Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

Se priver de vie privée ?

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J'ai un métier, mais j'ai choisi de rester à la maison pour mon mari et mes enfants. Je suis découragée, car mon mari s'investit à fond dans son travail, au détriment de la famille. Il n'a pas d'horaires et me laisse me débrouiller seule avec les soucis domestiques. Que faire?

 

Je sens votre lassitude et un sentiment de dévalorisation personnelle, qui, ajouté au poids du travail familial, constitue un fardeau lourd à porter seule. Il est difficile de trouver un équilibre entre le temps réservé au travail de chacun et le temps à consacrer à la famille. C'est aussi vrai pour la femme dont le mari rentre à des heures «impossible», que pour le mari dont la femme continue ses activités, lorsqu'il rentre à la maison. La difficulté est de savoir s'organiser pour que ce point de rencontre, qu'est la famille, reste un espace privilégié et prioritaire et que chacun s'efforce d'y être présent en même temps, et au moment des temps forts: essentiellement les repas. Ces temps forts servent à rétablir l'unité de la famille, et à sa restauration dans tous les sens du terme. Lorsque l'homme est trop sollicité par son travail, il n'est plus disponible pour les siens et les prémices d'une cassure au sein du couple se présentent. D'abord l'absence physique: on ne peut plus compter sur lui quand il le faut, il ne respecte pas les horaires familiaux, puis l'absence de dialogue: préoccupé par les soucis du travail, ses pensées y sont restées et il devient sourd aux tentatives de communication de sa femme; enfin, l'absence de communion: la fatigue, la répétition des mêmes problèmes, le retour des mêmes soucis rendent les relations intimes difficiles. Il est temps de se recréer, d'organiser des moments de détente qui ne soit pas des temps morts mais des moments où on fait autre chose, autrement, à un autre rythme, avec ceux qu'on aime. Au lieu que le temps nous prenne ou nous asservisse, on prend le temps pour soi et pour les siens, car c'est dans la mesure où on se sent bien, que ceux qui nous entourent se sentiront bien, indépendamment du bien-être matériel, recherché dans le travail.

 

Que le travail soit rémunéré ou pas, plus on est «occupe», «débordé» et plus on rentre dans le schéma de notre société actuelle de valorisation sociale par l'activité (même si elle est stérile), avec un emploi du temps chargé. Le temps consacré au travail devient alors un rival dangereux qui nous prive... d'une vie privée. On se trompe soi-même quand on ne veut pas reconnaître que le but de l'investissement professionnel, c'est la satisfaction personnelle, mais aussi, souvent l'occasion de fuir des désagréments familiaux ou des contraintes qui dérangent l'égoïsme. Le travail peut non seulement être une fuite de nos responsabilités familiales mais encore justifier notre existence. Une fois le nécessaire assuré, la famille n'a besoin de rien d'autre que d'une présence. Ce n'est pas le nombre d'heures passées ensemble qui compte, la quantité de temps accordé à la famille, mais la qualité de ces instants, ce qu'on y met, comment on le gère. Il faut donc partager les temps forts de la journée, les réincorporer au sein du couple par la parole afin qu'ils soient acceptés comme des expériences valorisantes nécessaires et que le couple puisse en tirer des bénéfices. Essayez de réserver, le soir, quand les enfants sont couchés, un moment de partage avec votre mari, pour lui dire simplement, sans agressivité, votre fardeau, vos préoccupations, et donnez-lui l'occasion d'exprimer les siennes. «Il y a un temps pour toutes choses» nous dit l'Ecclésiaste (3, 17). «Si quelqu'un n'a pas soin des siens, et principalement de ceux de sa famille, il a renié la foi et il est pire qu'un infidèle» (1 Tim. 5, 8). Le travail est pour l'homme, pour le servir et lui apporter un bien-être et non l'inverse, l'homme pour le travail, et le projet de Dieu était que l'homme jouisse «du travail de ses mains» et en reçoive joie et bonheur et prospérité (Ps: 128, 2).

Dominique Dirrenberger

AVENEMENT Juin 1992 No 47 / P 27

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