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L'église anglicane menacée d'un schisme sur la question de l'homosexualité

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L'avenir ni très gay, ni très rose de l'Eglise anglicane. Un schisme menacerait-il l'Eglise conduite par la reine d'Angleterre ? Entre conservateurs et progressistes la bataille fait rage. L'enjeu ? Les homosexuels et les femmes.

Pour les quelque 70 millions ou presque d'anglicans disséminés de Londres à Kuala Lumpur, le nom du Capilano College n'évoque rien. Mais, si l'on en croit George Carey, l'archevêque de Canterbury (qui doit se retirer prochainement), cet établissement universitaire situé sur la côte Pacifique du Canada pourrait bientôt devenir aussi célèbre que la diète de Worms, l'édit de Nantes ou le concile de Trente. Au début du mois de septembre, Michael Ingham, l'évêque du diocèse de New Westminster à Vancouver, et quelque 350 délégués ont investi la salle de conférences du Capilano College pour leur synode annuel. Outre l'habituel vote sur le budget du clergé et l'entretien des églises, un appel a été lancé pour que le diocèse autorise la bénédiction des mariages homosexuels. Sitôt la mesure approuvée, à 62,5 % des voix, et acceptée par l'évêque, les demandes de bénédiction ont commencé à affluer.

Compte tenu de son aspect local, le différend aurait pu passer inaperçu. Mais, à la mi-septembre, l'archevêque de Canterbury, chef spirituel de toute la communauté anglicane, s'est inquiété de ces dissensions doctrinales qui menaçaient son Eglise de schisme. Pour George Carey, qui laissera sa place dès octobre à Rowan Williams, les dissensions sur l'homosexualité et d'autres questions allant de la nomination de femmes à la tête d'évêchés au droit de partager le vin de la communion ont pris des proportions critiques. "Je suis préoccupé de voir que notre communauté est régulièrement affaiblie par des diocèses et des évêques qui agissent de façon unilatérale, en général dans des affaires liées à la sexualité. Cette attitude oriente de plus en plus notre Eglise vers une grave scission." En bref, il craint que les ailes progressiste et traditionaliste de l'anglicanisme ne décident de suivre chacune leur voie. L'Eglise d'Angleterre, qui était jadis le pouvoir spirituel de l'Empire britannique, a aujourd'hui bien du mal à préserver l'union entre des factions en lutte sur l'ensemble de ses anciens territoires.

L'anglicanisme, qui s'est propagé dans le monde à partir du règne de Henri VIII, est divisé en 38 "provinces" couvrant 164 pays. En Angleterre, l'Eglise mène une bataille de longue haleine contre le déclin d'une communauté forte de 24 millions de fidèles, alors qu'en Afrique elle est au contraire florissante : au Nigeria et en Ouganda, le nombre de pratiquants dépasse les 25,5 millions, un chiffre supérieur à celui de l'ensemble des anglicans d'Europe [hors Royaume-Uni]. Mais c'est en Amérique du Nord que l'aile progressiste se montre le plus remuante. La décision prise par l'évêque Michael Ingham et par son diocèse menace de rompre le consensus de 1998 sur l'homosexualité. Une résolution votée il y a quatre ans stipulait en effet que les relations homosexuelles ne pouvaient être comparées aux relations hétérosexuelles et qu'il était impossible de "recommander la légitimation ou la bénédiction de mariages de personnes du même sexe". Mais, dans le même temps, ce texte reconnaissait que l'Eglise comptait beaucoup de fidèles homosexuels et qu'ils devaient être considérés comme de vrais anglicans.

Dans l'Etat américain de Pennsylvanie, un évêque progressiste a démis de ses fonctions l'un des prêtres de son diocèse qui l'avait accusé d' "hérétisme" pour avoir soutenu l'ordination des femmes et les mariages gays. A l'opposé, les traditionalistes, prédominants en Afrique, continuent à mener un combat d'arrière-garde contre ce qu'ils considèrent comme des idées occidentales imposées au véritable anglicanisme. Dans la plupart des archevêchés africains, les bénédictions de mariages homosexuels ont "à peu près autant de chances de se produire qu'une tempête de neige dans le Sahara", observe un prêtre anglican.

Dans l'attaque cinglante de George Carey, certains observateurs avertis perçoivent l'influence des conservateurs d'Asie et d'Afrique. Son discours est peut-être aussi un avertissement à son successeur, connu pour ses idées progressistes sur l'homosexualité. Pour Paul Handley, le rédacteur en chef du Church Times , le principal hebdomadaire anglican, les deux factions devront finir par trouver un compromis sous l'égide de leur nouveau chef spirituel. "Rowan Williams est un grand unificateur, et l'anglicanisme a toujours reposé sur un consensus - un consensus auquel aucun des camps n'est prêt à renoncer."

A Vancouver, l'évêque Michael Ingham a riposté le 17 septembre en accusant l'archevêque d'aggraver les dissensions. "Ses commentaires n'honorent pas la prudence avec laquelle le synode et moi-même avons pris nos décisions sur la bénédiction des mariages d'homosexuels", a-t-il déclaré. Ces déclarations ne font que "jeter de l'huile sur le feu", déplore George Carey, et devraient relancer le débat au sein de l'Eglise d'Angleterre. Mais au coeur de la querelle se trouvent les prémisses d'un débat plus fondamental. L'Eglise d'Angleterre doit-elle se séparer de ses frères d'outre-mer ? La révérende Cassandra Howes, qui préside le Mouvement chrétien des lesbiennes et des gays, en est presque convaincue. "La question , explique-t-elle, est de savoir si un schisme est une menace ou une chance. Dans l'histoire de l'Eglise, il y a eu des époques où certains groupes avaient intérêt à suivre chacun leur voie. Peut-être est-ce le cas aujourd'hui."

(The Independent/Courrier International) ajouté le 9/10/2002

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