SECTION III. - Evidences des Écritures. (Suite)

 

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§ 58. Preuves morales. - Si la Bible n'est pas ce qu'elle prétend être, le livre de Dieu, elle ne peut être qu'une fable artificieusement composée. On se demande donc laquelle de ces deux suppositions est la plus probable. Quoiqu'il semble au premier abord que l'esprit humain ne soit guère compétent pour déclarer à priori ce qui doit être une révélation de Dieu, cependant, dans les formes dans lesquelles la question est posée, il est facile de décider si les enseignements de l'Ecriture peuvent être attribués à l'enthousiasme ou à l'imposture. C'est une question que chacun peut résoudre, quoiqu'elle exige sans doute de l'expérience, la connaissance du monde et surtout une connaissance exacte des Ecritures.

Remarquons d'abord l'extrême importance que la Bible attache à la sainteté. Si l'on en juge par tous les systèmes religieux inventés par les hommes, une religion humaine aurait employé toutes ses forces à l'établissement d'observances cérémonielles , on bien elle aurait exigé de ses adhérents des services sérieux , des sacrifices réels à son profit , en expiation de leurs fautes et de leurs dérèglements. Le mahométisme assigne dans le ciel la place d'honneur à ceux qui combattent et meurent pour le défendre. L'indouisme accorde les plus hautes récompenses à ceux qui se distinguent le plus par des actes extérieurs de dévotion. Une tradition juive porte que tous les Juifs , par le fait de leur naissance, seront sauvés. L'Ecriture, au contraire, place tous les hommes en présence d'un être d'une sainteté infinie , devant lequel les caractères les plus nobles et les plus élevés ne sont que péché et corruption (Job , XL, 4. Esaïe, VI , 5. Dan. , IX, 4. 1 Tim. , I, 15). Elle déclare , en outre, que rien de ce que nous pourrions faire par actes ou par paroles pour la cause de Christ ne suppléera jamais ce qui nous manque en vertu personnelle. Ceux même qui auront prêché au nom de Christ seront repoussés s'ils ont été des ouvriers d'iniquité, et la connaissance de la vérité, la profession de la foi ne font que rendre la sainteté chrétienne un devoir plus indispensable et plus impérieux.

Les devoirs moraux enseignés par la Bible sont d'une telle nature qu'il est bien peu probable qu'un homme eût pu les imaginer et les proclamer. Quand notre Seigneur vint au monde, les Romains étaient fiers de leur gloire militaire , les Grecs de leur sagesse supérieure. Parmi les Juifs régnait un esprit pharisaïque , et toute la nation était divisée en sectes et partis qui n'étaient d'accord que pour haïr tous les païens en général, et les Romains leurs oppresseurs en particulier. Un enthousiaste serait certainement devenu le partisan d'une de ces vues exclusives; un imposteur aurait flatté toutes ces sectes en condamnant les fautes et les erreurs des autres, ou la nation en condamnant la domination étrangère. Jésus-Christ arrive au contraire , docteur indépendant, repoussant toutes les erreurs, condamnant toutes les sectes, et sans même rien faire pour se concilier la faveur des masses. Ses préceptes ordonnent de rendre le bien pour le mal , d'aimer ses ennemis, d'être humble et plein de support, de considérer tous les peuples, races, tribus et nations , comme étant sur le même niveau devant Dieu. Evidemment , ils n'étaient acceptables pour personne; néanmoins il les répète et les reproduit avec la plus grande force et la plus vive insistance.

On peut objecter, il est vrai, que les hommes sont toujours disposés à recommander un degré de moralité supérieur à celui qu'ils pratiquent eux-mêmes et qu'ils espèrent obtenir des autres, et que les anciens philosophes ont écrit des traités remplis d'une morale beaucoup plus pure que celle qui avait cours parmi leurs compatriotes. Cette observation serait spécieuse si les pêcheurs de Galilée avaient étudié la philosophie; mais c'étaient des hommes ignorants, et leurs préceptes sont supérieurs non-seulement à la morale telle qu'elle était mise en pratique, mais encore à la morale telle qu'elle pouvait être conçue et rêvée par l'esprit humain. L'Evangile n'est pas seulement meilleur que la conduite des hommes; il est en opposition complète avec elle. La patience dans l'épreuve, le pardon des injures, l'exercice d'un esprit soumis, non-seulement n'étaient pas mis en pratique, mais ils n'étaient pas même admirés; l'Evangile, en nous les prescrivant comme des devoirs, les rattache à un héroïsme spirituel dont le monde n'a pas la moindre idée; car la grandeur morale a toujours été considérée dans ce monde comme inconciliable avec les vertus humbles et patientes que prescrit l'Ecriture.

Un autre caractère important à remarquer, et que Paley a fort bien développé, c'est que l'Ecriture s'attache à régler les pensées et les motifs non moins que les actes eux-mêmes; elle veut que le coeur soit disposé à rapporter toutes ses actions à la volonté de Dieu.

Cela seul suffirait à prouver que l'Evangile est de Dieu et non des hommes. Des imposteurs n'eussent pas imaginé une pareille moralité ; des hommes honnêtes et droits n'eussent pas cherché à accréditer de si hautes vérités par l'imposture.

La place donnée à Dieu en toute circonstance est encore un trait bien remarquable de l'Ecriture. Ainsi, le péché n'est jamais envisagé que comme une offense contre Dieu ; et toujours , quoi qu'il arrive, c'est à Dieu seul, et non point à ses instruments humains ou autres, que gloire est rendue. Or, quant au péché, la notion biblique est inconnue à toute la philosophie païenne; quant à la glorification de Dieu, elle est antipathique aux tendances naturelles du coeur de l'homme. « C'est une vérité reconnue de tous les philosophes , dit Cicéron, que la divinité ne peut éprouver aucun déplaisir des actions humaines, et qu'elle n'est pas disposée davantage à les affliger. » Jean-Jacques Rousseau dit la même chose.

Dans l'Ecriture, au contraire, le péché est représenté comme une chose mauvaise et coupable, parce qu'il déshonore Dieu. De là la destruction des Cananéens, des Amalécites, de Sanchérib, de Beltsçatsar (Exode, XVII, 16. 2 Rois, XIX, 22-37. Dan., V, 23). De là les Gentils abandonnés à un esprit de vertige et «erreur (Rom. , I, 21 , 28). De là les contestations de Dieu avec les Juifs et avec Moïse (Héb., III , 19. Nomb., XX , 12). De là les châtiments d'Héli et de David (1 Sam., II, 29, 30. 2 Sam., XII, 9. Cf. Ps. LXI, 4). De là la mort de Nadab et «Abihu, de Huza, d'Hérode (Lév., X, 1-3. 2 Sam., VI, 7. Actes, XII, 23). De là encore les calamités qui frappèrent le royaume de Salomon, le schisme d'Israël, la captivité et la destruction des deux royaumes (1 Rois, XI, 3-14; 2 Rois, XVII, 14-20. 2 Chron. , XXXVI , 16, 17. Luc, XIX, 42-44. Rom. , XI, 20).

Dieu seul est honoré. Les écrivains sacrés semblent ne pas avoir d'autre objet que de diriger vers lui les pensées des hommes. Le faux docteur se donne comme étant lui-même un grand personnage (Actes, VIII , 9), mais dans la Bible Dieu seul est grand.

Voyez, pour Moïse, Deut., I, 31 ; II, 33 ; III, 3; IV, 32-38. Exode, XVIII, 8; - pour Josué, Josué, XXIII, 3; - pour David, 1 Chron., XXIV, 11 , 14; - pour Daniel, Dan., II, 20 ; - pour Esdras, Esdras, VII , 28; - pour Néhémie, Néh., II, 12; - pour Pierre et Jean, Actes, III, 12-16; - pour Paul, Actes, XXI, 19. 1 Cor., III, 5. 2 Cor., IV, 7.

La création nous est représentée comme Dieu dans la nature, Ps. CIV, 10. Jér., V, 24. Joël, II, 23, 24. Matth., X, 29; - et les révolutions des empires , comme Dieu dans l'histoire, Jér., XVII, 7-10. Dan., IV, 35. Jér., XXV, 9. Esaïe, XXXXIV, 28.

C'est en partie aussi pour fortifier en nous les sentiments que ces idées doivent réveiller que la foi nous est donnée comme un principe d'obéissance et de succès; car, vis-à-vis de Dieu, la foi est une confession de notre faiblesse, et elle exclut tout orgueil; considérée quant à la tâche que nous avons à remplir, elle est toute-puissante; c'est une vérité aussi profonde en philosophie qu'importante au point de vue spirituel. Et cette vérité n'est révélée que dans la Bible (Rom. , III, 27. Ephés., II, 8 , 9. 1 Cor. , I, 29-31. Jean , XI , 40. Esaïe, VII, 9).

La candeur et la sincérité des écrivains sacrés ne sont pas moins remarquables que leurs préceptes moraux, et ne peuvent s'expliquer ni avec l'enthousiasme ni avec l'imposture.

Ils dénoncent les péchés de leur nation (Deut. , IX , 24. Juges, II, 19. 1 Sam., XII, 12. Néh. , IX). Ils parlent d'eux-mêmes ou de ceux dont le caractère aurait pu jeter le plus de lustre sur leur cause avec une parfaite humiliation. Moïse annonce que les Juifs violeront l'alliance de Dieu, et qu'il sera lui-même surpassé par un plus grand prophète (Gen., XLIX, 10. Deut., XVIII, 15,18. Actes, VII, 38). - Moïse raconte, sans rien voiler, les péchés des patriarches (Gen., XII, 11-13 ; XX, etc.); ceux de son aïeul Lévi (Gen., XLIX, 5-7); ceux d'Aaron et de ses fils aînés (Exode, XXXII. Lév., X), non moins que ses propres péchés (Nomb., XX, 12; XXVII, 12-14. Deut., XXXII, 51).

Rien n'est caché des péchés de David, des désordres de Salomon, des faiblesses de foi du puissant Elie.

Les évangélistes ne sont pas moins prêts à raconter leurs propres faiblesses, leurs chutes, leur incrédulité si longue et si persistante. Ils ne cachent ni les souffrances, ni les faiblesses matérielles, ni les humiliations du Sauveur, ni sa mort ignominieuse. Les apôtres n'essaient pas de taire ou de déguiser les désordres qui se glissaient dans les nouvelles Eglises fondées par eux, et ils reconnaissent que leur autorité a souvent été méconnue et mise en question (1 Cor., I, 11 ; V, 1. 2 Cor., II, 4 ; XI, 5-23; XII , 20).

Ce n'est pas ainsi que des imposteurs se recommandent au monde.

Une pareille abnégation d'esprit et de coeur entraîne avec elle la conviction intime que les écrivains sacrés n'ont eu d'autre objet en vue que de faire connaître à la conscience humaine des révélations divines.

Aucune analyse ne peut donner l'idée de la sublimité de la morale évangélique. C'est dans son ensemble qu'elle doit être comparée avec les enseignements des hommes. Les sages ont proclamé des maximes de vertu , ils ont fait appel aux sentiments moraux de notre nature, et pour faciliter la pratique du bien , ils ont fait des systèmes de morale. Mais tout cela pèche à son point de départ. Les maximes vulgaires de vertu sont dictées par la prudence et l'expérience, non par l'autorité du devoir. Les sentiments moraux sont bien vagues et souvent bien fugitifs , aisément étouffés ou altérés par les passions qui les avoisinent; ils sont le plus faibles alors qu'ils sont le plus nécessaires. Les systèmes de morale, comme tout ce qui tient du raisonnement , dépendent de la perfection de nos facultés, et sont trop souvent des sujets de discussion pour pouvoir devenir des mobiles puissants de sainteté. Ils sont en outre défectueux en ce qu'ils ne tiennent pas compte de la chute, et qu'ils méconnaissent la nécessité d'une régénération. L'Ecriture recommande toutes ces choses aux chrétiens, mais en les subordonnant toutes à ses propres leçons. Elle Commence l'oeuvre morale en forçant l'homme à reconnaître sa chute, et en lui ouvrant les yeux sur la fin de sa destinée ; elle met l'âme en harmonie avec Dieu et avec elle-même; elle éclaire et dirige la conscience, adoucit et purifie les sentiments, soumet les instincts à la raison, la raison à l'amour, et tout à Dieu; elle donne enfin , par le secours du Saint-Esprit, une force aussi puissante et aussi efficace que les vérités qu'elle révèle , et sur lesquelles elle repose, vérités sublimes et célestes.

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§ 59. Le caractère de Jésus-Christ. - L'une des preuves morales les plus décisives en faveur de la divinité des Ecritures est sans contredit le Caractère même de notre Seigneur. Mais c'est une preuve qu'il est plus facile de sentir que d'analyser, et dont la puissance est en proportion des dispositions morales du lecteur lui-même. Des intelligences pures et saintes en seront frappées plus que d'autres, et comme Nathanaël, l'Israélite sans fraude, elles s'écrieront : Maître, tu es le Fils de Dieu, tu es le Roi d'Israël.

Il y a trois observations à faire sur l'histoire écrite de Jésus-Christ .

1° elle ne porte nulle part le caractère d'un panégyrique;

2° le caractère de Jésus n'est pas l'objet d'une étude proprement dite, les faits étant racontés simplement, par des hommes sans étude, sans art et sans éloquence;

3° le caractère moral de Jésus-Christ n'a été attaqué par personne, pas même par les ennemis de l'Evangile. Ses apôtres en appellent au témoignage de tous quant à sa moralité, comme à un fait notoire et généralement reconnu.

Ses enseignements sont également un appel à l'opinion ; car s'il eût été coupable des mêmes choses qu'il condamne, ses nombreux ennemis n'eussent pas manqué de s'en prévaloir pour lui reprocher l'inconséquence de ses actes comparés à ses doctrines.

A l'appui de cette preuve, en pourrait citer en entier les quatre Evangiles qui font ressortir à chaque ligne sa sainteté, son amour de tous les hommes, sa compassion pour toutes les douleurs, son humilité, sa force morale, sa résignation, l'absence de tout enthousiasme charnel, sa haine de l'hypocrisie, son renoncement à lui-même, sa sobriété à tous égards, et toutes ces vertus qui par leur humilité même exigent un héroïsme de coeur que la terre ne connaît ni ne saurait donner.

Le caractère de Christ, a dit un éminent écrivain, est une preuve merveilleuse de la divinité de la Bible. L'Indou ne peut se représenter la sainteté de son Dieu qu'en lui prêtant les abstinences, les pratiques et l'autorité qu'il admire dans ses images vivantes. Le Socrate de Platon se compose d'éléments essentiellement grecs ; il est doué des vertus qui sont l'apanage et l'ornement naturel du sage. Les écrits rabbiniques nous fourniraient plusieurs exemples de l'idéal d'un docteur juif, et l'on y retrouverait l'image de ces scribes et de ces pharisiens que condamne si formellement l'Evangile. Mais dans la vie de notre Rédempteur nous avons un caractère qui diffère entièrement du type moral national qu'eussent pu rêver les auteurs juifs , et du type de toutes les autres nations connues , comme il s'éloigne aussi dans sa beauté de tout ce que l'usage , l'éducation , la religion et le patriotisme , eussent pu faire considérer comme le modèle du beau.

Quatre écrivains différents ont rapporté et recueilli de nombreux faits, et dans leurs récits on retrouve une même idée fondamentale, différente de tout ce qu'ils eussent pu voir et entendre, et nécessairement inspirée par un même modèle. Et néanmoins ce glorieux caractère, qui n'a rien emprunté de personne, ni Grec, ni Indou, ni Juif, qui n'a rien de commun avec les règles ordinaires de la perfection , devient pour chaque fidèle le type par excellence de tout ce qui est beau, de tout ce qui est bon. Il n'est l'inventeur d'aucun des systèmes de la Grèce, et le Grec l'adore ; il appartient à la caste inférieure des pécheurs, et le brahmine le révère; il appartient aux faces pâles de l'Orient, et l'homme rouge du Canada se prosterne devant lui.

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§ 60. Influence de l'Ecriture sur les individus et sur la société. On est d'accord à reconnaître que les doctrines de la Bible sont étroitement liées avec la morale qu'elle proclame, et que dans leur ensemble elles contiennent des motifs puissants de sanctification. Cette union du dogme et de la morale suffirait comme base d'une apologie , et plusieurs auteurs ont insisté sur ce fait, Fuller, Erskine, etc. (Voyez 1 Pierre, Il, 12. )

Nous nous bornerons à quelques indications sommaires. Les effets de l'Evangile dans l'Eglise primitive sont bien connus, et les Epîtres nous les révèlent incidemment. Paul nous raconte ce qui se passait à Corinthe et à Ephèse, et Pierre nous parle de l'influence de la vérité dans le Pont et la Galatie ( 1 Cor., VI, 11. Ephés., IV, 19 ; Il, 1. 1 Pierre, IV, 3 ). A une époque dissolue , et sous le plus mauvais de tous les gouvernements , les chrétiens, qui ne valaient d'abord pas mieux que ceux qui les entouraient, avaient atteint un degré de moralité et de vertu qui n'a peut-être jamais été dépassé.

On trouve des témoignages analogues dans les écrits des premiers apologistes. Clément de Rome, dans son épître aux Corinthiens, l'an 100, fait l'éloge de leurs vertus : « Et qui, s'écrie-t-il, a pu vivre, au milieu de vous, sans admirer votre piété sobre et modérée, votre large hospitalité. Vous êtes humbles et point orgueilleux, vous êtes contents du pain quotidien que Dieu vous envoie, vous écoutez diligemment sa Parole et vous croissez en charité. » - Justin Martyr, qui avait été un philosophe platonicien, dit de même dans son Apologie, l'an 165 : « Nous qui nous complaisions autrefois dans l'adultère, nous vivons aujourd'hui dans la plus grande chasteté; nous qui nous adonnions à la magie, nous ne connaissons plus que le vrai Dieu; nous qui mettions l'argent et le gain au-dessus de toutes choses, nous possédons maintenant tout en commun et nous donnons à chacun suivant ses besoins. » - « Et vous , dit Minutius Félix à son adversaire païen, vous ne punissez le mal que lorsqu'il s'est traduit en faits extérieurs, tandis que nous regardons comme un péché même de nourrir des pensées coupables. Ce sont les vôtres qui remplissent vos prisons ; vous n'y trouverez pas un seul chrétien,- à moins que ce ne soit un apostat, ou un confesseur de la vérité. » - Tertullien, le premier écrivain ecclésiastique latin dont les oeuvres soient parvenues jusqu'à nous (l'an 220) tient un langage semblable et parle de multitudes nombreuses qui , dans l'empire romain, avaient subi l'influence morale de la conversion. Origène, dans sa réponse à Celse (246) , Lactance, le précepteur de Constantin, reproduisent les mêmes faits, et il n'y a pas jusqu'à l'empereur Julien l'apostat qui l'offre les chrétiens en modèles aux païens sous le rapport de l'amour du prochain, de l'amour des ennemis et de la sainteté de la vie.

Cette influence de l'Evangile se fit sentir de bonne heure parmi les nations anciennes. En Grèce, les impuretés les plus effrayantes avaient été patronnées par Lycurgue et Solon. A Rome, elles se commettaient publiquement et sans être l'objet d'aucune désapprobation. Le suicide était presque partout estimé, recommandé même dans certaines circonstances. Sénèque et Plutarque , Pline l'ancien et Quintilien l'applaudissent. Les sacrifices humains , l'exposition des petits enfants sont permis et encouragés. Mais partout où l'Evangile pénètre, il condamne ces pratiques, les frappe de honte et finit par les faire disparaître. Ces progrès ne furent évidemment pas l'oeuvre de la civilisation, car ils s'opérèrent par l'avènement de la doctrine évangélique au milieu de peuples bien supérieurs aux chrétiens en connaissances et en raffinements de toutes espèces ; toujours et partout la moralité progresse et s'élève dans la mesure où se développe, non l'intelligence de l'homme, mais la connaissance de la vérité divine.

Le soin des pauvres et l'assistance donnée aux malheureux sont partout un caractère particulier des nations chrétiennes. Il n'y avait pas à Constantinople, avant l'introduction du christianisme, un seul établissement de charité; mais peu de temps après qu'il eut pénétré dans cette grande cité, on y compta jusqu'à trente maisons et plus , consacrées à recueillir les infortunes de cette terre, les pauvres, les malades, les orphelins, les vieillards, les étrangers, etc. A Rome , également, vingt maisons de charité ne tardaient pas à s'élever sous l'influence de l'Evangile. C'est le même esprit encore, on peut l'affirmer, qui a aboli la polygamie, adouci les horreurs de la guerre, racheté les prisonniers, aboli l'esclavage, tenu en échec la tendance oppressive de la féodalité, flétri les lois des nations barbares. « On est obligé de reconnaître, dit Gibbon, qui n'est guère suspect en cette matière , que le triomphe du christianisme fut pour l'ancien et le nouveau monde la source de nombreux bienfaits matériels, qu'il prévint la destruction complète de la littérature, adoucit la férocité des temps, vint en aide aux faibles et aux opprimés, et rendit à la société civile l'ordre et la paix depuis longtemps menacés (Gibbon , Hist., LV). »

Ainsi , comme on reconnaît la providence de Dieu dans la conservation de la Bible , on reconnaît dans ses effets la grâce d'en haut ; ces effets sont un puissant témoignage de son origine divine (1 Thes., 1, 4-10. Gal., V, 22).

L'ouvrage anglais de Lelaud, et, en français, les travaux récents de MM. les professeurs Schmidt et Chastel, font ressortir avec force et d'une manière intéressante cette preuve de l'immense supériorité pratique du christianisme comparé aux religions, aux philosophies et aux systèmes anciens.

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§ 61. Preuve tirée des harmonies littéraires. - On peut comprendre sous bien des chefs divers et diviser en plusieurs preuves distinctes la preuve tirée des harmonies des saints livres. Bien des auteurs l'ont envisagée, tantôt sous un point de vue, tantôt sous un autre.

Ainsi, les docteurs Kidder et Alexander se sont attachés à faire ressortir les harmonies merveilleuses qui existent entre les deux économies; - l'évêque Butler, celles qu'on peut remarquer entre les doctrines de la révélation et les faits de la nature ; - Bryant , Lardner, Gray, Prideaux, Shuckford, Russel, les rapports entre l'histoire sainte et l'histoire profane ; - Harmer, Clarke, Keith, les coïncidences et la parfaite exactitude des données des livres saints, comparées à la géographie et à l'histoire naturelle de la Palestine; - Graves, Blunt, Paley, Birks, et, en français, N. Roussel, les coïncidences inattendues, les harmonies accidentelles , les rapports impossibles à calculer à l'avance, entre les différentes parties du recueil sacré.

Ces harmonies sont à la lettre innombrables, et se trouvent mêlées au texte entier des Ecritures. Quelques-unes sont frappantes et matérielles, comme lorsqu'il est dit que notre Seigneur descendit de Nazareth à Capernaüm, expression qui concorde tout-à-fait avec les données géographiques. D'autres sont saisissantes de vérité naturelle, comme lorsqu'il est dit que du sang et de l'eau sortirent du côté percé de Jésus ; cette circonstance est considérée par toutes les autorités médicales comme une preuve évidente de la mort, et ne se présente que lorsque le coeur a été profondément atteint (voyez une citation du docteur Wisemann , dans Puaux , La raison , etc., p. 108 et suiv.).

D'autres sont critiques; ainsi l'on remarque qu'à aucune époque postérieure à la destruction de Jérusalem , personne n'eût pu écrire dans le style de la Bible; et en second lieu que les divers livres des Ecritures n'appartiennent pas tous à la même période littéraire, ce qui établit tout ensemble différents âges, différents auteurs, et une très-haute antiquité pour le recueil unique de la Bible. D'autres sont historiques; après l'époque des apôtres, le nom de chrétiens devint général, et fut employé par tous les écrivains pour désigner les disciples de Christ; cette désignation constitue une date précise; or, nulle part dans le Nouveau-Testament, nous ne la trouvons employée par les chrétiens parlant les uns des autres; les noms dont les apôtres se servent le plus habituellement dans ce cas sont ceux de saints et de bien-aimés, ou fidèles. D'autres enfin sont religieuses : on a fait l'observation très-juste que la seule chose qui eût pu paraître naturelle et acceptable à tous, soit juifs, soit païens, dans l'établissement d'une religion nouvelle, l'institution de sacrifices, est précisément la seule omise, omission bien remarquable dans la religion apportée par Jésus-Christ et promulguée par ses apôtres ! Ils n'ont donc fait aucune concession d'aucun genre, même la plus simple en apparence, à l'esprit de leur siècle.

Il est donc impossible de méconnaître en présence de faits pareils, qu'il serait facile de multiplier à l'infini, la complète créance que méritent les livres de la Bible, et la loyauté de leurs différents auteurs.

Citons encore, pour donner une idée du livre de Paley (Horoe paulinoe), la concordance des passages suivants qu'il indique, écrits par différents auteurs, à différentes époques, et en vue de différents objets. Leur parfaite harmonie, qui n'a point été recherchée, prouve tout ensemble leur bonne foi et leur parfaite connaissance des choses :

Rom. , XV, 25, 26

Actes, XX, 2, 3 XXI, 17 ; XXIV, 17-19. 1 Cor. XVI , 1-4. 2 Cor., VIII, 1-4 ; lX, 2.

Rom., XVI, 21-24.

Actes, XX, 4.

Rom., I, 13; XV, 23, 24.

Actes, XIX, 21.

1 Cor., IV, 17-19.

Actes, XIX, 21, 22.

1 Cor., XVI, 10, 11.

Actes, XIX, 21. 1 Tim., IV, 12.

1 Cor., Il 12; Ill, 6.

Actes, XVIII, 27, 28; XIX, 1.

1 Cor., IX, 20.

Actes, XVI, 3; XXI, 23, 26.

1 Cor., I, 14-17.

Actes, XVIII, 8. Rom., XVI, 23. 1 Cor., XVI, 15.

Voici encore un détail. Barnabas, est-il dit, était natif de l'île de Chypre; c'est lui qui vendit ses biens et en mit le prix aux pieds des apôtres (Actes, IV, 36, 37 ). Ailleurs nous lisons, mentionné d'une manière tout-à-fait incidente, que Marc était son neveu (Col., IV, 10). Ce double fait jette une lumière particulière sur d'autres circonstances :qui sans cela se comprendraient plus difficilement, Marc s'arrêtant à Chypre, son pays natal, et refusant de suivre Paul plus loin , puis rejoignant sa mère à Jérusalem, au grand mécontentement de l'apôtre; ce détail devient naturel , tout s'explique, et combien est remarquable l'ensemble de ces coïncidences ! (cf. 1 Cor., IX, 6, 7. Actes, XI, 20, 22; XIII, 4; XV, 37, 39; et XIII, 13.) Blunt ajoute que ce seul fait suffirait à imprimer au livre des Actes le cachet d'une histoire de la plus scrupuleuse exactitude (voyez aussi Birks, Horoe apostolicoe).

Comparez enfin la brusque interruption du récit Actes, VIII, 40 avec XXI , 8 , 9.

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§ 62. Preuve spirituelle. - Aux nombreuses évidences qui viennent d'être énumérées, il faut ajouter encore celle qui les domine presque toutes, la preuve spirituelle proprement dite, la preuve intérieure, celle qui ne peut être appréciée que par l'intelligence, le coeur et la conscience. En tant qu'elle nous parle de l'homme, tel que l'Evangile le trouve, elle s'adresse à tous indistinctement; l'apôtre l'invoque 1 Cor., XIV, 23, 25. Mais si elle parle de l'homme, tel que l'Evangile le forme, elle ne s'adresse qu'aux chrétiens, elle n'est appréciable que par l'expérience chrétienne (Rom., VIII, 16. 1 Jean , V, 20).

Cette preuve réside en partie dans l'accord frappant qui se trouve entre ce qu'éprouve le pécheur réveillé, et ce que la Parole de Dieu dit de lui. L'Evangile proclame la corruption universelle de la nature humaine. Il parle non-seulement de péchés et de. transgressions, mais d'une habitude profonde et invétérée d'irréligion naturelle, et de la nécessité d'une complète transformation. Si la conscience protestait contre cette description du coeur , si l'homme avait le sentiment qu'il lui est naturellement doux de soumettre sa volonté à la volonté de Dieu, et d'obéir à des commandements qui froissent son égoïsme et son amour-propre , il pourrait douter des vérités de l'Evangile. Mais s'il trouve que ce portrait de son âme est exact, et si tous les efforts qu'il tente pour échapper aux conséquences de cette découverte, ne font que lui en démontrer toujours plus la triste mais parfaite exactitude , il aura en lui-même un témoin vivant qui lui dira que l'Evangile est vrai. C'est là la première preuve intérieure.

Cette preuve se complétera si cet homme reconnaît que les directions de l'Evangile sont bien adaptées à son état. Il est coupable, il a besoin de pardon. Il est corrompu, il a besoin de sainteté. Il est entouré de tentations , il a besoin de force. Il vit dans un monde de tribulations et de douleurs , il a besoin de consolations et de bonheur. Il va mourir, il redoute la mort , il aspire à connaître mieux ce qui se trouve au-delà de la tombe; il veut vivre, et vivre toujours. Et l'Evangile pourvoit à tous ces besoins. Il est un message de pardon pour le coupable, de sainteté pour le pécheur, de paix pour l'affligé, de vie pour celui qui est assis dans les ténèbres et dans l'ombre de la mort.

Si l'Evangile est ainsi parfaitement en rapport avec les besoins de l'âme humaine, il n'y a pas moins harmonie complète entre ce que l'Evangile nous dit des résultats qu'il doit produire, et l'expérience des chrétiens.

Les effets de la foi sont à plusieurs reprises dépeints dans les Ecritures. Chaque promesse est une prophétie qui reçoit chaque jour aussi son accomplissement. La repentance et ses fruits, l'obéissance de la foi et les progrès de lumière et de paix qui en sont la conséquence, le pouvoir de la prière, l'influence des vérités chrétiennes sur l'intelligence, sur le coeur et le caractère ; les combats les victoires, les défaites même de la vie nouvelle , tout est prédit décrit, analysé avec une précision qui constitue une preuve nouvelle et une preuve puissante de la divinité du livre qui raconte à l'avance les faits les plus intimes de l'expérience chrétienne; preuve qui grandit elle-même à mesure que nous avançons dans la connaissance de l'amour de la vérité. Un coup-d'oeil si sûr et si perçant dans les profondeurs de l'homme intérieur ne peut être le fait de la sagesse humaine; un regard si clairvoyant n'appartient qu'à Dieu seul.

Au reste, nous le répétons, cette preuve ne peut servir qu'à confirmer la foi, mais elle ne saurait la produire, puisqu'elle la suppose. Quant au chrétien, cette preuve d'expérience l'emporte sur toutes les autres - aussi n'attache-t-il plus qu'un médiocre intérêt à la controverse entre le christianisme et l'incrédulité ; il sent, il savoure, il éprouve déjà la vérité qu'on voudrait lui démontrer, et quand on en est là on n'a plus besoin de preuves; on a en soi-même un témoin vivant, une démonstration vivante des choses qui ne se voient pas.

Ajoutons cependant que cette preuve ne consiste pas tant dans l'adaptation du christianisme à nos besoins, que dans son influence sanctifiante qui nous amène, non-seulement à aimer, mais encore à pratiquer la sainteté. Quand Christ apparut, les Juifs éprouvaient le besoin d'un libérateur politique et terrestre; ils n'éprouvaient nullement le besoin d'un Messie qui vint appeler les Gentils à partager l'héritage avec eux. Le système de Mahomet est aussi très-habilement adapté aux désirs sensuels, aux passions grossières d'un peuple ambitieux. Les Indous adhèrent de coeur, et sans chercher des preuves, à un système parfaitement approprié à leurs goûts et à leurs appétits.

Le christianisme, au contraire , se présente, non point comme conforme à nos inclinations naturelles , mais comme s'efforçant de les former à sa propre image , et ce n'est que lorsque ce travail d'assimilation est commencé, qu'on reconnaît combien il est approprié aux vrais besoins de l'homme. Les systèmes païens sont tous d'accord avec les penchants corrompus de l'homme tel qu'il est naturellement; le christianisme est adapté aux besoins de l'homme tel qu'il doit être, tel qu'il devient par la régénération. Le paganisme est un système corrompu , calculé pour harmoniser avec une nature corrompue; le christianisme est un système vivifiant pour une nature qui a besoin d'être renouvelée. Le premier met ses doctrines en rapport avec nos goûts; le second cherche à rendre nos goûts conformes à ses doctrines. Et c'est quand ce dernier travail se fait dans le coeur, que le croyant reconnaît l'évidence de la vérité. Il a d'abord l'espérance de la foi, puis vient l'espérance de l'expérience, expérience fondée sur l'influence sanctifiante de l'amour de Dieu (Rom., V, 2-5).

Il en est de l'Evangile comme d'un médecin appelé pour soigner un malade gravement atteint. Il peut faire deux choses, traiter les symptômes de la maladie, ou combattre la maladie elle-même. Si dans la fièvre il se préoccupe de la soif ardente du patient, si dans l'apoplexie il ne s'attache qu'à exciter le système engourdi, on pourra bien dire dans un sens qu'il répond aux besoins immédiats du malade, mais il est peu probable qu'il lui fasse un bien réel. Un praticien plus sage fera abstraction de ces détails, et s'occupera de la maladie elle-même; il lui importera peu que ses prescriptions flattent le palais du moribond, ou lui causent une excitation momentanée; il lui importera que le mal cède peu à peu, et que le malade se rétablisse. Ce résultat obtenu, il pourra dire, mieux que dans le premier cas, que son système était en harmonie avec les besoins du patient qui lui était confié. Le christianisme ne flatte pas l'homme; il n'en est pas moins la meilleure, la seule bonne réponse qui puisse être faite à tous ses besoins spirituels. L'expérience vient plus tard justifier et confirmer ce que l'étude et le raisonnement avaient pu suggérer d'abord comme possible, probable , et méritant examen.

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§ 63. Conclusion. - Et maintenant à cette question : Quelles sont les raisons de notre espérance ? chacun pourra répondre, non point sans doute d'une manière complète, car l'examen de toutes les preuves que peut invoquer le christianisme serait le travail d'une vie d'homme tout entière, mais d'une manière suffisante pour justifier notre foi. Le christianisme et le livre des chrétiens existent depuis dix-huit siècles. Les écrivains profanes sont d'accord avec les auteurs ecclésiastiques pour constater ce fait. Le fondateur de la religion chrétienne a fait des miracles publics à l'appui de sa doctrine, et il a donné à ses disciples le pouvoir d'en faire autant. Tous ont cruellement souffert , et plusieurs sont morts en témoignage de la vérité des faits qu'ils affirmaient avoir vus de leurs yeux et des vérités qui en découlent. Ces faits et ces doctrines ont été admis et reçus comme vrais par de nombreuses multitudes, malgré l'influence contraire des systèmes religieux dans lesquels elles avaient été élevées. Le caractère et l'histoire du Fondateur de la foi avaient été annoncés des siècles à l'avance dans les livres saints des Hébreux.

Il enseigne la morale la plus pure. Il a fait de nombreuses prophéties, et elles ont toutes été accomplies. Ses doctrines ont changé le caractère de ceux qui les ont reçues, elles ont adouci et civilisé les peuples anciens, elles comptent parmi les influences les plus puissantes qui se soient produites en tous lieux et en tous temps dans l'histoire du monde. Elles se donnent comme révélées de Dieu , et s'appuient pour cela sur d'innombrables preuves, tellement que nous devons, ou bien reconnaître les Ecritures comme divines, ou bien les attribuer à une imposture bien intentionnée, plus miraculeuse encore. Ajoutez encore que celui qui les reçoit trouve en lui-même une preuve de plus de leur origine et de leur sainteté, et peut dire avec saint Jean : « Je sais que le Fils de Dieu est venu et nous a donné l'intelligence pour connaître le véritable; et nous sommes dans le véritable, dans son Fils Jésus-Christ . celui-ci est le véritable et la vie éternelle (1 Jean, V, 20). »

Ce ne sont point là des idées abstraites, ce sont des faits accessibles à tous, intelligibles pour tous. L'une quelconque des preuves nombreuses que nous avons indiquées suffira pour une personne de bonne foi, aucun autre système religieux ne reposant sur des miracles et des prophéties, aucun ne respirant tant de sainteté et de charité. Quant à l'ensemble de ces preuves combinées , il est surabondamment concluant pour toute personne qui se servira de sa raison pour examiner et pour comprendre.

Et malgré toutes ces évidences, il reste encore beaucoup d'incrédulité , et parmi ceux qui cherchent la vérité, et parmi les chrétiens de profession.

Parmi ceux qui cherchent, parce qu'ils manquent de candeur et de docilité; une preuve de plus de la vérité de l'Ecriture, preuve tout-à-fait en harmonie avec la conduite générale de l'Esprit :de Dieu. Dans la vie ordinaire , la légèreté, le préjugé, la négligence sont souvent des causes d'erreur, et peuvent rendre un homme incapable de discerner ce qui est réellement sage et vrai. L'Ecriture d'ailleurs déclare elle-même, d'une manière positive, que ceux qui n'aiment pas la vérité ne sauraient la comprendre. Grotius était si vivement frappé de ce fait, qu'il regardait l'évidence du christianisme comme étant elle-même une preuve de l'origine divine de l'Evangile, étant merveilleusement propre à sonder et à éprouver le caractère des hommes (Grot. De verit., Il, § 19). (Voyez Dan., XII, 10. Esaïe, XXIX, 13, 14. Matth. , VI, 23; XI, 25; XIII, 11, 12. Jean, III, 19. 1 Cor., II, 14. 2 Cor. , IV, 4. 2 Tim., III, 13).

Parmi les chrétiens eux-mêmes, il y a quelquefois des doutes sur la plénitude des preuves scripturaires ; il y a par conséquent aussi pour eux besoin d'examiner. Baxter reconnaît lui-même que, dans sa jeunesse, il a été éprouvé par des doutes sur sa propre sincérité, plus tard par des doutes sur la vérité des Ecritures. Ces doutes disparurent devant un examen plus attentif. La preuve qui lui parut le plus concluante, ce fut la preuve interne. « L'esprit de prophétie, dit-il, fut mon premier témoin : l'esprit des pouvoirs miraculeux fut le second ; et maintenant nous avons l'esprit de renouvellement et de sainteté... Que les chrétiens ne craignent pas d'exposer leurs doutes, et qu'ils recherchent les preuves de la vérité divine; car il y en a une provision suffisante pour résoudre toutes les difficultés et dissiper tous les doutes. »

Oui , l'examen fera disparaître presque tous les doutes que peuvent avoir les hommes pieux. Il en restera peut-être quelques-uns , spéculatifs surtout, contre lesquels viendront échouer les preuves les plus puissantes. Mais dans ce cas encore il y a du remède. La philosophie ne les résoudra pas; mais la prière et une saine activité dans le domaine de la vie pratique, où les doutes ne sauraient pénétrer, les dissiperont ; ou si elles n'en font pas justice, elles auront l'avantage de nous prouver que ces questions n'ont qu'une importance secondaire, et qu'il nous faut attendre avec patience des lumières nouvelles. Notre nature est complexe, et quelquefois les langueurs d'une partie de notre organisation sont guéries par l'activité croissante de l'autre. Une foi irritable ou surexcitée est le symptôme d'un manque d'activité, et le meilleur remède se trouve dans une application plus constante aux devoirs pratiques de la vie chrétienne. Des difficultés qu'aucun examen ne pouvait vaincre ont souvent disparu dans la chaleur et la vigueur nouvelle produites par une ardente charité.


Table des matières

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