Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

SERMONS PRATIQUES

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LE CULTE DOMESTIQUE

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Ces commandements que je te donne aujourd’hui, seront dans ton cœur. Tu les inculqueras à tes enfants, et tu en parleras quand tu seras dans ta maison. Deutéronome VI, 6-7.

Il est bien naturel que les membres d’une même famille, que tous ceux qui habitent autour du même feu, parents, enfants, domestiques, hôtes habituels ou passagers, s’assemblent quelques instants tous les jours pour remercier la Providence de ses bienfaits et pour lui demander des grâces nouvelles.

Il n’est pas de plus beau spectacle que celui d’un père se faisant, comme les patriarches, prêtre dans le bon et vrai sens du mot, c’est-à-dire interprète des siens auprès de la divinité. Il y a là quelque chose de grand qui ne saurait manquer de frapper toute à me sérieuse.

Oui, c’est un beau spectacle; mais pourquoi faut-il qu’il soit si rare, pourquoi faut-il que cette coutume, en honneur chez nos ancêtres, ait presque disparu de nos mœurs?

Ah! que les hommes, trop nombreux, hélas! qui ont laissé leur âme se refroidir au vent glacial, incrédule et sceptique, qui de notre temps souffle sur le monde, que ces personnes indifférentes qui regardent la religion comme une chose secondaire, un superflu dont on use à ses heures, quand on peut, mais qu’on ne fait pas entrer dans le bilan de sa vie, que tous ces gens-là ne célèbrent point de culte dans leur maison, on le comprend!

Mais que, dans des familles que l’on peut appeler chrétiennes,

où l’Évangile est en estime,

où les enfants sont élevés dans la crainte de Dieu,

que dans ces familles-là on ait renoncé à cet usage, ou plutôt qu’on n’ait jamais songé à l’établir, c’est ce qui ne se comprend plus.


Mes frères, je vais m’adresser tout spécialement aux chrétiens qui sont dans ce cas, à ceux chez qui ne fleurit point la salutaire institution du culte domestique, pour leur dire:

«Introduisez-la chez vous, inaugurez-la sans tarder.»

C’est là tout le but de ce discours.

Quant aux personnes qui vivent dans l’isolement, sans avoir de famille où réchauffer leur cœur et leur piété, ou à celles qui connaissent déjà par expérience, qui ont éprouvé et qui éprouvent encore tous les jours les bénédictions attachées au culte dont nous parlons, peut-être pourront-elles tirer aussi de ce que nous allons dire, quelque instruction ou tout au moins quelque encouragement.

Il y a des raisons sans doute qui expliquent pourquoi tant de gens ne célèbrent pas le culte domestique quand ils ont dans le coeur tout ce qu'il faut pour le célébrer dignement; il doit y avoir des obstacles qui les empêchent de le faire  il y a des objections qu'ils pourraient nous opposer.

Cherchons ces raisons, découvrons ces obstacles, examinons ces objections, et, si elles sont sérieuses, si ce ne sont pas des prétextes ou des fins de non recevoir, efforçons-nous d’y répondre sérieusement.


* * *


La première difficulté se présentant à celui qui voudrait introduire un culte dans sa maison, est souvent UNE DIFFICULTÉ MATÉRIELLE.

Les occupations sont pour la plupart des gens si absorbantes, qu’elles laissent rarement du temps disponible. Toutes les heures sont comptées et employées. Chaque journée est comme un engrenage qui saisit le matin et ne relâche qu’au soir le corps fatigué pour le laisser dormir; chaque journée disperse çà et là les membres de la famille.

Les choses étant ainsi, dira-t-on, il est bien difficile de trouver un moment où tous, sans exception, soient réunis dans les dispositions qui conviennent à un acte aussi sérieux et sacré que celui que vous nous engagez à accomplir.

Ah! respect aux nobles efforts de l’homme qui gagne sa vie à la sueur de son front,

respect aux mains durcies par le travail,

respect aux légitimes nécessités d’une famille qui, pour conserver l’existence et l’honneur, n’a d’autres ressources qu’un labeur pénible et continu,

respect enfin à tous ceux qui soutiennent sans défaillir la lutte de la vie;

MAIS RESPECT AUSSI AUX DROITS DE L’ÂME QUI RÉCLAME SA NOURRITURE aussi bien que le corps, et aux droits de Dieu qui ne veut pas qu’on l’oublie, car POUR CELUI QUI AIME, IL EST CRUEL D’ÊTRE OUBLIÉ.

D’ailleurs ce qui est difficile n’est pas impossible. On fait souvent abus de ce dernier mot; il est bien des cas où l’on devrait s’abstenir de l’employer, car rien n’est impossible à celui qui veut.


On manque de temps! mais on sait bien en trouver pour des choses qui, si utiles et légitimes qu’elles soient en elles-mêmes, sont moins nécessaires. On en trouve pour parcourir les journaux, pour lire un feuilleton, pour s’accorder un plaisir, en un mot pour tout ce qui plaît, et on n’en trouverait pas du tout pour lire la Parole de Dieu et pour prier le Seigneur!

On manque de temps! mais il ne faut pas des heures. Le matin, avant d’aller au travail, ou le soir avant de se livrer au sommeil, ou dans le milieu du jour, avant ou après le repas, alors que personne ne manque à l’appel et que la famille entière est assise autour de la table commune, réserver quelques minutes, quelques minutes, dis-je, car cela suffit et le culte domestique doit être toujours court, est-ce une chose si malaisée? est-ce un sacrifice si lourd? y aurait-il là impossibilité pour qui que ce fût? Non, pour personne, si affairé, si laborieux fût-on. Il n’y a qu’à vouloir.


Poursuivons. Je crois que plus d’un père ou d’une mère de famille seraient disposés à suivre le conseil que nous leur donnons de la part de Dieu, mais s’en laissent détourner par une considération différente.

Je me rends un jour vers un homme en qui je reconnais une réelle piété, et, après avoir parlé du.devoir même dont nous nous entretenons en ce moment, constatant qu’il a jusqu'à présent négligé ce devoir, je lui rappelle l’ordre de Moïse:

Les commandements qui sont dans votre cœur, vous les inculquerez à vos enfants, et vous en parlerez quand vous serez à la maison.

Ce n’est pas l’envie qui me manque, répond-il, mais il y a un obstacle.

Et lequel, je désirerais le savoir.

C’est que JE ME SENS INCAPABLE DE CÉLÉBRER MOI-MÊME UN CULTE. Si j’avais quelque habitude de la chose, si j’avais la parole à mon commandement, si je savais expliquer les textes bibliques et en tirer des leçons utiles, je commencerais aujourd’hui même, mais comment m’y prendre?

Ce n’est que cela qui vous embarrasse. Eh bien! vous commencerez aujourd’hui. Je vous le promets.

Le culte de famille en effet peut revêtir des formes très différentes, et chacun doit choisir celle qui est le mieux appropriée à son cas. Souffrez que j’en énumère ici quelques-unes, et pardonnez-moi ces détails familiers, en raison de l’importance du sujet et du but tout pratique que je me propose.


Le culte domestique au complet consiste:

à lire quelques versets de la parole de Dieu,

à les méditer brièvement,

puis à improviser une prière en rapport avec cette lecture même et les circonstances spéciales du jour,

enfin à chanter un psaume ou un cantique, ce qui forme une des parties les plus édifiantes du service, celle qui réclame la coopération de tous, enfants et parents.


Il est relativement peu de personnes qui puissent ainsi célébrer le culte domestique, et la plupart doivent le réduire à des proportions plus modestes.

Les uns se servent des ouvrages spéciaux qui ont paru sur la matière et qui contiennent, à la suite d’une portion de l’Écriture sainte, des réflexions explicatives et édifiantes, et souvent une prière.

On pourrait citer un bon nombre de livres, qui ont un mérite réel et rendent de grands services dans beaucoup de familles, et il n’est pas d’années où il n’en paraisse de nouveaux.

Vos pasteurs du reste sont toujours à votre disposition pour vous indiquer et même au besoin pour prêter à ceux qui le désireraient, des ouvrages convenables. Peut-être d’ailleurs avez-vous au grenier, dans le fond d’une armoire ou sur un rayon écarté de votre bibliothèque, une de ces bonnes vieilles bibles d’Osterwald avec réflexions ajoutées à chaque chapitre. Profitez de ce trésor, car c’en est un. Je sais par expérience tout ce qu’il vaut.


D’autres personnes se contentent de moins encore.

Elles se bornent à lire un chapitre de l’Écriture, et si elles hésitent à improviser une prière et à exposer à Dieu, par des paroles, les soucis, les besoins et les sentiments de tous, elles répètent simplement ou font répéter par un de leurs enfants l'Oraison dominicale, cette prière que tous connaissent et qui fait tant de bien quand elle n’est pas prononcée seulement des lèvres et que le cœur s’y associe.

Chacun enfin peut modifier, ajouter, retrancher, innover, mais nul ne peut se dispenser, puisque, ainsi que je viens de vous le montrer, tous les hommes, sans exception, ont la possibilité d’établir chez eux un culte de famille. C’est la deuxième vérité que je pose.

Ces deux vérités étant reconnues, on pourrait s’attendre à ce que notre cause fut définitivement gagnée et à voir le culte domestique s’implanter dans bien des demeures où il était auparavant inconnu; mais ce serait compter sans les faiblesses du cœur humain. 


QU'EST-CE QUI FAIT QUE BEAUCOUP DE PERSONNES qui sont peut-être en ce moment parfaitement d'accord avec moi en théorie, désireuses mêmes de combler la lacune qu’elles reconnaissent dans leur maison et qu’elles déplorent: qu’est-ce qui fait que beaucoup de ces personnes-là, au lieu de traduire immédiatement dans la pratique le sentiment de leur cœur, N’AJOUTERONT RIEN À LEURS HABITUDES ANTÉRIEURES?

C’est qu’il y a comme une fausse honte qui retient l’essor du sentiment religieux chez certaines natures et qui glace les meilleures résolutions; et cette fausse honte, chose curieuse! bien loin de se dissiper dans l’atmosphère de la famille, y exerce avec plus de force peut-être qu’ailleurs sa gênante influence. On ne rougit pas de manifester hautement du zèle pour ses intérêts matériels (personne ne songe à blâmer ce zèle-là), mais on éprouve quelque embarras à montrer soudain pour les choses de la religion plus de ferveur qu’auparavant, et à avouer ainsi à ceux qui nous entourent qu’il s’est fait un changement en nous, changement qui pourrait modifier considérablement notre manière d’être et notre conduite.

Cette réserve a quelque chose de respectable.

Elle provient, me semble-t-il, d’une légitime défiance de soi-même, basée sur l’expérience du passé, qui ne permet pas d’étaler aussitôt aux regards des sentiments sincères sans doute, mais peut-être fugitifs et dans lesquels on ne persévérera pas.

Elle provient aussi de la crainte de paraître exagéré, crainte qui dénote une âme équilibrée, car l’exaltation religieuse est toujours préjudiciable soit à l’âme qui s’y laisse prendre, soit à l’Église de Christ tout entière, et saint Paul nous recommande  «de conserver notre bon sens en toutes choses.»

Elle provient encore de ce faux et coupable respect humain qui a paralysé déjà tant d’excellentes intentions et qu’on ne saurait assez maudire comme une pierre d’achoppement qui se trouve toujours sous les pas des disciples de Jésus et les fait trébucher à chaque instant; et lorsqu’il s’agit d’une habitude religieuse à prendre comme celle que nous vous prêchons, qui me dit que ce respect humain, que la perspective d’un sourire moqueur, d’un haussement d’épaules ou d’un refus catégorique, que toute autre crainte enfin n’empêchera pas la proposition qu’on désirerait faire, ne la fera pas expirer sur les lèvres et ne l’ensevelira pas à jamais dans le cœur?

Qui me dit que cette timidité mal placée, que ce manque de courage ne retardera pas indéfiniment et peut-être pour toujours la fondation d’une Église ou même de plusieurs Églises domestiques?


ÉGLISES, CAR UNE FAMILLE EST UNE ÉGLISE

ET LE PÈRE EN EST LE PASTEUR.


Il est pourtant un tableau, un beau tableau que je me figure en ce moment.

C’est le soir, et dans ce village même. Dans une chambre où retentit plus d’un rire joyeux, autour d’une table bien éclairée, une mère contemple tous ceux qui lui sont chers. Elle tient respectueusement dans ses mains une Bible trop longtemps délaissée, mais qui ne le sera plus désormais.

Eh! mes enfants, voici le livre de Dieu, le livre des promesses de l’Éternel. Jusqu’à présent nous ne l’avons pas assez lu, nous n’avons pas su en tirer les trésors qu’il contient. Désormais nous voulons mieux faire.

Nous l’ouvrirons ensemble régulièrement, n’est-ce pas?

Vous y trouverez des enseignements d’un prix inestimable,

vous y trouverez des directions pour la vie,

vous y trouverez aussi des forces quand vous serez tentés, des consolations quand vous serez tristes, et des espérances si belles qu’elles sont à peine croyables, mais si certaines qu’on ne peut en douter.

Oui, lisons les paroles de ce livre, car le ciel et la terre passeront, mais ces paroles-là ne passeront point.

À ces mots prononcés avec une émotion contenue, je vois le père donner son approbation, les enfants se rapprocher les uns des autres et attendre, et une voix grave s’élève qui fait entendre les paroles de l’éternelle vérité, telles que Dieu nous les a données.

Mais au milieu de cette scène digne d’inspirer le pinceau d’un peintre, QUEL EST CE PERSONNAGE NOUVEAU QUE JE N’AVAIS PAS APERÇU D’ABORD?

Je distingue avec une netteté parfaite son visage resplendissant, son regard plein de douceur, et l’ineffable expression d’amour répandue sur toute sa physionomie. Ah! je le reconnais maintenant: C’EST CELUI QUI A DIT QUE LÀ OÙ DEUX OU TROIS SE RÉUNIRAIENT EN SON NOM, IL Y SERAIT AVEC EUX; c’est Jésus-Christ qui est apparu soudain; comme autrefois chez Zachée, le salut est entré dans cette maison.


Oh! que n’ai-je l’autorité d’un chrétien chargé d’années! que n’ai-je l’éloquence d’un Apollos! Je voudrais que des paroles brûlantes sortissent de ma bouche pour porter la conviction dans vos esprits et pour ébranler vos résolutions! Mais je m’assure que les bénédictions attachées au culte domestique sont assez persuasives par elles-mêmes, assez évidentes et désirables pour qu’elles ne vous laissent ni froids ni insensibles; et c’est pourquoi je veux vous en décrire ou tout au moins vous en mentionner quelques-unes.

Ce sont des choses que l’œil ne voit point toujours et que l’oreille n’entend point, mais que le cœur sent, et cela suffit.

Ce sont des choses qui varient selon les individus, les caractères, les états d’âme, les positions, mais qui, du plus ou moins, se passent chez tous.

À mesure qu’on avance et qu’on persévère, on en découvre de nouvelles.

Je n’insiste pas sur ce fait que le culte domestique est une précieuse ressource pour les vieillards, pour les infirmes, pour les malades, pour tous ceux enfin qui ne peuvent habituellement se rendre au temple pour adorer. Que de cœurs soulagés, que d’âmes secourues et nourries, que de lits de souffrance éclairés et réjouis par ce moyen!

Je ne dirai pas non plus qu’il y a dans l’histoire de toute famille, des circonstances où il est pour ainsi dire choquant de n’en pas voir tous les membres se réunir pour implorer ou bénir Dieu.

Ici c’est une délivrance accordée, là c’est une épreuve qui s’appesantit sur le foyer;

ici c’est le départ, là c’est le retour d’un enfant bien-aimé;

ici c’est une naissance qui a comblé les vœux du ménage, là c’est une mort qui approche, à laquelle on s’attend et qu’on ne saurait plus éviter.

Où sont les actions de grâces, où sont les supplications, où sont les prières?

Où sont les cœurs consolés, les âmes raffermies, les forces spirituelles envoyées?

Est-ce dans la maison où le Seigneur n’est jamais invoqué et où il ne le sera pas davantage en un temps particulièrement sérieux?

Mais laissons les circonstances exceptionnelles pour considérer la vie de tous les jours, et voyons ce que le culte domestique peut apporter à ceux qui le célèbrent.


* * *


Le culte domestique est avant tout dans la maison un élément de paix.

Comment serait-il possible en effet d’ouvrir ensemble le livre qui nous parle d’union et de charité, et de confondre chaque jour ses prières, tout en conservant les uns contre les autres du ressentiment ou de l’inimitié?

Ah! les murailles que le péché élève si souvent entre les hommes, même quand ils sont rapprochés par les liens du sang, s’écroulent sous le marteau de l’Évangile; les nuées d’orage qui peuvent obscurcir un moment le ciel de la famille se dissipent au soleil du bon Dieu.

Tiraillements douloureux, discordes fatales, guerres intestines qui assombrissez tant de coeurs et déflorez tant de vies, disparaissez à la face de Jésus-Christ. Vous ne sauriez résister à la puissance de la religion.

Quelle est cette maison où règne l’harmonie, où les cris discordants ne se font pas entendre, où l’on supporte volontiers les défauts et les faiblesses d’autrui, et où l’amour triomphe de tout?

C’est la maison qui sait, au temps voulu, se transformer en temple.

Mais pourquoi ces âcres discussions, ces querelles toujours renaissantes, cet état de guerre continuel qui change en enfers tant de ménages?

C’est que, dans ces maisons-là, on ne désire jamais, on n’appelle jamais la présence du roi de paix.

Si vous voulez voir croître chez vous l’estime réciproque et le respect mutuel,

si vous voulez que les rapports journaliers des uns et des autres soient constamment élevés et sanctifiés,

si vous voulez une affection qui dure et qui subsiste malgré tout:

le moyen que je vous propose est éprouvé; vous en pouvez trouver d’autres peut-être, mais aucun n’est plus certain ni plus efficace.

Vous sentez déjà que cette considération en introduit ici une autre de même nature et plus importante encore, s’il est possible:


Le culte domestique est dans une maison un puissant élément de piété.

Par lui-même il n’est rien s’il ne pénètre dans les cœurs, mais il ne peut se faire qu’il n’y pénètre pas. Influence insensible souvent mais réelle, il agit sans faire de bruit, progressivement. Vous ne pouvez voir la plante pousser, et pourtant, après n’avoir été qu’un chétif arbrisseau, elle devient un arbre.

Ainsi de l’action dont nous parlons; se répétant chaque jour, chaque jour aussi elle apporte sa petite pierre, son grain de sable à l’édifice qui se construit ainsi lentement mais d’autant plus sûrement en l’honneur de Dieu.

À mesure qu’on connaît mieux les Écritures et qu’on les comprend mieux, on s’y intéresse et on les apprécie davantage; on apprend à s’en servir et à y recourir dans toutes les occasions de la vie;

À mesure qu’on connaît mieux son Sauveur et que sa vie nous apparaît dans toute son imposante grandeur, on l’admire, on l’aime davantage;

À mesure que la bonté de Dieu nous est dépeinte, cet amour qui dépasse toute expression, uni à cette sainteté dont nous ne pouvons pas même nous faire une idée, on éprouve le besoin de se donner à lui, de le servir, de lui obéir tous les jours de la vie.

Et pour en arriver là l’instruction religieuse ne suffit pas, elle s’efface avec les années; le culte public ne suffit pas, il se célèbre à de trop longs intervalles; les dévotions particulières, si indispensables qu’elles puissent être, ne suffisent pas; elles suffisent aux chrétiens avancés dans la foi, elles sont une manifestation de la foi qui remplit le cœur, mais elles ne forment pas des chrétiens puisqu’elles n’existent guère que chez ceux qui le sont déjà; IL FAUT LE SANCTUAIRE DU FOYER DOMESTIQUE.

Et alors se posent les assises d’une piété solide, convaincue et durable, non pas isolée, mais constamment soutenue par celle des autres.

Prenez des tisons ardents et dispersez-les. Ils s’éteindront bien vite. Rassemblez-les au contraire. Ils formeront un foyer incandescent. C’est l’image de ces familles où la piété du père, et la piété de la mère, et la piété de l’enfant, et la piété du serviteur s’unissent et, par ce mélange continu, s’augmentent et se fortifient.


La piété de l’enfant. C’est en effet une troisième bénédiction attachée au culte domestique que ces impressions religieuses gagnées dans les premières années de la vie et persistant jusqu’à la mort, que cette influence bénie qui accompagnera et préservera dans la suite, où qu’ils aillent, sur le sol de la patrie ou sur le rivage de l’étranger, les fils et les filles du chrétien.

Le souvenir de la maison paternelle sera vivant dans leur cœur, ils seront encore imprégnés des principes qu’ils y auront puisés, ils n’oublieront pas les impressions et les leçons reçues.

Viennent les tentations, et les tentations semblent parfois s’acharner sur la jeunesse, ils pourront se souvenir de tout cela, être forts, je me trompe, car la force de l’homme n’est que faiblesse: ils sauront où trouver des forces; et si une fois ils se laissent renverser, car l’esprit est plein de puissance mais la chair est faible, si le grand chasseur des âmes parvient à les enlacer, à les étreindre dans les mailles serrées de son filet, ils le briseront bien vite, ce filet mortel, et se relèveront, brandissant d’une main l’épée de la parole, de l’autre le bouclier de la foi et portant sur la tête, selon l’expression de saint Paul, le casque du salut.

Ah! pères et mères, qu’est-ce qui vous tient à cœur plus encore que votre propre salut? N’est-ce pas le salut de vos enfants?

Seriez-vous heureux, même au sein des félicités éternelles, si vous les saviez malheureux, ennemis du Seigneur et bannis du ciel?

Voudriez-vous avoir la responsabilité de leur éducation manquée et de leurs âmes perdues?

Quels devoirs vis-à-vis de ces êtres que Dieu vous a confiés pour en faire un jour plus que des anges!

Travaillez donc à leur salut dès maintenant. Répandez dans leur jeune cœur la semence de l’Évangile et, dans votre voyage vers le ciel, prenez-les avec vous, conduisez-les par la main, et avancez-vous en famille au-devant de l’Éternité.

Lorsque le voyageur chrétien accomplissait son douloureux pèlerinage vers l’éternité, à ce que raconte Bunyan dans son livre immortel, il arriva enfin vers les portes du ciel, et comme après tant d’épreuves son âme se reposait à ce doux spectacle, la Charité s’avança vers lui, et, prenant la parole, lui demanda s’il avait une famille.

Oui, j’ai une femme et quatre petits enfants.

Pourquoi ne les avez-vous pas amenés avec vous?

Le chrétien se mit à pleurer.

O larmes pleines de tristesse et de regrets! ô larmes amères!


Mes frères, je vous ai entretenus d’un sujet qui a une grande importance. On dit quelquefois dans le public religieux que les prédications sont d’ordinaire trop vagues et trop générales. Telle n’a pas été celle d’aujourd’hui. Elle a touché un point précis; elle a exposé un devoir qui peut aisément être pratiqué sans retard par tout le monde.

Je demande à Dieu de n’avoir pas parlé en vain.



 

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