Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

SERMONS PRATIQUES

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LA PRIÈRE

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Que gagnerons-nous en adressant à Dieu nos prières. Job, XXI, 15.

Je n’ai pas l’intention, comme si je parlais à des incrédules, de vous démontrer que la prière est efficace; je ne viens pas vous prouver par de longs raisonnements que Dieu, Créateur de ce monde et de tout ce qu’il renferme, peut sans cesse intervenir au milieu de ses créatures, et que lui refuser ce pouvoir, c’est lui enlever l’un des plus importants, que dis-je, le plus important des attributs de sa souveraineté.

C’est en effet à des chrétiens que je m’adresse, qui savent que DIEU PEUT EXAUCER CEUX QUI INVOQUENT SON NOM, et qu’il n’est point sourd aux supplications des hommes.

Aussi, me basant sur les seules données de mon expérience, me bornerai-je à vous parler des effets bienfaisants de la prière, c’est-à-dire des bénédictions spirituelles qui découlent de la prière et qui l’accompagnent, connue la fertilité accompagne la pluie qui détrempe la terre ou le soleil qui l’inonde de ses rayons.


J’ai toujours été frappé de voir L’IMPORTANCE QUE LES PREMIERS CHRÉTIENS DONNAIENT À LA PRIÈRE.

Elle faisait partie intégrante de leur vie, à tel point qu’on a pu dire qu’ils passaient leur existence en communion intime avec Dieu. Dans toutes les circonstances où ils se trouvaient, heureuses ou malheureuses, nous voyons la prière apparaître.

Voyez-les, après la première arrestation des apôtres, fléchir le genou devant le Seigneur;

voyez-les, après la délivrance miraculeuse de Pierre, réunis chez Marie pour prier;

voyez-les, non seulement à Jérusalem, mais à Antioche, à Éphèse, dans toutes les Églises, partout, en tout temps, persévérant dans la prière, les yeux tournés vers le ciel.

Et les grands héros du christianisme, les hardis champions de la vérité religieuse, les saint Paul, les saint Pierre, les saint Augustin, ne les entendons-nous pas recommander sans cesse aux fidèles la prière et mettre en pratique d’une manière admirable leurs enseignements sur ce point-là?

Ah! c’est qu’ils avaient compris que la prière est l’âme de la vie du chrétien, qu’elle en est l’aliment indispensable, qu’il n’y a qu’elle qui entretienne la foi, qui l’augmente, qui la nourrisse, qui lui fournisse chaque jour ce qui est nécessaire pour qu’elle ne périsse point.


Supprimez l’air que nous respirons: le corps s’affaiblira peu à peu, puis enfin la vie l’abandonnera parce qu’il sera privé d’un aliment dont il ne peut se passer; de même;

Si vous supprimez la prière, tout ce qui constitue la vie religieuse disparaîtra bientôt.


CELUI QUI NE PRIE PLUS VOIT BIENTÔT SA FOI FAIBLIR sans qu’il sache pourquoi,

son ardeur se ralentir sans qu’il puisse se rendre compte de ce qui lui arrive,

son amour pour Dieu et pour les choses saintes s’évanouir par degrés comme à son insu;

enfin vient le moment où il doit s’avouer à lui-même au sujet de la loi de son Dieu, qu’il n’y prend plus de plaisir;

- le désenchantement et le découragement s’emparent de lui;

- il se sent entraîné sur la pente fatale qui éloigne de la religion,

- et il tombe ou dans l’indifférence, sans plus s’occuper en aucune manière des affaires du royaume de Dieu,

- ou bien, tout en gardant ses anciennes habitudes et les dehors d’un homme religieux, il ne conserve plus qu’une foi morte;

c’est le partisan d’un système, non plus un disciple du Christ!

Heureux encore s’il ne va pas plus loin, s’il ne rompt pas avec tout son passé pour aller grossir les rangs de l’incrédulité et des ennemis de l’Évangile.


Voilà quels sont les effets de l’abandon de la prière, voilà jusqu’où descend peu à peu celui qui l’oublie, à moins que, avant qu’il en vienne à ces extrémités, un avertissement de l’Éternel, une de ces secousses qui ébranlent la conscience et l’âme jusque dans leurs fondements, ne vienne le ramener à Dieu et lui montrer l’abîme où il allait se précipiter.

On a souvent vu des chrétiens, on en voit encore tous les jours, qui, au début de la carrière, sont pleins de piété, de foi, d’amour pour leur Sauveur, et qui insensiblement se détournent de lui. La raison de ce fait, elle se devine, elle n’est pas éloignée, elle est en eux-mêmes: C’EST QU’ILS NE PRIENT PLUS.

La prière était la source de leur vie religieuse, le foyer auquel venait s’alimenter leur foi et s’allumer leur zèle chrétien; c’était par elle qu’ils pouvaient s’élever parfois au-dessus des horizons bornés de ce monde pour communiquer avec le ciel; et lorsqu’elle a été retranchée, ils sont retombés lourdement à terre, comme un oiseau à qui l’on a coupé les ailes.

Mais, dira-t-on, la prière a-t-elle une influence magique qui infuse, pour ainsi dire, dans l’âme et dans le cœur tout ce qui constitue le chrétien?

Nullement.

Pourquoi alors exerce-t-elle une action telle, que celui qui ne prie pas est en quelque sorte fatalement entraîné loin de Dieu et de la religion?

Parce qu’une religion SANS PRIÈRE, ce qui veut dire SANS communion avec Dieu, SANS adoration, SANS aspiration vers l’infini, SANS ces élans de l’âme qui rapprochent du ciel, n’est plus une religion, un lien qui unit les cieux avec la terre et l’homme avec Dieu.

Comment alors s’étonner que la vie religieuse périsse là où il n’y a plus de religion?

De plus, l’homme n’est pas naturellement pieux.

De même que les peuples abandonnés à eux-mêmes ont peu à peu perdu la vérité religieuse qu’ils possédaient auparavant, et qu’il a fallu une révélation particulière de Dieu pour conserver cette vérité dans une seule nation, de même l’individu, laissé à ses seules forces, perd en peu de temps sa religion, sa foi et sa piété, s’il ne reçoit des lumières d’en haut.

Il faut que son cœur soit sans cesse revivifié par le Saint-Esprit.

Or, pour recevoir le Saint-Esprit, il faut le désirer ardemment, il faut le demander par la prière, selon cette parole de Jésus, que Dieu le donnera à ceux qui le demandent.


LE GRAIN NE PEUT GERMER SANS LA ROSÉE DU CIEL,

LA FOI SE DÉVELOPPER SANS RECEVOIR UNE EAU VIVE.


Or, il n’y a point de religion sans foi, point de foi sans Saint-Esprit, point de Saint-Esprit sans prière.

On se fait quelquefois d’étranges illusions. On se croit encore chrétien et l’on ne prie plus; on pense pouvoir participer aux grâces de Dieu, et l’on a fermé le canal par lequel seul elles peuvent nous arriver.


Que celui qui néglige la prière ne s’abuse point!

Il a rompu la chaîne qui l’unissait à Dieu,

il appartient à la terre,

il n’a plus rien à faire avec le ciel.


Que gagnerons-nous encore en adressant à Dieu nos prières?

Nous serons fortifiés et consolés au milieu des afflictions et des souffrances. Si quelqu’un souffre, qu’il prie, écrivait un jour saint Jacques, et jamais vérité d’une application plus universelle n’est tombée d’une plume inspirée.

La vie n’est pas, en effet, un chemin large et aplani sur lequel on s’avance sans difficultés et sans secousses! c’est, au contraire, une route étroite et ardue, parsemée de cailloux qui roulent sous les pieds et les déchirent, et sur laquelle l’homme, le front ruisselant de sueur, doit s’avancer en portant sa croix. En portant sa croix! Elle est lourde pour plusieurs, elle est bien difficile à porter!

Penchez l’oreille sur l’humanité et recueillez les mille bruits qui s’en échappent incessamment. Écoutez. Au milieu d’innombrables murmures, entendez-vous cette voix grave et solennelle qui se détache des autres, qui les surpasse toutes et qui, lugubre et déchirante, monte jusqu’au trône de Dieu?

C’est la voix de ceux qui pleurent, de ceux qui souffrent; c’est la voix des malheureux de ce monde, voix puissante qui, sortant de milliers et de centaines de milliers de bouches, couvre tous les autres bruits de la terre.

L’homme est né pour souffrir comme l’étincelle pour voler, dit l’Écriture. Il n’y a pas besoin d’avoir sur la tête une couronne de cheveux blancs ni d’être bien avancé dans la carrière pour en avoir fait la douloureuse expérience.

Souffrances qui proviennent des peines, des fatigues, des soucis, des inquiétudes, des insuccès, des découragements, des difficultés de la vie;

souffrances qui proviennent de l’injustice, de la méchanceté ou de l’ingratitude des autres;

souffrances qui proviennent de la misère ou de la maladie;

souffrances qui proviennent de la mort, laquelle vient séparer ceux qui s’aiment et porter la désolation dans les cœurs;

souffrances qui proviennent de la propre folie de l’homme et de ses passions insensées;

souffrances qui proviennent de mille autres causes que l’homme trouve en lui et hors de lui, dans son propre cœur et dans tout ce qui l’entoure.

Qui consolera celui qui souffre, qui le relèvera dans son abattement, d’où recevra-t-il le courage qui lui manque?

Il a besoin de forces pour supporter son mal, et ces forces, où pourra-t-il les trouver?

Je n’ai qu’une seule réponse: EN DIEU PAR LA PRIÈRE.


Le Père que nous avons dans les cieux est puissant pour nous soulager de nos fardeaux, pour nous fortifier dans nos faiblesses, pour nous affermir dans nos luttes, pour nous consoler dans nos afflictions, si nous levons vers lui nos regards suppliants, si nous le prenons pour confident de nos peines, si nous nous remettons avec confiance et amour entre ses bras paternels. Venez à moi, vous tous qui êtes travaillés et chargés, a-t-il dit lui-même, et je vous délivrerai!


C’est à votre expérience seule que je veux ici faire appel.

Ne vous est-il pas arrivé, dans un moment difficile de votre vie, moment de découragement et de larmes, lorsque vous aviez le cœur brisé, ne vous est-il pas arrivé de vous retirer à l’écart, et là, levant les yeux au ciel, d’adresser à Dieu une prière?

Et quand vous vous êtes relevés, n’étiez-vous pas complètement changé?

Sans doute la cause de votre douleur n’avait pas disparu; vous n’étiez pas entièrement consolé, mais vous étiez résigné; il vous semblait qu’un baume avait été versé sur votre blessure.

C’est que la prière vous avait communiqué un esprit nouveau, des forces nouvelles, et vous puisiez le courage de supporter fermement votre malheur dans le vif sentiment qu’elle vous avait donné, que Dieu était avec vous et qu’il ne vous abandonnerait pas.

Et où l’homme affligé irait-il chercher des forces, sinon dans la prière et dans la communion avec Dieu?

À qui irait-il demander des consolations, sinon au PÈRE DE TOUTES LES CONSOLATIONS?

Au monde? Mais c’est le monde qui, la plupart du temps, est la cause de ses maux, bien loin qu’il puisse les consoler.

Aux plaisirs? Mais les plaisirs ne produisent qu’un oubli momentané, qu’un étourdissement factice.

Irait-il les chercher dans les douces joies de l’amitié et de l’affection? Sans doute ce serait un moyen plus efficace, mais un ami même ne peut consoler véritablement son ami que s’il lui tourne les regards en haut, que s’il lui fait contempler le ciel. Non:


C’est la prière qui sait le mieux sécher les larmes, parce qu’elle dirige les pensées de l’homme vers un monde béni dans lequel les larmes ne couleront plus et d’où toute souffrance sera bannie.

Demandez aux martyrs de l’Évangile ce qui leur communiquait cette joie au milieu des souffrances, cette sérénité parfaite, cette force d’âme inouïe, cette confiance imperturbable qui provoquait l’admiration même de leurs bourreaux!

C’est qu’ils ne vivaient pour ainsi dire plus sur la terre, mais, tout entiers à leurs célestes espérances, ils étaient en communication directe et habituelle par la prière avec ce Sauveur dont ils attendaient tout.

Que leur faisaient les outrages, les cachots ou les bûchers de la terre?

N’étaient-ils pas déjà par anticipation des bourgeois des cieux?

Et Jésus-Christ, celui que nous devons en toutes choses prendre pour modèle, où puisait-il ces forces surhumaines qui devaient lui permettre d’accomplir son douloureux ministère?

Il nous est dit, presque à chaque page des Évangiles, qu’il se retirait solitaire pour prier.

Là, tandis que, promenant sur la terre son regard prophétique, il voyait par avance les grands se liguer contre lui, le peuple auquel. il avait fait tant de bien demander sa mort à grands cris, le monde le rejeter de son sein comme un criminel, et tous l’abandonner, même ses plus intimes amis; tandis que se déroulait devant lui cette longue série de souffrances qui devait se terminer sur une croix ensanglantée; tandis que ces tableaux anticipés de l’avenir lui remplissaient le cœur d’une douloureuse tristesse, il levait son regard vers le Ciel, et, seul à seul avec Dieu, se reposait et se consolait dans la vue des splendeurs célestes.

Il contemplait son Père qui l’encourageait et qui lui tendait les bras;

il contemplait la place d’honneur qui lui était réservée;

il contemplait surtout l’humanité rachetée et sauvée par son sacrifice; et il se relevait plein d’une force nouvelle pour accomplir son œuvre de dévouement et d’amour. 


Si la prière fut indispensable à celui qui ne participait pas aux faiblesses humaines, à celui qui était l’homme fort par excellence puisqu’il n’avait pas reçu l’esprit par mesure, que ne sera-t-elle pas pour nous, êtres chétifs et sans force?

Comme à la voix de Jésus, le ciel s’ouvre aux prières chrétiennes, le croyant aperçoit son Sauveur qui l’attend et lui prépare une place. Tout disparaît à cet éclatant spectacle; les peines et les joies ne lui apparaissent plus que comme passagères; il est consolé et fortifié parce qu’à côté de souffrances d’un jour, il entrevoit une bienheureuse éternité.


La prière est encore davantage: elle est une force contre le mal, contre cet ennemi qui rôde toujours autour de nous, qui nous serre, qui nous presse, qui nous assaille, qui saisit toutes les occasions de s’emparer de la place pour s’y établir en vainqueur.

Il n’y a pas un seul instant de notre vie où nous n’ayons à nous tenir en garde contre ses pièges, et nous pouvons d’autant moins facilement lui échapper qu’il a des intelligences jusque dans notre cœur et qu’il en fait trop souvent sa résidence. Certes, nous avons besoin de forces contre lui.

Je veux ici exposer brièvement trois idées:

la première, c’est que la prière détourne du péché;

la seconde, c’est qu’elle relève celui qui a été vaincu par le péché;

la troisième, c'est quelle excite au bien.


D’abord la prière détourne du péché.

Le seul fait qu’un homme prie montre déjà qu’il est dans des dispositions agréables à Dieu et qu’il a la ferme intention d’essayer au moins de faire sa volonté. Vous ne comprendriez pas celui qui, le cœur rempli de desseins mauvais et de désirs pervers, oserait se présenter devant l’Être tout-puissant qui lit au plus profond des cœurs.

ON PEUT ÊTRE HYPOCRITE DEVANT LES HOMMES, ON NE L’EST PAS DEVANT DIEU. Celui donc qui fait ses efforts pour prier a déjà vaincu en lui l’amour du mal, c’est-à-dire le désir de goûter le fruit du péché. Toutefois l’homme le meilleur peut être momentanément égaré; le tentateur est habile; il a mille moyens de circonvenir les cœurs. On peut être entraîné sur les bords de l’abîme du mal pour ainsi dire sans le savoir.

Heureux alors celui qui a des habitudes de prière, car la prière pourra lui ouvrir les yeux et le préservera de la chute!

Un homme avait eu beaucoup à souffrir de la méchanceté de l’un de ses semblables. Pendant de longues années il avait étouffé son ressentiment, lorsqu’un jour se présenta une occasion de tirer une vengeance éclatante de son ennemi. Que fera-t-il?

La question ne se pose pas même pour lui; il est aveugle pour le moment; l’homme naturel s’est réveillé avec tous ses mauvais instincts.

Œil pour œil, dent pour dent; il se vengera; il savoure déjà sa vengeance; il la médite avec joie.

Cependant, cédant à ses habitudes religieuses, avant de commencer la journée, il joignit les mains devant l’Éternel, et lorsqu’il arriva à cette parole de l’Oraison dominicale: Pardonne-nous nos péchés, COMME nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés, un trouble inexprimable le saisit; il entendit au dedans de lui une voix qui lui criait: Que vas-tu faire?

Les écailles tombèrent de ses yeux. Il aperçut la faute qu’il allait commettre, et tandis que des larmes de repentir humectaient ses paupières, il s’écria:

Ô Dieu! pardonne-moi mes mauvaises pensées, oui, pardonne-moi, comme je pardonne à mon ennemi.

Ce qui lui arriva peut nous arriver à tous dans des circonstances différentes. Que de gens ont été retenus par la prière sur la pente fatale où leurs passions les entraînaient!

Voyez ce jeune homme. Il est pieux d’habitude, mais le mal s’est un jour emparé de son cœur, une tentation l’a obsédé, et il va y succomber. Ni les protestations de sa conscience, ni l’habitude de se plier au devoir, ni les forces qu’il puise habituellement dans sa foi, ne peuvent le détourner d’une action dont il se repentira peut-être toute sa vie et qui le couvrira de honte et d’opprobre.

Tandis qu’il est encore hésitant, il vient à penser à son Dieu qui le voit et l’entend; se prenant alors à trembler, il lève les mains vers lui; une prière fervente sort de son cœur et il se sent par là raffermi; il résiste, le mal est vaincu, et il sort victorieux de l’épreuve. C’est ainsi que celui qui sent le mal s’insinuer dans son cœur, s’il pousse un gémissement vers le Seigneur, verra la tentation s’enfuir comme le brouillard devant le soleil.


CEPENDANT IL EST UNE TRISTE RÉALITÉ. C’est que le péché exerce un tel empire sur nous que la plupart du temps nous oublions Dieu ou du moins nous ne nous souvenons de lui que lorsqu’il est trop tard et que nous nous sommes déjà laissé vaincre par le mal.

C’est lorsque nous sommes dans cet état, lorsque nous sommes accablés sous le poids d’une faute, petite ou grande, mais qui n’en est pas moins une transgression de la loi de Dieu, lorsque nous sommes sous le coup d’une infidélité que notre conscience nous reproche, c’est alors que la prière exerce peut-être sa plus heureuse influence.

Tandis que chaque péché enfonce plus profondément dans le mal CELUI QUI NE PRIE PAS, et que de chute en chute, il l’éloigne toujours davantage de Dieu, parce qu’un tel homme est abandonné à ses seules forces et qu’il est entraîné sur une pente irrésistible qu’il est impossible de remonter...


CELUI QUI PRIE, c’est-à-dire qui, après chaque transgression, se présente devant Dieu dans le sentiment de sa faiblesse, convaincu de son indignité et de son état de péché, sera sans cesse relevé, réhabilité, et se sentira sans cesse pardonné.

Rien ne lui enlèvera le sentiment qu’il est encore un enfant de Dieu, sentiment qu’il puisera dans la communion avec son Père céleste, et bien loin que chaque chute soit un nouveau degré d’abaissement dans le mal, ce sera une expérience nouvelle qui le convaincra de son impuissance et qui le poussera toujours davantage à chercher ses forces en Dieu et à se réfugier dans ses bras.

Mais s’il est vrai que nous trouvions dans la prière une aide puissante pour nous écarter du mal, s’il est vrai qu’elle nous offre un moyen de relèvement si efficace qu’il est impossible que l’homme de prière soit un esclave du péché, elle fait plus encore: 


La prière pousse au bien, elle excite à l’amour et à une active charité.

Oseriez-vous demander à Dieu d’ouvrir pour vous le trésor de ses grâces et tenir votre main et votre cœur fermés pour les autres, réclamer les secours de Dieu tout en refusant de secourir vos semblables?

Oseriez-vous attendre ses bénédictions et les demander à grands cris, si vous ne faites aussi du bien vous-même, suivant vos forces, vos moyens et votre position?

Non! celui qui agirait ainsi serait un insensé parce qu’il se tromperait lui-même, un impie, parce qu’il spéculerait au profit de son égoïsme sur la bonté et la générosité de Dieu.

D’ailleurs, ne prions-nous que pour nous-mêmes?

N’associons-nous pas sans cesse à nos prières nos parents, nos amis, tous les êtres qui nous sont chers?

Ne faisons-nous pas monter d’ardentes supplications en faveur des autres hommes?

Et pouvons-nous prier pour les malheureux, demander à Dieu d’alléger leurs fardeaux et de calmer leurs souffrances, et rester nous-mêmes les bras croisés, sans essayer d’apporter quelque remède à leurs maux et sans travailler avec Dieu et pour Dieu?

Non! cela ne se peut pas!

Celui qui prie et qui ne se relève pas plus charitable, plus déterminé à faire du bien, plus prêt enfin à se dévouer pour les autres, risque bien d’avoir fait une mauvaise prière, de n’avoir que vaqué à une stérile habitude et par conséquent ne doit pas s’étonner s’il n’est pas exaucé de Dieu.


Parmi tant d’autres mobiles que nous avons de déployer sur cette terre une activité bienfaisante, la prière n’est donc pas le moindre. Par les sentiments qui la dictent et ceux qu’elle fait naître, elle doit, si elle est sincère et fervente, donner chaque jour un salutaire avertissement à celui qui serait tenté de négliger l’œuvre de Dieu.


Nous avons vu que la prière est la SOURCE PRÉCIEUSE DE LA FOI ET DE LA VIE RELIGIEUSE, qu’elle est une consolation pour celui qui souffre, et un auxiliaire puissant qui nous aide à résister aux séductions du mal.

Est-elle tout cela pour vous?

C’est la question que je pose en terminant.

Je ne demande pas si vous priez, ceux qui ne prient pas ne se rencontrent guère dans les temples;

je ne demande pas si vous priez régulièrement, combien auraient des reproches à se faire à cet égard.

Je demande si vous regardez la prière comme le plus précieux de tous les privilèges, si vous sentez ce qu’elle est et ce qu’elle fait pour l’âme, si vous savez enfin en tirer tous les trésors de patience, de foi, de force, qui y sont contenus, ou si elle n’est pour vous qu’un DEVOIR FASTIDIEUX auquel vous vous soumettez par SIMPLE HABITUDE.

Dans le premier cas, je vous félicite. Vous pouvez marcher sans crainte. La pluie peut tomber, les rivières déborder, les vents souffler et fondre sur vous: vous avez bâti votre maison sur le roc et vous ne serez point ébranlé.

Dans l’autre cas, je vous plains, parce que vous êtes comme un homme qui meurt de faim couché sur un trésor sans savoir en profiter; je tremble pour vous, parce que, lancé au milieu de la vie, sans appui et sans autre secours que votre faiblesse, vous êtes comme un cheval emporté, qui, sans frein, va se précipiter dans le premier abîme qui s’ouvre sous ses pas.


Ah! s’il y avait parmi nous plus d’hommes de prière:

Verrait-on tant de gens dont la foi est vacillante et dont le cœur se laisse envahir par le doute?

Verrait-on tant de chrétiens qui ne sont ni froids ni bouillants, chez lesquels la sève religieuse ne circule plus?

Verrait-on tant de malheureux qui tombent victimes de leurs passions ou de leurs vices?

Verrait-on enfin l’empire du mal se développer comme il le fait sous nos yeux?

Et c’est justement à l’époque où le christianisme est attaqué, où des ennemis puissants et terribles se sont conjurés contre lui, où les masses l'abandonnent de plus en plus pour passer à l’incrédulité, où le disciple de Christ doit s’attendre à être bientôt seul en face d’un monde hostile et acharné, c’est lorsque l’avenir est menaçant et que l’horizon s’assombrit, c’est à cette époque, dis-je, que la prière semble être le plus négligée parmi nous.

C’est alors qu’il faudrait avoir le plus d’énergie et de persévérance pour ne pas se laisser entraîner soi-même et pour ramener les autres à Christ, que les chrétiens se relâchent et que le sel a perdu de sa saveur.


Debout donc, vous qui dormez dans l’indifférence et dans l’oubli de Dieu, sans vous douter de l’abîme qui se creuse entre vous et le ciel.

Debout, vous qui croyez à l’Évangile et qui êtes des rachetés de Christ: regardez en haut et priez.

Approchez-vous avec amour et confiance, comme des enfants, de ce bon Père qui vous tend les bras, et vous recevrez, n’en doutez pas, les grâces excellentes et parfaites qui sont attachées à la prière chrétienne.



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