Charger sa croix. (Lire Il Tim., II, 1-15.)
Charger sa croix, c'est prendre sur soi un fardeau qui peut même, à un moment donné, devenir un instrument de supplice, mais pourtant un fardeau que, pour suivre Jésus, on prend volontairement, par amour et même avec joie. Jésus nous a donné l'exemple de la souffrance; (quoiqu'il Fût Fils,» dit saint Paul, «il a appris l'obéissance par les choses qu'il a souffertes (1); » « car il était convenable que celui par qui et pour qui sont toutes choses, voulant amener plusieurs enfants à la gloire, consacrât l'auteur de leur salut par les souffrances (2). » Que « ceux qui lui obéissent» ,ne s'étonnent donc point de voir la douleur occuper une place si importante dans les dispensations par lesquelles Dieu veut les sanctifier.
Il faut déjà prendre sa croix pour s'enrôler au service de Jésus; c'est ce qui nous explique que si souvent, tout en désirant le suivre, on reste loin de lui, on ne lui donne pas son coeur. Il faut ensuite, pour venir après lui, se charger de jour en jour de sa croix, c'est-à-dire se résoudre à marcher dans l'obéissance et non dans l'indépendance, ce qui coûte à un coeur comme le nôtre, naturellement disposé à « se détourner pour suivre son propre chemin. » « Par la croix de notre Seigneur Jésus-Christ, » dit encore saint Paul, « le monde est crucifié à mon égard et moi au monde (3) . »
Tel répugne à admettre la doctrine du salut par grâce, tant il lui semble naturel et nécessaire que ses oeuvres comptent pour quelque chose dans son salut : la croix qu'il lui faut prendre est le renoncement à sa propre justice; on ne vient après le Sauveur que comme pécheur, comme malade, comme mendiant. Tel autre, dont une idole remplit le coeur, est appelé à faire un effort, douloureux, peut-être, pour remettre chaque chose à sa place et empêcher ses affections terrestres de venir en premier lieu. Celui-ci reconnaît que Jésus doit être le seul maître de ceux qui veulent avoir part à la vie, mais il n'a pu se décider jusqu'ici à rompre avec le monde, tant il aime ses plaisirs ou craint ses railleries : la croix qui attend, à portée de sa main, qu'il se décide à la prendre, c'est le renoncement au monde. Celui-là, qui a trouvé en Jésus son Sauveur, et veut se donner à lui en sacrifice vivant et saint, doit pour cela soutenir l'opposition plus ou moins avouée de sa famille : voilà la croix que Dieu lui impose. Pour d'autres, cette croix serait la soumission du coeur dans une épreuve contre laquelle il regimbe et murmure; pour d'autres enfin, l'acceptation filiale et complète de telles difficultés., le sacrifice de tel interdit...
Et nous, quelle est notre croix?
Ah! recevons-la de la main du Seigneur comme elle nous est présentée par le Seigneur : avec amour; prenons-la, non-seulement parce qu'il faut bien la prendre, mais parce que nous croyons qu'elle est bonne pour nous puisque Dieu nous l'impose; et nous ne tarderons pas à comprendre ce que Jésus a voulu dire quand il a dit : Chargez-vous de « mon joug... et vous trouverez le repos de vos âmes. »
PRIÈRE.
Quelle qu'elle soit, Seigneur Jésus, cette croix sans laquelle nous ne pouvons te suivre, fais que nous la prenions avec courage et même avec une sainte joie. Viens à notre aide; nous comptons sur toi et sur ta fidélité. Pardonne-nous notre lâcheté, notre peu de persévérance, notre crainte de la souffrance i subviens à notre faiblesse et augmente-nous la foi. Seigneur Jésus, puisque tu nous imposes une obligation si contraire à nos penchants naturels, donne-nous de regarder à toi, et de suivre l'exemple que tu nous as laissé quand tu as souffert la croix, méprisant l'ignominie, à cause de la joie qui t'était proposée, Enseigne-nous le renoncement à nous-mêmes, et fais-nous arriver à regarder toutes choses comme rien en comparaison de l'excellence de ta connaissance. Nous te le demandons au nom de ton amour. Amen.
1. Hébr., V, 8. -
2. Hébr., II, 10. -
3. Gal., VI, 14