Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

Un anniversaire: NICÉE-CONSTANTINOPLE 381-1981

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Le Symbole de Nicée-Constantinople
Les six premiers conciles


par Jean-Marc DAUMAS


En 381, il y a plus de trois siècles que les chrétiens essaient de répondre à la question posée sur le chemin de Césarée :
« Au dire des gens, qui suis-je, moi le Fils de l'homme ? » (Mt 16: 13)

La réponse à cette question cardinale: la Christologie - la réflexion sur la personne du Christ - existait donc depuis les premiers jours de l'Église. Mais elle fut aiguillonnée par la seule grande hérésie, l'arianisme, qui donnera au dogme christologique une réalité textuelle dans le Symbole de Nicée (325), ratifié au Concile de Constantinople (381), dont nous commémorons l'anniversaire.

L'idée-mère du prêtre égyptien, Arius (250-336) est celle du Dieu unique : « Nous croyons en un seul Dieu». Il part de cette intuition profonde de l'Unicité transcendante de Dieu pour arriver à nier la divinité du Fils, en passant par les médiations suivantes :

- Dieu est seul éternel, sans principe. Il n'y a pas de pluralité en Dieu.
- Le Fils n'est pas inengendré ou incrée, il a été tiré du néant.
- Avant d'être créé, il n'était pas, il a commencé d'exister par la volonté de Dieu avant les siècles.
- Le Fils est une créature hétérogène et subordonnée au Père.

Ainsi toute la divinité est donnée au Père seul, toute l'humanité aux hommes ; le Christ est un être intermédiaire entre les hommes et Dieu, ni homme, ni Dieu.

Ce premier conflit christologique, surgi dans le clergé d'Orient au IVe siècle, s'accélérera pour éclater en crise ouverte en Occident où l'arianisme est religion d'État des Goths. C'est dire l'ampleur de ce drame arien qui démembrera l'Église jusqu'au VIIe siècle.
Pour endiguer cette interrogation dévastatrice qui met en péril l'Église et l'Empire, Constantin convoque pour le 20 mai un Concile oecuménique (230 évêques présents) à Nicée, petite ville d'Anatolie, en Asie Mineure. Le synode excommunie Arius et proclame le Fils consubstantiel (homoousios) au Père, en parfaite unité d'essence avec Lui. Ce mot consubstantiel sera comme le résumé de la foi menacée par les ariens, il tracera la ligne de partage entre les orthodoxes (nicéens) et les partisans d'Arius.

Dix ans après Nicée, l'arianisme, entrant par la petite porte du pluralisme séducteur, s'installe dans le peuple pour devenir religion dominante. C'est la déchirure de la chrétienté ! En 330, les évêques ariens déposent Eustathe, le président du Concile de Nicée ; en 335, c'est le tour d'Athanase d'Alexandrie (295-373), le champion de l'orthodoxie. Le tout culmine en 360 dans un Concile tenu à Constantinople, qui rejette Nicée et proclame la foi arienne.
Les ariens, très insolitement, perdent rapidement du terrain : ils s'épuisent dans leurs propres divisions. Faute de cohésion et de stabilité, la balance penche résolument du côté de leurs adversaires nicéens, bien que les empereurs aient été plutôt ariens. L'atout de l'orthodoxie est le soutien de théologiens de grande classe, en Orient principalement, la triade des grands cappadociens : Basile de Césarée, Grégoire de Nysse et Grégoire de Nagianze, en Occident, Ambroise de Milan.

En 361, Constance meurt, c'est le début de l'effritement arien (sauf sous le règne de Valens en Orient, qui permettra une recrudescence de l'hérésie arienne). En 379, Théodore, d'Orient, convoque pour mai 381, à Constantinople, un second Concile qui sera reconnu comme oecuménique. Le nec plus ultra en théologie nicéenne, la christologie d'Athanase trouvera son expression textuelle dans le Symbole que le Concile va officialiser et qui est connu sous le nom de Nicée-Constantinople. Cette confession de foi complète celle du premier Synode. La théologie objective d'Athanase apparaît dans ce nouveau texte par l'insistance répétée des événements historiques du salut. Contre les marcionites (leur Dieu, qui n'est pas le Dieu créateur, est une divinité peu personnalisée, lointaine, qui ne s'approche pas réellement des hommes), il est précisé que le Père est le créateur du ciel et de la terre. La christologie athanasienne donne des indices objectifs précis en jouant sur les deux registres de sensibilité culturelle: pour les païens, il y a la précision: sous Ponce Pilate ; pour les juifs, le selon les Écritures met en lumière de vérité la proclamation « Le Christ est ressuscité ». Il est indiqué par ailleurs que Jésus est né de la Vierge Marie. Contre les pneumatomaques et les macédoniens (qui refusent la pleine divinité à l'Esprit), il y a un long développement sur l'Esprit appelé Seigneur et qui règne. Il est précisé que l'Esprit procède du Père (et non du Père et du Fils, selon l'addition du filioque de Tolède en 589, puis de Gentilly en 767, qui se maintiendra en Occident).
L'actualité de Nicée-Constantinople est évidente: si Jésus-Christ n'est pas Dieu et homme, l'oeuvre de rédemption perd toute sa réalité. C'est toute la question du salut qui est en jeu. Au plus, Jésus-Christ est Dieu, grand Seigneur, au plus il peut être notre Sauveur. Et c'est la formule-choc d'Athanase : « Le Verbe, qui est Dieu, s'est fait homme pour que l'homme devienne Dieu». Cette outrance de langage ne fait qu'approcher la démesure de la folie de Dieu pour le salut du monde.

J-M. D.

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Le Symbole de Nicée-Constantinople

Nous croyons
en un seul Dieu, Père tout-puissant, créateur du ciel et de la terre, des choses visibles et invisibles,

et en un seul Seigneur Jésus-Christ, fils unique de Dieu, engendré du Père avant tous les siècles, lumière de lumière, vrai Dieu de vrai Dieu, engendré, non créé, de la même substance (homoousios) que le Père, par lequel tout a été créé, qui pour nous les hommes et pour notre salut est descendu des cieux, a été fait chair par le Saint-Esprit, de la vierge Marie, s'est fait homme. Il a été crucifié à cause de nous sous Ponce Pilate, a souffert, a été enseveli et est ressuscité le troisième jour selon les Écritures; il est remonté aux cieux et s'est assis à la droite du Père, d'où il reviendra avec gloire pour juger les vivants et les morts, dont le règne n'aura pas de fin,

et en l'Esprit Saint, le Seigneur qui règne et rend vivant, qui procède du Père et qui avec le Père et le Fils doit être honoré et glorifié, qui a parlé par les prophètes, une seule église, sainte, universelle et apostolique. Nous reconnaissons un seul baptême pour la rémission des péchés. Nous attendons la résurrection des morts et la vie du siècle futur. Amen.



Le concile de 381 n'a pas rédigé un nouveau symbole, mais a modifié celui de Nicée, 325. Les développements que Constantinople a apportés au texte de Nicée sont en caractères gras.

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Les six premiers conciles oecuméniques ou généraux


 

Brève présentation
Ces conciles s'occupèrent surtout des questions concernant la Trinité : la nature divine, les relations entre le Père, le Fils et le Saint-Esprit et l'Incarnation. On y forgea des confessions de foi.

Les deux premiers conciles ont insisté sur la pleine divinité du Christ et ont formulé la doctrine de la Trinité :

- 1er CONCILE DE NICÉE, 325, en Bithynie, convoqué par Constantin.

-Condamnation d'Arius (Christ = un être créé). Symbole de Nicée : le Christ est consubstantiel, un en essence (homoousios) avec le Père.

- 2 ème CONCILE DE CONSTANTINOPLE, 381 :

-ratifié la condamnation d'Arius
-homologué le symbole de Nicée
-précisé la doctrine sur le Saint-Esprit. Il est Dieu, au même titre que le Père et le Fils.

Les quatre conciles suivants se sont attachés à définir l'humanité du Christ et à expliquer l'union, en une même personne, de la nature humaine et de la nature divine :

-3 ème CONCILE D'EPHESE, 431, convoqué par l'empereur Théodose Il :

-a condamné Nestorius (= les deux natures dans le Christ sont distinctes, sans influences de l'une sur l'autre a précisé la doctrine de l'incarnation ;
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a canonisé l'expression theotokos (mère de Dieu) appliquée à Marie dans le but de sauvegarder l'unité de la personne du Christ : vrai Dieu et vrai homme.

4 ème CONCILE DE CHALCEDOINE, 451, convoqué par l'empereur Marcien:

-renouvelé la condamnation de Nestorius ;
-élaboré une définition dogmatique sur les deux natures unies en Jésus-Christ «sans confusion et sans changement», contre les monophysites (= la nature divine submerge ce qui est humain), « sans division et sans séparation» contre les nestoriens.

5 ème CONCILE DE CONSTANTINOPLE (II), 553, sous Justinien, appelé aussi concile des Trois Chapitres :

-a précisé (contre Appolinaire et Eutychès) la notion de personne divine : le Fils est une seule personne mais a deux natures.

6 ème CONCILE DE CONSTANTINOPLE (Il!), 680-681 :

a précisé davantage la christologie, contre les monothélites (= nouvelle forme de monophysisme : deux natures, une seule personne, donc une seule volonté. C'est une attaque de la plénitude de l'humanité du Christ : une nature sous-humaine sans volonté humaine ne serait qu'une nature incomplète, une simple abstraction), ce concile a affirmé l'existence en Jésus-Christ de deux volontés : divine et humaine, correspondant aux deux natures.

J-M. D.

© Fac-Réflexion no 6 1981