LUC, X, 38-fin.

Marthe et Marie.

(Lire Deut., VI, 1-12.)

 

Marthe était une femme pieuse; «Jésus aimait Marthe (1), » et elle aimait Jésus de toute son âme; sa joie était tout aussi vive que celle de son frère et de sa soeur lorsqu'elle le voyait franchir le seuil de leur demeure; c'était assurément dans le désir de le bien recevoir et de lui témoigner ainsi son affection qu'elle se donnait tant de peine dans le ménage, qu'elle allait et venait, disposant la maison, apprêtant le repas, s'efforçant de penser à tout et de ne rien négliger. Et pourtant, nous entendons Jésus lui adresser un reproche, car c'est bien un reproche que renferment ces mots : « Marthe, Marthe, tu te mets en peine et tu t'agites pour beaucoup de choses; mais une seule chose est nécessaire : or, Marie a choisi la bonne part, qui ne lui sera point ôtée. »

C'est que Jésus veut que tout soit à sa place dans la vie de ses disciples, et que l'activité de Marthe, bonne, ou du moins légitime et permise en toute autre circonstance, devenait mauvaise du moment que le Sauveur était là, parlant, donnant des enseignements divins dont les deux soeurs avaient autant besoin l'une que l'autre; elle empêchait Marthe d'écouter, lui faisait perdre de vue la seule chose nécessaire, c'est-à-dire le salut de son âme, la grâce et la connaissance « de notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ, » et lui inspirait même un mauvais sentiment à l'égard de Marie.

Voilà ce qui fait pour nous la haute importance de ce simple et touchant récit. Il faut le reconnaître : il y a pour les chrétiens d'un caractère très-actif, et dont cette activité, quand elle est bien réglée, fait d'utiles et infatigables serviteurs du Seigneur, un piège dans le besoin de mouvement qui leur est habituel et qui risque de dégénérer en agitation. On en vient facilement alors à attacher une importance exagérée aux détails de la vie matérielle, à des choses qui occupent trop les pensées et absorbent l'attention. Il est même possible de trop s'agiter en vue du règne de Dieu. Agir, parler, payer de sa personne, fonder ou soutenir des oeuvres religieuses, tout cela est bon et utile, tout cela fait partie de nos obligations; mais si l'on se contente, ou à peu près, de cette activité, parce que Jésus en est le but, on tombe dans un fâcheux extrême et la vie intérieure s'en ressent. Il faut réunir et concilier les deux choses, regardant sans cesse à la volonté de Dieu.

Jésus n'aurait certainement pas approuvé Marie de laisser habituellement à sa soeur tout le fardeau des occupations domestiques,et de passer sa vie dans une inaction où la paresse aurait fini par trouver son compte. Chacun de nous est tenu d'accomplir la tâche quelle qu'elle soit que Dieu lui a confiée sur la terre. Mais il n'en est pas moins certain que ce qui regarde la terre n'est rien à côté de ce qui regarde le ciel, et que le premier et le plus important des devoirs, c'est celui, qui est aussi le plus doux des privilèges, de nous tenir assis aux pieds de Jésus, écoutant sa parole, pour la serrer dans notre coeur et la mettre ensuite en pratique. Avant tout, le salut de l'âme et la vie cachée avec Christ en Dieu; mais en même temps, la fidélité à rendre témoignage, dans le cours

de l'existence extérieure, « aux vertus de celui qui nous a appelés des ténèbres à sa merveilleuse lumière. »

 

PRIÈRE.

Oui, Seigneur, nous savons qu'une seule chose est nécessaire; mais tu sais quel empire les choses terrestres exercent sur nous, et combien il nous est difficile de ne pas leur donner une trop grande importance. Seigneur notre Dieu, que nos voies soient bien réglées pour garder tes statuts; que notre coeur t'appartienne tout entier, et que notre plus grande joie, comme le plus profond besoin de notre nue, soit de nous tenir aux pieds de Jésus, pour être instruits par lui et mis avec lui dans une communion toujours plus intime. Nous le, le demandons au nom de ce bon Sauveur: daigne nous exaucer selon ta promesse. Amen.


Table des matières

1. Jean, XI, 5.