Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

PRÉFACE





Il n'est pas nécessaire de présenter aux lecteurs de langue française l'auteur de la brochure dont nous publions une traduction, car tous ceux qui sont quelque peu au courant de la littérature religieuse contemporaine, connaissent le nom d'Henry Drummond.

Professeur de sciences naturelles à la Faculté de théologie de l'Église libre de Glasgow et jadis collaborateur du célèbre Moody, il réunit en sa personne les connaissances d'un savant, les convictions d'un chrétien vivant, les dons d'un évangéliste et, dans ses discours, comme dans ses écrits, il poursuit, par des méthodes nouvelles, un but qui, pour être ancien, n'a rien perdu de son importance et de son actualité, à savoir, la conciliation de la science et de la foi.

Outre son principal ouvrage : Les lois de la nature dans le monde spirituel, qui a eu en Angleterre et en Amérique un succès colossal et dont la traduction française a atteint sa quatrième édition, M. Drummond a publié, sous le nom de Messages de Noël, une série d'études remarquables sur des sujets relatifs à la personne de Christ ou à la vie religieuse. L'une d'entre elles, traduite en plusieurs langues et intitulée La plus grande chose du monde, est devenue populaire dans nos contrées et a été en bénédiction à un grand nombre de lecteurs.

Celle que nous offrons au public français traite également un des points essentiels de la vie chrétienne. Notre salut ne s'accomplit pas hors de nous et sans nous ; nous ne saurions être sauvés, si nous ne sommes changés, mais ce changement ne peut avoir lieu que dans une communion personnelle avec Christ, reproduisant son image par une action lente, invisible et permanente, dans l'âme de chacun de ses disciples.

C'est cette divine méthode de sanctification et de transformation que l'auteur expose et développe dans cet écrit avec une grande richesse d'aperçus originaux et un rare bonheur d'exemples et d'expressions. La traductrice a pensé rendre service aux personnes qui ne connaissent pas l'anglais en mettant à leur portée ces quelques pages qui décrivent, en traits simples et frappants, le chemin « de la sanctification sans laquelle nul ne verra le Seigneur, » et elle espère que plusieurs ne trouveront pas, à les lire et à les méditer, moins d'intérêt et de profit qu'elle n'en a trouvé elle-même.

Chaux-de-Fonds.

M. COURVOISIER-SANDOZ.





INTRODUCTION


« Ainsi nous tous, qui contemplons, comme dans un miroir, la gloire du Seigneur à visage découvert, nous sommes transformés en la même image, de gloire en gloire, comme par l'Esprit du Seigneur. » 2 Cor. III, 18.

L'automne dernier, je découvris dans une librairie de Californie un petit livre, sur la première page duquel se trouvait mon nom. J'ignorais l'existence de cet ouvrage que je n'avais pas écrit et dont le titre m'était également inconnu. Loin de moi la pensée de reprocher à qui que ce soit cette publication égarée, due sans doute aux notes sténographiques prises par quelque auditeur de l'un de mes discours. Ces pages, telles qu'elles étaient, paraissaient avoir déjà produit quelque bien. Mais à la vue des imperfections qu'elles contenaient, j'ai cru de mon devoir d'en donner une édition plus complète.

Cette étude, de même que d'autres appartenant à la même série, ne présente qu'un seul côté du grand sujet qui y est traité, le côté de l'activité humaine. C'est à ce point de vue que le lecteur devra se placer pour faire la part de la lumière et des ombres. J'en appelle donc à sa bienveillante attention, le priant de tenir compte de cette délimitation et de ne pas s'étonner si certains points, que la théologie nous a toujours appris avec raison à mettre en évidence, ne sont pas même abordés ici.

C'est en assistant un jour dans les montagnes de l'Écosse à une conversation entre l'un de mes amis et quelques simples habitants de la contrée, que mon attention fut attirée pour la première fois sur la solution pratique de ce problème capital de l'expérience chrétienne. Les pages suivantes doivent en grande partie leur origine à cette matinée de dimanche.




S'il était au pouvoir de quelque force supérieure de me faire penser toujours ce qui est vrai et de me faire accomplir toujours ce qui est bien, à la condition que je sois changé en une sorte d'horloge qui devrait être remontée chaque matin, je déclare que j'accepterais immédiatement le marché.

Ces paroles sont de M. Huxley. Le désir infini et l'infinie difficulté d'être bon : ce thème est aussi ancien que l'humanité. Il ne vit pas, celui dont l'être intime n'a jamais laissé échapper un semblable aveu, celui qui ne donnerait pas son avenir tout entier en échange de la possibilité de devenir meilleur.

Ce marché, je viens aujourd'hui vous le proposer très sérieusement. C'est sans nécessité aucune d'être changé en une sorte d'horloge que ce but peut être atteint. Dans les conditions normales, il est aussi naturel au caractère qu'à la fleur de s'épanouir en beauté, et si, sur la terre que Dieu à créée,

il n'existait pas quelque procédé capable de produire ce résultat, c'est que, parmi tous les dons octroyés aux humains, le don suprême aurait été oublié. N'est-ce donc pas pour cela que l'homme a été créé ? Ne dirons-nous pas avec le poète Browning : « Je déclare que l'homme a été fait pour progresser et non pour rester stationnaire ; » ou mieux encore, avec les mots plus profonds d'un plus ancien livre : « Ceux qu'il a préconnus, il les a aussi prédestinés à être conformes à l'image de son Fils. »

Permettez-moi tout d'abord de passer en revue, en éliminant la plupart d'entre eux, certains procédés dès longtemps en usage pour arriver à une vie meilleure. Ces procédés sont loin d'être mauvais. Ce que nous leur reprochons, c'est de ne pas produire le meilleur résultat possible.

La première de ces méthodes imparfaites consiste à s'appuyer sur la volonté. Le salut ne réside ni dans la puissance de la volonté, ni dans des résolutions spasmodiques. La lutte, l'effort, l'agonie elle-même ont leur place dans la vie chrétienne, comme nous le verrons plus tard, mais elles ne l'ont pas dans la phase dont nous parlons. L'autre jour, comme je naviguais en plein Atlantique, l' « Etruria, » sur lequel je me trouvais, s'arrêta subitement. Quelque chose s'était dérangé dans la machine. Cinq cents hommes vigoureux se trouvaient à bord. Croyez-vous que si nous nous fussions tous mis à pousser le mât, nous aurions pu remettre le navire en marche ? L'homme qui cherche à atteindre la sanctification par son propre effort est semblable à celui qui tente de faire avancer son bateau en poussant le mât. Il est pareil à un homme qui se noie et qui croit pouvoir se soutenir hors de l'eau en tirant ses propres cheveux. Christ a en quelque sorte jeté le ridicule sur cette méthode, lorsqu'il a dit : « Lequel de vous peut par ses inquiétudes ajouter une coudée à sa taille ? » Le seul côté bienfaisant de ce procédé de l'effort personnel consiste en ce que ceux qui en font l'essai, découvrent presque immédiatement qu'il ne les rapprochera pas du but.

Un autre expérimentateur dira : « Ma méthode est toute différente. J'ai reconnu la folie d'une lutte à outrance dans les ténèbres. J'agis d'après un principe. Mon plan n'est pas d'épuiser mes forces à tort et à travers, mais de les concentrer sur un péché particulier. En combattant ce péché et en le crucifiant résolument, j'ai l'espoir à la fin de les extirper tous. » Ce plan malheureusement vient se heurter à quatre objections. Et d'abord, la vie est trop courte et le péché s'appelle légion. Puis, s'occuper d'un seul péché individuel, c'est laisser pour un temps le reste de la nature intact. Troisièmement, une lutte isolée contre un péché spécial n'atteint pas la racine et la source du mal. L'expérience nous montre que le péché refoulé de l'un de ses canaux, se précipite avec plus de force dans les autres conduits de l'organisme. Une conversion partielle est presque toujours accompagnée d'une déperdition de forces morales, par suite de la concentration des énergies sur le point d'attaque, et le dernier état de l'âme peut être pire que le premier. Enfin, la religion ne consiste pas en mesures négatives, en répressions partielles du mal. Ce n'est pas à coups de serpette que l'on parviendra à tailler un caractère parfait.

Un troisième proteste et dit : « Soit, je ne cherche nullement à réprimer mes péchés un à un. Ma méthode est diamétralement opposée. Je m'attache à copier les vertus une à une. » Le côté faible de cette méthode de copie, c'est qu'elle risque de devenir mécanique. On pourra toujours distinguer une gravure d'une peinture, une fleur artificielle d'une fleur naturelle. En copiant une à une les vertus, on arrivera à peu près au même résultat qu'en déracinant les vices les uns après les autres. La conséquence immédiate sera un caractère mal équilibré et difforme. Quelqu'un a défini le fat : une créature trop bien nourrie relativement à sa taille. On rencontre parfois des chrétiens de cette espèce, trop bien nourris d'un côté de leur être, mais effrayamment maigres et d'apparence famélique de l'autre. En copiant l'humilité, par exemple, et en l'associant à une vie mondaine dans ses autres manifestations, on arrive à un résultat simplement grotesque. Un défenseur forcené de la tempérance sera souvent, pour la même raison, la plus misérable des créatures, prospérant dans une vertu unique et oubliant totalement que sa tempérance le rend plus mauvais et non pas meilleur. Ce sont là des exemples de belles vertus perverties par de viles compagnes. Le caractère est une unité et toutes les vertus doivent progresser du même pas pour composer un homme parfait. Cependant cette méthode de sanctification suit la bonne direction. Elle fait fausse route seulement dans les détails de l'exécution.

Il est à peine nécessaire d'en signaler une quatrième, car elle n'est qu'une variété de celles déjà nommées. C'est la méthode du tout jeune homme, et, devant tant de candeur, on craint de commettre un sacrilège en y touchant. Elle consiste à tenir un journal portant des colonnes spéciales pour chaque jour de la semaine et une liste des vertus avec un espace blanc en regard destiné à noter des observations. Ce livre orné, en manière de préface, d'un grand nombre de règles sévères, est conservé à part dans un endroit secret et de temps en temps, à la tombée de la nuit, l'âme est citée à sa barre comme à celle d'un tribunal privé. Ce code de vie était celui de Franklin et je suppose que des millions d'individus pourraient nous dire comment ils ont suspendu dans leur chambre ou caché dans un tiroir fermé à clef ces règles qu'en un jour solennel ils ont tracées pour en faire le programme de leur vie. Cette méthode n'est pas fautive ; mais, pour une cause ou pour une autre, son succès laisse à désirer. Vous m'êtes témoins qu'elle ne réussit pas et c'est généralement pour une raison très simple - bien probablement parce que nous avons oublié notre règlement.

Toutes les méthodes que nous venons de nommer, celle de la volonté propre, celle du crucifiement personnel, celle de l'imitation et la méthode-journal sont parfaitement humaines, parfaitement naturelles, parfaitement irréfléchies et comme telles parfaitement insuffisantes. Nous ne prétendons pas, je le répète, qu'elles doivent être abandonnées. Leur tort consiste plutôt en ce qu'elles détournent l'attention de la méthode réellement efficace et en ce qu'elles produisent un résultat relativement bon, aux dépens du résultat parfait. Efforçons-nous donc de découvrir quelle est cette méthode parfaite.



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