Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

E SCHISME DES TRIBUS DU NORD

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Salomon mort et enterré, Roboam, l'aîné de ses fils, accède au trône apparemment sans contestation. Mais l'inauguration du nouveau règne ressemble davantage à une investiture populaire et démocratique qu'à un sacre. Les anciens du peuple, les chefs de tribus et de familles président une assemblée avec le dessein d'établir un contrat avec le nouveau souverain. On semble vouloir passer d'une monarchie absolue à une monarchie constitutionnelle.

Sous-jacente à la harangue des anciens : « Allège le joug pesant que ton père nous a imposé » (le, Rois, chap. 12, vers. 4), on discerne une volonté inébranlable de réforme. Les anciens, manifestement décidés à aller jusqu'au bout, posent des conditions. Cette assemblée « révolutionnaire » est en fait un retour coutumes d'avant la monarchie. Si Jéroboam, rentré d'Égypte, figure aux côtés des anciens, c'est qu'il a été convoqué par eux, poussé aussi sans doute par le désir de participer aux événements décisifs qui vont se dérouler. Il était la personnification de la misère du peuple et de la résistance aux abus du précédent régime. Sa présence à lui, le proscrit, le condamné à mort, l'exilé, donnait un poids singulier aux revendications des anciens du peuple. Il était de plus « l'oint » clandestin. Face à Roboam, l'héritier de droit, Jéroboam était l'héritier de par l'investiture prophétique reçue d'Ahiyya.

Si l'assemblée se réunit à Sichem, c'est toujours parce qu'on veut renouer avec les traditions les plus anciennes, et peut-être restituer quelque peu l'atmosphère de l'assemblée de toutes les tribus que présida Josué après le partage de la Terre promise (Josué, chap. 24). De plus, Sichem est dans le nord. On veut obliger le roi à quitter Jérusalem, c'est un défi à l'adresse de la citadelle de David. Du temps de Salomon, J'antagonisme entre le nord et le sud s'est maintes fois affirmé, il va se consommer. Le royaume du sud prend le nom de « royaume de Juda », celui du nord le nom de « royaume d'Israël ». Roboam règne à Jérusalem, la capitale du sud ; Jéroboam d'abord à Sichem probablement, puis à Tirsa; l'un de ses successeurs fondera Samarie comme capitale du nord. Le royaume du nord regroupe nominalement l'ensemble des tribus d'Israël, moins Juda et Benjamin; celles-ci constituent, théoriquement seules, le royaume du sud; elles sont toutefois enrichies d'une part de Siméon fondue dans Juda : le reste a pu rallier le nord et trouver une implantation sur la rive ouest du Jourdain, sur les terres orientales appartenant en principe à Manassé et Éphraïm. La politique de grandeur a vécu. On en revient tant dans le sud que dans le nord au régime agricole d'autrefois. De soi, ce retour à une vie plus simple devrait marquer un assainissement moral. Mais ce schisme politique amène aussi un schisme religieux. Malgré sa dureté, Roboam du simple fait qu'il a le royaume du sud pour partage et Jérusalem pour capitale, est le soutien naturel du culte conforme à la Loi. Certains de ses successeurs s'emploieront à le purifier de tous les syncrétismes et des tendances idolâtriques que Salomon a laissé s'infiltrer.

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Des sanctuaires rivaux

Par contre Jéroboam, malgré son humanité profonde, et du simple fait qu'il se trouve en lutte plus ou moins ouverte avec le royaume du sud, ne pourra tolérer que ses sujets viennent plusieurs fois par an à Jérusalem, pour les fêtes légales : dans la crainte d'une action psychologique des Judéens qui entraînerait la subversion dans son royaume. Aussi va-t-il instituer des sanctuaires rivaux de celui de Jérusalem : à Béthel au sud, près de la frontière avec le royaume de Juda, et à Dan, dans l'extrême nord. Ces temples nouveaux seront pourvus par Jéroboam d'idoles symbolisant la fécondité, dont il pense peut-être qu'elles peuvent représenter l'Éternel. Il y organise un culte parodiant celui de la Loi, et enfin s'arroge les fonctions de grand prêtre. C'est en fait une nouvelle religion, qui n 1 a plus grand chose de commun avec celle qui fut révélée au Sinaï. C'est pourquoi revient si souvent dans les livres des Rois, manifestement écrit dans le royaume du sud : « Il ne se détourna pas de tous les péchés par lesquels Jéroboam, fils de Nebat, fit pécher Israël. » Sur le plan politique, le destin des deux royaumes est fort différent : au sud, le pouvoir demeure puissant. Une seule dynastie, celle de David, le détient par succession régulière, alors qu'au nord les quatre dynasties qui se succèdent n'ont aucune relation entre elles, si ce n'est le meurtre qui marque à chaque fois le passage de l'une à l'autre. Le trône est à la merci d'aventuriers ambitieux, le pays est divisé en clans hostiles, une certaine anarchie s'installe progressivement.

Ahiyya, le prophète, qui fut d'une certaine manière à l'origine du schisme de par le sacre secret de Jéroboam, s'élèvera vigoureusement contre la trahison religieuse de celui qu'il a désigné pour roi, et il annoncera la chute rapide de sa dynastie.

Mais dans le royaume de Juda également les prophètes doivent braver le pouvoir royal quand il jugent nécessaire de le faire. Dan ce conflit incessant qui va oppose le nord au sud jusqu'à la chut de Samarie, ils prendront souvent le contre-pied de la politique officielle, se refusant à donner raison à l'une ou l'autre partie. Il prêchent la réconciliation en affirment que Dieu seul reste le vrai recours. Ainsi prend corps peu peu l'idée prophétique d'un car tain neutralisme, c'est-à-dire d l'abstention de toute alliance poli tique, et du seul maintien d l'Alliance avec Dieu.

P. CRISOLI

En ce temps-là, la Bible No 26 page IV.

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