Le docteur de la loi.
Ce pauvre docteur de la loi, qui se croyait capable d'éprouver Jésus par une question épineuse, nous fournit un nouvel exemple de cette vérité, que le Seigneur « surprend les sages en leurs finesses. » Jésus se servit de cette question même pour le confondre et l'obliger à réfléchir. Il était pleinement satisfait de ses lumières et rempli de sa propre justice; aussi sa question ne ressemble-t-elle pas à celle du geôlier de Philippes : « Que faut-il que je fasse pour être sauvé? »
C'est qu'avant d'en venir là, il faut avoir le coeur touché et humilié, et que celui du Scribe ne l'était pas. Et pourtant, Jésus le trouva plus avancé dans la connaissance de la vérité que ne l'étaient la plupart de ses contemporains; il avait compris que la loi avait un sens spirituel et se résumait dans l'amour de Dieu et du prochain; mais le besoin qu'il éprouva de « se justifier» dès que Jésus lui eut dit : « Fais cela et tu vivras, » en nous montrant qu'il se sentit alors repris dans sa conscience, nous prouve aussi que ce qu'il savait, il le savait de la tête plutôt que du coeur. Jésus avait cependant pu lui dire : « Tu as bien répondu... » Ali! il est bon de pouvoir bien répondre, mais cela ne suffit pas pour aller au ciel; on peut connaître les Écritures par coeur et cependant «faire naufrage quant à la foi. »
L'erreur de ce Scribe qui s'imaginait pouvoir acquérir par ses oeuvres la vie éternelle, est celle de toute personne qui n'a pas encore senti son péché et son absolue misère. Ce n'est pas qu'une parfaite obéissance à la loi de Dieu, si nous en étions capables, ne pût nous donner la vie éternelle; « fais « cela et tu vivras, » dit Jésus; mais il est impossible à notre coeur corrompu, à notre nature déchue, de « faire cela;,, impossible d'accomplir dans toute son étendue cette loi sainte et inflexible qui se résume dans les deux grands commandements cités par le Scribe. Qui est-ce, en effet, qui aime et qui a toujours aimé Dieu de tout son coeur, de toute son âme, de toute sa force et de toute sa pensée, et son prochain comme lui-même? Ce n'était pas le Scribe; ce n'est pas nous; ce ne sera jamais aucun homme.
Le Scribe le sentit, et la parole de Jésus, « vivante, efficace, plus pénétrante qu'une épée à deux tranchants,» entra dans son 'coeur : heureux eut-il été si le trouble de sa conscience l'avait jeté humilié et repentant dans les bras du Sauveur! Nous ne savons s'il en fut ainsi dans la suite; mais pour le moment, hélas! nous voyons cet homme entrer dans une tout autre voie. Ce fut pour se donner le change à lui-même, tout en détournant de lui la sérieuse attention du Sauveur, qu'il demanda : «Qui est mon prochain ? » Nous connaissons la réponse de Jésus : cette admirable et touchante parabole du Samaritain compatissant, qui, mieux que toutes les démonstrations., nous amène à voir notre prochain dans tout être humain qui a besoin de notre secours. L'amour tel que le pratiqua le Samaritain est une belle, une sainte chose; « va, et fais de même, » dit Jésus au Scribe, et il nous le dit aussi. « La charité est l'accomplissement de la loi. »
PRIÈRE.
Mets-la dans notre coeur, cette charité que tu veux y voir, Seigneur notre Dieu! enseigne-nous, nous t'en supplions, à aimer nos frères, et à leur témoigner notre affection par notre dévouement et notre zèle à nous employer pour eux. Dépouille-nous de notre égoïsme, fais-nous prendre part aux souffrances comme aux joies de notre prochain, et qu'il soit vrai de nous que nous n'aimons pas de paroles ni de langue, mais en effet et en vérité. Seigneur Jésus, nous ne sommes pas plus que le Scribe capables d'accomplir le plus grand commandement de la loi; mais tu as accompli toute la loi pour nous, et tu veux nous rendre parfaits, en sorte qu'il ne nous manque rien. Nous te supplions de toucher et de réchauffer notre coeur, pour que nous éprouvions le besoin de te le donner tout entier, et en toi à nos frères. Amen.