Importance
de la
question.
- Qu'elle est importante cette
question ?
Elles sont importantes les questions qui se
débattent de nos jours. Il y a la question
militaire, la question sociale, la question
ecclésiastique, la question d'Orient, etc.,
etc.
Mais tout cela, ce ne sont que des questions
humaines, des questions que des hommes
soulèvent et qui passent, comme tout ce qui
est humain. Elles feront un jour place à
d'autres questions, et en fin de compte chacun
demeure libre de s'en préoccuper ou non, de
les ignorer même, sans qu'il en subisse de ce
fait quelque préjudice.
Il en est tout autrement de cette question
divine s'adressant à tout homme : Que
pensez-vous du Christ ? Elle demeure
immuable ; elle concerne chacun de nous,
quelque intérêt que nous puissions
avoir d'ailleurs pour les beaux-arts, pour la
politique ou pour l'économie sociale, ou
non ; que nous soyons riches ou pauvres,
jeunes ou vieux, cultivés ou
illettrés. Et lorsque, sur notre lit de
mort, toutes les autres questions
auront perdu tout intérêt pour nous,
alors s'imposera à nous la grande, l'unique
question, la plus sérieuse pour notre
âme ; elle se posera d'une façon
impérieuse, dépassant infiniment
toutes les affaires et les questions
d'ici-bas.
Et au jour du jugement cette question : Que
pensez-vous du Christ ?
subsistera
seule, et de telle manière que, de la
réponse à ces mots, dépendra
pour nous un bonheur ou un malheur éternel,
car il est écrit : « Il n'y a
de salut en aucun autre et il n'y a point d'autre
nom qui ait été donné aux
hommes par lequel il nous faille être
sauvés. »
(Actes
4: 12.)
La
personnalité
historique du Christ.
- Alors que pensez-vous du Christ ?
Vous savez sans doute qui il est ; qu'il est
né, il y a 19 siècles, de la vierge
Marie ; qu'il vécut trente ans comme
fils d'un charpentier, dans la ville de
Nazareth ; qu'après cela il
prêcha pendant environ trois ans en
Palestine ; qu'il y accomplit plusieurs
miracles ; qu'il fut crucifié sous
Ponce Pilate, et qu'il ressuscita le
troisième jour.
C'est du moins ce que, dès votre
enfance, on vous a raconté quant à la
vie de Jésus, notre Seigneur. C'est le
récit que nous rapporte la Bible et ce qui
est à la base des prédications faites
chaque dimanche dans les cultes publics. Tout
chrétien le croit ou passe au moins pour
croire ces choses. Et je veux aussi penser que vous
ajoutez foi à ces faits d'une façon
plus sérieuse et plus consciencieuse que
tant de gens qui, lorsqu'on les questionne à
ce sujet, vous avouent qu'ils ne se sont jamais
demandé si, oui ou non, ils ajoutent bien
foi à ces choses-là. Ces personnes
laissent ainsi voir le peu d'intérêt
et la faible importance que leur offre la
personne du Christ.
Le
Christ historique
ne suffit pas.
- Mais il se peut aussi que, malgré
votre foi sincère à la
réalité des faits que les
Évangiles nous rapportent, concernant le
Christ, il ne soit encore pour vous qu'un
personnage historique ; plus
considérable, plus vénérable
et meilleur assurément qu'un Socrate ou
qu'un Luther, mais enfin toujours un héros
de l'histoire, tel qu'il ressort de l'étude
de la Bible.
Christ sera toujours, à vos yeux,
cette figure pleine de bonté, de
majesté et de douceur à la fois, que,
dès notre enfance, nous avons vue
dépeinte dans une quantité de livres
et d'images, et sur les vitraux de nos
églises ! Nous l'y voyons vêtu
d'une longue robe flottante, tantôt bleue,
tantôt rouge, étendant ses mains pour
bénir, entouré de disciples à
l'air vénérable, au milieu d'une
foule recueillie, lui apportant ses petits enfants
pour qu'il les bénisse. L'auréole
même qui entoure sa tête a fini par
vous apparaître comme aussi naturelle que
légitime.
C'est de cette façon que s'est
formée dans votre imagination une figure de
Christ idéale, mais imaginaire. C'est ainsi
que vous êtes arrivé à vous
dire, comme tant d'autres avant vous : Si
j'eusse vécu de son temps et que j'eusse pu
le voir et l'entendre, j'aurais certainement cru en
lui, moi, et je n'aurais pas crié :
« Crucifie-le ! »
Le
Christ
véritable.
- Mais tout autre est le Christ
véritable. Il a passé sa vie dans des
conditions d'abaissement bien plus réelles
que nous ne nous le figurons. Car il n'y avait en
lui ni beauté ni apparence, mais sa gloire
morale et spirituelle en était d'autant plus
grande et pure.
Permettez donc que nous déroulions
devant vous le tableau sobrement
esquissé des circonstances et dispositions
où la nation juive se trouvait alors, au
temps où le Christ vécut, en ne
puisant à d'autres sources que les
récits évangéliques, l'unique
origine de vos idées quant à la
personne du Sauveur.
Sous le règne de l'empereur
Tibère, alors que le monde retentissait de
bruits de guerres et des victoires des Romains,
dans une petite province de leur immense empire, on
voit paraître un homme issu d'une peuplade
soumise dès longtemps et devenue
insignifiante.
Cet homme est encore jeune, il est
vêtu comme un ouvrier et n'a rien de frappant
en sa personne. C'est pour chacun un inconnu,
jusqu'au moment où l'on apprend qu'il sort
de cette bourgade de Nazareth
généralement méprisée,
et qu'il est charpentier de son métier
(Marc
6: 3), comme son père,
avec qui, depuis bien des années, il
travaille comme ouvrier, dans cet endroit où
il est depuis longtemps établi. Les gens de
cette contrée le reconnaissent pour leur
concitoyen et affirment qu'ils connaissent bien son
père, ses frères et ses soeurs.
(Matth.
13 : 55-56.)
Cet ouvrier charpentier n'a d'ailleurs rien
d'extraordinaire, sauf qu'il se distingue de ses
congénères par le sérieux de
son caractère et des paroles dénotant
une grande élévation de
pensées. Il mange et il boit ce qu'on lui
offre, et en quelque société que ce
soit. Il est cependant sujet aussi à la
fatigue, et s'accommode, pour dormir, tantôt
d'une barque de pêcheur, tantôt d'un
endroit quelconque pour y prendre du repos, car il
n'a pas de domicile fixe. Il passera même au
besoin la nuit en plein air et dans les montagnes.
On affirme aussi qu'il fréquente de
préférence les gens de sa condition,
des ouvriers, des pêcheurs, des mendiants même et
autres
gens méprisés, mangeant et buvant en
leur compagnie.
En même temps, à ce que l'on
raconte encore, cet homme proclame en termes
voilés et obscurs le salut et la
délivrance pour tout le peuple, se disant
appelé à être le
libérateur de la nation. Il se dit
même être le Messie en personne et le
Fils de Dieu, mais il se garde bien de se
présenter comme tel aux chefs du peuple. Il
évite aussi le roi Hérode et le
gouverneur romain Pilate et ne se rend pas
auprès du Souverain Sacrificateur. Il fait
d'ailleurs peu de cas des prêtres, auxquels
la loi de Moïse a cependant confié le
service du culte. Il n'a pas davantage d'estime
pour les docteurs de la Loi, dont la mission est
d'interpréter au peuple les paroles divines.
Cet homme mène ainsi une existence
absolument indépendante, ne
prétendant d'ailleurs à aucun
rôle religieux.
Cet ouvrier se soucie encore moins de la
politique. Le sort si malheureux des Juifs
gémissant sous le joug de fer des Romains ne
semble pas l'émouvoir. Lorsqu'on essaie de
le mettre en demeure de prendre position à
l'égard de l'empereur, il répond
d'une façon évasive. Un jour que la
foule du peuple s'apprête à le
proclamer roi, il s'enfuit au désert.
Un grand nombre de gens affirment
néanmoins que Jésus de Nazareth est
un homme excellent et que l'on ne saurait
absolument rien lui reprocher de mauvais. Bien au
contraire, il s'emploie, assure-t-on, à
guérir les malades et à consoler tous
ceux qui souffrent. D'autres personnes vont
même jusqu'à déclarer que ce
Jésus de Nazareth fait toute sorte de
miracles, qu'ils ont même vu s'accomplir sous
leurs yeux.
Témoignages
défavorables des adversaires.
- À l'encontre de ces
témoignages favorables, d'autres gens
répliquent cependant qu'après
être allés aux informations
auprès des principaux du peuple,
auprès des docteurs les plus versés
dans les Écritures et des hommes les plus
estimés par les gens pieux, personnes qui
toutes doivent savoir le mieux qu'en penser, ils en
ont obtenu pour toute réponse cette
déclaration « Nous savons que cet
homme est un pécheur.
(Jean
9: 24.)
Ces personnes autorisées ont encore
affirmé que, d'après les
prophéties, le Messie devait sortir de
Bethléem, tandis que cet homme vient de
Nazareth, bourgade d'où jamais
prophète n'est sorti, chacun le
sait !
Et quant à ses prétendus
miracles, qu'on assure avoir vu faire à ce
Nazaréen, ils prouvent qu'il faut bien qu'il
ait un démon pour pouvoir chasser les
démons par Béelzébub !
(Marc
3: 22.) Il y a d'ailleurs
beaucoup de faux dans les récits qu'on en
fait. N'a-t-il pas dit lui-même, lors de la
prétendue résurrection de la fille de
Jaïrus, qu'elle n'était pas morte, mais
seulement endormie ? Et quant à
Lazarre, on sait que celui-ci et ses deux soeurs
étaient des amis intimes de Jésus. Il
est donc aisé d'admettre qu'ils aient
concerté entre eux cette prétendue
résurrection. Il est vrai qu'on raconte de
lui d'autres miracles. Mais qui est-ce qui
était présent, lorsqu'il marcha sur
les eaux, comme on l'affirme ? Personne
d'autre que ces quelques pêcheurs
troublés par la peur qui, vu la nuit, se
forgèrent toute sorte d'idées. Et le
fait qu'ils abordèrent aussitôt au
lieu où ils allaient, comme ils le dirent
eux-mêmes, prouve à l'évidence
que c'est sur le rivage que Jésus venait
à leur rencontre.
On prétend aussi qu'il a
rassasié plusieurs milliers de personnes
avec quelques pains et des poissons. Mais qui donc
dans cette foule n'aurait pas songé à
s'enquérir du nombre de pains que ses
partisans doivent avoir cachés par devers
eux ? Et qui ne sait qu'une foule
composée de gens ignorants et superstitieux
est portée à croire tout ce qu'on
veut, pour venir ensuite publier des récits
fantastiques de faits absolument
naturels ?
Les prêtres assurent encore que, dans
ses discours au peuple, ce Jésus de Nazareth
s'est fait passer pour le Fils de Dieu, et que
même il se dit être Dieu
lui-même, si l'on a bien compris ses propos
obscurs. Quel blasphème ! Et lorsque
Jean le Baptiseur, un autre de ses partisans et
encore faux prophète, fut
arrêté, puis décapité,
par le roi Hérode
(Matth.21:
25), Jésus ne
parvint pas, malgré sa prétendue
toute-puissance, à faire le plus petit
miracle pour sauver son fidèle partisan. Au
contraire, après son exécution.
Jésus se retire avec ses disciples au
désert, évidemment par peur
d'Hérode et dans le sentiment de son
impuissance.
(Matth.
14, 13.)
Et puis, lorsque les prêtres et les
docteurs de la loi eux-mêmes le
sommèrent, par deux fois et publiquement,
pour parer à toute illusion, d'opérer
un signe dans le ciel, la première fois il
s'excuse en répondant :
« Cette race demande un miracle, mais il
ne lui sera donné d'autre signe que celui du
prophète Jonas »
(Luc
11 : 29 ; Marc
8: 11-13 ; Matth.
16: 2-4), et la seconde fois
il se dérobe tout simplement en
s'éloignant.
À la fin, nos pieux docteurs et
prêtres apostrophèrent le peuple en
disant : « Êtes-vous
séduits, vous aussi ? Aucun des
principaux ou des pharisiens a-t-il cru en
lui ?
Mais
cette populace ignorante de la loi est plus
qu'exécrable » !
(Jean
7 : 47-49.)
Ses propres frères eux-mêmes ne
croyaient pas en Jésus
(Jean
7: 3-5), et cependant qui
est-ce qui, mieux qu'eux, aurait pu le
connaître, ayant habité près de
trente ans sous le même toit, mangé
à la même table, travaillé
journellement à ses
côtés ? Malgré cela, ils
n'avaient rien découvert de divin en leur
frère aîné. On comprend que ces
hommes-là aient eu bien de la peine à
accepter que leur frère, issu de la
même mère qu'eux, pût
légitimement avoir la prétention de
se déclarer le fils de Dieu. Ils devaient
sans doute déplorer d'avoir à subir
de fréquentes moqueries à cause de la
prétention de Jésus au titre de Fils
de Dieu, ce qui apparaissait comme un fanatisme
insensé. C'est ainsi qu'alors, comme on l'a
fait de tout temps, les hommes se sont
moqués de ce qu'ils ne comprenaient pas. Et,
en effet, là où la raison cesse, la
moquerie commence.
Difficultés
s'opposant à la foi à la
divinité de Jésus.
- Quand nous aurons ainsi envisagé
les circonstances au milieu desquelles Jésus
a vécu, en les considérant au point
de vue de ses adversaires, comme à celui de
ses partisans, vous figurerez-vous encore, cher
lecteur, que vous eussiez, comme contemporain et
compatriote de Jésus, cru à la
divinité de Jésus de Nazareth avec
une foi joyeuse, confiante et
empressée ; que vous eussiez
considéré ce pèlerin inconnu,
méprisé de tous les gens
cultivés et pieux de l'époque, comme
le Fils de Dieu, voire même Dieu en personne,
venu au monde pour réconcilier le monde
pécheur avec lui-même ?
Pensez-vous qu'en dépit de
l'autorité de la religion établie, objet du respect
de toute la nation, que contrairement à
l'avis des personnes cultivées et pieuses de
votre entourage et de votre peuple, à
l'encontre de parents et amis, - pensez-vous que
vous vous seriez volontiers laissé exclure
de votre congrégation et du cercle de vos
relations, abandonnant fortune et
propriétés, votre vocation ou votre
industrie, pour suivre le cortège de pauvres
mendiants et estropiés qui formaient la
suite de Jésus-Christ, en consentant
à vivre avec eux dans la pauvreté, la
faim, l'opprobre et le mépris ?
L'auriez-vous, malgré tout, reconnu comme le
Fils de Dieu, uniquement pour avoir entendu sortir
de sa bouche des paroles de vie
éternelle ?
S'il en est ainsi, vous êtes alors un
homme grand devant Dieu, baptisé du
Saint-Esprit et de feu, et digne, en la
résurrection des justes, d'être
placé à côté des
pêcheurs du lac de Génézareth,
auxquels le Seigneur fit jadis cette
promesse : « Parce que vous avez
persévéré dans mes tentations,
vous serez assis sur des trônes pour juger
les douze tribus d'Israël.
(Luc
22: 28.)
Mais s'il n'en est pas ainsi,
humilions-nous, cher lecteur, vous et moi, mon
frère, et disons : Non, certes, nous,
pas plus que les autres Israélites et le
peuple juif, nous n'aurions cru en Jésus de
Nazareth, Fils de Dieu, et nous l'aurions
crucifié, nous aussi !
Impressions
produites
par le spectacle de la crucifixion.
- Et maintenant figurez-vous que vous ayez
été témoin de ce qui s'est
passé pour mettre fin à ce que
l'autorité, juive considérait comme
un grand désordre. Représentez-vous
la police et le haut clergé faisant
arrêter Jésus et le traduisant devant
ses juges. Voyez ce prétendu Fils de Dieu,
incapable de se défendre,
lié comme un vil criminel, amené
devant le tribunal et interrogé, ne
prononçant pas une parole pour sa
défense !
(Matth.
26 : 62.)
Le roi Hérode, désireux de le
voir, ayant déjà beaucoup entendu
parler de lui, demande au prévenu de faire
un miracle devant lui. Mais Jésus semble
avoir perdu son pouvoir ou bien ne l'avoir jamais
possédé, car il demeure impassible et
muet, en proie aux injures des soldats.
(Luc
23: 9.
Le malheureux est enfin mis en croix,
à la vue de toute la multitude du peuple,
des soldats romains et de leur capitaine, de ses
disciples et de sa propre mère. Alors les
chefs de la nation, les prêtres mêmes
de Dieu, se plaçant en face de lui,
prononcent à haute et intelligible voix ces
paroles : « Si tu es le Fils de
Dieu, descends de la croix, » exigence
pouvant assurément paraître
légitime alors, et ils ajoutent :
« alors nous croirons en
toi ! »
(Matth.
27: 40-42.)
À ces mots, si vous doutez encore de
Jésus, quand vous le voyez en croix, vous
penserez qu'il ne peut faire autre chose que d'en
descendre. Il faut qu'il agisse ; il se doit
à lui-même, à sa mission,
à nous qui avons cru en lui, à ses
ennemis, à Dieu lui-même, - il est
obligé de se manifester en ce moment
solennel comme Fils de Dieu, en donnant gloire
à la vérité et en glorifiant
Dieu. Sans cela ses ennemis pourront jubiler
à jamais, disant qu'en face de la mort il
n'était rien et ne pouvait rien ! -
« Si tu es le Fils de Dieu, descends de
la croix ! » - Et
qu'arrive-t-il ? - Rien !
Celui qui se disait Fils de
l'Éternel, qui fut avant Abraham, qui,
à ce que l'on prétendait, commandait
aux éléments, à la mer et aux
vents, aux morts et aux démons, le
voilà incapable de répondre à
ce défi, de se défaire de ses quatre
clous ; le voilà qui, dans sa douleur
impuissante, appelle Elie à son
secours !
Pensez-vous encore qu'en présence de
tous ces faits vous n'eussiez point douté de
sa divinité ? et que,
révolté vous-même de
prétentions aussi inouïes, en
même temps que blasphématoires, vous
n'auriez pas crié comme les autres :
« Crucifie-le, car il a dit être le
Fils de Dieu ! »
(Matth.
27 : 43.)
Et croyez-vous que vous auriez
été bien profondément
remué, quand quelques femmes, et plus tard
quelques disciples, seraient venus vous dire que le
crucifié était ressuscité et
qu'ils l'avaient vu, alors que tout homme
cultivé, vos amis et connaissances, vous
eussent demandé avec ironie si vous
étiez assez superstitieux pour croire
pareille chose, alors qu'une enquête
judiciaire aurait prouvé que les disciples
étaient venus de nuit dérober son
corps ?
N'est-ce pas, mon frère, nous voulons
plutôt rendre grâces à Dieu de
ce qu'il connaît notre infirmité,
notre peu d'indépendance de
caractère, et de ce que, dans sa grande
bonté et sa sagesse infinie, il n'a pas
voulu que nous vinssions au monde à pareille
époque et dans de telles circonstances.
Privilèges
des
temps actuels pour les croyants.
- Car à ce moment-là, il
était beaucoup plus difficile de croire en
lui qu'à l'époque actuelle et dans
les conditions présentes. Il est certain que
l'esprit de Dieu est tout-puissant et qu'il
eût pu alors nous éclairer, aussi bien
que de nos jours, de manière à ce que
nous eussions pu déclarer, nous aussi :
« Tu es le Fils de
Dieu ! »
Mais avec une foi aussi faible qu'est la
nôtre, avec notre peu d'indépendance
de caractère, il est très probable
que nous eussions méprisé le
crucifié aussi certainement que la foule
témoin de son supplice. Dieu nous a
gardés en ne nous exposant pas à une
plus grande condamnation. Sachons donc lui en rendre
grâces !
Aujourd'hui nous possédons des
renseignements précis et certains sur la
personne de Christ. Nous sommes en état
d'apercevoir et d'embrasser du regard de la foi les
grandioses conséquences de ses paroles et de
son oeuvre. Il est ainsi plus aisé de nous
le représenter que lorsqu'il vivait sur la
terre. Alors nous eussions été aussi
incapables qu'à présent de nous
soustraire à l'influence morale de notre
entourage. Sur la foi de ces vertueux pharisiens,
nous aurions été conduits à
prendre Jésus pour un pécheur et pour
un faux prophète, au dire des
Saducéens, ces matérialistes
décidés, qui, déjà
à cette époque-là, ne
croyaient ni à l'âme ni à
l'esprit, et qui auraient ri de notre stupide
superstition !
De nos jours, nous vivons au sein d'une
nation chrétienne, au moins de nom, dans une
communauté où le Christ est
confessé et annoncé, et où son
nom est proclamé. Ainsi, au moins d'une
façon extérieure, il ne semble plus
guère difficile de croire en
Jésus-Christ comme les autres gens.
Mais en revanche l'on est exposé au
danger de ne croire en lui que parce que chacun
semble plus ou moins partager cette croyance,
croyance qui peut d'ailleurs ne s'attacher qu'au
Christ historique, accrédité dans le
monde, comme fondateur de l'Eglise
chrétienne. Pourtant nous savons que ce
n'est point cette croyance-là qui sauve,
puisque l'athée lui-même peut partager
cette opinion.
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