Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

L'INTERCESSION

***


....Et les mains de Moïse étant devenues pesantes, ils prirent une pierre et la mirent sous lui, et il s'assit dessus, et Aaron et Hur soutenaient ses mains, l’un de ça, l'autre de là, et ainsi ses mains furent fermes jusqu’au soleil couchant. (Exode XVII, 12; lire versets 8-16.)

Ce dut être un spectacle bien saisissant que de voir le peuple de Dieu s’avancer dans le désert; ses six cent mille hommes, sans compter les femmes et les petits enfants, ayant l’Éternel pour étendard et la foi de Moïse pour bouclier, triomphent de tous les obstacles.

Malgré leurs ingratitudes et leurs craintes, l’Éternel «qui avait fait des miracles en la présence de leurs pères au pays d’Égypte,» fend la mer devant eux afin qu’ils puissent passer au travers, et change le désert en une source d’eaux à la parole de son serviteur.


Amalek, leur premier ennemi redoutable, se présente devant eux deux mois après la sortie d’Égypte, et au moment où ils murmuraient contre l'Éternel.

Aussi le Seigneur pour confondre une fois encore leur incrédulité leur accorde une victoire signalée, présage de futures délivrances.

Josué range en bataille les troupes de l'Éternel dans la plaine; c’était un vaillant capitaine: l’histoire n’a mentionné aucun soldat plus valeureux et dans la suite aucun conquérant plus humain.

Il avait pour lui, à ce moment, sa jeunesse, sa foi inébranlable, son courage, doublés encore par sa fidélité; n’est-ce pas à lui que l’Éternel devait faire cette magnifique promesse: «Ne t’ai-je pas dit: Fortifie-toi et te renforce; ne t’épouvante point et ne t’effraie de rien, car l’Éternel ton Dieu est avec toi partout où tu iras?» (Josué I, 9.)

Et pourtant, livré à lui-même, Josué eût fini par céder devant les hordes sauvages des Amalécites. Mais Moïse priait sur la montagne: le vieillard, comprenant qu’il s’agissait ici d’une action décisive, prend en sa main la verge de Dieu, symbole de son miraculeux pouvoir; il se retire à l’écart, il lutte avec l’Éternel.

Pendant que d’un regard prophétique il suit au loin la bataille, ses mains suppliantes, soutenues par Aaron et par Hur, sont levées vers le ciel. Avec une ingénieuse charité ceux-ci lui viennent en aide; il peut ainsi braver la fatigue, il redouble de patience, et, vers le soir, dans sa pieuse reconnaissance, il dresse un autel comme un monument des délivrances de l’Éternel.


Vous savez sans doute, mes chers frères et sœurs, que l’Église a toujours vu, dans ce touchant épisode, un vivant symbole de la «PRIÈRE D’INTERCESSION.»

Allons y puiser les instructions, les encouragements dont notre faible foi a un si pressant besoin, et que l’Éternel nous dise aussi dans ce jour: «Je serai avec toi comme j’ai été avec Moïse, je ne te délaisserai point et je ne t’abandonnerai point.»   (Josué I, 5.)

Combien ce récit nous retrace exactement le devoir de l’enfant de Dieu en face des ennemis qui l’assaillent: il travaille et il prie.

Josué combat dans la plaine, mais Moïse intercède sur la montagne: ainsi doivent se soutenir le travail et la prière, l’un par l’autre, non pas l’un à la place de l’autre; ILS SE COMPLÈTENT, ILS NE SE REMPLACENT PAS.


Jamais on ne travaille mieux que lorsqu’on a bien prié; jamais on ne prie mieux que pour réparer les forces dépensées dans le travail; il faut beaucoup prier pour être capable de bien agir.

Le travail sans la prière n’est qu’une erreur du matérialisme ou de l’impiété;

mais la prière sans le travail est une illusion, si même elle n’est pas une manière de se moquer de Dieu.

C’est la loi universelle établie par le Seigneur dans son royaume, dans l’ordre de la nature, dans la vie des âmes; que sa volonté nous soit toujours sacrée, et souvenons-nous que tous les hommes qui, dans l’histoire de l’Église, ont accompli de grandes choses, ont été de vaillants intercesseurs.

Ainsi un Abraham, un Samuel, un Élie: ainsi encore un Paul qui, accablé du soin de toutes les églises, en veilles, en voyage, partout, pouvait leur dire sans exagération: «Nous ne cessons point de prier pour vous!» (Col. I, 3.)

Mais si Jésus nous a dit: «Travaillez jusqu’à ce que je revienne!» (Luc XIX, 13.) c’est lui dont la prière soutient et sanctifie la nôtre, lui qui dit en parlant des siens dans son adieu suprême: «Je prie pour eux!» (Jean XVII, 9.)


Oui, grâce à Dieu, nous ne sommes pas seuls à prier,

JÉSUS PRIE POUR NOUS.


Ainsi, dans le rude combat de la vie où chaque jour voit se renouveler les assauts de l’ennemi, nous n’avons, comme Josué, qu’à élever les yeux vers notre Moïse qui prie sur la montagne, vers ce Jésus qui, plus grand que Moïse, et médiateur d’une plus excellente alliance, se tient encore à la brèche pour nous.

Amalek, lisons-nous dans le Deutéronome (Deut. XXV, 17-18.), avait assailli traîtreusement Israël dans le chemin, le chargeant en queue et attaquant les faibles qui le suivaient; aussi le redoutable châtiment qui l’atteint semble-t-il une conséquence de sa perfidie.

Ainsi en est-il de nos ennemis acharnés:

Satan est toujours habile à nous assaillir par-derrière, à nous envelopper de ses ruses diaboliques;

lorsque le monde voit que nous sortons de l’Égypte de ses péchés, il est toujours prêt à nous attaquer par la calomnie;

il voit très bien quels sont les points faibles chez un nouveau converti, où est le défaut de la cuirasse;

la chair à son tour ne nous épargne pas ses assauts;

toi aussi pauvre frère, malade ou infirme, tu as à redouter les aiguillons de la souffrance ou les défaillances de la foi.


MAIS EN TOUTES CES CHOSES NOUS SERONS PLUS QUE VAINQUEURS, (Rom. VIII, 37.) si, fidèles à notre poste comme Josué, nous tenons les yeux fixés sur Jésus.

Oui, «IL PRIE POUR NOUS;»

il a prié dans les jours de sa chair, alors que ses nuits entières étaient une requête pour ses disciples;

il a prié sur la croix; alors que la colline de Golgotha buvait son sang, son intercession fidèle montait encore pour nous vers le ciel.

Il était seul: point d’Aaron, point de Hur compatissants pour le soutenir; «il était seul à fouler au pressoir et personne d’entre les peuples n’était avec lui;» (Ésaïe LXIII, 3.) mais «son bras l’a sauvé et sa fureur l’a soutenu(Ésaïe LXIII, 5.) c’est pourquoi nous pouvons vaincre AVEC LUI et EN SON NOM faire mention des gratuités de l’Éternel.


Jésus prie pour nous. Et que demande-t-il?

«Père saint, garde en ton nom ceux que tu m’as donnés;» (Jean XVII, 11.)

Mettons-nous donc sous sa sainte garde, et il nous gardera en effet comme la prunelle de son œil.

Son âme sainte ne demande pas que nous soyons «ôtés du monde, mais préservés du mal,» (Jean XVII, 15.) afin que, comme un précieux levain, nous préservions alors le monde de la corruption.


Voici enfin le dernier soupir de son cœur qui nous promet le terme de la lutte, et répand ainsi du baume sur toutes nos blessures:

«Père, mon désir est que là où je suis, ceux que tu m’as donnés y soient aussi avec moi, afin qu’ils contemplent la gloire que tu m’as donnée(Jean XVII, 24.)

Ce cri de la charité, Jésus le répète maintenant encore devant son Père qui est notre Père, devant son Dieu qui est notre Dieu.

Ô vous tous que le Seigneur appelle aujourd’hui à lutter contre Amalek, ô vous tous dont la foi défaillante répète: «Je ne sais plus, je ne peux plus prier!»

Ô vous tous qui dites dans l’amertume de votre cœur: «Tu t’es couvert d’une nuée afin que la requête ne passât point» prenez courage:


JÉSUS PRIE POUR VOUS!


Approchez-vous donc aujourd’hui pour combattre vos ennemis; «que votre cœur ne soit point lâche, ne craignez point et ne soyez point épouvantés, car l’Éternel votre Dieu marche avec vous pour combattre pour vous contre vos ennemis.» (Deut. XX, 3-4.)

Mais si le Seigneur Jésus prie pour nous, il nous laisse dans la prière, comme en toutes choses, UN SAINT MODÈLE, afin que nous suivions ses traces.

Et quoi de plus beau que l’assistance fraternelle par le moyen de la PRIÈRE! quoi de plus doux et en même temps de plus efficace que «LA PRIÈRE D’INTERCESSION!»


Sans doute il est bon de s’humilier devant le Saint des saints, en sachant que sa miséricorde est prête à nous relever; sans doute il est précieux à l’âme fidèle de faire monter devant le trône, matin et soir, l’encens de ses adorations et de ses actions de grâce en répétant: «Béni soit l’Éternel! et béni soit à jamais le nom de sa gloire!» (Ps. LXXII, 19.)

Mais il semble que la prière d’intercession, plus concrète, plus intime, parce que nous en voyons plus souvent les résultats immédiats, offre un attrait plus direct à nos cœurs: «Ils invoquaient l’Éternel et l’Éternel leur répondait!»

Ô moments bénis, passés à genoux devant le Père dans la communion de Jésus, venez répandre encore sur nos heures de sécheresse l’onction du Saint-Esprit; venez, en sanctifiant nos joies et en épurant nos douleurs, nous ouvrir les trésors du ciel!

Oui, la prière d’intercession est la requête bénie, bouclier protecteur pour celui qui en est l’objet, flamme sainte dans l’âme de celui qui la présente. Disons seulement ici qu’elle est une source de bénédiction pour celui qui prie comme pour celui en faveur duquel on prie.


Et d’abord «POUR CELUI QUI PRIE.»

En effet, quand notre foi est-elle mieux ranimée, si elle était près de s’éteindre?

Quand nos entrailles s’émeuvent-elles d’une plus réelle, d’une plus efficace charité?

Quand enfin nous élevons-nous mieux, par une espérance vive, jusqu’aux demeures célestes, jusqu’aux biens éternels dont nous voudrions ouvrir les trésors à ceux pour lesquels nous prions?


PRIER POUR LES AUTRES EST DONC LE MEILLEUR

MOYEN DE SE FAIRE DU BIEN À SOI-MÊME.


Combien d’âmes qui en intercédant pour des frères éloignés, ont retrouvé pour elles-mêmes la clef de la prière?

Le missionnaire Gobat raconte qu’il était un jour couché sur le sable brûlant du désert, anéanti par la fièvre, incapable de se mouvoir, et trop accablé pour pouvoir prier. Soudain le souvenir lointain de la patrie le ranime; il revoit le doux tableau du foyer domestique et des parents qu’il y a laissés; en les nommant dans son cœur il prie pour eux, son espérance renaît; peu à peu il reprend courage et fait monter jusqu’à Dieu ses cris de détresse et ses supplications: le soir il était sauvé.

Et combien qui pourraient rendre le même témoignage à la fidélité de Dieu!


La prière est de plus une source d’intimes et fécondes bénédictions POUR CEUX EN FAVEUR DESQUELS ELLE EST ADRESSÉE.

Et qui pourrait les énumérer?

Combien qui ignorent tout ce qu’ils lui doivent; combien de bons mouvements et de lumières soudaines, combien de secrètes délivrances et de secours inespérés, arrivés au moment opportun, ne devons-nous pas à l’intercession ignorée d’un ami chrétien?

Il y a dans le monde des esprits des harmonies infinies, de merveilleux accords, dont nous ne pourrons nous rendre compte qu’au jour où les secrets des cœurs seront manifestés. Citons-en quelques exemples.

Voyez ce soldat, la veille de la bataille.

À peine se laisse-t-il ébranler par les apprêts meurtriers du lendemain; il rêve au pays natal, aux trésors d’amour qu’il y a laissés, et des pleurs silencieux humectent sa paupière.

Et puis encore il prie, car au milieu des tentations de sa vie aventureuse, il est demeuré un soldat de Christ et il n’a pas honte des consolations de son Évangile. Soudain la paix rentre dans son âme, il est calme, il est fort: d’où lui vient l’apaisement de ses regrets et de ses craintes?

Ah! c’est que là-bas, dans une chaumière de la montagne, une femme, une sœur peut-être, est à genoux; elle supplie le Seigneur de garder, dans son corps et dans son âme, celui qu’elle aime; elle lutte jusqu’au matin, et les deux prières se sont rencontrées devant le trône de ce Dieu qui a promis d’exaucer les deux qui prient ensemble, — et ils sont déjà exaucés.

Voyez encore ce jeune homme.

C’est un enfant prodigue égaré sur la terre étrangère; les doutes angoissants l’ont mordu au cœur, le péché l’a enlacé peu à peu, et, après des luttes terribles, le suicide est là, silencieux, implacable, seul remède à ses maux, dit-il dans son aveuglement. La rivière va l’engloutir

Soudain, lui aussi revoit sa mère au foyer domestique, il entend sa voix, il contemple ce pâle visage penché sur lui au moment du départ:

«Mon enfant, a-t-elle dit, attache-toi au Seigneur et par sa grâce tu posséderas toutes choses; ne désespère jamais; qui craint Dieu sort de tout.»

C’est la flèche salutaire de l’Esprit qui a transpercé son cœur; il réfléchit: «Qui sait, murmure-t-il, si l’Éternel ne viendra point à se repentir et s’il ne laissera pas après lui la bénédiction?»

Sa mère a longtemps prié, elle prie encore, et ce soir-là les anges se réjouissent dans le ciel pour une brebis rentrée au bercail.

Ce ne sont point ici des tableaux imaginaires tracés pour satisfaire une vaine curiosité; ce sont d’émouvantes réalités; je sais un cher ami que le souvenir, les prières d’une mère, ont arraché à un pareil abîme.

Ô saintes requêtes de la foi! intercessions brûlantes de la charité, combien de fois n’avez-vous pas ramené la lumière dans les ténèbres d’un cœur désespéré?

Combien de fois n’avez-vous pas transformé en Béthel une mansarde solitaire?

Combien de liens précieux n’avez-vous pas formés pour l’éternité!


Mais si la prière d’intercession est un SECOURS EFFICACE, elle est aussi UN TRAVAIL BÉNI!

C’est par ce trait que nous voulons terminer.

Moïse combat par la prière et ses cris intercesseurs protègent Israël, mais Aaron et Hur soutiennent ses mains affaiblies et contribuent AUSSI à la victoire.

Ainsi, dans le peuple de Dieu, le vieillard, le malade, même le faible enfant, ont leur part dans cette œuvre sainte.

N’est-il pas doux de se dire qu’au céleste banquet de la prière le Seigneur ne repousse personne?

Les chétifs, les déshérités y sont bien souvent les premiers conviés.

Le pieux évêque Spangenberg disait à un frère morave accablé d’années, et qui se désolait de ne pouvoir accompagner les missionnaires au Groenland:

«Restez! vous prierez pour nous, et souvent ainsi vous travaillerez mieux que nous

«Si je savais, disait Luther, qu’un seul chrétien prie pour moi, je ne craindrais rien.»


Ô vous tous! qui avez perdu forces, santé, fortune peut-être, et qui craignez de devenir des ouvriers inutiles dans la vigne du Seigneur, ne vous plaignez pas: l’Église a besoin de vous, et IL VOUS RESTE LA TÂCHE DE LA PRIÈRE.

N’est-elle pas souvent la meilleure partie de votre œuvre?

Pendant que Josué combat les batailles de l'Éternel, pendant que vos frères sont exposés au feu de l’ennemi, vous aiguisez, de votre prière, les armes qui remporteront la victoire.

L’œil humain ne peut ni calculer vos efforts, ni mesurer votre patience, mais, au jour des éternelles rétributions. Celui qui vous voit dans le secret vous le rendra publiquement.

Ne défaillez donc point, prières solitaires; ne vous découragez pas, humbles intercesseurs: DIEU ENTEND, DIEU EXAUCE!

Ce Dieu qui pourrait tout, sans vous, vous demande votre prière; allez! votre part est belle, et la famille des désolés vous réclame.


Et maintenant, frères, si par l’Esprit de Dieu vous avez compris un peu mieux les grâces, les privilèges de la prière d’intercession, levez-vous et ne restez pas là sans rien faire.

Dieu ne veut point d’oisifs dans sa vigne: agissez donc, mettez-vous à l’œuvre promptement; apportez, vous aussi, votre humble pierre à l’édifice du Seigneur; que votre piété s’affirme, que votre prière brûle au dedans de vous!

Voyez: les temps sont sérieux, les ennemis de Christ redoublent d’efforts contre l’Église; hélas! ce n’est plus contre les ennemis du dehors seulement qu’elle a à se prémunir, Amalek est souvent dans son propre sein.

Allez donc pour consoler tous ces déshérités dont le cri vous appelle;

Allez  pour nourrir votre foi et former une alliance plus intime avec votre Dieu;

Allez  pour obéir à l'Éternel et pour édifier les murailles de Jérusalem.

L’ange se tient avec l’encensoir devant le trône; ne voulez-vous pas que vos prières montent aussi, avec le parfum, pour détourner le courroux d'un Dieu vengeur?

Allez avec courage, avec humilité avec foi.


Quand une âme vous a demandé de prier pour elle, faites-vous un devoir sacré de ne jamais l’oublier; priez sans cesse, c’est-à-dire recherchez les occasions et faites toujours la volonté de Dieu; employez souvent vos dimanches, vos heures d’isolement ou de maladie à présenter au Seigneur tous ceux qui, en demandant votre prière, ont fait appel à votre charité et honoré votre foi.

Mettez dans votre intercession la ferveur de l’émotion et la sainte régularité de l’habitude. Montez à la montagne de l’Éternel, et puis luttez jusqu’au soir, car bientôt viendra la nuit en laquelle nul ne peut travailler; faites en Dieu des actions de valeur, et dressez-lui aussi votre autel en disant: «L’Éternel est mon berger!» (Ps. XXIII.)

Alors «les canaux des cieux s’ouvriront et la rosée d’en haut descendra sur vous

Alors l’Éternel vous dira: «ME VOICI!» et «il répandra en votre faveur la bénédiction, en sorte que vous n’y pourrez suffire

Amen! Que Dieu le fasse en tous nos cœurs pour sa gloire.

Ainsi soit-il.




- Table des matières -