« Sachant que ce n'est pas par les oeuvres de la loi que l'homme est justifié, mais par la foi en Jésus-Christ, nous aussi nous avons cru en Jésus-Christ, afin d'être justifiés par la foi en Christ et non par les oeuvres de la loi, parce que nulle chair ne sera justifiée par les oeuvres de la loi. » Gal. II, 16.
Les mêmes vérités sont exprimées presque dans les mêmes termes
au IIIme chapitre des Romains. Sous le nom de Justification par la
foi, j'en fais le sujet de mon présent discours, et, je me propose de
l'étudier en montrant successivement :
I. ce qu'est la justification par la loi.
II. qu'aucun homme ne peut-être justifié par les oeuvres de la loi.
III. ce qu'est la justification évangélique,
IV. quel est son résultat, c'est-à-dire quel est l'état de l'homme
ainsi justifié,
V. que la justification évangélique a lieu par le moyeu de la foi,
VI. enfin, quelles sont les réponses à faire à différentes difficultés
que soulève notre sujet.
1. D'une manière générale, elle consiste à déclarer un accusé non
coupable. Elle prononce qu'il n'a pas violé la loi, qu'il n'a
accompli aucun acte qualifié crime
par elle, qu'il est par conséquent innocent.
2. Dans un sens plus spécial et plus technique, elle consiste.
à admettre le fait qui est à la charge de l'accusé, mais en
établissant qu'il avait le droit d'agir ainsi qu'il l'a fait. Si par
exemple un homme est accusé de meurtre, le fait qu'il a tué est admis,
mais on constate qu'il a agi en exerçant le droit de légitime défense,
ou qu'il y a eu accident inévitable.
1. S'il s'agit de la justification sous sa forme la plus
générale, c'est à l'accusateur à faire la preuve des faits dont il
charge l'accusé ; il lui suffit, en ce cas, d'établir qu'un crime
(un fait) a été commis. Cette preuve unique suffit à établir la
culpabilité de l'accusé, et exclut pour lui la possibilité d'être
justifié par la voie qui nous occupe en ce moment. Il ne servirait de
rien, devant le tribunal de Dieu, que l'accusé démontrât qu'il a fait
plus de bien que de mal, ou que le temps pendant lequel il a gardé la
loi a été plus considérable que celui pendant lequel il l'a
violée ; il faudrait pour sa justification qu'il pût établir
qu'il a accompli la loi tout entière jusqu'à un iota et jusqu'au
moindre trait de lettre. Or qui peut être justifié de cette
façon-là ? Personne assurément.
2. S'il s'agit de la seconde forme de justification que j'ai
indiquée, — celle où le fait est admis et la culpabilité niée, — c'est
à l'accusé à faire la preuve qu'il n'est pas coupable. Il reconnaît la
réalité des faits qu'on lui impute ; si donc il ne peut alléguer
qu'un vain prétexte, il est perdu.
Si l'excuse n'est qu'une apologie futile ou si elle ne s'applique pas
au cas donné, elle ne peut justifier ; pour qu'elle justifie, il
faut qu'elle réunisse deux conditions : il faut qu'elle soit
vraie, et qu'elle soit suffisante. Si elle ne réunit pas ces deux
conditions, et surtout si elle jette le blâme sur le tribunal ou sur
le gouvernement, elle ne fait qu'augmenter la culpabilité de
l'accusé ; elle est une aggravation infamante du crime. Nous.
aurons bientôt à revenir sur cette dernière remarque.
J'indiquerai maintenant quelques-unes des principales raisons que les
pécheurs ont l'habitude d'alléguer pour leur justification ; je
vous en montrerai la vraie nature, ainsi que la portée, et vous
comprendrez ce qu'elles sont aux yeux de Dieu. Je n'ai pas le temps de
les examiner toutes, Mais j'en citerai deux de chacune des catégories
que je vous ai fait entrevoir. Deux de celles qui manquent de vérité
et qui seraient bonnes si elles étaient vraies ; puis deux de
celles qui sont vraies, mais insuffisantes.
1° Les pécheurs allèguent souvent leur nature pécheresse pour
se justifier. Et s'il est vrai, comme ils le prétendent, que Dieu leur
ait donné une nature qui soit en elle-même pécheresse, une nature dont
les actes soient nécessairement mauvais, ils ont là une bonne excuse
pour leurs péchés ; au jour du Jugement, à la face du ciel et de
la terre, le fait qu'ils allèguent les justifiera. Il faudrait, en
effet, que Dieu faussât la raison de tous les êtres raisonnables, pour
qu'ils pussent vous blâmer d'avoir péché, alors que Dieu vous ayant
constitués pécheurs en vous créant, serait lui-même l'auteur de votre
péché. Mais comment votre nature pourrait-elle être elle-même
péché ? Qu'est-ce que le péché ? Le péché est une
transgression de la loi. Il n'y a aucun autre péché que celui-là. Or
loi dit-elle que vous ne devez pas avoir la nature que nous avons tous
en venant au monde ? Elle ne dit rien de semblable.
Cette doctrine, qui place le péché dans la nature même de l'homme,
méconnaît la différence qu'il y a entre le péché et l'occasion du
péché. Nos appétits physiques, nos besoins et nos penchants deviennent
des occasions de péché, alors qu'ils sont fortement excités. Il en fut
ainsi chez le premier homme ; personne cependant ne dira qu'il
avait une nature pécheresse. L'appétit physique qui recherche
la nourriture du corps, ainsi que le désir de croître dans la
connaissance faisaient partie de son être tel qu'il était sorti des
mains de Dieu ; c'est tout ce que l'on peut dire. Il n'y avait là
aucun péché. Mais ces penchants nécessaires à la créature appelée à
vivre en ce monde sous le gouvernement, moral de Dieu, n'en
devinrent pas moins, une fois excités, une occasion de pécher contre
Dieu. Ils étaient innocents en eux-mêmes, mais le péché fut dans la
manière dont le premier homme les satisfit. Or, quand le pécheur
essaie de se justifier en alléguant ce qu'il appelle sa nature
pécheresse, il confond ces appétits et ces besoins innocents avec le
péché lui-même ; en fait, il accuse Dieu follement de lui avoir
donné une mauvaise nature, alors que tous les éléments de sa nature
sont essentiels à la vie morale à laquelle il est appelé, et que Dieu
l'a constitué aussi bien que cela, était possible, l'adaptant
parfaitement à toutes les circonstances de la vie qu'il devait mener
en ce monde. La vérité est donc que la nature de l'homme est
parfaitement ce qu'elle doit être ; elle est aussi bien
constituée pour aimer Dieu et lui obéir que pour le haïr et lui
désobéir.
Pécheur ! le jour n'est pas loin où tous verront si l'excuse que
tu donnes est bonne ou non ; et tu verras toi-même si, alors que
ton Créateur te reprochera, ton péché, tu pourras le couvrir de
confusion en retournant l'accusation contre lui et en faisant retomber
tout le blâme sur sa personne.
Mais, m'objecterez-vous peut-être, le péché d'Adam n’a-t-il donc pas
contribué à produire ceux de ses descendants ? — Oui, en ce sens
qu'il les a exposés à des tentations plus puissantes et plus
multipliées ; mais il est faux qu'il leur ait légué une nature
qui en soi serait pécheresse.
2° Pour se justifier, les pécheurs allèguent souvent leur incapacité à
faire le bien ; raison semblable à la précédente et qui serait
bonne si elle était vraie. En effet, si étant accusé de péché, vous
pouviez prouver que vous êtes réellement incapable d'obéir à Dieu, que
Dieu a par conséquent exigé de vous de qu'il vous était impossible de
faire, tous les êtres intelligents de l'Univers n'auraient qu'une voix
pour vous déclarer NON COUPABLE. il faudrait ou qu'ils rendissent ce
verdict ou qu'ils cessassent d'être raisonnables ; car une des
vérités les plus élémentaires qu'enseigne la raison, c'est que nul
être ne peut être tenu de faire ce qui lui est impossible.
Supposez qu'on vous demande d'annuler les péchés que vous avez
commis ; chacun reconnaîtra que c'est là une impossibilité et que
vous ne pouvez être blâmé parce que vous ne le faites pas. Mais ce que
Dieu vous demande, ce n'est pas d'annuler les péchés que vous avez
commis, c'est de vous en repentir. Je suppose que le premier jour de
cette année votre devoir ait été d'avertir un pécheur ; vous ne
l'avez pas fait, et maintenant ce pécheur est mort. Êtes-vous
aujourd'hui dans l'obligation de l'avertir ? Non ! la chose
est impossible ; tout ce que Dieu peut vous demander, c'est de
vous repentir de votre négligence. Dieu ne peut vous rendre
responsable que de l'accomplissement d'un devoir qu'il était en votre
pouvoir d'accomplir ; mais il est absurde de penser qu'il puisse
vous faire un devoir d'accomplir ce qui n'est pas en votre pouvoir.
Encore ici, l'excuse que nous examinons accuse Dieu de tyrannie, aussi
constitue-t-elle une aggravation infamante du crime. Il est clair, en
effet, que si Dieu exige de vous ce que vous ne pouvez pas faire,
c'est de la tyrannie. Et comme son commandement est sous peine de mort
éternelle, sa tyrannie est sans bornes. Bien loin donc que l'excuse en
question justifie le pécheur, elle est une sérieuse aggravation de sa
culpabilité, vu qu'elle accuse Dieu d'une tyrannie sans mesure aucune.
Supposez encore que Dieu vous ordonne de vous repentir pour n'avoir
pas fait ce qu'il n'a jamais été en votre pouvoir de faire, et vous
condamne à l'enfer si vous n'obéissez pas. Ce commandement là ne
serait pas plus raisonnable que le précédent, car dans un cas pareil
vous ne pouvez vous repentir, et Dieu lui-même ne peut faire que vous
vous repentiez. Qu'est-ce que la repentance ? C'est se blâmer
soi-même et justifier Dieu. Or, pour un être raisonnable, c'est une
impossibilité que de se blâmer pour n'avoir pas fait une chose qu'il a
conscience de n'avoir pu faire. Dans ce cas, aucun être raisonnable ne
pourrait non plus justifier Dieu.
Si Dieu vous appelait en jugement et vous sommait de vous repentir de
ce que vous ne volez pas au plus haut des airs, par quel procédé
pourrait-il faire que vous vous blâmiez pour cela, alors que vous êtes
parfaitement conscient de n'avoir ni ailes, ni rien de ce qu'il faut
pour voler ? Pour que le repentir vous fût possible, il faudrait
que Dieu vous trompât et vous inspirât la fausse persuasion que vous
aviez le pouvoir de voler. Mais quel Dieu que celui qui agirait de la
sorte à l'égard de ses créatures !
Que prétendez-vous donc, pécheur, en alléguant votre incapacité ?
pensez-vous faire croire que vous n'avez jamais péché ? Vous
tombez dans une étrange contradiction quand vous admettez que vous
devez vous repentir et qu'aussitôt après vous prétendez avoir été
incapable d'obéir à Dieu. Choisissez le terrain sur lequel vous voulez
vous placer et restez-y. Si vous pensez vous appuyer sur l'excuse qui
nous occupe, faites-la valoir hardiment, présentez-vous devant, le
tribunal de Dieu et dites : « Seigneur, je ne puis ni ne
veux me repentir du tout, je n'y suis pas obligé, car je n'ai pas le
pouvoir d'obéir à la loi ; je maintiens donc que je ne suis
absolument pas coupable, car je n'ai jamais péché. »
Pouvez-vous réellement vous flatter de vous justifier de la
sorte ? Osez-vous vous prévaloir d'une excuse pareille et rejeter
sur Dieu toute la responsabilité de votre péché ?
3° Une autre excuse qu'allèguent les pécheurs pour rester dans leur
impénitence, c'est leur mauvais coeur.
Cette excuse est vraie, mais elle est insuffisante. Qu'est-ce qu'un
mauvais coeur ? Ce n'est pas l'organe qui bat dans notre
poitrine, ce sont les affections, les mauvais sentiments, les
mauvaises pensées, les actions de l'âme. Si c'est là ce qui doit vous
justifier, le diable lui-même sera justifié. N’a-t-il pas un aussi
mauvais coeur que vous ?
Supposons que vous ayez commis un meurtre et que, comparaissant devant
la cour d'assises, vous essayiez de vous justifier de la manière
suivante : « C'est vrai, j'ai tué un homme, mais, j'ai une
telle haine pour l'humanité, j'ai une telle soif de sang, que je ne
puis m'empêcher de tuer quelqu'un chaque fois que j'en ai
l’occasion. » « Horreur ! s'écriera le juge, dressez le
gibet immédiatement et que cet homme soit pendu avant que je
quitte la cour ; un pareil misérable ne mérite pas de vivre
une heure. S'il a une telle soif de sang que personne ne soit en
sûreté auprès de lui, c'est précisément pour cela qu'il faut le pendre
à l'instant. » Les pécheurs qui allèguent leur mauvais coeur
présentent une justification exactement semblable à celle que nous
venons de supposer. « Méchant serviteur, je te jugerai par tes
propres paroles. »
4° Une autre excuse fort commune est celle qui allègue la conduite des
chrétiens.
Demandez à beaucoup de ceux qui vous entourent, pourquoi ils ne se
donnent pas à Dieu. « Les chrétiens, vous répondront-ils, ne sont
pas meilleurs que les autres ; quand nous les verrons se conduire
conformément à leur profession de piété, nous penserons alors à nous
convertir. » Ils montrent donc qu'ils savent comment les
chrétiens devraient se conduire, et que par conséquent ils ne pèchent
pas par ignorance.
Ensuite, en admettant, ainsi que je le fais, que beaucoup de chrétiens
ont une conduite très répréhensible, et font bien de choses qui sont
entièrement contraires à leur profession de piété, est-ce là une
excuse pour ceux qui refusent de se donner à Dieu ? Au contraire,
leur dirai-je, c'est une des plus fortes raisons qu'il y ait pour vous
mettre à son service. Vous qui savez comment ceux qui professent la
piété devraient se conduire, vous êtes tenus de donner l'exemple. Si
vous aviez imité la conduite des chrétiens parce que vous ne saviez
pas mieux faire, le cas serait tout autre ; mais maintenant vous
êtes inexcusables.
Votre devoir est de reprendre ces chrétiens dont vous parlez, de prier
pour eux et de les conduire dans un chemin meilleur, mais vous n'en
faites rien.
Votre excuse, bien que vraie, en fait, ne vous justifie
nullement ; elle ne tait qu'ajouter à votre culpabilité. Belle
justification que celle-là ! Vous cacher derrière quelque diacre
ancien d'église pris en faute pour décocher contre le Très-Haut
lui-même les traits de votre méchanceté.
Maintenant, mes chers auditeurs, y aurait-il encore quelqu'un parmi
vous qui penserait pouvoir être justifié par la loi ? Qui d'entre
vous l'a gardée ? Et qui d'entre-vous pourrait présenter une
excuse valable pour sa désobéissance ?
Disons d’abord CE QU'ELLE N'EST PAS.
1. La justification évangélique n'est pas l'imputation de
la justice de Jésus-Christ.
La justification des pécheurs ne consiste pas en ce que l'obéissance
de Jésus-Christ serait portée à leur compte, comme s'il avait obéi à
la loi à leur place. C'est une erreur assez commune que d'interpréter
la justification évangélique en ce sens que le pécheur serait tenu
pour juste au point de vue de la loi parce que l'obéissance ou la
justice de Christ lui serait imputée. Je n'ai pas le temps maintenant
d'entrer dans l'examen de cette question ; tout ce que je puis
dire, c'est que cette idée est absurde, par la raison que Jésus-Christ
était tenu d'obéir à la loi pour lui-même et qu'il ne pouvait pas plus
faire des oeuvres surérogatoires, ou obéir pour notre compte, que qui
que ce soit d'autre. N'était-ce pas son devoir d'aimer le Seigneur son
Dieu de tout son coeur, de toute son âme, de toute sa pensée et de
toute sa force et d'aimer son prochain comme lui-même ?
Certainement ; et s'il n'avait pas fait cela, il aurait péché. La
seule oeuvre surérogatoire qu'il pouvait faire était d'accepter des
souffrances qu'il n'avait pas méritées. C'est ce qui est appelé son
obéissance jusqu'à la mort, et c'est de cette obéissance-là que nous
recueillons le bénéfice.
Si son obéissance à la loi nous était imputée, comment pourrions-nous
être appelés à nous repentir et à obéir nous-mêmes à la loi ?
Dieu exige-t-il une double ou même une triple satisfaction ?
D'abord l'obéissance que Jésus-Christ aurait offerte à notre place,
puis les souffrances endurées en expiation de nos péchés, enfin notre
repentance et notre obéissance personnelles ! Ce que Dieu demande
de nous, c'est que nous obéissions toujours à la loi de l'amour ;
et pour cela, il n'y a pas de substitution possible. Si nous manquons
à cette obligation, nous devons ou subir le châtiment ou recevoir un
pardon gratuit.
2. La justification par la foi ne consiste pas en ce que la
foi nous tiendrait lieu de sainteté personnelle.
Quelques-uns pensent que la justification nous dispense d'être
personnellement saints ; Dieu nous déchargerait donc
arbitrairement du devoir d'obéir à la loi et il se contenterait de
notre foi, qui serait ainsi substituée à l'obéissance. Mais tout cela
est faux. Dieu compte notre foi pour ce qu'elle est et non pour ce
qu'elle n'est pas. La foi d'Abraham lui fut imputée à justice (1),
parce qu'elle était elle-même un acte de justice et
qu'elle opérait par l'amour et produisait la sainteté. La foi qui
justifie EST sainteté, quoiqu'elle ne soit pas toute la
sainteté ; elle produit la sainteté du coeur et de la
vie ; aussi est-elle imputée au croyant comme sainteté, mais
non à la place de la sainteté.
3. La justification par la foi n'implique donc pas
que le pécheur soit justifié par la foi sans les bonnes oeuvres,
(c'est-à-dire sans la sainteté.)
Plusieurs pensent que « justification par la foi » signifie
justification sans aucun égard aux bonnes oeuvres ou à la
sainteté ; ils tirent cette conséquence des paroles de l'apôtre
Paul qui insiste avec une grande force sur la justification par la
foi. Mais il faut remarquer que Paul polémique contre les Juifs qui
pensaient être justifiés par leur obéissance à la loi. En opposition à
cette erreur, il déclare que les oeuvres de la loi ne peuvent
nullement justifier, et insiste sur la justification « par la foi
sans les oeuvres de la loi. » Il ne veut pas dire que les bonnes
oeuvres ne soient pas nécessaires à la justification, mais bien que
les oeuvres de la loi ne sont pas de bonnes oeuvres, vu qu'elles
procèdent de considérations légales, telles que l'espoir de la
récompense et la crainte du châtiment, et non de la foi qui opère par
amour.
Mais lorsqu'une erreur opposée se fut introduite dans l'église sous le
couvert des paroles de Paul, Jacques reprit le sujet et montra qu'on
n'avait pas compris Paul. Il se servit de l'exemple d'Abraham.
« Abraham, notre père, dit-il, ne fut-il pas justifié par les
oeuvres, quand il offrit Isaac son fils sur l'autel ? Tu vois que
sa foi opérait avec ses oeuvres, et que, par les oeuvres, la foi fut
rendue parfaite. » Ainsi fut accomplie l'Écriture qui dit :
« Abraham crut Dieu, et cela lui fut imputé à justice »
« et il fut appelé ami de Dieu. » « Vous voyez donc que
l'homme est justifié par les oeuvres et non par la foi
seulement. » On a vu une contradiction entre cet enseignement et
celui de Paul, et plusieurs des anciennes églises rejetaient, pour ce
motif, l'épître de Jacques ; on n'avait pas compris que Paul
parlait d'une sorte d'oeuvres et Jacques d'une autre. Paul parlait
d'oeuvres de loi, c'est-à-dire d'oeuvres faites par des motifs
légaux ; tandis que partout il insistait sur les bonnes oeuvres
provenant de la foi, ou sur la justice de la foi, montrant que cette
justice-là est indispensable pour le salut. Ce qu'il niait, c'était
uniquement que les oeuvres légales eussent une part quelconque dans la
justification. Jacques enseigne la même chose quand il montre que
l'homme n'est justifié ni par les oeuvres seules, ni par la foi
seulement, mais par la foi agissant avec les oeuvres.
Disons maintenant CE QU'EST LA JUSTIFICATION ÉVANGÉLIQUE.
La justification évangélique ou justification par la foi consiste en
ceci, que nos péchés nous sont pardonnés et que nous devenons
agréables à Dieu à cause de Jésus-Christ.
Quand nous disons que l'homme est justifié par la foi et la
sainteté ; nous ne vouions pas dire qu'il soit accepté de Dieu
sur le terrain de la loi (2) ;
nous voulons dire qu'il est traité comme s'il était juste, à cause de
sa foi et des oeuvres de sa foi. Tel est, en effet, le principe
d'après lequel Dieu justifie le pécheur ; ce n'est pas que la foi
soit le fondement de sa justification ; ce fondement, c'est
Christ. Si le pécheur se repent, croit et devient saint, ses péchés
sont pardonnés pour l'amour de Christ.
C'est ainsi que l'on voit par oui la justification évangélique diffère
de la justification légale. Celle-ci est une déclaration d'innocence
actuelle : celui qui en est l'objet est de droit exempt de tout
blâme ; tandis que dans la justification évangélique l'homme est
pardonné et accepté comme s'il était juste, mais sur une tout autre
base que celle de son droit et de son obéissance à la loi.
1. Le premier effet du pardon est de faire disparaître la
pénalité.
Celle-ci est reconnue juste, méritée, mais elle est mise de côté, de
sorte que celui qui est justifié n'a pas plus à craindre le châtiment
que s'il n'avait jamais transgressé la loi. Celui qui a la vraie foi
ne doit plus être influencé par la crainte de la punition.
2. Un second effet du pardon, quand il est octroyé par les
souverains de ce monde, est de faire disparaître les conséquences
infamantes de la transgression,
telles que confiscation des biens, incapacité de tester, de remplir un
emploi dans l'administration, etc. Un pardon réel réintègre l'individu
dans la position qu'il avait avant sa transgression de la loi. De
même en est-il dans le gouvernement de Dieu ; Celui qui est
pardonné est traité par Dieu, quant à ce qui. concerne la loi, comme
s'il était innocent. Cela ne veut pas dire que Dieu le déclare
innocent, cela signifie que le pardon le place dans la même position
que s'il l'était.
3. Un troisième effet du pardon est de rendre à celui qui
le reçoit sa qualité d'enfant de Dieu, pour être traité désormais
comme tel.
Supposez que le fils d'un prince régnant ait commis un meurtre, qu'il
soit jugé et condamné à mort. Le pardon ne le délivrera pas seulement
de la mort, il lui rendra sa place au sein de sa famille. De même
quant aux enfants de Dieu : ils se sont tous égarés et sont
entrés au service du diable ; mais dès que le pardon leur est
accordé, ils reçoivent l'esprit d'adoption, ils sont scellés comme
héritiers de Dieu, et réintégrés dans tous les privilèges des enfants
de Dieu.
4. Par la justification, nous est assurée toute la grâce
nécessaire pour être pleinement gardés des pièges de Satan et pour
sortir des innombrables liens dont le péché nous a enlacés.
Mes bien-aimés, si Dieu se bornait à nous pardonner, et qu'il nous
laissât nous dégager du péché, comme nous le pourrions, par nos
propres forces, à quoi nous servirait le pardon ? À rien. Si un
enfant s'enfuit de la maison paternelle, s'égare dans la forêt, et
tombe dans une fosse profonde, et que son père se trouvant là, lui
pardonne sa fuite loin des siens, à quoi pourra lui servir ce pardon,
à moins que son père ne le tire de la fosse et ne le ramène à la
maison ? Dans le plan de la rédemption, toute aide, tout secours
dont nous pouvons avoir besoin nous est garanti, si nous croyons.
Laissez-moi vous le répéter, si Dieu entreprend de vous sauver, il
s'engage à vous donner toute la lumière, toute la force, toutes les
grâces qui sont nécessaires pour rompre toutes les chaînes de Satan et
tous les liens du péché ; il s'engage à vous conduire même
jusqu'à la maison paternelle.
Voici ce qui arrive très souvent, je le sais. Le pécheur est brisé par
la conviction de péché, son coeur se fond à la pensée de sa vie passée
et plus encore à la vue de la miséricorde divine, il se jette aux
pieds du Seigneur, il fait abandon complet de sa personne à
Jésus-Christ, puis il se réjouit de toute son âme à la pensée qu'il en
a fini avec le péché. Mais peu après, il recommence à sentir le poids
des vieilles habitudes et la puissance des influences qui l'ont
subjugué si longtemps ; le combat à livrer lui apparaît alors si
rude, la tâche à accomplir si grande, qu'il se décourage et
s'écrie ; « Que faire, que devenir, avec tant d'ennemis sur
ma route et si peu de force, si peu de solidité et de résolution pour
leur tenir tête ? » Laissez-moi vous dire, mes bien-aimés,
que si Dieu a commencé son oeuvre en vous, vous n'avez qu'à vous tenir
près de lui, dans la confiance, et il vous fera « sortir de
tout. »
Vous n'avez aucun ennemi à craindre. Que les cieux tonnent, que la
terre s'ébranle, que les éléments s'embrasent et se dissolvent, vous
n'avez pas à trembler ; ni ennemis du dehors, ni ennemis du
dedans ne peuvent vous nuire : Dieu est pour vous, qui sera
contre vous ? « Qui condamnera ? Christ est mort ;
bien plus, il est ressuscité, il est à la droite de Dieu, et il
intercède pour vous. »
5. Aussitôt que nous sommes justifiés, tous les attributs
divins concourent à notre salut, comme si nous n'avions jamais
péché.
Voyez ce saint ange qui porte un message d'amour dans quelque partie
éloignée de l'Univers ; l'oeil de Dieu le suit, et si quelque
danger le menace, tous les attributs divins le couvrent et le
protègent. Il en est absolument de même pour vous si vous êtes
justifiés. Tous les attributs divins concourent à vous défendre, à
vous soutenir, à vous sauver. Bien que vous ne soyez pas encore nets
de tout reste de péché et que vous soyez entièrement indignes de
l'amour de Dieu, si vous êtes réellement justifiés, l'Éternel, le Dieu
tout sage et tout puissant, est engagé à mener à bien l'ouvre de votre
salut.
Comment donc pourriez-vous craindre encore et vous laisser aller au
découragement ?
Si un gouvernement humain pardonne à un criminel, il est tenu dès lors
de le protéger comme tout autre citoyen, exactement comme s'il n'avait
jamais commis aucun crime. Il en est de même quand Dieu a justifié un
pécheur. L'apôtre Paul dit : « Étant justifiés par la foi,
nous avons la paix avec Dieu. » Dieu est donc de notre côté,
engagé envers nous, lié à nous comme notre fidèle et éternel Ami.
Si nous étions justifiés par la loi, cette justification ne durerait
pas plus que notre innocence. Dès que nous aurions commis une seule
transgression, notre précédente justification ne nous servirait plus
de rien. Mais sous le régime de la justification évangélique, il n'en
est pas ainsi. « Si nous avons péché, nous avons un avocat auprès
du Père, Jésus-Christ le juste. » Par cette justification nous
sommes placés dans une relation avec Dieu qui est entièrement
nouvelle. Le pécheur n'est plus sous l'alliance des oeuvres (3),
il est sous l'alliance de grâce. Ce n'est plus sous la condition d'une
obéissance absolue qu'il conserve la faveur de Dieu ; s'il pèche,
il n'est pas remis sous la loi, il reste au bénéfice de la Nouvelle
Alliance. S'il est réellement justifié par la foi et devenu enfant de
Dieu, il est traité comme un enfant ; il est corrigé, humilié,
relevé ; car « les dons et l'appel de Dieu sont sans
repentance. » Cela ne veut pas dire que Dieu appelle et sauve le
pécheur sans qu'il se repente, mais que Dieu ne change jamais
d'intention quand il a commencé l'oeuvre du salut dans une âme.
Je sais que cette doctrine est regardée par plusieurs comme très
dangereuse. « Persuader aux pécheurs qu'ils sont justifiés
définitivement et pour toujours, nous dit-on, mais c'est encourager
les gens à pécher ! En vérité. ! quand un homme s'est
repenti du péché, quand il y a renoncé de tout son coeur, quand il ne
désire rien autant que d'en être affranchi, lui dire que Dieu l'aidera
et lui donnera certainement la victoire sur le péché, c'est
l'encourager à pécher ! Étrange logique que celle-là ! Si
cette doctrine encourage un homme à pécher, cela montre seulement que
cet homme-là ne s'est jamais repenti ; qu'il n'a jamais haï le
péché, jamais aimé Dieu pour lui-même, que sa repentance a été fausse
et que s'il a aimé Dieu ce n'a été que d'un amour égoïste, parce qu'il
espérait recevoir de Dieu quelque faveur. En effet, si jamais il avait
haï véritablement le péché, la pensée que malgré toute son indignité,
Dieu le recevait comme son enfant et voulait le traiter comme tel, est
précisément ce qui lui aurait transpercé le coeur. La vue de cette
bonté paternelle si longtemps méconnue et outragée l'aurait humilié
jusque dans la poussière et rempli de la tristesse la plus vive.
Oh ! combien souvent l'enfant de Dieu ne fond-il pas en larmes,
en adorant cette bonté de Dieu qui, alors qu'il s'égarait, usait de
tous les moyens pour le ramener au bien, au lieu de l'envoyer en enfer
comme il le méritait !
6. La justification par la foi nous met au bénéfice de lu
discipline de l'alliance de grâce.
Dieu a promis d'user de cette discipline et de ramener à lui, par son
moyen, ceux de ses enfants qui s'égareraient. Dans le Ps.
LXXXIX, parlant de la postérité de David, c'est-à-dire de celle
de Christ, il dit : « Si ses fils abandonnent, ma loi et ne
marchent pas selon mes ordonnances, s'ils violent mes préceptes et
n'observent pas mes commandements, je punirai de la verge leurs
transgressions, et par des coups leurs iniquités ; mais je ne lui
retirerai point ma bonté et je ne trahirai ma fidélité, je ne violerai
point mon alliance et je ne changerai pas ce qui est sorti de mes
lèvres. »
Vous voyez donc que, lorsqu'ils s'écartent du droit chemin, les
chrétiens peuvent toujours s'attendre à être visités plus promptement
par les jugements de Dieu que les impénitents. Ceux-ci peuvent
s'engraisser dans les richesses, être exempts d'angoisse jusqu'à leur
mort, et cela conformément aux principes du gouvernement divin. Mais
qu'un enfant de Dieu oublie son Père céleste, qu'il recherche les
richesses ou tout autre bien de ce monde, Dieu le frappera de sa
verge, c'est aussi certain qu'il est certain que Dieu est son Père. Et
quand il aura été frappé, il dira comme le Psalmiste :
« Il est bon pour moi d'avoir été affligé, afin que j'apprisse
statuts. Avant que je fusse affligé, je m'égarais ; mais
maintenant j'observe ta parole (Ps
CXIX : 71,72). » Quelques-uns d'entre vous peut-être,
mes bien-aimés, savent ce que c'est que d'être affligés de cette
façon, et ils savent que c'est pour leur bien qu'ils l'ont été.
7. La justification évangélique assure la sanctification.
Elle assure non seulement les moyens de la sanctification, mais encore
son accomplissement actuel, de sorte que celui qui est véritablement
converti, persévérera certainement dans l'obéissance jusqu'à ce qu'il
soit actuellement sauvé et prêt, pour le ciel.
La foi est le moyen par lequel elle nous est communiquée. La preuve en
est dans la Bible. Notre texte le déclare expressément :
« Sachant que ce n'est pas par les oeuvres de la loi que l'homme
est justifié, mais par la foi en Jésus-Christ, nous aussi nous avons
cru en Jésus-Christ, afin d'être justifiés par la foi en Christ et non
par les oeuvres de la loi, parce que nulle chair ne sera justifiée par
les oeuvres de la loi. » Ce sujet revient trop souvent dans le
Nouveau Testament pour qu'il soit nécessaire d'en parler davantage.
1. Pourquoi la justification est-elle dite « par la
foi, » plutôt que par la repentance, l'amour ou quelque autre
grâce ?
Il n'est dit nulle part que le croyant est justifié ou sauvé POUR sa
foi qui deviendrait ainsi le fondement de son pardon ; il est dit
seulement qu'il est justifié PAR la foi, la foi étant le moyen ou
l'instrument de la justification. Si l'on demande pourquoi c'est la
foi qui est désignée comme le moyen de la justification plutôt que
toute autre activité de notre esprit, il faut répondre que c'est à
cause de la nature et des effets de la foi. Aucune autre opération de
l'esprit ne peut être désignée ici. Qu'est-ce que la foi ? C'est
cette confiance en Dieu qui nous conduit à l'aimer et à lui obéir.
Nous sommes donc justifiés par la foi parce que nous sommes sanctifiés
par la foi.
La foi est l'instrument désigné de notre justification parce qu'elle
est l'instrument naturel de notre sanctification. Elle est le moyen
par lequel nous revenons à l'obéissance, c'est pourquoi elle est aussi
le moyen par lequel nous obtenons les bénédictions assurées à
quiconque revient à Dieu. Elle nous est imputée, non arbitrairement
pour ce qu'elle n'est pas, mais pour ce qu'elle est, à savoir le
principe de toute véritable obéissance. Elle est la condition du
pardon, parce que seule elle nous rend capables d'offrir à Dieu
l'obéissance de l'amour. Nos péchés. sont pardonnés à cause de Christ.
Mais c'est notre devoir de nous repentir et, d'obéir à Dieu ; et,
si nous le faisons, cette repentance et cette obéissance nous sont
imputées pour ce qu'elles sont véritablement.
Quant au pardon de nos péchés passés, nous devons placer en
Jésus-Christ toute notre confiance, c'est pour cela que la
justification est dite par la foi en Jésus-Christ.
2. Une question qui a une grande importance est celle-ci :
« Qu'est-ce que la foi justifiante ? » ou :
« Que dois-je croire pour être sauvé ? »
La foi justifiante ne consiste pas à croire que vos péchés sont
pardonnés. S'il vous était nécessaire de croire cela pour être
justifié, il vous faudrait le croire avant que cela fût vrai,
c'est-à-dire qu'il vous faudrait croire une fausseté. Rappelez-vous
que vos péchés restent non pardonnés jusqu'à ce que vous croyiez. Et
vous ne pouvez pas croire qu'ils sont pardonnés avant d'en avoir la
preuve. Or cette preuve ne peut être acquise que lorsque la chose est
vraie, c'est-à-dire lorsque vous avez la foi qui sauve. Cette foi qui
sauve consiste donc à croire autre chose que le fait du pardon de vos
péchés.
De même, la foi qui sauve ne consiste pas du tout à croire que vous
serez. sauvés. Vous n'avez aucun droit de croire que vous serez sauvés
jusqu'à ce que vous ayez fait l'acte de foi qui sauve.
Cet acte consiste à croire l'expiation de Jésus-Christ, ou le
témoignage que Dieu a rendu de son Fils.
On a mis en doute l'exactitude de cette définition ; et je
confesse qu'ici mes vues ont subi un changement.
Il est dit qu'Abraham « crut Dieu » et que cela lui fut
imputé à justice. Or, que crut Abraham ? Il crut qu'il aurait un
fils. Mais, ne crut-il que cela ? Nullement ! Sa foi
embrassait la grande bénédiction qui devait résulter du don de ce
fils ; il crut que le Messie, le Sauveur du monde, le Désiré des
nations, naîtrait dans sa postérité. C'était là l'objet principal de
l'alliance conclue, entre Dieu et lui. La foi d'Abraham était donc la
foi en Christ. L'apôtre Paul montre dans le IIIme chap
de l'ép. aux Galates que le résumé de la promesse faite à
Abraham est compris dans cette parole : « En toi seront
bénies toutes les nations. » Et, au v. 16 de ce même chapitre, il
dit : « Les promesses ont été faites à Abraham et à sa
postérité. » Il ne dit pas : « et à tes
postérités, » comme s'il parlait de plusieurs, mais comme parlant
d'une seule « Et à ta postérité, qui est le Christ. »
On dit que dans le chapitre XIe de l'ép. aux Hébreux les saints ne
sont pas tous présentés comme ayant eu la foi en Christ. Mais si vous
voulez examiner avec soin ce qui en est, vous verrez que cette foi a
toujours été impliquée dans la leur. Voyez, par exemple, ce qui est
dit d'Abel. « C'est par la foi qu'Abel offrit à Dieu un sacrifice
plus excellent que celui de Caïn ; c'est par elle qu'il fut
déclaré juste, Dieu approuvant ses offrandes ; et c'est par elle
qu'il parle encore, » quoique mort. Pourquoi son sacrifice fut-il
plus excellent que celui de Caïn ? parce qu'en offrant des
premiers-nés de son. troupeau, il reconnut la nécessité de l'expiation
et que « sans effusion de sang, il n'y a pas de rémission des
péchés. » Caïn ne fut qu'un orgueilleux incrédule offrant des
fruits de la terre comme pur sacrifice d'actions de grâces pour les
bienfaits de la Providence, n'admettant pas qu'il soit un pécheur et
qu'il eût besoin d'un sacrifice expiatoire pour lui acquérir le pardon
de Dieu.
Quelques-uns pensent que l'on peut avoir la foi qui justifie, tout en
niant la divinité et l'expiation de Jésus-Christ. Il n'en est rien.
Tout dans la révélation converge vers Jésus-Christ, tout s'y résume en
lui, en sa divinité, en son expiation. Tout ce que les prophètes et
les autres écrivains de l'Ancien Testament nous disent du salut se
rapporte à lui ; tous les types de l'Ancien et du Nouveau
Testament n'ont d'autre signification que lui. La foi des saints de
l'Ancienne Alliance était la foi au Messie à venir, celle des saints
de la Nouvelle Alliance est la foi au Messie déjà venu : Dans le
XVme
chapitre de la 1e épître aux Corinthiens, l'apôtre Paul montre
quelle place il assignait à l'expiation de Christ : « Je
vous ai enseigné avant tout, dit-il, comme je l'avais aussi reçu, que
Christ est mort pour nos péchés, selon les Écritures ; qu'il a
été enseveli, et qu'il est ressuscité le troisième jour, selon les
Écritures. » Remarquez cette expression : « je vous ai
enseigné AVANT TOUT, » elle montre que Paul prêchait Christ mort
pour les pécheurs, comme la principale doctrine de l'Évangile. Et d'un
bout de la Bible à l'autre, nous voyons que l'attention du lecteur est
dirigée vers ce chemin vivant qui seul conduit au salut. Christ mort
pour les pécheurs est la seule vérité qui puisse sanctifier ;
l'on peut croire mille autres choses ; mais la foi en Christ dans
lequel Dieu a réconcilié le monde avec soi, est seule la foi qui
justifie.
3. Une troisième question fréquemment soulevée est : À
quel moment est-on justifié ? »
Je réponds : On est justifié au moment même où l'on croit en
Christ d'une foi qui opère par l'amour. Vous qui n'êtes pas
réconciliés avec Dieu, vous n'êtes pas obligés de rester sous la
colère de Dieu un seul instant de plus ; vous pouvez être
justifiés ici, immédiatement, si seulement vous voulez vous confier en
Christ. Votre pardon est déjà prêt, scellé du grand sceau de
Dieu ; le nom seul est en blanc ; pour écrire votre nom à
cette place, pour vous accorder un gracieux pardon, Dieu attend
seulement que par un acte de foi vous receviez Jésus-Christ tel qu'il
vous est présenté dans l'Évangile.
4. Une quatrième question est celle-ci :
« Comment savoir si je suis justifié ? »
Je réponds : Vous ne pouvez le savoir que par voie d'induction.
Dieu n'a pas révélé dans les Écritures que vous ou tel autre individu
étiez justifié ; il a indiqué les caractères du chrétien, et il a
déclaré que tous ceux qui portent ces caractères-là sont justifiés.
A. Avez-vous le témoignage du Saint-Esprit ? Tous ceux qui sont
justifiés l'ont ; ils ont reçu le Saint-Esprit qui leur donne le
vrai sens des Écritures et qui les conduit au Fils et au Père, leur
révélant l'un et l'autre. Si vous avez ce témoignage, vous êtes
justifié ; si vous ne l'avez pas, vous êtes encore dans vos
péchés.
B. Avez-vous les fruits de l'Esprit ? « Ces fruits sont
l'amour, la joie, la paix, » etc. Quand on les a, on en a
conscience. Si vous les avez, vous êtes justifié.
C. Avez-vous la paix avec Dieu ? L'apôtre Paul dit « Étant
justifiés par la foi, nous avons la paix avec Dieu. » Jésus dit à
ses disciples : « Je vous donne ma paix. Je ne vous la donne
pas comme le monde la donne. » Et encore :
« Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés, et je vous
donnerai le repos. » Avez-vous trouvé LE REPOS en Christ ?
Votre paix est-elle semblable à un fleuve qui coule doucement au
travers de votre âme, vous remplissant d'un calme et d'une félicité
célestes ? Ou avez-vous plutôt le sentiment de la condamnation de
Dieu ?
Avez-vous conscience que vous êtes reçu en grâce, que vos péchés sont
pardonnés et que vous avez communion avec Dieu ? Si cela est,
cela doit être pour vous un fait, d'expérience. Ne vous imaginez pas
que vous puissiez être dans l'état de justification sans en avoir le
témoignage.
La paix, il est vrai, peut remplir votre âme sans que cependant vous
tiriez la conclusion que vous êtes justifié. Je me rappelle le temps
où mon coeur était rempli d'une paix si délicieuse que la nature
entière me semblait faire silence pour écouter la voix de Dieu ;
je ne savais cependant pas que ce fût la paix de Dieu et que je fusse
réellement justifié. Loin de là, car voyant que j'avais perdu ma
conviction de péché, je cherchais à la ramener en moi. Je n'eus l'idée
que j'étais justifié que lorsque l'amour de Dieu fut répandu dans mon
coeur par le Saint-Esprit en une telle abondance que je fus obligé de
m'écrier : « Assez, Seigneur, je n'en puis porter
davantage. » Je ne crois pas que le sentiment de la condamnation
puisse subsister là où le pardon de Dieu est réel.
D. Avez-vous l'esprit d'adoption ? Si vous êtes justifié, vous
êtes adopté comme enfant de Dieu ; Dieu met son esprit dans votre
coeur et vous vous écriez tout naturellement : « Abba !
Père ! » Dieu vous apparaît, en effet, comme un Père et vous
avez besoin de l'appeler du nom de Père. Connaissez-vous quelque chose
de cela ? Autre chose est d'appeler Dieu du nom de Père, autre
chose d'avoir pour lui un sentiment vraiment Si vous avez l'esprit
d'adoption. c'est une preuve que vous êtes actuellement justifié.
1. Mes chers auditeurs, je voudrais pouvoir demander à
chacun de vous en particulier s'il est justifié. En avez-vous la
preuve ? Oseriez-vous comparaître devant Dieu en cet
instant ? Si les sons éclatants de la dernière trompette
ébranlaient maintenant l'Univers, et que vous vissiez apparaître le
Fils de Dieu venant pour juger les nations, seriez-vous prêt à
comparaître devant Lui ? Pourriez-vous élever avec
tranquillité vos regards vers le ciel et dire : « Ce moment
est solennel, mais Jésus-Christ est mort pour moi, Dieu m'a justifié,
qui me condamnera ? »
2. Si vous croyez avoir été justifié autrefois et
qu'actuellement vous n'ayez pas le témoignage intérieur d'être en état
de grâce, je vous ferai une question : « Êtes-vous sous la
discipline de l'alliance de grâce ? » Si vous n'y êtes pas,
quelle raison auriez-vous de croire que vous avez jamais été
justifié ? Pour celui qui appartient à Christ, l'alliance que
Dieu a traitée avec lui renferme cette condition : « S'il
rétrograde, je punirai de la verge ses transgressions. » Si donc
vous ne marchez pas avec Dieu et que vous ne soyez pas châtié, vous
n'avez aucune raison de croire que vous êtes enfant de Dieu.
3. Ceux d'entre vous qui ont la preuve qu'ils ont été justifiés
doivent maintenir la relation avec Dieu dans laquelle leur
justification les a placés ; ils doivent vivre à la hauteur des
privilèges qu'elle leur a acquis. Ce point est d'une très grande
importance. Il n'y a aucune vertu à être méfiant, craintif, plein de
doutes. Une des raisons pour lesquelles beaucoup de chrétiens ne
croissent pas dans la grâce, c'est qu'ils craignent de réclamer les
privilèges d'enfants de Dieu qui leur appartiennent. Soyez-en
certains, mes bien-aimés, il n'y a là aucune véritable humilité ;
cette crainte n'est, au contraire qu'une criminelle incrédulité. Si
vous avez la preuve que vous êtes justifié, prévalez-vous en pour
rechercher la pureté intérieure ; venez à Dieu avec toute la
hardiesse que pourrait avoir un ange et comprenez combien vous êtes
près de son coeur. C'est là votre devoir. Pourquoi vous tiendriez-vous
en arrière ? Pourquoi craindriez-vous de reconnaître toute
l'étendue de l'alliance de grâce ? Tous les biens de la maison
paternelle sont à votre disposition. Convertis, justifiés, réintégrés
dans la famille de Dieu, vous craindriez encore de vous asseoir à la
table du Père ! N'alléguez pas que vous êtes « si
indignes », une telle excuse n'est que propre justice et
incrédulité. C'est vrai, vous êtes très indignes ; mais si
vous êtes justifiés, ce n'est plus une barrière entre vous et
Dieu. Votre devoir est maintenant de saisir les promesses qui
vous appartiennent. Prenez chacune des promesses bibliques qui vous
concernent, portez-la à votre Père, réclamez-en l'accomplissement, et
croyez que Dieu vous exauce. Pensez-vous que Dieu veuille
méconnaître ses engagements ? « Les très grandes et
précieuses promesses » vous ont été données dans le but exprès
que vous « deveniez participants de la nature divine. »
Pourquoi douter encore ? Venez donc, mes bien-aimés
approchez-vous, saisissez l'amour, la paix, la joie que vous offre
l'Évangile.
4. Si vous n'êtes pas dans l'état de justification, vous n'êtes
rien, quels que soient les travaux que vous ayez pu accomplir et
quelles qu'aient pu être vos prières et vos souffrances. Vous avez pu
être des semaines, des mois, même des années, dans l'angoisse et la
détresse, soupirant et gémissant, et cependant, si vous n'êtes pas
actuellement justifiés, vous êtes toujours dans un fiel amer, sous la
condamnation de la loi et sous la colère de Dieu.
Mes chers auditeurs, si vous êtes maintenant sous la colère de Dieu,
croyez en Christ. Tous vos retards et vos gémissements ne vous
approcheront pas d'une ligne plus près de Dieu. Me direz-vous que vous
avez besoin d'une plus grande conviction de péché ? Je vous
répondrai : « Venez à Christ maintenant. » Me
direz-vous que vous devez attendre d'avoir prié, davantage ? Je
vous demanderai à quoi peut servir de prier dans l'incrédulité. La
prière d'un rebelle condamné à mort, peut-elle avoir quelque
efficacité, à moins que ce ne soit la prière de la repentance et de la
foi ? Direz-vous que vous êtes « si indigne ? »
Christ est mort pour ceux qui sont tels. Il vient droit à vous
maintenant. Où êtes-vous assis ? Quel est ici le pécheur auquel
s'adressent mes paroles ? Pécheurs, il n'y a pas de bonne raison
pour attendre. Il n'est nullement nécessaire que vous rentriez dans
votre demeure en gardant ce lourd fardeau sur votre coeur. C'est
maintenant le jour de salut. Écoutez Parole de Dieu : « Si
tu crois dans ton coeur au Seigneur Jésus-Christ et que tu confesses
de ta bouche que Dieu l'a ressuscité des morts, tu seras sauvé. »
Demanderez-vous encore : que dois-je croire ? Croyez ce que
Dieu dit de son Fils. Attachez-vous à quelqu'une de ces vérités
fondamentales que Dieu a révélées concernant la voie du salut ;
appuyez votre âme sur elle, et vous serez sauvé. Ne voulez-vous pas
vous abandonner maintenant au Seigneur Jésus-Christ ? N'avez-vous
pas assez de confiance en lui pour vous remettre entre ses mains, afin
qu'il dispose de votre corps et de votre âme comme il l'entendra, pour
le temps et pour l'éternité ? Ne pouvez-vous pas lui dire :
« Seigneur, je me donne à toi, »
« C'est tout ce que je puis faire ? »
Peut-être essayez-vous, avant d'aller au Sauveur, de vous tirer par
vos prières des difficultés qui vous retiennent. Cela ne vous servira
de rien. Jetez-vous maintenant aux pieds de Christ, remettez votre âme
entre ses mains. Dites-lui « Seigneur, je me donne à toi ;
dispose de moi comme tu voudras pour ta propre gloire ; je sais
que tu feras tout parfaitement bien, et c'est tout ce que je
désire. » Ne voulez-vous pas le lui dire en cet instant ?
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