Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

III

La situation

Les Révolutions nécessaires

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Évolution, un mot, une théorie, dont il ne se trouve pas trace dans la Bible.
Révolution, oui, pas évolution.

L'homme, Adam, ce chef-d'oeuvre sorti des mains du Créateur, et sa race, nous les voyons rétrograder, nous ne les voyons pas évoluer. Et leur salut présent, comme leur salut final, seront le produit, non d'évolutions, mais de révolutions : la nouvelle naissance est une révolution, la transfiguration du croyant à l'image et à la ressemblance de Jésus-Christ, l'établissement du Royaume de Dieu, de nouveaux cieux et d'une nouvelle terre, sont, seront, des révolutions.

Nous ne voyons pas évoluer, au cours de son histoire, le peuple d'Israël, produit, cependant, de la plus remarquable sélection, nous le voyons rétrograder, s'abîmer dans une ruine sans nom, pour n'avoir pas voulu accepter les révolutions nécessaires.

Et l'Eglise, qui ose dire qu'elle obéit à une loi d'évolution ? Produit d'une sélection supérieure encore à celle d'Israël, l'Eglise part d'une cellule à peu près parfaite - l'Eglise du lendemain de la Pentecôte - pour aboutir à la confusion de nos temps modernes.

Des voix généreuses se font entendre à cette heure en faveur de l'Union des Églises, de l'Unité même, comme l'avait voulue Jésus-Christ.
L'unité des croyants, ah ! certes, quelle prédication elle serait pour le monde !
Mais est-ce bien par là qu'il faut commencer pour sauver l'Eglise ? Ne met-on pas la charrue devant les boeufs. ?

Consommer une Unité dont devrait faire les frais la Vérité serait trahir aussi bien la pensée du Maître.
Qu'est-ce qui seul pourrait sauver l'Eglise en danger ? - Une évolution ? Non. Une révolution, une série de révolutions.




Le « Christianisme » du 26 septembre 1918 publiait un remarquable, un puissant article du doyen Doumergue.
Je l'ai précieusement conservé : Les Révolutions nécessaires. - « Je ne suis point prophète », disait modestement notre vénéré doyen.
Or, il fut prophète ; on le sent, quand on relit, après treize ans, cette belle page.
Passant en revue quelques-unes des réformes, d'ordre ecclésiastique, qu'appelait alors l'Eglise, - qu'elle appelle toujours - notre Église réformée, si elle voulait vivre, il concluait :

- « Il faut, - et je n'aborde pas la question capitale, celle de la foi - il faut des révolutions intimes et profondes dans notre Église.
« Et ce qui m'effraie, c'est que, ces révolutions-là, on n'a pas l'air de les désirer et de les préparer. »

J'attendis impatiemment - et ne fus sans doute pas le seul - la conclusion de cet article.
Les semaines, les mois passèrent. C'étaient, il est vrai, les formidables semaines de la fin du gigantesque conflit. À l'effort suprême il fallait les paroles correspondantes d'encouragement au pays qui haletait, après ces cinquante mois d'enfer, et notre doyen les prodigua...
Alors, vers la fin de décembre, je me décidai, moi, le dernier et le moins qualifié de tous, à reprendre le poignant sujet et j'envoyai quelques notes au journal que le directeur d'alors, M. Couve, voulut bien, en bonne place, insérer.

C'est de ces notes, résumé de ma pensée, que ces lignes s'inspireront. La situation, depuis, ne s'est pas améliorée, il s'en faut (1).


Première révolution nécessaire

Retour à la prédication apostolique.

L'une des graves raisons de la stérilité de notre prédication et, par conséquence, de la mort de nos églises, c'est que notre parole n'est à peu près plus uniquement qu'un effort d'intelligence, de connaissances philosophiques, morales et religieuses, au lieu d'être une démonstration d'esprit et de puissance.
- « Ma parole et ma prédication, dit l'apôtre, ne reposaient pas sur les discours persuasifs de la sagesse - au sens grec du mot : science, instruction, connaissance approfondie des choses - mais sur une démonstration d'Esprit et de puissance. »

Nous sommes rongés, desséchés, par l'intellectualisme religieux, tous, pasteurs comme laïcs, laïcs comme pasteurs.
Certes, on ne préparera jamais trop une prédication, mais c'est à genoux, mais c'est dans l'intercession, et non point plongés dans des notes et des livres, c'est en nous offrant en sacrifice vivant à Dieu, le suppliant de nous utiliser comme de simples canaux où passera l'effusion de la Grâce.

Les apôtres ne connaissaient que deux catégories : d'âmes : des sauvées et des perdues. Et ils prêchaient en conséquence :
- « Sauvez-vous... ! » criaient-ils. « Fuyez la colère à venir... ! »

À nous entendre, mais il semble vraiment que nous croyons au purgatoire ! (2)
Si quelqu'un pense donc parmi nous qu'il faille parler aux sages et aux riches de ce monde un autre langage qu'aux humbles, aux ignorants, ou aux gens de mauvaise vie, il n'a rien compris au ministère évangélique.

 

Rien ne ressemble plus au coeur du plus pauvre et du plus misérable des hommes, que le coeur du plus riche et du plus instruit. Et les péchés de ceux-ci sont aussi rouges et aussi répugnants, parfois plus, que les péchés de ceux-là. Les intellectuels et les riches nous maudiront éternellement de ne pas leur avoir parlé aussi simplement et aussi franchement de leurs péchés que nous le faisons aux pauvres.


Deuxième révolution

Quitter dans nos sermons le langage collectif et devenir personnels.

Disons-nous bien que l'impersonnalité, en religion, est une manière d'hypocrisie. Il faut en finir avec le pluriel de majesté qui endort les âmes et entretient en elles la plus fatale sécurité.

Il ne s'agit pas de parler du péché en général à nos auditeurs, mais de leurs péchés. « Vous... », « Vos péchés... ». Si le prédicateur se met, peut-on dire, dans le tas, s'il donne, si peu que ce soit, l'impression qu'il a besoin du salut, du pardon de ses péchés, comme le plus impénitent de son auditoire, son autorité spirituelle sera nulle, et il ne devra s'attendre à aucun résultat de ses paroles.
Même remarque pour ses visites pastorales et ses conversations avec ses paroissiens : - Êtes-vous sauvé ? Avez-vous la certitude du pardon de vos péchés ? Êtes-vous né de nouveau ? Comment va votre âme ?...
C'était le langage de Félix Neff, bien avant que l'Armée du Salut vît le jour.

Et si, sur la réponse d'une âme hésitante, ou troublée par un appel direct, le pasteur n'a pas la puissance spirituelle de conduire sur-le-champ, résolument, cette âme au pied de la croix, à la certitude glorieuse du pardon et de l'adoption en Christ, ce pasteur est insuffisant à sa tâche. Il a la mission de conduire au salut les autres, est-il sauvé lui-même... ?


Troisième révolution

Revenir à l'autorité de l'Écriture comme Parole de Dieu.

Peut-être eût-il fallu commencer par là. Car, en définitive, tout découle de là. - « La foi vient de ce qu'on entend, et ce qu'on entend vient de la Parole de Dieu. »

Ébranlez l'autorité de la Bible, et tout l'édifice évangélique se lézarde, et par ces mille fissures pénètrent tous les ferments du doute et toutes les tares de l'impuissance. Croire à l'autorité souveraine de la Parole de Dieu, c'est commencer par vivre cette Parole. Sans doute. Mais c'est encore autre chose :

Croire à l'autorité de la Bible c'est, lorsque par exemple il est écrit : « L'Éternel dit à Abraham... » tenir pour vrai que cela signifie exactement : L'Éternel dit à Abraham. C'est donner aux mots employés dans la Bible leur sens usuel, le sens du dictionnaire, adoptant pour l'Écriture la définition de Fustel de Coulanges : Quand un mot a un sens net et clair, ne pas lui chercher d'autre sens.

La Bible appelle un miracle, miracle. Elle ne dit point par exemple que le passage du Jourdain put s'accomplir grâce au concours de certaines conditions atmosphériques, ou naturelles, mais elle dit que cet événement inouï de séparation des eaux se produisit sur-le-champ, et par un effet surnaturel, immédiat, de la seule volonté de Dieu. La Bible dit cela. Croire à l'autorité de la Bible, c'est tenir pour rigoureusement exacts les récits bibliques, c'est ne rien y ajouter, ne rien en retrancher. De même pour les autres miracles, et prodiges, et accomplissements de prophéties, de la Bible.

Nos confessions de foi modernes disent, même parfois celles d'amis dont le drapeau est le plus évangélique, - autorité souveraine des Saintes Écritures en matière de foi. Pourquoi cette restriction : en matière de foi ? Elle ne se trouve pas, il s'en faut, dans la Confession de 1559 (3).
Cette restriction est grave. Elle est lourde de conséquences. Elle me permet de déchirer le premier chapitre de la Genèse, et cent autres chapitres autre part.
Si la Bible se trompe en matière de Science, quelle confiance puis-je avoir en elle en matière de foi ? Pour ma part, aucune.
- « Un tel est un brave homme, de très bonne foi et morale ; malheureusement, c'est un grand ignorant. »

Acceptez-vous l'autorité spirituelle souveraine de cet un tel ? Non ? Moi non plus.
Croire à l'autorité de la Bible c'est, surtout, avant tout, croire à l'autorité transcendante, absolue, de notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ, c'est-à-dire croire à sa déité, à sa conception miraculeuse de la Vierge Marie par le Saint-Esprit : « Au commencement était la Parole, et la Parole était avec Dieu, et la Parole était Dieu. Elle a été faite chair... » « En vérité, en vérité, je vous le dis : Avant qu'Abraham fût, je suis. » « Moi et le Père nous sommes un. »
Seul, un dieu, ou un fou, peut parler ainsi.
Et comme le Christ a couvert de son autorité, par des déclarations formelles et répétées, tous les récits, toutes les prophéties, de l'Ancien Testament, croire à l'autorité de l'Écriture, c'est en définitive faire équivalentes les paroles des prophètes et celles du Christ.

La Bible est la robe sans couture qui recouvre la pensée de Dieu. Elle est la volonté écrite de notre Père céleste pour notre salut.
- « Elle n'est pas tant écrite d'encre que du sang du Fils de Dieu », disait Calvin.
Y toucher est un sacrilège doublé d'un incommensurable appauvrissement. C'est le signal de l'écroulement prochain de tout édifice religieux, de quelque nom qu'on le nomme.

La douloureuse - disons le mot, la scandaleuse, - situation déficitaire de nos budgets, la stagnation spirituelle lamentable - le paganisme, disait crûment une enquête récente - de nos Églises, n'en cherchons pas la cause dominante autre part que dans une infidélité persistante à la Parole de Dieu, infidélité d'autant plus grave et dangereuse qu'elle est savamment camouflée d'évangélisme.

En Angleterre, aux États-Unis, en Suisse, partout, le mal s'aggrave de jour en jour.
La tendance toujours plus marquée au « Puseysme » et à l'anglo-catholicisme, qui se manifeste en Angleterre et ailleurs n'a pas d'autre cause que l'irrespect croissant pour l'Écriture dans ces pays.
Et nous sommes ici logiquement obligé d'aborder un sujet brûlant, infiniment délicat, celui de nos Facultés de théologie.
Nous le ferons avec tout l'amour, toute la réserve, toute la déférence qui leur sont dus.
Autant il serait injuste de généraliser ou de contester la piété, la haute valeur morale des professeurs, autant il serait insensé de dissimuler le mal, de se dérober aux responsabilités comme aux mesures qui s'imposent.

Nous devons donc être, en même temps, d'une sincérité, d'une fermeté auxquelles nous donneraient droit plus de trente ans passés au service de nos Églises. Mais comment oser parler de droit quand nous sentons d'une manière cruellement douloureuse notre indignité, et, aussi, combien il conviendrait plutôt à d'autres, incomparablement mieux qualifiés que nous, de prendre ici la parole.
C'est uniquement parce qu'ils se taisent que, contraint par l'Esprit, nous élevons la voix.

Dans les Facultés de théologie, des réformes radicales s'imposent si l'on ne veut pas que nos églises finissent toutes par s'enliser dans l'indifférence, le formalisme et l'incrédulité.
Sans doute nos pasteurs ne seront jamais trop cultivés ; mais il ne faudrait pourtant pas perdre de vue que théologie signifie connaissance de Dieu, et que se préparer au Saint Ministère c'est viser avant tout à devenir un dispensateur fidèle, un « ministre » de la Parole divine ; qu'une des premières conditions pour réussir dans cette sainte vocation c'est de cultiver le respect du « Il est écrit » que pratiquait à un si haut point le Sauveur.

« Celui qui gagne les âmes est sage ». Gagner des âmes à Jésus-Christ, n'est-ce point le premier, le suprême savoir, à emporter de ces études de théologie ? Or, pour ce combat, l'arme par excellence, c'est la Parole de Dieu. Hébr. IV, 12, 13.

« Les armes de notre guerre, dit le grand gagneur d'âmes saint Paul, ne sont pas charnelles (psychiques), - et l'intellect ressortit au psychique de l'homme, non au spirituel -, mais puissantes par Dieu pour détruire les raisonnements et toute hauteur qui s'élève contre la connaissance de Dieu, amenant toute pensée captive à l'obéissance du Christ... » 2 Cor. X. 4.

Un collègue nous disait que, durant ses quatre années de Faculté, il n'avait étudié de l'Ancien Testament que le seul livre de Job, et quelques psaumes. Un autre faisait devant plusieurs cette déclaration, qui nous serra violemment le coeur :
- Durant mes études de théologie, j'ai dû lutter quatre années pour défendre ma foi... »

Aussi n'est-elle pas surprenante cette parole d'un récent discours de consécration, que reproduisaient les journaux :
- « Pendant mes premières années de théologie, j'ai passé par une crise dans laquelle ma foi a failli sombrer... »

Et cependant, si les Facultés de théologie n'existaient point, pas un instant ne serait à perdre pour les inventer.
Et à ceux qui objectent que le Sauveur ne choisit aucun de ses apôtres parmi les hommes instruits de son temps, il est facile d'opposer la parole de l'un des moins suspects, à ce propos, des disciples : « Joignez à votre foi la vertu, et à la vertu la connaissance (gnôsin)... »
Combien en effet serait amoindri un ministère qui n'aurait eu sa pénétrante, sa profonde préparation théologique et intellectuelle.

Nous sommes le premier à déplorer que par la misère des temps, et à cause de la grande pitié de tant d'Églises sans berger, on doive donner à celles-ci des hommes hâtivement préparés. Mais il faut avertir ces hommes, il faut qu'ils comprennent, qu'ils ne pourront vraiment suffire à leur tâche que s'ils étendent largement, dans la suite, et consolident, par un labeur acharné, leur sommaire instruction (4).

On ne peut donc se méprendre sur notre pensée. Mais voici ce que nous demandons, pour l'amour des âmes qui périssent, pour le salut de nos Églises, c'est : que ce qui semble ne plus être que l'ACCESSOIRE dans les programmes des Facultés de théologie y devienne l'ESSENTIEL.

Il faut que nos futurs pasteurs, non seulement ne risquent plus de voir sombrer leur foi durant leurs années d'études, mais que nos Écoles visent, avant tout, à former des hommes « versés dans la connaissance des Écritures ». (Actes XVIII, 24.)

Un pasteur a besoin, c'est entendu, d'un bagage solide, mais non spécialisé. Et ici nous touchons à la conception fausse de la préparation des pasteurs : On voit la Faculté sous forme d'une miniature d'Université, au lieu d'École où l'on forme des ouvriers de Dieu pour le salut des âmes.
Et c'est ainsi que l'on se noiera, toute une année durant, dans des détails, des précisions inutiles, sur l'Histoire religieuse, alors que l'on ne consacrera que deux leçons au Réveil.

À quoi cela peut-il bien servir au futur pasteur de savoir qu'il y a soixante opinions différentes sur tel verset, et qu'en retiendra-t-il ? Ou que l'on lui donne toutes les conceptions possibles de la Conversion sans arriver à une conclusion pratique, sans enseigner à cet homme, dont la carrière, par définition, n'a d'autre fin que d'amener des âmes à Jésus-Christ, la voie apostolique, sûre et droite, d'atteindre ce but ?
Et comment un professeur, qui a peu, ou qui n'a pas, exercé le ministère, peut-il former pour le ministère ?
Quel sens ont dans nos Facultés les mots, inscrits en lettres d'or dans les Confessions de foi : autorité souveraine des Écritures ?

Et n'est-ce pas un défi à toute sagesse spirituelle et à toute foi qu'une Faculté de théologie puisse avoir pour idéal de ressembler à une Faculté de médecine, où les corps à disséquer seraient la Parole vivante de Dieu et la personne sacrée de Jésus-Christ ?

La pratique de telles opérations, qui presque toujours, hélas ! sont des profanations, s'imagine-t-on qu'elle pourra enrichir la pensée religieuse de l'étudiant ? Et que pourra celui-ci, plus tard, apporter aux âmes sinon un squelette de Jésus, sinon une lettre morte de l'Écriture ? On ne saurait avec des cadavres mettre au jour des vivants.
C'est ainsi qu'un professeur pourra consacrer une année de cours à démontrer, essayer du moins, que l'expiation ne se trouve pas dans la Bible...

Comment le futur pasteur aura-t-il ensuite le courage de prendre pour programme de prédication celui de l'apôtre :
- « Parmi vous, je n'ai jugé savoir qu'une seule chose : Jésus-Christ et Jésus-Christ crucifié. » ?

En sorte qu'un jeune pasteur formé de cette manière pour le ministère ressemble à un soldat qui jeté soudain dans la plus terrible des batailles ferait la tragique constatation que l'épée mise entre ses mains, à la poignée toute dorée, sertie de diamants, ciselée avec un art raffiné, n'est qu'en carton, et que ses cartouches ne sont bourrées que d'étoupe...

En somme, l'étudiant ne reçoit par de base biblique au sens positif de ce mot. On ne lui donne pas un esprit biblique. Et, jeune pasteur, il arrive dans son église avec le plus douloureux « déficit » biblique. Il va lui falloir apprendre l'A B C de la Bible pour être capable d'enseigner ceux dont il a la responsabilité devant Dieu.

L'élève de Saint-Cyr, en entrant à l'École, a un bagage intellectuel sensiblement équivalent à celui de l'étudiant de Faculté à sa seconde année. Mais à Saint-Cyr, tout va tendre à faire de cet élève non un spécialiste des questions militaires - il y a pour cela l'École supérieure de guerre - mais un entraîneur d'hommes, un soldat. Il faut qu'il sorte de là un maître dans l'art de tuer.

De quoi l'Eglise a-t-elle le plus urgent besoin ? Qu'attend-elle de ses Facultés ? Des spécialistes des questions théologiques ? Non.
Qu'on lui envoie des maîtres dans l'art de sauver.
Sera-t-il donc éternellement vrai que « les enfants de ce siècle sont plus sages que les enfants de lumière » ... !
Arrivé dans sa paroisse, les plus douloureuses, les plus décevantes expériences attendent le pasteur. Qui en fera les frais ? L'Eglise.
Que le pasteur soit aux écoutes de l'Esprit et lui obéisse, il lui faudra refaire sa théologie. Que d'années perdues !

Quelles pages de l'Écriture devraient être plus lues, et relues, dans une Faculté de théologie, et commentées, et méditées, avec la plus sainte émotion, ainsi que dans la veillée d'armes, autrefois, le chevalier faisait au seigneur l'oblation totale de son être, que les trois Épîtres, celles dites pastorales, de l'apôtre Paul à Tite et à Timothée ?
Hélas ! de quel poids sont aujourd'hui ces appels poignants de l'héroïque athlète qui écrivait en prison, quelques heures peut-être avant que sa tête roulât sous le glaive, l'épître qui va nous servir de conclusion ?

Plaise à Dieu qu'à cette heure sombre de la destinée des nations et de l'Eglise, ce cri pathétique, couvrant le vain bruit du nôtre, soit entendu :
- « Je t'en conjure, devant Dieu et devant Jésus-Christ, prêche la parole, insiste, reprends, censure, exhorte... car il viendra un temps où les hommes ne supporteront pas la saine doctrine... Ils se donneront une foule de docteurs selon leurs propres désirs, et détourneront l'oreille de la vérité...

« Efforce-toi de te présenter devant Dieu comme un homme éprouvé, un ouvrier qui n'a point à rougir, dispensant droitement la parole de la vérité... Pour moi, je sers déjà de libation. J'ai combattu le bon combat... J'ai gardé la foi !... »

Quelle est donc la Faculté idéale ? - C'est la Faculté fidèle, qui forme des ouvriers fidèles, remplis d'amour pour les âmes qui périssent et passionnés pour la gloire du Crucifié.
C'est le Réveil, qui par la puissance du Saint-Esprit, peut seul accomplir cela.


Quatrième révolution

Révolution spirituelle.

Souvent, dans les Évangiles et les Actes, cette expression revient : rempli du Saint-Esprit, baptême du Saint-Esprit ...
Le mot, et surtout la chose, sont lamentablement absents des préoccupations religieuses modernes.

C'était par un baptême du Saint-Esprit que commençaient tous les ministères, toutes les charges apostoliques, même la consécration au « service des tables ».

L'imposition des mains, oui, c'est entendu, nous l'avons. C'est une cérémonie très solennelle, très imposante. Mais c'est une cérémonie. Le baptême du Saint-Esprit, c'est une puissance.
Est-ce que la forme nous suffit ?
Le Saint-Esprit était appelé, dans la pensée de Dieu, à remplacer Jésus-Christ sur la terre après son ascension au ciel. - « Il vous est avantageux que je m'en aille, car si je ne m'en vais, le Consolateur ne viendra pas à vous. » Nous savons que ce Consolateur, c'était le Saint-Esprit. Nous savons quel rôle unique, prépondérant, il devait remplir dans le monde. Pas de repentance, pas de force pour résister au mal, pas d'autorité spirituelle pour amener les âmes au pied de la croix, sans le Saint-Esprit.

On pourrait rééditer, au sujet du Saint-Esprit, le mot de Siéyès à propos du Tiers-État : - « Qu'est-ce que le Tiers-État ? Tout. - Qu'est-il ? Rien. - Que demande-t-il à être ? Quelque chose. »

Avoir reçu le Saint-Esprit, avoir reçu le baptême d'Esprit et de puissance, voilà ce qui devrait qualifier, avant tout, un candidat au Saint Ministère.
Voilà la révolution la plus nécessaire, la plus urgente à introduire dans nos Facultés de théologie et dans nos Églises.
Tout cela est vrai !
Mais tout cela est-il possible ?
Puisque cela est vrai, cela est possible.
Et cela sera possible si nous le voulons, sincèrement, loyalement. Alors, Dieu fera le reste.

On vous appellera théopneuste attardé, minus, fossile et autres aménités dont s'honore tout fidèle serviteur du Dieu vivant.
Et puis après ? Si votre témoignage privé et public est en accord avec votre position théologique, si vous êtes un homme de prière, un homme qui aime les âmes, à commencer par l'âme de vos contradicteurs, vos insulteurs même, si vous êtes un homme tenace, d'une persévérance à toute épreuve, votre volonté s'imposera dans votre milieu, de Faculté, de synode ou de paroisse, et le réveil souhaité viendra et récompensera vos efforts.

Si même il ne vous est pas accordé de voir le fruit de votre fidélité, eh bien, vous aurez été une vaillante sentinelle. Vous aurez sonné de la trompette. Vous serez net du sang de vos frères.
« Et si après avoir averti les âmes pour les détourner de leurs erreurs et de leurs mauvaises voies, elles ne s'en détournent pas, elles mourront dans leur iniquité. Et vous, vous sauverez votre âme. » (Ezéchiel XXXIII.)

Mon frère, ma soeur, notre Église tant aimée est en danger.
Criez-le sur les toits pour en avertir vos frères !
Criez à Dieu dans son sanctuaire, pour le supplier d'intervenir.

Que l'Éternel nous soit à tous en aide pour que s'accomplissent les révolutions nécessaires, avant qu'il soit trop tard.

Pasteur A. ANTOMARCHI
La Batie-Rolland, septembre 1931.



(1) Nous nous en tenons à notre seule Église réformée. Dans l'Eglise romaine. dans les autres Confessions. le mal est pour le moins aussi grave. Que chacun balaie devant sa porte. 

(2) Quelques pasteurs commencent d'ailleurs à y croire :  - « Peut-on prier pour les morts ? » demandent-ils publiquement. Et ils répondent : Oui. 

(3) Elle fut, on le sait, Introduite dans celle de 1872. 

(4) Un ministère manque, lamentablement à l'Eglise, et à peu près personne ne paraît s'en aviser : celui du colportage. Car c'est un ministère, et quel ministère !
Aurait-on oublié que ce sont les colporteurs qui ont fait pour une bonne par la Réforme ?
Oui, mais voilà, être colporteur. ce n'est pas honorifique...
La raison des succès de l'Adventisme tient dans le grand nombre de ses colporteurs et leur remarquable entraînement. 
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