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Béthel "Haut lieu" des patriarches maudit par les prophètes

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Antique lieu biblique, puisqu'il doit son nom (Maison de Dieu) à Jacob (GENESE, chap. 28, vers. 12-17), qui y vit en songe Yahvé appuyé au sommet d'une échelle « dont le sommet atteignait le ciel », Béthel est devenu l'objet de la réprobation des prophètes. Depuis que Jéroboam y a dressé un veau d'or pour détourner du Temple de Jérusalem les habitants du nouveau royaume du nord, il concrétise en effet à la fois le schisme d'Israël et l'infidélité à Yahvé,son Dieu.

Les archéologues américains s'attachent aujourd'hui à faire revivre Béthel, en partie recouverte par le village moderne de Beitin, à quelques kilomètres au nord de Jérusalem.

Des trouvailles éparses de silex microlithiques peuvent faire remonter les origines de cette cité à un lointain passé préhistorique. Mais c'est de 2500 environ av. J.-C. que date le premier sanctuaire cananéen; à côté, rien d'autre qu'un campement de bergers autour d'une source; le coeur du haut lieu était une table rocheuse, surélevée d'environ un mètre par rapport à la roche environnante. Des taches sombres sur le rocher blanc attirèrent l'attention des chercheurs qui firent analyser dans un laboratoire des parcelles de pierres ainsi teintées. Aucun doute : C'était du sang, humain ou animal, qui avait giclé sur le rocher. Ainsi, après quarante-cinq siècles, on avait retrouvé la trace des antiques sacrifices au dieu El, puisque tel est le plus ancien nom sémitique qui ait été donné à la divinité. L'hypothèse fut d'ailleurs confirmée par la découverte d'ossements d'animaux éparpillés alentour.

En d'autres endroits, la roche portait des traces de flammes, témoignages des bûchers sacrificiels qui avaient été allumés.

Vers 2200 avant notre ère, un village se constitua autour de la source et du haut lieu.

Il eut un sanctuaire moins rustique : un temple de plus de onze mètres de long sur trois mètres cinquante de large, dont la porte faisait face à l'est. Sans doute se trouvait-il encore fréquenté lorsque le patriarche Abraham campa « sur la montagne qui est à l'orient de Béthel » (GENESE, chap 12, vers. 8).

Dans les premiers siècles du second millénaire avant J.-C. l'agglomération s'est étendue, et fut alors solidement fortifiée pour la première fois, puis abandonnée pour une raison inconnue. Le site sera de nouveau occupé autour de 1 700 avant notre ère et ses nouveaux habitants construisent un second sanctuaire au nord du premier. Le nouvel édifice était orné sur le côté sud d'une colonnade, et, parmi les décombres, on découvrit un pilier sacré. De cette époque date un mur d'enceinte, si résistant et si bien dessiné qu'il en reste des vestiges.

C'était une muraille épaisse de plus de onze mètres, en forme d'U mais de plan complexe, construite en pierres étroitement imbriquées et pourvue de portes monumentales dont la plus remarquable, celle du nord-ouest, empiète sur l'emplacement du premier haut lieu. Elle fut détruite, en même temps qu'une partie de la ville, vers 1 550 av. J.-C., par les armées égyptiennes qui allaient conquérir la Syrie.

Peu après, les habitants revinrent sur la colline. Une ville neuve s'y éleva, avec des demeures « patriciennes », luxueuses, et des canalisations pour l'écoulement des eaux. Ainsi s'ouvre une ère de prospérité qui dura trois siècles. Au XIIe siècle avant notre ère, Josué pénètre dans la ville et l'incendie. Puis les Israélites s'y installent et leurs maigres cabanes se mêlent aux riches maisons des anciens Cananéens.

Sous les Juges, la cité est pauvre mais garde une certaine importance : elle est maintes fois mentionnée dans l'Écriture. Avec David et Salomon, elle recouvre une réelle prospérité. Et, sous le règne de Jéroboam 1er (930-909 av. J.-C.) enfin, elle acquiert un prestige exceptionnel : au mépris de la Loi du Sinaï, le roi d'Israël y dresse « une image sculptée » autour de laquelle s'organise le culte (1er ROIS, chap. 12, vers. 28-29). Sans doute le sanctuaire était-il somptueux : c'est ce que pensent les archéologues qui - jusqu'ici sans succès cherchent sous le village moderne de Beitin.

Quelque deux cents ans plus tard, vers 750 av. J.-C., la voix du prophète Amos s'élève pour stigmatiser Béthel (chap. 3, vers. 14; chap, 4, vers. 4) qu'il appelle par dérision Bet-Aven : non plus « maison de Dieu », mais « maison du néant ».

La ville est alors riche; les notables du royaume du nord se « vautrent » dans le luxe et la luxure (AMOS, chap. 6, vers. 13).

Un sceau d'argile inscrit, datant du IVe ou VIIIe siècle avant notre ère, récemment découvert, permet de constater qu'un siècle seulement après la visite de la reine de Saba en Israël, le commerce avec l'Orient florissant encore à Béthel : il témoigne de la présence de marchands d'encens venue du sud de l'Arabie.

En 724, l'invasion des Assyriens mettra fin à l'opulence, mais, un siècle plus tard, les Babyloniens, nouveaux occupants, accordent aux Juifs le droit d'y rebâtir un sanctuaire.

Si Béthel est épargnée en 586, alors que Jérusalem s'effondre sous les coups de Nabukodonosor, elle ne survivra pas à la puissance perse (VIe siècle av. J.-C.). Pour les contemporains d'Esdras et de Néhémie, ce n'est plus qu'un village.

La cité reprend vie toutefois sous le règne d'Alexandre le Grand et croîtra sans cesse jusqu'à la conquête musulmane. Dans les premiers siècles de notre ère, elle fut dotée de citernes qui la mettaient à l'abri des caprices des saisons et des rigueurs d'un siège.

Mais la ville byzantine, très étendue, demeurait vulnérable et dut notamment se protéger contre les Samaritains en révolte qui déjà avaient massacré la population chrétienne de Naplouse. Ses habitants édifièrent de nouveaux remparts grâce aux moellons puisés dans l'ancienne muraille du XVIIIe siècle av. J.-C. Mais, au Vlle siècle, l'invasion des Arabes marqua irrémédiablement le déclin de Béthel qui ne s'est jamais relevée depuis.

M.-C. HALPERN

En ce temps-là, la Bible No 72

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