Voici le simple récit de mes
expériences dans la Russie d'hier et
d'aujourd'hui, dans cette Russie que j'aime tant,
à laquelle tant de liens m'attachent et que
j'ai dû quitter, avec grand serrement de
coeur, à l'âge de cinquante-deux ans,
pour chercher à l'étranger une autre
patrie.
Mon désir et ma prière
à Dieu, c'est que ces quelques pages soient
pour mes lecteurs un stimulant à se montrer,
dans toutes les circonstances de la vie, même
les plus difficiles, de fidèles disciples de
Jésus-Christ. C'est de la foi vivante et
agissante au Christ Sauveur que le mouvement
évangélique en Russie a tiré
et tirera toujours sa force. Ma propre
expérience m'a montré la puissance de
la Parole de Dieu ; elle répond aux
besoins des âmes assoiffées de
vérité et donne force et consolation
aux jours de détresse et
d'épreuve.
Le chrétien, même aux prises
avec les difficultés et en butte aux
attaques et aux persécutions, ne doit jamais
cesser de porter secours, par son amour agissant et
ses intercessions constantes, aux âmes
faibles et languissantes, et de proclamer devant le monde
que la liberté,
l'égalité et la fraternité
vraies ne sauraient être fondées qu'en
Jésus-Christ. Il faut risquer sa vie, non
pour une idée, si grande et si belle
soit-elle, mais pour la réalisation du
Royaume de Dieu. À Lui seul soit la
gloire !
Avec l'Église souffrante et
combattante, j'attends la venue du Seigneur, selon
la promesse du prophète Ésaïe
(ch.
XXXV, v. 10) : « Les
rachetés de l'Éternel reviendront
à Sion avec des chants de triomphe, et une
joie éternelle couronnera leur tête.
L'allégresse et la joie seront leur partage.
La douleur et les gémissements
s'enfuiront ».
L'évangéliste Cornélius
Jacovlévitch Martens appartient aux
Mennonites, colons d'origine et de langue
allemandes, dont les aïeux sont allés
s'établir en Russie au XVIIIe siècle,
à l'appel de l'impératrice Catherine
II, pour fuir les persécutions dont ils
étaient l'objet en Occident.
Les Mennonites sont une secte
évangélique datant de l'époque
de la Réformation. Ils n'admettent dans leur
Église que les adultes, et les baptisent par
immersion. Ils refusent de faire leur service
militaire dans les armes combattantes, ce qui leur
valut maint conflit, jadis, en Prusse ;
Catherine leur garantit et la liberté de
conscience et l'exemption du service
militaire.
En Russie, ils ont conservé,
malgré un certain formalisme, une
piété très vivante et un beau
zèle qui s' est manifesté entre
autres par une grande libéralité
envers les sociétés missionnaires.
Toutefois la propagande évangélique
qu'ils ont faite en Russie, sous l'ancien
régime, est due à l'initiative
d'individus isolés et non de l'Église
mennonite comme telle.
Les chrétiens
évangéliques d'origine russe sont
connus dans le peuple sous le nom de Stundistes.
Cette appellation leur vient de ce que leur
mouvement est né au contact des
piétistes wurtembergeois établis au
Sud de la Russie, et qui appellent
« Stunden » leurs
réunions religieuses. Les Stundistes,
étant des dissidents de l'Eglise orthodoxe
russe, ont eu à endurer de grandes
persécutions sous le régime
tsariste.
Au début, la Révolution, en
proclamant la liberté religieuse, a
donné la possibilité aux Mennonites
comme aux Stundistes de prendre une certaine
extension. Toutefois les autorités
soviétiques se montrèrent
bientôt hostiles et beaucoup de
chrétiens évangéliques, sous
d'autres prétextes, il est vrai, que leurs
croyances, ont été exilés ou
mis à mort. Les évangélistes
ont dû finalement chercher leur salut
à l'étranger, en particulier M. C.
Martens, que sa dure enfance avait si bien
préparé à apporter
l'Évangile aux pauvres et aux
illettrés.
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