Pierre repris. (Lire Apoc., III.)
Ne laissons pas passer inaperçus les petits mots de la Bible, car ils ont souvent une riche et importante signification; remarquons ce dès lors qui commence notre passage d'aujourd'hui: «Dès lors Jésus commença à dire à ses disciples qu'il fallait qu'il allât à Jérusalem... » etc. Ce fut au moment même où il venait de faire entrevoir à Pierre, pour lui et pour ses compagnons d'apostolat, les plus glorieuses perspectives, que Jésus commença à leur annoncer et à leur décrire ses souffrances. C'est qu'il n'aurait pas été bon pour les disciples de s'arrêter longtemps sur ces perspectives; ils n'étaient que trop portés à interpréter dans un sens terrestre les promesses de Jésus, a se représenter leur Maître fondant un royaume visible, et eux-mêmes ayant part à sa puissance et à sa gloire. Aussi Jésus prit-il soin qu'ils ne pussent trouver dans ses paroles qu'un encouragement propre à soutenir leur foi et leur zèle dans les jours de tristesse et d'effroi qui les attendaient.
Mais la nécessité de la douleur et de l'humiliation, pour soi ou pour ceux qu'on aime, ne semble jamais sur l'heure un sujet de joie, mais de tristesse, parce que, gens à vue bornée que nous sommes, il nous est difficile de contempler, à travers les afflictions du présent, la joie qui doit leur succéder dans le ciel. Pierre fut profondément blessé dans ses espérances et dans ses sentiments pour son Maître lorsqu'il l'entendit prédire ses souffrances; toujours ardent, et peut-être un peu enflé par l'approbation que Jésus venait de lui donner, il crut pouvoir engager le Sauveur à retirer ses paroles, à reculer devant ce qu'il pouvait éviter, s'il le voulait. « Aie pitié de toi-même, » s'écria-t-il, car c'est là le sens exact de l'expression qu'il employa. « Aie pitié de toi-même, « et cela ne t'arrivera point. »
Jamais offense ou trahison de ses disciples ne produisit sur Jésus une plus profonde et plus douloureuse impression que cette parole; jamais Jésus n'exprima son indignation en termes plus forts; Pierre ne reçut pas après son reniement les vifs reproches qu'il reçut alors. « Arrière de moi, Satan, tu m'es en scandale; » c'est-à-dire tu es une pierre d'achoppement sur mon chemin ! Pourquoi cette sévérité? Parce que Jésus ressentait plus vivement ce qui pouvait s'opposer à ses desseins d'amour, à son oeuvre de rédemption, que les outrages qui s'adressaient à sa personne; parce que Pierre, en l'engageant à s'épargner lui-même, faisait l'oeuvre du diable, qui tentait sans cesse Jésus de la même, manière. Que d'enseignements dans ce récit! que de réflexions il suggère sur l'amour de Jésus pour les pécheurs, et sur la vigilance dont nous avons besoin pour ne pas être comme Pierre, avec les meilleures intentions, des occasions de chute pour nos frères!
PRIÈRE.
Seigneur notre Dieu, que celui de nous qui croit être debout prenne garde qu'il ne tombe et ne fasse tomber ses frères! Préserve-nous de l'orgueil et de la présomption. Tu sais combien il nous est facile d'être entraînés dans ces pièges de notre adversaire, et tu sais combien il est habile à nous faire abuser même des plus excellentes de tes grâces. Seigneur Jésus, toi qui as eu à lutter contre la tentation, et même contre la tentation venant d'un de tes disciples, viens à notre aide, fais-nous vaincre comme toi, et donne-nous, avec ta fidélité, ton saint courage et ton obéissance à la volonté de Celui qui est ton Père et le nôtre. Nous nous remettons entre tes mains, nous nous reposons sur toi; prends soin de nous selon ta promesse, et rends-nous vigilants, persévérants dans la prière, fermes dans la foi, abondant en espérance par la puissance du Saint-Esprit. Amen.