Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

CHAPITRE VII

DIEU VISITE NOTRE MAISON

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Le mercredi, nous décidâmes de rentrer et, dans l'après-midi, Adèle arriva à Londres avec ma jeune soeur Frieda. Elles tombèrent au milieu d'une salle de réunion bondée et durent se placer tout au fond de la pièce. À ce moment, un esprit de supplication passait sur l'assistance entière et tout le monde priait en même temps (Actes 4/24). C'est alors qu'Adèle reconnut ma voix et elle rit de joie, certaine que Dieu m'avait baptisé. Frieda fut brisée et cria au Seigneur pour Lui demander Son pardon et Sa paix. Sa prière fut exaucée.
À la fin de la réunion, plusieurs reçurent le baptême du Saint-Esprit, avec des signes remarquables. C'était dur de se séparer d'une telle atmosphère. Avec M. Goodwin, un ami, nous partîmes à cinq et reprîmes le train pour Westcliff-on-Sea.



Guidés par l'Esprit.
Dans le train, j'eus l'intuition que nous devions chanter. Une paroi à mi-hauteur nous séparait du compartiment voisin. Je craignais que nous fussions entendus, mais la Voix persistait en moi. Finalement, ne pouvant plus résister, j'entonnai le cantique :

Merveilleux amour,
Amour de Dieu pour moi,
Merveilleux amour
De Jésus sur la croix !



En quelques minutes, le bruit du train fut couvert par celui de nos chants. Puis nous entendîmes une nouvelle voix qui se joignait à nous, de l'autre côté de la demi-paroi. Regardant par-dessus, nous vîmes une jeune fille, toute seule dans son compartiment, le visage rayonnant. « Avez-vous votre billet pour le grand voyage ? » lui demanda mon père. « Oui, répondit-elle, je viens de me convertir ; j'ai passé trois jours à Londres sans rencontrer un seul enfant de Dieu ; j'ai prié pour en rencontrer dans le train ! » Nous étions tous dans la joie. Sa prière était exaucée. Nous lui parlâmes des grandes choses que Dieu faisait pour nous.
Cet incident m'apprit à être toujours soumis aux directions de l'Esprit et à obéir au Seigneur pour chaque pas qu'il m'est donné de faire.



La communion à Ses souffrances.
De retour à la maison, nous nous réunîmes pour la prière dans le bureau de mon père. Immédiatement, l'Esprit de supplication me saisit, accompagné d'un lourd fardeau au sujet de mes frères et soeurs que je voulais voir passer par le même rafraîchissement spirituel. D'énormes nuages semblaient surgir de partout, assombrissant le ciel de mon coeur. L'oppression grandit jusqu'à ce que je ne pusse rien faire d'autre que pleurer et gémir.
Parmi les remords qui me déchiraient le coeur apparaissait le souvenir de mon comportement récent au milieu des miens, Dieu me faisait sentir les conséquences de ma conduite infidèle. Comme je les aimais, mes frères et soeurs, tandis que je les considérais à la lumière de l'amour de Dieu ! Le désir de les voir partager ma joie sacrée me consumait. Ils ne connaissaient encore que les tristes joies du monde, n'ayant pas été entièrement délivrés de ses enchantements. Mais ils ne pourraient comprendre, avec leur intelligence humaine, ce qui m'était arrivé. Il fallait les attirer et non les repousser. Je fus saisi de la même agonie pour notre chère Adèle, pour la gouvernante, la cuisinière, mes camarades d'école ; tous devaient « goûter et voir comme l'Éternel est bon ».
Tout à coup, la liberté revint et une joie plus grande que la précédente m'inonda. Christ avait permis que je veille une heure avec Lui en Gethsémané et que j'aie part, pour un moment, à la communion de ses souffrances, Le fardeau de Son coeur divin me causait de la douleur, mais elle était encore plus douce que la joie. Désormais j'avais part au Cantique des Cantiques qui s'élevait en rires et en musique sur les ailes du langage céleste. Cela continua dans ma chambre, pendant la plus grande partie de la nuit.
Ce soir-là, Adèle avait pleuré silencieusement : Dieu se rapprochait d'elle. Nous l'aimions beaucoup, cette Adèle. Elle était notre seconde mère. C'était une Française, une ancienne officière de l'Armée du Salut qui s'était attachée à notre famille et était restée avec nous dans les bons et les mauvais jours. Elle remplaçait ma mère quand celle-ci était en tournée d'évangélisation.



La gouvernante suisse se convertit.
Tout le jeudi, je restai aux pieds du Seigneur dans ma chambre : le même fardeau était revenu. Le soir, nous nous retrouvâmes et ce poids terrible fut de nouveau sur moi. Le Seigneur m'enseignait comment prier jusqu'à la victoire.
Le lendemain soir, mon père invita Mlle Moser, notre gouvernante saint-galloise, à se joindre à nous. C'était une personne instruite, qui nous enseignait les langues et la musique. Elle ne s'expliquait pas le changement soudain qui s'était produit chez nous. Elle entra timidement. Ma petite soeur Frieda était aussi dans la chambre. Après quelques chants, mon père fit un bref exposé du salut et nous nous mîmes immédiatement en prière. Je fus bientôt en larmes. La condition des autres pesait lourdement sur mon coeur. N'étant pas encore accoutumé à ce mystère, j'en étais alarmé car j'y voyais le résultat d'un péché ou de ma résistance à Dieu. Mais c'est ce dont l'apôtre Paul parle quand il dit : « J'achève de souffrir en ma chair les afflictions de Christ pour son Corps qui est l'Église. » (Col. 1 /24.) Ce sont les souffrances que Christ endure en nous pour son Église.
Nous chantions souvent à genoux et mon père nous accompagnait doucement sur son instrument.
Tandis que nous étions en prière, un cantique divin jaillit à nouveau de moi ; le poids disparut de mon coeur et la gloire du ciel nous enveloppa. Tout à coup, la gouvernante, qui nous avait regardés jusqu'ici, en proie à l'embarras, ne put plus résister à la conviction de péché. Elle se leva et tomba à genoux en poussant des cris perçants. Les terreurs du jugement, la découverte qu'elle était perdue et que toute sa fausse religion ne valait rien, accablèrent son âme angoissée. Son désespoir remplit la chambre et, tous, nous inclinâmes nos esprits dans la prière, suppliant le Seigneur qu'Il la sauvât. Puis elle se mit elle-même à appeler au secours et à rechercher le salut. En un éclair, elle réalisa que Christ l'avait entendue et ses terribles cris d'angoisse se transformèrent en acclamations de joie. Elle frappa des mains en criant : « Il est aussi mon Jésus ! » Dieu avait révélé une fois de plus, par cette conversion enfantine, combien il travaille rapidement. La joie de notre gouvernante était merveilleuse à voir. Elle confessa tous ses préjugés contre nous et notre joie en fut augmentée.



Adèle reçoit le baptême.
Je priais beaucoup pour notre chère Adèle. Anéantie par la puissance de Dieu, elle pleurait et riait tour à tour tandis que la gloire passait au travers d'elle. Mais le Seigneur me réservait une surprise : il me donna une nouvelle langue, dont les syllabes dures et gutturales me secouaient de rire. Les deux jours que j'avais passés sous les fardeaux et dans les luttes allaient se terminer par la victoire. Ma coupe débordait. Nous nous séparâmes après minuit, mais j'étais trop heureux pour dormir.
Le lendemain, de huit heures du soir à deux heures du matin, l'Esprit déversa ses averses sur nous. Adèle commença à articuler laborieusement quelques syllabes, comme si elle faisait des efforts pour apprendre une langue étrangère. Cela continua pendant longtemps. Puis, à notre soulagement, elle se mit à parler couramment et avec force. Vous ne pouvez vous imaginer comme cela nous rafraîchissait de voir « l'huile de joie » répandue sur elle aussi et provoquant chez elle le même rire merveilleux que chez moi. Jusque-là, j'avais chanté seul, mais ce soir nous fîmes un duo.
Maintenant qu'Adèle avait reçu le baptême, ma foi était encouragée et affermie. Je persévérais dans la lutte pour Mlle Moser, Evangéline, Victoria, Herbert, Augustin et les plus jeunes. Le psaume 37 devint pour moi un refuge quotidien :
« Fais de l'Éternel tes délices et IL T'ACCORDERA LES DÉSIRS DE TON COEUR. Remets ton sort à l'Éternel et te confie en Lui ET IL AGIRA. »
Ne pensez pas qu'un pareil conflit spirituel soit compatible avec la chair. Seule la puissance de Dieu put me soutenir dans cette bataille et me protéger contre les attaques de l'ennemi ; l'Esprit ne me libéra pas avant qu'un travail d'intercession grandissante fût accompli pour chacun de mes bien-aimés. C'était Dieu qui me donnait le vouloir et le faire, selon Sen bon plaisir. (Phil. 2/13.)



Le cantique céleste.
Nous nous assemblâmes tous le dimanche soir et, chargé de fardeaux, je fus saisi d'un esprit de supplication, accompagné de cris et de larmes. Adèle aussi luttait sous un même poids. Après le départ de quelques-uns de mes frères et soeurs, le fardeau qui était sur nous s'allégea quelque peu ; la prophétie et le chant spirituel s'élevèrent de nos coeurs. (1 Cor. 14/15.)
La veille, nous avions imposé les mains à Mlle Moser et il fut bientôt évident qu'elle triomphait de sa timidité et entrait dans une liberté spirituelle aussi nouvelle pour elle que réjouissante pour nous. L'Esprit l'avait désignée pour diriger la réunion. Nous l'écoutâmes parler au Seigneur, tandis qu'elle lui ouvrait tout son coeur. Il se passa peu de temps avant qu'elle ne se mit aussi à parler et à chanter en une nouvelle langue. Son abandon, son rire, ses cris d'enthousiasme étaient inimitables.
Elle chanta comme seule elle pouvait le faire. Sa voix, déjà très belle et exercée, devint, brillante sous l'inspiration de l'Esprit. Nous joignant à elle, nous eûmes avec Adèle un trio de chant spirituel ; ceux qui nous entendaient étaient étonnés de son harmonie, et pourtant nous n'y vouions aucune attention. Les airs se succédaient, jaillissant spontanément. Nous passions d'une voix à l'autre, restant toujours dans l'harmonie et nous montions à des hauteurs impossibles à atteindre naturellement. La mélodie était souvent rapide et finissait brusquement, dans une merveilleuse sonorité ; d'autres fois, elle diminuait progressivement et s'éteignait dans un murmure. Et ces oratorios se reproduisaient chaque soir ; c'était des concerts sacrés de la plus riche improvisation. Combien j'aurais voulu pouvoir fixer quelques-uns de ces cantiques divins !



CHAPITRE VIII

JOURNÉES DE CIEL SUR LA TERRE


L'atmosphère de la maison était entièrement transformée. Partout des chants et des accents de joie. Un bonheur suprême régnait parmi nous ; nous étions conscients que Christ marchait et parlait avec nous. Cela se retrouvait dans la vie journalière : nous nous aidions les uns les autres, cherchant à nous faire du bien mutuellement. Nos esprits étaient soumis à Dieu. Les paroles vaines, la moindre inimitié ou négligence, la plus petite irritation nous attristaient. L'ordre était immédiatement rétabli, de peur de contrister la douce colombe de l'Esprit. Nous avions les yeux fixés sur Christ et cette glorieuse réalité dévoilait immédiatement l'horreur de n'importe quel péché. À table, c'était souvent des pleurs de joie. Au lieu des conversations bruyantes, nos paroles étaient assaisonnées de grâce, joyeuse mais libérées de tout esprit charnel ou badin.

Je craignais de dilapider les immenses bénédictions reçues. Ma prière était celle de David : « Éternel, garde ma bouche, veille sur l'ouverture de mes lèvres ! » Il y eut aussi quelques confessions et des restitutions. Cela peut sembler dur de s'humilier devant ses propres frères et soeurs, mais il fallait à tout prix sauvegarder la paix qui surpasse toute intelligence. Ma Bible ne me quittait pas ; mes livres favoris étaient les Psaumes, le Cantique des Cantiques et Esaïe. Je passais des heures seul, dans la méditation ou dans la prière persévérante pour autrui, selon les fardeaux que je ressentais. J'eus aussi plusieurs songes inspirés qui, par la suite, se sont révélés être de véritables prédictions. Je me vis prêchant à des milliers de personnes ; et j'ai retrouvé au cours de mes campagnes d'évangélisation plusieurs des scènes que j'avais vues en songe ; j'ai même reconnu les visages des gens.



Prophétie et interprétation.
La semaine suivante fut plus merveilleuse encore. Notre adoration se prolongeait souvent jusqu'à une ou deux heures du matin. En réponse à la prière de mon père, Adèle reçut le don d'interprétation. Ainsi nous connûmes beaucoup de ce qui était dit dans les parler en langues ; c'étaient principalement des encouragements et des exhortations. Quand des étrangers étaient présents, il y avait souvent de solennels avertissements et des appels à la repentance, donnés dans la joie ou la tristesse, suivant leur sens.

Les messages prophétiques en anglais étaient fréquents. L'Esprit nous mettait un sujet à coeur et nous recevions alors prophétie sur prophétie. Parfois cela concernait la Croix de Christ dans la vie journalière, ou la préparation à Son retour, ou encore Sa glorieuse puissance de résurrection. Plusieurs de ces prophéties furent notées par écrit. Certes, ces messages ne sont en aucun cas d'une valeur semblable à ceux de la Parole, mais ils servent magistralement à illustrer la vérité et à la rendre vivante.
Il arrivait souvent que nous ayons des dialogues, puis nous reprenions de nouveau chacun à notre tour. Quand il s'agissait, par exemple, de la résurrection, l'un de nous s'écriait ; « Voyez, Ses ennemis s'enfuient, ceux qui gardaient la tombe ! » Un autre ajoutait : « Quand il ouvrira toutes les tombes, alors les puissances des ténèbres trembleront et connaîtront que leurs jours sont mesurés. » Et encore : « Il ressuscite victorieux ; Il a toute puissance, alléluia ! dans les cieux et sur la terre. Que les armées célestes poussent des cris de joie ! Il est le sceptre du ciel. » Puis le thème était repris : « Je suis ressuscité avec Lui ; Ses blessures et Sa gloire sont les miennes ! Tous mes ennemis se sont enfuis, ceux qui guettaient mon âme pour la détruire n'ont plus de puissance ! » Et l'histoire se déroulait ainsi. Toujours nous en sortions affermis et édifiés.



L'avenir et la guerre mondiale.
Il y avait aussi des messages pleins d'assurance, nous annonçant que Dieu en baptiserait bientôt d'autres et que de grandes choses nous attendaient. Des amis commençaient à assister aux réunions mais, lorsque la discrétion manquait, l'oeuvre de l'Esprit de Dieu était entravée. Il fallait que l'unité fût parfaite. Sinon notre temps se passait à lutter dans les douleurs de l'enfantement pour la conversion des âmes présentes. Ces larmes et ces agonies duraient parfois très longtemps, puis nous retrouvions la liberté et les glorieux chants spirituels.

Un soir, Adèle fit une expérience extraordinaire. Le Saint-Esprit la conduisit à revivre toute la crucifixion. Prostrée, elle décrivait la trahison et les souffrances de Christ, Sa flagellation. Par l'Esprit, elle vécut personnellement chacun des aspects de la Croix, le couronnement d'épines, les coups et la crucifixion. Comme elle pleurait tandis que les clous étaient enfoncés et les pieds fixés au bois ! Et nous sanglotions avec elle. Ses prophéties appliquaient constamment à la vie de tous les jours ce qu'elle ressentait si vivement. Depuis, j'ai souvent vu des gens passer par cette pseudo-crucifixion. C'est une expérience précieuse et sacrée pour celui qui la fait — et très émouvante pour ceux qui en sent les témoins. Adèle nous raconta par la suite que pendant un moment elle avait ressenti de vives douleurs dans ses mains, ses pieds et son côté. L'Esprit de Dieu avait véritablement imprimé Ses blessures dans sa chair.

Désormais, l'interprétation était souvent donnée par Mlle Moser ou par moi-même. Certains messages plaidaient avec les membres de la famille, afin qu'ils cherchent Dieu et ne résistent pas plus longtemps à l'Esprit. Nous apprîmes aussi que nous serions dispersés. Parfois c'étaient des gens venus du dehors qui recevaient des reproches à cause de leur endurcissement et de leur incrédulité. Une longue succession de prophéties annonçaient la fin proche de notre époque, décrivant les phases du retour en gloire du Seigneur. Beaucoup de messages prédisaient des guerres et des destructions terribles. L'Angleterre était souvent mentionnée, ainsi que les «nuages du Nord ». Elle était mise en garde contre de grandes calamités ; sa « ceinture serait détachée » (commerce) et son orgueil « tomberait en poussière, mais Dieu aurait encore pitié de Son peuple ». Toutes les nations étaient averties qu'elles devaient se repentir et renoncer à leur folie. Le feu, la fumée, le sang, l'épée et la peste revenaient sans cesse comme des châtiments devant punir le monde. Une fois, il fut dit : « Je sèmerai les bateaux comme des rochers au fond de la mer : » Un « vent mauvais » allait détruire des millions et passer trois fois sur la terre (probablement trois guerres mondiales).

Mme Catherine Price, dont nous avons parlé plus haut comme ayant été la première à recevoir le baptême du Saint-Esprit à Londres, vint nous voir. Elle nous confirma que c'était bien l'Esprit qui travaillait parmi nous. Elle nous conseilla aussi de terminer nos réunions quand l'influence directe de l'Esprit se retirait, afin de ne pas prolonger dans la chair l'oeuvre de l'Esprit. D'autres amis, venus de loin, témoignaient des choses merveilleuses que le Seigneur opérait.



Opposition et calomnie.
Toute la rue apprit bientôt ce qui se passait chez nous. Le dimanche, la maison était ouverte à chacun et un certain soir il y avait des gens jusqu'au haut des escaliers. Le bruit ne cessait guère : ma soeur Evelyne se levait toujours de bonne heure pour exercer son piano ; quant à nos réunions, elles duraient souvent presque jusqu'au matin. Les voisins en furent bientôt alarmés, Une pétition fut lancée, demandant poliment que les clameurs cessassent, au moins dans la soirée. C'est alors que mon père prit des couvertures et boucha portes et fenêtres. Nous pûmes ainsi continuer sans déranger personne. Un de mes camarades d'école se convertit. Frieda, Evelyne et Théodore priaient souvent avec nous.
Ne pensez pas que Satan restât inactif ! Oh non ! il rageait littéralement, manifestant sa fureur non seulement par des attaques directes et stupides, mais en répandant le bruit que des réunions bizarres se tenaient chez nous. Au quartier général de l'Armée du Salut, on racontait que nous faisions du spiritisme. Le fait que nous « parlions en langues » sema la consternation parmi nos amis chrétiens. Mais mon père resta inébranlable. Sans sa foi, nous n'en serions pas sortis victorieux. L'influence de mes parents dans le monde évangélique était considérable et ils savaient que leur attitude serait déterminante. Dieu leur donna la grâce, la sagesse et l'humilité nécessaires pour mettre en pratique ces paroles : « Marchez tandis que vous avez la lumière, de peur que la nuit ne vous surprenne. » (Jean 12/35.)
Ils ne commirent pas l'erreur fatale de tant de chrétiens éminents, qui consiste à rejeter et à taxer de diabolique, de déséquilibré ce qu'on ne comprend pas. Non, ils se souvinrent de la prophétie :
« Voyez, vous qui me méprisez, et soyez étonnés, et pâlissez d'effroi ; car je vais faire une oeuvre en vos jours, une oeuvre que vous ne croirez point, si quelqu'un vous la raconte. »
(Actes 13/41.)

Noël arriva — mais combien différent des autres années ! Impossible de concilier les festivités bruyantes du Noël anglais avec la piété et la joie profonde qui avaient envahi l'atmosphère de notre maison. Quel privilège d'avoir des parents instruits dans les voies mystérieuses de Dieu ! Il y a des choses permises et légitimes, mais dans les circonstances que nous vivions, elles eussent été malséantes ; et ils le comprirent.
Ma mère, en tournée d'évangélisation lorsque l'Esprit était tombé sur nous, avait remarqué à son retour le changement extraordinaire qui s'était opéré en moi et les effets bénis de cette visitation sur toute la maison. Elle reconnut que c'était l'oeuvre du Saint-Esprit, « car, dit-elle, l'humilité est une preuve de l'action de Dieu ».
Bien des éléments frivoles furent éliminés pendant ces vacances et, toute la journée, nous attendions avec joie notre réunion du soir.



Vos fils et vos filles prophétiseront.
Je repris mes études après Noël. Mais aucune préoccupation scolaire ne put diminuer mon zèle pour Dieu et Sa Parole. Mes pensées étaient en Lui, jour et nuit. Ce printemps-là, je me promenai souvent seul dans la campagne avec ma Bible. J'avais le coeur rempli de prédications et quand je les prononçais à haute voix, la nature semblait dire « amen ».
La première, parmi mes frères et soeurs, qui reçut le baptême du Saint-Esprit fut la douce Frieda ; ce fut une grande joie. Ensuite vint le tour de la cadette de toute la famille : Joséphine. Plus tard, mon père emmena Éric et Herbert à une convention dans le Nord, d'où ils revinrent transformés, pleins de hardiesse pour le témoignage, faisant du Seigneur leurs délices. Augustin et Théodore reçurent la bénédiction en 1910, suivis de près par Evelyne et Victoria. Toutes mes prières pour eux avaient été exaucées ! Plus tard, je fus interne dans un collège de Londres ; les épreuves et la persécution devinrent le moyen dont Dieu se servit pour éprouver, pour purifier ma foi et ma consécration. L'ostracisme et l'opposition ne rendirent que plus ardente ma soif d'amener des âmes à Christ. Quelques-uns de mes camarades furent gagnés.
Puis une plus grande porte s'ouvrit. Mon père connaissait mon appel et nous partîmes pour le continent. En Hollande, en Allemagne, en Pologne et jusqu'à la frontière russe, nous portâmes la bonne nouvelle dans de vastes campagnes d'évangélisation. Je parlais surtout aux enfants et Dieu me donna de grandes bénédictions. En Allemagne, mes auditoires de garçons et de filles s'élevèrent jusqu'à six cents. Des centaines se convertirent. Invariablement, la puissance de Dieu tombait sur eux pendant la prière, après la prédication et il arrivait qu'il y eût, en un soir, plus de vingt baptêmes dans le Saint-Esprit. Quelques-uns se mettaient à chanter en de nouvelles langues, en accord parfait et dans la plus grande harmonie. Ils manifestaient une foi remarquable ; des signes et des miracles, des visions et des prophéties accompagnaient ces réveils d'enfants. Un jour, l'Esprit de Dieu tomba sur cent soixante à la fois ; la plupart étaient prostrés et se mirent bientôt à louer Dieu en de nouvelles langues. Il faudrait un livre pour raconter tout ce dont nous avons été témoins lors de trois grandes tournées au cours desquelles plusieurs églises et missions furent établies. Dieu visita spécialement la patrie de Luther avant que les nuages n'assombrissent son ciel et que l'holocauste de la première guerre mondiale ne paralysât les efforts faits en vue du réveil.



Les premières convictions se confirment.
J'arrive à la fin de mon témoignage. On m'a souvent demandé si je n'avais jamais douté de la réalité de ces bénédictions. Au contraire, tout est plus réel que jamais. Comme tout ce qui vient de Dieu, toute l'expérience du baptême demeure en moi dans sa fraîcheur originale. Bien entendu, mon esprit a mûri et ma connaissance des choses de Dieu a augmenté. Mais la vision de mes premières années, loin d'avoir pâli, n'a fait que gagner en puissance à travers mon ministère. Tout ce qui s'est produit au cours de réveils dans le monde entier, les milliers de conversions enregistrées, n'ont fait que confirmer la réalité et le caractère authentique : ment divin de cette glorieuse visitation.

Bien souvent, j'ai entendu des théologiens et des évangélistes éminents discréditer et ridiculiser l'expérience relatée dans ces pages. De telles attaques ont toujours laissé l'auditoire embarrassé et confus, mais ne l'ont pas convaincu. Il s'agit cependant d'un réveil de portée mondiale et, même s'il y a eu parfois des exagérations ou des contrefaçons, c'est une grave erreur que de condamner le fleuve entier parce qu'il est arrivé qu'on trouvât sur les bords quelques débris ou poissons morts. Il est vrai qu'on a parfois rencontré des étangs d'eau stagnante, là où le courant avait cessé, mais le fleuve continu à couler, dans sa puissance originale. Et l’on ne peut rien contre la vérité ! Toutes les réfutations ne font que stimuler l'intérêt des âmes sincères, qui ne seront pas déçues. Ceux qui persistent dans leur résistance à l'oeuvre du Saint-Esprit feront bien de prendre, garde : plusieurs ont déjà été mis à l'écart par Dieu et d'aucuns frappés soudainement. Nul ecclésiastique ne saurait résister à un pareil courant. Tout obstacle sera balayé ! Et l'étendard de Dieu continue à avancer.
Et, pour terminer, permets-moi de te dire, cher lecteur, que le don du Saint-Esprit, le baptême de la première Pentecôte, est pour toi. Que personne ne te dissuade de le recevoir dans sa plénitude, comme il fut accordé à la première église. Dieu n'a pas égard aux personnes S'Il m'a baptisé, Il peut et veut faire de même pour toi. Dans nos campagnes d'évangélisation, nous avons vu des milliers le recevoir. Et des centaines de milliers continuent à en faire l'expérience. Le réveil s'étend aux contrées les plus reculées. Ne te prive pas de ce que Dieu tient en réserve de meilleur pour toi. Ce sera le début d'une vie nouvelle de prière, de louange et de service.

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