Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

L'espion qui venait du froid

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Selon la célèbre «théorie du chaos», le battement des ailes d'un papillon à Singapour peut provoquer une réaction en chaîne susceptible de se terminer par une tornade sur la côte Est des Etats-Unis. En appliquant la même logique, il est possible d'arriver à la conclusion que la chute du mur de Berlin n'aurait jamais eu lieu si Viktor Greibsky n'avait pas existé. Il y a environ 38 ans, le destin a donné l'occasion à cet Israélien, aujourd'hui âgé de 70 ans, d'écrire un chapitre déterminant de l'histoire mondiale.

C'est dans les années cinquante que Greibsky, à l'époque journaliste de renom en Pologne et aujourd'hui ombudsman de la société de radiodiffusion israélienne, influença le cours de l'histoire. En effet, il réussit à livrer aux services secrets israéliens l'intégralité du discours secret de Khrouchtchev dans lequel celui-ci dénonçait pour la première fois les crimes de Staline.

En 1956, tous les services secrets occidentaux tentèrent de s'approprier la version intégrale et officielle de ce discours historique. Les meilleurs agents furent utilisés pour cette mission et des sommes considérables y furent consacrées. La C.I.A. proposait à elle seule un million de dollars - une somme colossale pour l'époque - à celui qui ramènerait ce document tant convoité. Mais les tentatives américaines furent vaines. Seul Viktor Greibsky parvint à exécuter ce coup de maître, et comme dans tous les thrillers dignes de ce nom, le hasard l'aida beaucoup dans son entreprise.

Tout se passe en mai 1956. Quelques semaines plus tôt, à l'occasion du vingtième congrès du parti communiste de l'URSS, Khrouchtchev avait dénoncé dans un discours les atrocités commises par Staline. La stupéfaction des 1200 personnes présentes dans la salle n'eut d'égale que l'émotion profonde provoquée par cette allocution. Pour la première fois, un homme politique soviétique de haut rang osait critiquer publiquement celui qui jusqu'alors était unanimement considéré comme le «petit père des peuples», comme un demi-dieu en quelque sorte. L'intention de Khrouchtchev était de garder ce discours secret. Il savait qu'une large diffusion non contrôlée de ce texte provoquerait une dangereuse agitation dans le monde communiste. Le discours ne fut donc tiré qu'en sept exemplaires et envoyé aux présidents de parti du bloc communiste, avec l'instruction formelle de garantir la confidentialité de son contenu. L'une de ces copies atterrit sur le bureau du premier secrétaire du parti communiste polonais, Edouard Ochab.

Viktor Greibsky se rendait très fréquemment dans les bureaux du gouvernement. Il était aussi très lié avec Lucia, la secrétaire personnelle d'Ochab, et il passait souvent la voir. Au cours d'une de ces visites, il aperçut le document secret sur le bureau de Lucia. Sa curiosité éveillée, il commença à le lire. Le nombre de pages étant considérable, il demanda à son amie s'il pouvait reprendre le dossier afin d'en prendre tranquillement connaissance chez lui. Lucia y consentit, en insistant toutefois pour qu'il le ramenât le jour même, car elle devait le ranger dans un coffre-fort.

Greibsky fut très impressionné par la lecture de ce discours et comprit pourquoi le monde entier le convoitait. Il décida de le remettre à l'ambassade israélienne.

Celle-ci ne lui était pas inconnue puisque, durant les mois précédant cette affaire, il s'y était rendu à plusieurs reprises afin de préparer son immigration vers Israël. Un an auparavant, il avait en effet visité Israël et adhéré au sionisme, ce qui lui avait valu d'être expulsé à la fois du parti et de l'agence de presse pour laquelle il travaillait. Lorsque ce jour-là, il arriva à l'ambassade avec le document qu'il qualifia plus tard de bombe à retardement, il savait très bien à qui s'adresser. Le document fut photocopié puis remis à Greibsky qui le rendit quelques heures après à Lucia.

Quelques jours plus tard, le Premier ministre israélien de l'époque, David Ben Gourion, entrait en possession de cette copie. Ben Gourion était un homme très intelligent, doté de la faculté exceptionnelle de pressentir les événements historiques. Après avoir lu le document, il fit appeler le chef des services secrets, Amos Manor, et lui parla en ces termes: «Si ce document est authentique, dans 20 ans, le régime totalitaire de l'URSS aura disparu». Une fois convaincu de son authenticité, Ben Gourion prit une décision importante: il offrit le document aux Américains qui, à l'époque, redoutaient toujours que le jeune Etat d'Israël n'adopte une attitude pro-communiste.

La C.I.A. vérifia à son tour l'authenticité du discours puis, conformément aux instructions du Président Eisenhower, l'envoya au quotidien «The New York Times». La publication des atrocités commises par Staline fit le tour du monde. Ce que Ben Gourion avait prédit se produisit: les premiers signes de fêlure du régime communiste se manifestèrent en Hongrie, en Tchécoslovaquie et en Pologne. Le communisme ne redeviendrait jamais ce qu'il avait été par le passé.

Le succès américain fut total et le chef de la C.I.A., Allan Dallas, put déclarer avec fierté que la subtilisation du discours de Khrouchtchev pouvait être considérée comme le plus grand exploit des services secrets américains sous son commandement.

Le cadeau d'Israël, ce «service diplomatique» rendu par les services secrets israéliens aux Américains, eut également des répercussions d'un tout autre type. Les relations israélo-américaines, plutôt froides jusqu'alors, connurent un début de réchauffement. Convaincue du talent et des intentions bienveillantes des services secrets israéliens, la C.I.A. entama une étroite collaboration avec eux et progressivement, une «alliance stratégique» se noua entre les deux Etats.

Viktor Greibsky, dont la présence d'esprit avait déclenché tout ce processus, immigra en 1957 vers Israël et entra au service de la radio. Il y mena une brillante carrière et après seulement quelques années, il fut nommé directeur du département des émissions étrangères diffusées dans pas moins de 20 langues. Peu de personnes connaissaient son secret et lui-même n'en parlait jamais. Les années passant, il fut peu à peu établi que c'était Israël qui avait en réalité mis la main sur le discours de Khrouchtchev, et non les Etats-Unis. Cependant, le rôle qu'avait joué Greibsky dans cette affaire est resté secret jusqu'en ce mois de juin 1994.

En effet, 38 ans plus tard, Greibsky a enfin rompu ce silence et raconté son histoire dans un documentaire réalisé par la télévision israélienne. Dans ce film tourné en Israël, en Pologne, en Russie et aux Etats-Unis, Amos Manor, chef des services secrets israéliens au moment de l'affaire, s'exprime également et confirme la version de Greibsky. Il y révèle également que sa vie se trouva en danger lorsque les Américains décidèrent - avec le consentement d'Israël - de publier le fameux discours. Le film comporte également une interview du chef du KGB dans les années 60. Selon lui, le KGB avait pu découvrir que le discours avait été initialement dérobé en Pologne, mais ses services n'avaient jamais réussi pour autant à identifier les coupables.

Quant à Greibsky, il affiche une attitude modeste quant au rôle qu'il a joué dans cette affaire. «Ce n'est pas moi qui ai fait l'histoire», dit-il dans le film, «c'est Khrouchtchev. Moi, je n'ai fait que la croiser durant quelques heures et saisir l'occasion de faire un cadeau à Israël. Ce discours était en quelque sorte le bouquet de fleurs que j'offrais à ma nouvelle patrie.»

COMMENTAIRE

Avant toute chose, signalons que Zwi Lidar, notre correspondant à Jérusalem et l'auteur de cet article, a lui-même été directement impliqué dans cette affaire et y a même apporté sa «contribution».

Cet article nous montre de manière éclatante que fondamentalement, Israël est à l'origine de toutes choses. Différents passages de l'Ecriture le confirment d'ailleurs directement ou indirectement (cf. Deut. 32, 8; Gen. 12, 3; Zach. 2, 8; Matth. 25, 40; Rom. 11, 15). En 1956 déjà, le jeune Etat israélien ouvrait les yeux du monde sur la malignité et les méfaits du communisme. On peut dire sans hésitation qu'à cette époque, l'Etat hébreu encore tout neuf avait démasqué l'imposture du système communiste. Le communisme qui proclamait haut et fort que «Dieu n'existe pas» a dû céder face à Israël, la preuve sur la terre de l'existence de Dieu! Ce n'est pas un hasard si aucun service secret occidental n'a réussi à s'emparer du discours de Khrouchtchev et si le Mossad israélien y est parvenu. Ce fait doit être analysé sous l'angle de la Parole prophétique, car dans l'Ecriture, Jérusalem est appelée la «ville de vérité» (cf. Zach. 8, 13; version Darby). Mais il y a plus encore: c'est à Jérusalem que Jésus-Christ, sur la croix de Golgotha, a triomphé de toutes les forces des ténèbres et les a publiquement livrées en spectacle (cf. Col. 2, 15). Aujourd'hui, c'est encore par Israël qu'est révélée la fourberie du monde; c'est précisément ce qui explique les divergences de vue à son sujet; c'est aussi la raison pour laquelle tant de personnes et de nations sont malveillantes à l'égard d'Israël. En effet, Israël n'est pas un pays comme les autres: c'est celui du peuple de Dieu! C'est le signal de Dieu et le signe de notre temps indiquant que la fin est imminente et que l'avènement du Seigneur est Proche. C.M.

Nouvelles d'Israël 08 / 1994

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