Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

CHAPITRE XII

LES HISTOIRES DE LA BIBLE

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Nous oublions notre propre enfance. Nous oublions, en parlant aux enfants, notre goût prédominant pour les belles histoires, quand nous étions nous-mêmes des enfants. Et nous abreuvons ces pauvres petits de sermons, de doctrines, de formules morales que leur esprit ne saurait digérer, et qu'il rejettera tout simplement.

Oui, il faut raconter des histoires à nos enfants, mais en nous gardant des réflexions morales dont nous sommes enclins à les assaisonner. Laissons aux enfants le soin de trouver par eux-mêmes la leçon que nous en voulons tirer. Elle leur sera d'autant plus profitable.

Surtout ne donnons pas en pâture à nos enfants de ces histoires visiblement fabriquées pour les besoins de la cause. Ils sauraient vite les comparer avec les histoires vraies qu'on leur apprend à l'école, et la comparaison ne serait pas flatteuse pour nos récits fictifs et truqués. Apprenons à nos enfants les histoires de la Bible, sans y mettre autre chose que ce qu'il y a dedans. Apprenons-leur aussi les histoires des premiers martyrs et des grands chrétiens jusqu'à nos jours.

Comment faut-il raconter les histoires de la Bible, pour qu'elles fassent de l'impression sur les enfants ?
Avant tout, il faut les raconter en un langage aussi simple et aussi familier que possible, de manière qu'elles soient tout à fait accessibles aux enfants. Remarquez qu'il n'est pas du tout nécessaire, avant de raconter une de ces histoires, d'annoncer que c'est une histoire « tirée de la Bible ». C'est une histoire, voilà tout, et qui porte en elle-même son intérêt.

Il vaut mieux que vous ne commenciez pas votre histoire tout de suite, surtout si vous êtes devant un groupe d'enfants réunis. Il faut d'abord qu'ils se calment un peu, qu'ils soient disposés à écouter en silence, qu'ils n'aient pas autre chose qui les préoccupe. Ne vous imaginez pas qu'il vous suffira de dire : « Mes enfants, je vais vous raconter une histoire tirée de la Bible » pour que vos petits auditeurs soient tout oreilles. Presque toujours ils ont quelque chose à vous raconter eux-mêmes qui est pour eux du plus haut intérêt. Laissez-les donc, dans les deux ou trois premières minutes, avoir la satisfaction de dire quelque chose, de vous raconter un incident qui les a frappés, par exemple la rencontre d'un animal curieux.

Cela ne durera pas bien longtemps parce que les autres enfants en ont vite assez de ce que l'un d'eux est fier de raconter. Ils seront tous attentifs quand vous leur direz : « Eh ! bien, moi, je sais une histoire d'il y a très, très longtemps » ou bien : « J'en sais une autre, moi, une vieille histoire, mais très intéressante; vous allez voir » - enfin quelque chose qui pique leur attention.

Quand vous voulez raconter une histoire de la Bible de manière qu'elle fasse le plus d'impression possible sur les enfants, il y a cinq points différents sur lesquels je voudrais ici faire quelques remarques :

1° La préparation,
2° Le récit ;
3° Les gestes et la mise en scène ;
4° L'illustration ;
5° La répétition de l'histoire par les enfants eux-mêmes.

1° La préparation. Lisez et relisez l'histoire pour vous-même plusieurs fois, bien avant de la raconter, dans un ou de préférence dans plusieurs des innombrables recueils d'histoires de la Bible pour les enfants que vous trouverez en librairie. Il en existe dans chacune de nos confessions différentes. Choisissez pour votre première lecture celui qui vous satisfait personnellement le mieux. Relisez ensuite ce même récit dans le recueil dont le langage est le mieux adapté à l'âge des enfants auxquels vous vous proposez de le raconter. Enfin, après tout cela, relisez-le dans le texte même de la Bible. Faites cette lecture à haute voix, pour que votre oreille saisisse mieux toutes les beautés du texte, les traits saillants, les détails impressifs. Et maintenant préparez votre propre version. Peut-être qu'au début vous éprouverez le besoin de l'écrire tout au long, de peur que votre mémoire ne vous trahisse. Mais vous arriverez bientôt à n'avoir plus besoin que d'un résumé, d'un simple mémento qui vous rappelle la suite des faits, les points saillants, les versets de la Bible que vous citerez textuellement, et cela suffira. Les enfants ne sont pas du tout refroidis par le fait que vous consultez vos notes, alors même qu'ils préfèrent que vous ne lisiez pas tout du long une histoire dans un livre. D'ailleurs, lire à des enfants et leur raconter une histoire sont deux choses très différentes ; la même personne est rarement capable de faire les deux choses également bien. Les enfants acceptent très bien que vous vous serviez de notes, et quand vous serez arrivé à bien posséder l'art de raconter une histoire, alors ils ne s'apercevront même plus que vous avez des notes. Mais pour vous, il est essentiel que vous rédigiez ce résumé, même si vous racontez l'histoire sans y jeter les yeux.

Un élément très important de la préparation, c'est le choix de l'illustration de votre histoire. J'y reviendrai en traitant de ce quatrième point, mais ici je veux seulement rappeler que toute cette illustration doit être soigneusement choisie à l'avance. Il arrive souvent qu'une histoire très bien racontée perd son effet parce que les images montrées aux enfants ont été choisies trop à la hâte, ou mal choisies ; parce que les images manquaient tout à fait, ou au contraire, parce qu'il y en avait trop, que l'ensemble devenait confus et dispersait trop l'attention.

2° Le récit. Servez-vous de mots colorés, vigoureux, et ne craignez pas de les répéter. La plupart des enfants ont pour les mots en général, mais tout spécialement pour les mots nouveaux et frappants, un goût tout particulier. Très souvent, quand ils demandent qu'on leur raconte de nouveau une histoire, ils font cette demande en se servant des mots qui les ont spécialement frappés. J'ai connu des enfants qui réclamaient toujours l'histoire de Chadrak, Méchak et Abed-Nego en l'appelant l'histoire des hommes qui étaient dans « la fournaise ardente ». L'histoire de l'armée de Gédéon, qu'ils aimaient aussi beaucoup, c'était l'histoire des hommes qui avaient « lapé » l'eau. Joseph, c'était toujours le garçon qui avait « la tunique de couleurs bigarrées ». Sans doute, ce n'était pas les seuls mots de l'histoire qu'ils eussent retenus, mais ces mots-là s'étaient gravés dans leur mémoire, comme des clous brillants où tout le reste était accroché.

Ne craignez pas de répéter plusieurs fois la même phrase ou le même mot, quand cela en vaut la peine. Cela enfonce mieux les faits dans l'esprit des enfants. Cela permet à ceux qui n'ont pas saisi tout de suite de se rattraper. Ces mots répétés restent mieux dans leur souvenir : ce sont les clous brillants dont je viens de parler. Si vous avez bien choisi tous vos termes, si vos phrases sont bien équilibrées et faciles à retenir, si elles sonnent bien, les enfants y seront sensibles, et cela les aidera à mieux comprendre et à mieux saisir l'élément moral et religieux.

Employez autant que possible les mots mêmes que vous trouvez dans la Bible, à condition qu'ils ne soient pas de nature à paraître à l'enfant des mots traditionnels, raides et empesés, ou tout simplement des mots incompréhensibles. Les mots colorés que j'ai cités plus haut sont dans le texte même de la Bible. Les paraboles de Jésus sont pleines de mots et d'expressions tout à fait accessibles, même aux tout-petits : « D'abord une herbe, puis un épi, puis tous les grains de blé qui remplissent l'épi. » - « Une perle de grand prix » - « Des pleurs et des grincements de dents » - « Celui qui a des oreilles pour entendre, qu'il entende ! » - Toute la parabole de la maison bâtie sur le roc et de la maison bâtie sur le sable. Toute la parabole des vierges folles et des vierges sages. Toute la parabole des talents.

Ce n'est pas seulement parce que ces expressions sont colorées qu'il est bon de les employer. C'est aussi parce qu'elles familiarisent l'enfant avec le texte de la Bible. Désormais la Bible ne pourra plus être pour eux un terrain absolument inconnu où l'on ne peut pas s'aventurer

L'enfant, plus tard, en ouvrant sa Bible, sans un guide retrouvera ces mots qui l'avaient frappé tout petit quand on lui racontait de belles histoires, et ces mots familiers feront qu'il se sentira un peu chez lui. Je plains de tout mon coeur ces centaines de jeunes gens, garçons et filles, que je rencontre un peu partout, et qui n'ont jamais dans leur enfance eu de contact avec la Bible et avec le langage de la Bible. Il leur manque un élément important de la culture littéraire, aussi bien qu'un précieux secours pour leur vie spirituelle. Comment obéir à Dieu quand nous ne connaissons pas la Parole de Dieu ?

Tâchez de raconter votre histoire tout d'une traite, sans vous laisser troubler ou détourner par les interruptions de quelques enfants, pourvu que ces interruptions se rapportent directement à l'histoire elle-même, à son explication ou au désir d'en savoir davantage. Vous trouvez là une occasion excellente de répéter certaines des choses que vous avez dites, et vous pouvez compter que les enfants ne perdront pas le fil de votre histoire, pourvu que vous ne le perdiez pas. Si par contre il y a beaucoup d'interruptions intempestives, et si le fil de l'histoire se perd, c'est que vous avez commis vous-même quelque erreur en préparant votre histoire. Peut-être en avez-vous mal calculé la longueur. Peut-être est-elle trop longue, ou bien trop monotone. Peut-être n'avez-vous pas su mettre en lumière les points saillants. Peut-être enfin que ce qui lui manque, c'est l'un ou l'autre des deux points que nous allons maintenant examiner, la mise en scène ou l'illustration.

3° Les gestes et la mise en scène. Au fond cela fait partie intégrante du récit lui-même, mais cela me parait si important que je préfère en traiter séparément. Soyez plein de vie et d'entrain en racontant votre histoire ; faites-en un petit drame, sans tomber dans la vulgarité. Que vos gestes soient éloquents et naturels. Quand vous racontez l'histoire du festin de Belschatsar et de ces doigts mystérieux qui écrivent sur la chaux de la muraille, dans le palais du roi, levez-vous et faites le simulacre d'écrire avec votre doigt sur le mur. Trouvez moyen que ces mots : « Pesé, pesé dans la balance, et trouvé léger » semblent briller sur le mur comme des étincelles.

Servez-vous pareillement de l'instinct dramatique qui existe chez tous les enfants. Faites-leur jouer à eux-mêmes les histoires que vous leur racontez. Un jour, à Noël, j'entrai dans une salle, et qu'est-ce que je vis ? la monitrice racontait et les enfants jouaient en même temps l'histoire des rois mages. Les chaises représentaient des chameaux, le pupitre du pasteur était la crèche, la monitrice représentait Marie - enfin on s'était servi de tout, et l'imagination colorait tout cela. - je n'ai jamais vu de spectacle plus émouvant et plus pénétré d'adoration que la représentation qui eut lieu pour Noël à notre École l'an dernier. Les adultes eux-mêmes dans l'assistance étaient émus par ces tableaux vivants où les enfants faisaient revivre la merveilleuse histoire de la Nativité.

En choisissant vos histoires, recherchez toutes celles que vous pouvez mettre en scène et traduire en action. Cela est surtout important avec les tout-petits. Et même pour les grands, j'irai jusqu'à dire même pour les adultes, un petit drame représenté devant eux se grave infiniment mieux dans leur esprit que les plus belles descriptions ou les plus beaux raisonnements.

4° L'illustration. Que votre histoire parle aux yeux. Si vous racontez l'histoire de David et de Goliath, montrez aux enfants, sur une carte de la Palestine, la vallée des Térébinthes, la montagne d'un côté où campaient les Philistins, et la montagne de l'autre côté où se tenait l'armée d'Israël. Sur un tableau noir dessinez des tentes (des triangles peuvent suffire) pour montrer les deux armées campées l'une contre l'autre. Montrez aux enfants l'image d'un géant, et puis celle d'un jeune berger. Dessinez rapidement au tableau le casque de Goliath et sa cotte de mailles. Il n'est pas nécessaire que votre dessin soit très artistique. Ayez une fronde et « cinq cailloux polis ». Montrez-les quand vous arrivez à cet endroit de l'histoire. Enfin procurez-vous une image passable de David combattant Goliath, comme on en trouve un peu partout, et montrez-la pour finir à vos enfants.

Si vous racontez l'histoire de Ruth et de Naomi, montrez aux enfants sur une carte où se trouvent Moab et Juda. Indiquez le chemin pour se rendre à Bethléem. Montrez-leur l'image d'un champ d'orge. Faites des dessins pour montrer un champ au temps de la moisson et le même champ au temps de la famine. Montrez aux enfants l'image bien connue de Ruth et de Naomi, avec Orpa qui retourne dans son pays.

Autant que possible, ayez des images en couleur. Ayez à votre disposition tous les objets qui sont de nature à faire mieux comprendre les détails de votre histoire, pourvu qu'ils ne risquent pas d'attirer sur eux-mêmes une attention trop exclusive. Pour vos images et tout ce qui sert à illustrer votre récit, employez-les surtout après le récit, en le résumant peut-être, ou en répétant certains épisodes, de manière que l'attention de l'enfant ne risque pas d'être détournée des mots importants et des gestes dont vous accompagnez le récit par tel ou tel détail insignifiant d'une gravure.

5° La répétition de l'histoire par les enfants eux-mêmes. D'une manière ou d'une autre, arrangez-vous pour que les enfants puissent, à leur tour, vous raconter l'histoire qu'ils ont entendue. Les enfants aiment beaucoup raconter eux-mêmes des histoires, aussi bien que de les entendre. Donnez-leur l'idée de raconter l'histoire que vous venez de leur exposer à des enfants plus jeunes ou tout simplement à des camarades. Engagez les aînés à mettre le récit par écrit, en employant les mots qu'ils veulent. Les tableaux vivants, la représentation dramatique sont d'excellents moyens de faire reproduire par les enfants ce qu'ils ont entendu.
On peut aussi leur faire faire des petits dessins, ou bien découper des personnages en papier, ou bien reproduire la scène avec des petites poupées, des bouts d'étoffe, des bouts de bois, des cartonnages, etc.

J'ajouterai à ces cinq points un conseil final : ne cherchez pas à conclure chacune de vos histoires par une leçon de morale ou de religion. Laissez les enfants tirer eux-mêmes leurs conclusions : ils n'y manqueront pas. Ils n'ont que trop l'idée que votre but est de les endoctriner ; et à cela ils sont toujours enclins à faire la sourde oreille. Mais leur curiosité instinctive les pousse à chercher quelle peut bien être la signification de l'histoire, et cet effort personnel leur sera beaucoup plus profitable que tout ce que vous essaierez de leur enfoncer du dehors. C'est là au fond de la pédagogie élémentaire. Nous en parlons beaucoup, et nous ne la pratiquons guère.

Je transcris ici deux listes qui m'ont été personnellement très utiles. L'une et l'autre sont dans l'ordre des livres de la Bible. La première contient les histoires qui captivent le plus les enfants, d'après mon expérience. La seconde est une liste complémentaire qui me parait nécessaire pour compléter ce que les enfants devraient connaître de la Bible.


HISTOIRES DE LA BIBLE QUI CAPTIVENT LE PLUS LES ENFANTS

L'arche de Noé
Joseph vendu par ses frères
Moïse dans les roseaux
Le petit Samuel David et Goliath
Le jugement de Salomon
Le festin de Belschatsar
Daniel dans la fosse aux lions
La fournaise ardente
Le Bébé dans la crèche
Les rois mages
Jésus calmant la tempête
Le dernier souper de Jésus
Ananias et Saphira
Saul sur le chemin de Damas
La maison sur le roc et la maison sur le sable
Le bon Samaritain
La brebis perdue
L'enfant prodigue

LISTE SUPPLÉMENTAIRE

La femme de Lot
Le sacrifice d'Isaac
Joseph et Benjamin, et la coupe
Le passage de la Mer Rouge

LES HISTOIRES DE LA BIBLE

Moïse au Sinaï
La chute des murailles de Jéricho
L'armée de Gédéon
Ruth et Naomi
David et Jonathan
Salomon et la reine de Saba
Élisée, les enfants, et les ours
Esther
Jésus dans le Temple
La guérison du fils de l'officier royal
La multiplication des pains
La guérison de l'aveugle
La guérison du paralytique
Le dimanche des Rameaux
Gethsémané
La trahison de Judas
Les pèlerins d'Emmaüs
La lapidation d'Étienne
Lydie
Timothée
Le grain de moutarde
Les différents terrains
Les deux débiteurs
La drachme perdue
Le grand dîner
Les vierges sages et les vierges folles
Les talents


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