1 CORINTHIENS, IV, 7. Un motif d'humilité. (Lire Rom., XII, 1-8.)
L'orgueil est un des plus redoutables ennemis que nous ayons à combattre; redoutable surtout parce qu'il est tellement d'accord avec notre coeur que nous ne pouvons pas même y constater sa présence aussi facilement que celle d'autres péchés. Il se glisse jusque dans nos plus sincères efforts pour l'extirper de notre âme; et souvent, lorsque pour nous humilier salutairement nous disons: je ne suis pas humble, dans telle circonstance j'ai agi avec orgueil, nous sommes forcés de nous avouer avec douleur qu'il y a de l'orgueil dans cette confession même, et que nous nous glorifions secrètement d'avoir le courage de nous avouer orgueilleux.
C'est pour que chacun de nous redouble de vigilance contre ce péché que saint Paul nous adresse l'appel de notre texte : Qu'est-ce qui met de la différence entre toi et un autre, et qu'as-tu que tu ne l'aies reçu?), La première de ces questions ne signifie pas que rien ne mette de la différence entre nous et d'autres; ce serait manquer le but que de le dépasser, et nous le dépasserions si nous nous efforcions de nous croire en tout semblables à des gens sur lesquels nous avons des avantages évidents, soit par notre titre d'enfants de Dieu, soit par nos lumières, soit par notre désir de résister au péché. Mais saint Paul veut que nous nous rendions compte de ce qui constitue cette différence, parce que nous ne pouvons que reconnaître nous-mêmes qu'il y aurait non-seulement péché, mais folie, à nous enorgueillir de grâces reçues, et reçues gratuitement, sans que rien en nous ait pu engager le Seigneur à nous les donner plutôt qu'à d'autres.
Qu'as-tu que tu ne l'aies reçu?
Rien; mais, hélas! il n'est peut-être aucun de nous qui n'oublie cette vérité dans la pratique, et qui, tout en confessant devant le Seigneur qu'il n'est rien par lui-même, ne se croie souvent, et presque habituellement, supérieur à ses frères sous quelque rapport. Eh bien, la pensée de saint Paul peut recevoir un développement qui est éminemment propre à nous rabaisser nous-mêmes et à élever les autres dans notre estime. Dans ce que nous possédons, de même que dans ce que nous sommes, nous avons à faire une large part à ce que nous avons reçu de nos frères. Que savons-nous de plus que telle personne, que nous n'ayons nous-mêmes appris de telle autre? Que de choses Dieu nous a données, même pour notre âme, par le moyen de parents, d'amis, d'étrangers même ! Parmi les sentiments, les convictions., les pensées qui forment notre être moral, parmi les forces même qui composent notre vie physique, quelle part ne devons-nous pas faire aux habitudes qui nous ont été inculquées dès notre enfance, aux idées qui circulent autour de nous, aux exemples que nous contemplons sans même nous apercevoir que nous en subissons l'influence! Ces considérations sont de la plus haute importance, parce qu'elles nous aident réellement à « estimer les autres comme plus excellents que nous-mêmes. »
PRIÈRE.
Seigneur notre Dieu, lorsque nous examinons sérieusement des déclarations de ta Parole aussi claires que celle-ci, nous sentons vivement combien nous sommes insensés de nous élever si souvent au-dessus de nos frères, ne serait-ce que dans notre imagination. Mais tu sais pourtant combien il est vrai que l'orgueil est lié à notre coeur, et que, malgré nos résolutions d'être humbles, nous n'agissons pas sous l'empire d'une véritable humilité. Fais-nous comprendre et mettre en pratique la parole de notre texte, et que le sentiment de tout ce que nous avons reçu se joigne à celui de tout ce qui nous manque pour nous empêcher d'avoir de nous-mêmes une plus haute opinion que nous ne devons. Donne-nous, nous t'en supplions, des sentiments modestes; aide-nous à marcher sur les traces de ce Jésus qui était doux et humble de coeur; nous te le demandons en son nom. Amen.