ne peut être question de sept rois; de sorte que, suivant le contexte, les cornes peuvent signifier des rois ou simplement la puissance. En rapport avec la précédente bête il nous est dit qu'elles représentent des rois; mais en elles-mêmes elles n'ont pas nécessairement ce sens, et il semble qu'ici elles n'impliquent pas autre chose que la puissance. Il ne s'agit pas d'une perfection de puissance comme dans le cas de l'agneau mais seulement d'une prétention à la chose; il y avait deux cornes.

L'Esprit de Dieu se plaît à nous montrer au XVIIme chapitre de ce livre que les dix cornes de la première bête sont dix rois (chap. XVII. 12). Jusqu'ici tout est donc clair quant à cette seconde bête. C'est une puissance qui s'élève lorsque tout est extérieurement en ordre et bien organisé; par conséquent elle apparaît plus tard que la première bête. Mais il y a plus encore: elle s'arroge le pouvoir de Christ car elle a deux cornes semblables à un agneau. Toutefois son langage la trahit &emdash; elle parle comme un dragon.
C'est de l'abondance du coeur que la bouche parle.
Quelle que soit son apparence extérieure, lorsqu'elle exprime les sentiments de son coeur sa voix est celle d'un dragon. A la précédente bête le dragon avait donné sa puissance et son autorité, mais ici il y a une ressemblance plus intime avec le dragon; sa voix en est l'expression. C'est la grande et active puissance du mal au dernier temps, et c'est là la différence qui existe entre ces deux bêtes.
La première fait grande parade; elle enlace les habitants de ce monde par son déploiement de puissance et de gloire.
La seconde bête est de beaucoup la plus énergique des deux; c'est celle qui prend le plus la place de Christ &emdash; c'est un faux Christ ou plutôt l'Antichrist, l'expression même de Satan dans son opposition la plus directe à Christ.
Lorsque Satan a été vu au chap. XII attendant la naissance de l'enfant mâle pour le dévorer aussitôt, il ne nous est pas présenté comme le serpent mais bien comme le dragon. Et ici pour l'accomplissement de ses derniers desseins Satan fait parler la bête comme un dragon.

Mais il peut être à la fois utile et intéressant de considérer quelques-uns des passages de l'Écriture qui font allusion à cette seconde bête, car souvent elle est l'objet d'une extrême confusion, et cela n'est point surprenant car ces bêtes sont si étroitement liées ensemble au dernier jour qu'il est difficile de décider laquelle des deux est l'Antichrist.


(1) II faut que le lecteur sache que c'est ici la leçon la plus contestée du livre. Dans le grec, la différence n'est que d'une lettre de plus ou de moins; mais dans un cas c'est de Jean qu'il s'agit, dans l'autre du Dragon. Les autorités, (manuscrits, versions, éditeurs et commentateurs,) sont partagées. Si on compare notre texte avec Apoc. X, 5-10, cela suffira peut-être pour montrer qu'il n'y a pas d'inconvenance interne à assigner à Jean une telle position. Il faut se rappeler Dan. X, 4, 5; XII, 5. D'un autre côté, si on doit lire «il se tint», je ne vois pas que cela attribue à Satan un pouvoir de providence, chose à laquelle il y aurait fort à objecter.


(2). Il faut se rappeler que ces remarques ont été écrites en Angleterre.


(3) M. Elliot voit dans la Bête à deux cornes semblables à l'agneau le clergé papiste, le clergé séculier et le clergé régulier unis sous le pape comme patriarche de l'occident, et qui le soutiennent dans son caractère plus orgueilleux de vicaire de Christ, ou d'Anti-Christ.

A son avis le passage de Matth. VII. 15 exclut presque toute possibilité d'erreur dans cette manière d'interpréter le symbole du corps clérical anti-chrétien. Mais l'expression, une «Bête» n'applique-t-elle pas toujours dans le langage figuré de la prophétie, une corporation politique ou un pouvoir civil, et jamais nulle part, une classe sacerdotale quelque organisée qu'elle soit? Devrait-on laisser de coté un pareil élément, en interprétant ce chapitre?

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