Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

Les procès-verbaux des sages de Sion

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Plutôt honteux, une génération à peine après l'holocauste, de devoir prouver à des contemporains crédules, se disant «éclairés et humanitaires», que le pamphlet antisémite «Die Protokolle der Weisen von Zion (Les procès-verbaux des sages de Sion)» est un faux.

Ces fameux « procès-verbaux» sont à nouveau cités en Union Soviétique dans le contexte des campagnes de provocation anti-juive du Pamyat; dans les pays arabes, on en trouve des versions traduites et même dans notre Allemagne d'après-guerre, nous entendons à nouveau des voix cherchant à justifier leur attitude antisioniste par ces soi-disant «procès-verbaux».

 

De quoi s'agit-il, en fait?

1905 en Russie: un fonctionnaire scribe jusqu'alors inconnu, Sergius Nilus, publie un livre sous le titre «La grandeur dans les petites choses ou l'antéchrist comme alternative politique la plus proche». Une première édition doit déjà avoir paru en 1901 sous le titre «La grandeur dans les petites choses ou l'avènement de l'antéchrist et la règne du diable sur la terre», toujours à Moscou.

1907, nouvelle édition sous le titre «Accusations portées contre les ennemis du genre humain», signé par un réactionnaire russe nommé S. Butmy comme éditeur et dédié à «l'Union du peuple russe». Comme annexe au 12ème chapitre du livre, nous trouvons des procès-verbaux d'une assemblée des «Sages de Sion» qui, selon les précisions de l'auteur dans la 4ème édition (imprimée en 1917 au couvent de Troitzko-Sergejew sous un nouveau titre) a dû se dérouler en même temps que le premier congrès sioniste à Bâle en 1897.

Les diverses éditions du livre ainsi que les traductions donnent des renseignements qui s'écartent fortement l'un de l'autre en ce qui concerne la manière dont Nilus est entré en possession de ces documents.

Ce n'est qu'à la fin de la Première Guerre mondiale, après l'effondrement de la Russie et des puissances de l'Europe centrale que les « procès-verbaux» jouirent d'une célébrité extraordinaire. On en trouve des traductions dans presque toutes les langues vivantes. Pour de larges cercles antisémites de tout poil, ils furent une véritable révélation sur les objectifs secrets du judaïsme.

Dans ce soi-disant procès-verbal de conciliabule, on y trouve en effet la description détaillée de ce que les juifs ont fait jusqu'alors et ce qu'ils doivent continuer à faire pour s'assurer la maîtrise du monde. Chaque lecteur intelligent et sans préjugés aura immédiatement reconnu que ce livre constitue un tissu de mensonges sans valeur, dépourvu de sens, ne méritant ni analyse ni critique.

La position particulière accordée à la question juive après la Première Guerre mondiale, en particulier durant la période nazie, a voulu que ce pamphlet trouve non seulement de nombreux lecteurs, mais également des adeptes. La propagande antisémite aidant, il a été diffusé sur une grande échelle, en particulier dans une édition populaire de 1919.

Le livre fut le point de départ d'une littérature abondante dans toutes les langues, renforçant parmi de larges couches des peuples européens la croyance en un plan de renversement fomenté par les Juifs. Devant la commission d'enquête mise en place pour juger les émeutes d'août 1929 en Palestine, le grand mufti de Jérusalem s'est rabattu sur les «procès-verbaux des sages de Sion» pour justifier sa haine contre les juifs.

Un correspondant du «Times» londonien a découvert en 1921 que ces «procès-verbaux» avaient été repris en grande partie, presque mot par mot - en tout cas avec de minimes corrections stylistiques - d'une brochure parue d'abord en 1864 sous une plume anonyme, puis en 1868 à Bruxelles sous le nom de l'auteur Maurice Joly et portant le titre «Dialogue aux Enfers entre Machiavel et Montesquieu, ou la politique de Machiavel au XIXème siècle, par un contemporain».

Cette brochure attaque Napoléon III, n'a donc rien à voir avec les juifs et le judaïsme et a été imprimée de surcroît 33 ans avant le premier congrès sioniste de Bâle. Les articles du correspondant du «Times» sortirent en août 1921 et plus tard sous le titre «The Truth about the Protocols, a literary forgery» comme tirage spécial.

Dans les « procès-verbaux», nous trouvons de plus des réminiscences d'histoires mensongères connues à souhait de chaque connaisseur de la littérature antisémite sur des assemblées secrètes juives, par exemple la description d'une rencontre cabalistique au cimetière juif de Prague dans le roman «Biarriz» de Sir John Recliffe (nom d'emprunt de l'antisémite Goedsche allemand) paru en 1868, selon lequel, une fois par siècle, les «princes» des douze tribus d'Israël se rencontrent dans l'ancien cimetière juif de Prague pour s'informer mutuellement sur la situation momentanée de l'empire mondial juif et sur ce qu'il importe encore de faire dans ce domaine.

Malgré le plagiat évident commis par Nilus et les falsifications éhontées, de nombreuses orientations antisémites ne démordent pas de cette argumentation servant leur cause tirée des prétendus «procès-verbaux des sages de Sion», ce qui prouve à l'envie que les mensonges ont longue haleine - d'autant plus si l'on s'empresse d'ignorer l'évidence. L. S.

Nouvelles d'Israël Juillet 1990

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