D'après le chapitre 5 de la GENESE, Adam aurait eu un fils à l'âge de 130 ans, et il aurait encore vécu 800 ans.
La série des patriarches d'avant le déluge, qu'inaugure Adam, décidément nous étonne.
Celle des patriarches d'après, guère moins :
une série de cas semblables ; Abraham lui-même est centenaire lorsqu'il devient père d'Isaac, et il meurt à 175 ans. Il y a donc un problème: ces hommes qui vécurent en des temps très reculés ont-ils joui d'une longévité exceptionnelle, nettement supérieure à la nôtre ? C'est peu probable. Mais alors comment expliquer les affirmations de l'auteur biblique?
Au cours des âges, diverses explications ont été fournies.
Certains n'ont vu là qu'une confusion entre les années et les mois lunaires, ceux-ci ne comptant guère que 29 jours. Mathusalem n'aurait alors vécu que 78 de nos années. Malheureusement, cette solution commode amènerait à trouver tout naturel que de nombreux patriarches aient été pères avant l'âge de la puberté : ainsi Abraham par exemple aurait eu 8 ans à la naissance d'Isaac. Ce qui n'est pas très vraisemblable. De plus, le récit du déluge (chap. 8 de la Genèse, vers. 5 à 14) contredit ouvertement cette hypothèse : « Le 27e jour du second mois... ».
Mois et jours sont nommés comme tels, et la seule lecture du texte permet de conclure que les années du récit sont des années lunaires, composées de mois de 27 jours au moins, et probablement analogues à celles des Chaldéens: douze mois de 29 ou 30 jours.
D'autres ont considéré qu'après la création comme après le déluge, Dieu avait fort bien pu faire bénéficier l'homme d'une durée d'existence supérieure à celle que nous connaissons afin que la terre se peuplât ou se repeuplât plus rapidement. On peut déceler une intention de cette nature dans les versets 1 à 3 du chapitre 6 de la Genèse : « Après que les hommes eurent commencé à se multiplier sur la terre... Yahvé dit : ...le temps de l'homme ne sera plus que de cent vingt ans. » Certes, rien n'est impossible à la toute-puissance de Dieu, dès qu'on admet que Dieu est Dieu : le maître de tout.
D'autres enfin ont remarqué que pour nombre de patriarches postérieurs au déluge en tout cas, l'écart n'était pas si grand entre leur âge et celui de certains hommes de l'époque historique dont la vie simple et saine pouvait se comparer à la leur, Les plus avisés signalent que dans la seule République du Daghestan en Union Soviétique, quelque 643 centenaires sont aujourd'hui recensés sur les 1266 000 habitants de ce territoire. La palme de la longévité revenant à Chirali Baba Mouslinov qui, à l'heure où nous écrivons, porte gaillardement ses 163 ans; ce n'est pas si loin en somme des 175 ans d'Abraham.
Les âges cités n'ont pas un caractère historique rigoureux
Nous avons cependant consulté à ce sujet un des meilleurs spécialistes de la Bible. l'Abbé J. Dheilly.
professeur à I'Institut catholique de Paris, et voici ce qu'il en pense : « Un certain nombre de remarques préliminaires s'imposent.
Tout d'abord le texte biblique du chapitre 5 de la Genèse qu'a suivi le traducteur de « En ce temps-là », le Journal de la Bible, celui d'ailleurs qu'avait retenu saint Jérôme pour sa traduction latine (Ve siècle), est le texte reconnu comme officiel par les juifs depuis le début de l'ère chrétienne.
Mais il en est d'autres. Or si l'on consulte le Pentateuque samaritain (exemplaire qui se trouve à Naplouse, et qui fournit la copie tardive d'un autre texte hébreu), ou la traduction grecque des Septante, qui suppose elle aussi un texte différent du nôtre, on se trouve en présence de données chronologiques variables. Ici Mathusalem aurait vécu 720 ans au lieu de 969; là Hénok aurait eu, à la naissance de Mathusalem 165 ans au lieu de 65. Cela entraîne dès l'abord une certaine réserve sur le caractère historique rigoureux de ces données.
En outre on constate dans le texte grec que, d'Adam à Lamek, l'âge des Patriarches, à la naissance de ,leur fils, va régulièrement en diminuant, de même que la durée globale de leur existence à une ou deux exceptions près. On peut donc légitimement penser à un certain caractère conventionnel de la présentation.
Dix générations pour 432.000 ans !
Ajoutons que la Bible n'est pas le seul document à présenter de telles généalogies étonnantes. Dans l'immense littérature babylonienne que les fouilles ont amenée à la lumière trois textes nous offrent des listes de rois d'avant le déluge avec des durées de règne extraordinaires: ainsi la liste de Bérose (prêtre et historien chaldéen, vers 300 av.
J.-C.) comporte dix noms pour couvrir une durée de 432 000 ans 1 Si l'on songe que la littérature biblique plonge dans celle de Mésopotamie par ses racines les plus anciennes, l'impression s'affirme d'un procédé littéraire.
Dernière remarque : le texte du chapitre 5 de la Genèse a été rédigé à l'intérieur des cercles sacerdotaux de l'exil. à Babylone.
Il présente donc, comme toutes les productions bibliques de l'époque, un souci très marqué d'enseignement religieux.
Il est maintenant possible d'apporter une solution valable à ce problème.» .
Longue vie à ceux qui sont fidèles
L'auteur biblique, au début de la Genèse, a présenté à son lecteur la fresque de la création (chap. l), où Dieu donne la vie à l'homme.
Après quoi il montre cette vie transmise de génération en génération. Mais le fait traditionnel du déluge l'amène à faire une distinction entre les hommes fidèles à Dieu et les pécheurs. En fonction des idées courantes, il envisage une longévité anormale comme un don de Dieu accordée à la fidélité de l'homme ; mais en même temps il insinue que la vie humaine diminue avec les progrès du mal.
Or la littérature mésopotamienne lui fournissait des listes de noms avec une durée de vie extraordinaire. Il les adopte donc, mais en les schématisant encore davantage et en les ordonnant à la leçon religieuse qu'il voulait dégager.
dans la ligne du dépôt de la foi traditionnelle dont les cercles sacerdotaux de l'exil assuraient la garde Assurément, chacun est libre de conclure à sa guise. Pour aucune des confessions qui se réclament de la Bible, l'âge des patriarches n'est un article de Foi.
En ce temps-là, la Bible No 3 pages VII- VIII.