Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

PLUS DE CONDAMNATION

***

(Prêché un dimanche de Pâques.)


Il n’y a donc maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont en Jésus-Christ, qui marchent, non selon la chair, mais selon l’esprit. (Romains VIII, 1.)


Mes frères,

Nous ne ferions pas partie de l’innombrable multitude des rachetés si les mâles accents de ces paroles de Saint Paul ne trouvaient pas un écho dans nos cœurs, car elles sont l’expression fidèle des sentiments de l'âme qui, longtemps poursuivie par le remords, ou saisie par la frayeur, vient de trouver la paix et le repos en Jésus-Christ.

Aussi, les chrétiens de toutes les époques les ont-ils répétées à l’heure des chutes profondes pour se relever, ou sous le coup des condamnations iniques des hommes pour s’encourager à les porter avec résignation, comme nous les répétons aujourd’hui pour augmenter la joie de notre salut.

N’est-ce pas, chers frères et sœurs, qu’il suffit de penser que des multitudes (qui sont maintenant dans la gloire des enfants de Dieu) ont répété ces paroles avant nous, et que des millions de frères et de sœurs en la foi, qui luttent, prient et pleurent comme nous, les répètent avec nous, pour doubler la joie sainte qui nous anime en ce moment!


Nous ne sommes pas seuls!

Des millions partagent les mêmes convictions,

combattent les mêmes combats,

savourent les mêmes joies

et nourrissent les mêmes espérances que nous.

Et des multitudes qui sont venues avant nous ont vu se réaliser leurs espérances après les avoir affirmées, comme nous affirmons les nôtres en ce jour de fête.


Aussi, c’est parce que ces paroles conviennent parfaitement à l’heureuse occasion qui nous réunit autour de cette table sainte, que je vous invite à les méditer avec moi:


«Il n’y a donc MAINTENANT aucune condamnation

POUR ceux qui sont en Jésus-Christ,

qui marchent, non selon la chair, mais selon l'esprit.»



* * *


I


Il y avait une condamnation sur nous.


Il y avait donc une condamnation qui pesait sur nous?

OUI, notre conscience nous la rappelait à chaque instant, et le spectacle de notre vie confirmait le témoignage de notre conscience.

OUI, et elle était terrible, car l'Écriture sainte en parle toujours de manière à nous faire frémir.

Écoutez plutôt:

«L'Éternel condamnera l'homme qui machine du mal» (Proverbes XII, 2).

«Celui qui n'aura point cru sera condamné» (Marc XVI, 16).

«Celui qui ne croit point est déjà condamné, parce qu'il n'a point cru au Fils unique de Dieu» (Jean III, 18).

«Celui qui me rejette et qui ne reçoit point mes paroles, a son juge; et la parole que j'ai annoncée, c'est elle qui le condamnera au dernier jour» (Jean XII, 48).

«Ceux qui auront fait le mal ressusciteront pour la condamnation» (Jean V, 29).


Voilà en quels termes la parole de Dieu parle de la condamnation qui repose sur tous les pécheurs impénitents.

ET NOUS EN ÉTIONS, un jour, en sorte que cette terrible condamnation pesait sur nous.

Et elle semblait se multiplier, pour ainsi dire, afin de nous frapper dans toutes les parties de notre être et à toutes les époques de notre vie.

Écrite sur tous les feuillets de la Bible, elle nous frappait chaque fois que nous en lisions une portion, nous venons de le voir.

Elle nous frappait dans la conscience par le remords.

Lequel d’entre nous peut se vanter, oserait se vanter, de n’avoir jamais SENTI LES AIGUILLONS DU REMORDS S’ENFONCER DANS SA CONSCIENCE et lui causer, parfois, des souffrances intolérables?


Le remords, ce grand tourmenteur de l’âme pécheresse, empoisonne toutes les joies, aigrit tous les plaisirs, envenime toutes les plaies de l’âme. Personne n’y échappe.

La plupart du temps ce sont ceux mêmes qui le nient le plus énergiquement qui mettent fin à leur vie pour échapper à ses tortures de tous les instants, et lorsque la crainte de la mort et du jugement à venir l’accompagnent, qui décrira le carnaval de tortures et de terreurs qu’il joue dans les replis les plus secrets de l’âme humaine!

Cette condamnation avait fondu sur nous et elle s’acharnait à notre poursuite. Non contente de nous atteindre dans la conscience, elle nous frappait aussi dans notre corps. Sous l’empire de passions irrésistibles, nous cédions aux «convoitises de notre chair, accomplissant les désirs de la chair et de nos pensées; et nous étions par nature des enfants de colère, comme les autres» (Éphésiens II, 3).

Au lieu d’offrir nos corps en sacrifice vivant au Seigneur, nous en faisions le sacrifice au péché. Nos forces se consumaient, notre santé s’affaiblissait, notre corps s’usait dans un service qui nous précipitait au-devant de la mort et du JUGEMENT DERNIER.

Notre corps était condamné et notre terreur croissait! Déjà nous sentions les atteintes de ce ver rongeur qui ne meurt point. La mort nous épouvantait et la vie à venir nous répugnait encore plus que le néant.

Ainsi:

condamnés dans notre corps,

condamnés dans notre âme;

condamnés dans le passé, dans le présent et dans l’avenir;

condamnés dans le ciel comme sur la terre:


Nous étions réellement «SANS DIEU ET SANS ESPÉRANCE»(Éphésiens II, 12).

Malheureusement, le tourbillon des choses humaines nous faisait trop souvent oublier notre lamentable état. Absorbés par les objets et les êtres qui nous environnaient, c’est à peine si nous pouvions d'une fois à autre nous placer en face de la réalité.

Nous étions bien «MORTS DANS NOS FAUTES ET NOS PÉCHÉS(Éphésiens II, 1)» .

Voyez ce prévenu qui se tient à la barre du tribunal qui va le juger. Il est accusé d’un grand crime, mais il nourrit le secret espoir d’être acquitté. Cet espoir le soutient, le stimule, le rend presque gai durant le cours du procès. Enfin le jury se retire pour délibérer. C’est son acquittement ou sa condamnation qu’il va rapporter.

Aussi avec quelle douloureuse anxiété l’accusé attend-il sa rentrée! Le voilà. La foule agitée se calme soudain; le prisonnier fixe un regard inquiet, perçant sur la figure de ces hommes qui ont décidé de son sort.

Par la voix de son chef qui tremble d'émotion, le jury prononce son verdict:


C'est la condamnation!


Pour la première fois le condamné réalise tout ce qu'il y a d'effrayant et de désespérant dans sa situation.

Condamné aux travaux forcés à perpétuité!

Condamné par la justice,

condamné par la foule qui l'abreuve de mépris et le couvre de ses malédictions.

Condamné pour toujours!

Alors, accablé sous le poids de sa condamnation, il fléchit, s'affaisse et s'écrie comme Caïn: «Ma peine est trop grande pour être supportée» (Genèse IV, 13).

Il a enfin compris....


Mes frères, qu'est-ce qu'une pareille condamnation en comparaison de la condamnation ÉTERNELLE qui doit tomber sur ceux qui n'auront point obéi à l'Évangile de notre Seigneur Jésus-Christ?

Une goutte d'eau dans l'océan, une seconde dans l'éternité!

Ceux qui seront frappés de cette terrible condamnation «se tiendront devant Dieu, les livres seront ouverts et ils seront jugés SELON LEURS ŒUVRES.

Comme ils ne seront pas trouvés inscrits au livre de vie, ils seront jetés dans l'étang ardent de feu et de soufre et tourmentés au siècle des siècles» (Apocalypse XX, 12-15, et 10).

Nous étions sous le coup de cette condamnation éternelle sans beaucoup nous en soucier, comme font tous les pécheurs impénitents.

Que dis-je! Par nos paroles et par notre conduite de tous les instants nous aggravions comme à plaisir notre condamnation.

MAINTENANT QUE NOUS VOYONS NOTRE FOLIE et que nous mesurons l'étendue du danger qui nous menaçait, nous frémissons!


* * *


II


Il n'y en a plus.


Pourtant le danger est passé. Il est passé! «Il n'y a maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont en Jésus-Christ, qui marchent, non selon la chair, mais selon l'esprit

Dieu a prononcé notre acquittement, la condamnation est levée; le Seigneur nous a rendu son amour, nous avons repris notre place au foyer paternel, et nous pouvons nous écrier avec une humble, mais ferme assurance:

«Qui accusera les élus de Dieu? Dieu est celui qui les justifie.

Qui les condamnera? Christ est mort, et de plus il est ressuscité, il est même assis à la droite de Dieu, et il intercède aussi pour nous» (Romains VIII, 33, 34).


Le Christ s'est substitué à nous,

il a littéralement pris notre place.


Son obéissance parfaite a effacé notre désobéissance,

son sang nous a purifiés de nos péchés,

ses souffrances expiatoires ont levé la peine de nos péchés qui pesait sur nous,

sa mort nous assure la vie,

sa résurrection est un gage de la nôtre,

son œuvre change notre condamnation en adoption.


Ce n'est pas que le péché ne doive pas être condamné dans le croyant, car l'Écriture enseigne avec une rare vigueur qu'il n'y a point de rémission pour ceux qui disent «PÉCHONS AFIN QUE LA GRÂCE ABONDE;», mais, Jésus ayant porté les péchés du croyant en son corps sur le bois, déclare qu'il n'y a plus de condamnation pour lui s'il se réfugie dans son sein.

Ainsi, frères, grâce à la grande œuvre de substitution du Fils de Dieu fait homme, nous échappons à la peine de nos péchés.

Le remords, ce vengeur de la conscience offensée, cesse de nous tourmenter, et la paix s'établit dans nos cœurs. En sorte que nous pouvons nous écrier avec le barde chrétien:


«Seigneur, quel changement! comme au bruit de l'orage

Succède un calme pur dans un ciel sans nuage,

Mon âme ainsi te doit cette sérénité

Qui répand sur mes jours sa divine clarté!»


Mais, non seulement le remords disparaît, la crainte de la punition dans la vie future s'évanouit aussi, comme un affreux cauchemar aux premiers rayons de l'aurore.

La pensée de la vie à venir nous anime d'une espérance sainte et d'une joie qui grandissent à mesure que nous voyons approcher le jour. Dieu ne nous apparaît plus comme:


«.... un Maître sévère.

Prêt à juger et punir.»


mais comme:

«.... un tendre Père,

Toujours prêt à bénir»!


Ô! qui décrira les célestes joies qui emplissent l’âme du chrétien et les espérances de gloire éternelle qui le font tressaillir alors que, plongeant dans l'avenir, il se mêle aux multitudes rachetées par le sang du Christ et vêtues de longues robes blanches, qui se tiennent devant le trône de Dieu et de l'Agneau. Il se repose des tribulations de la terre avec elles, avec elles il entonne le cantique sacré; avec elles il tressaille d'allégresse! Toutes choses sont faites nouvelles.


Comme l'âme, le corps aussi a été soustrait à la condamnation.

Il est vrai qu'il doit passer par la mort et par le tombeau. Et j'avoue qu'à première vue c'est une terrible condamnation.

Pauvre corps! le voilà tendu sur un lit de souffrances d'où il ne se relèvera jamais. La fièvre le mine, un mal incurable le ronge, une douleur impitoyable lui arrache des plaintes qui transpercent l'âme des bien-aimés qui le soignent et le veillent avec une tendre sollicitude. Il s'amaigrit, se décharne et meurt dans une lente et pénible agonie.

On le rend à la terre qui ouvre son sein pour l'engloutir et se l’assimiler.

Tout est fini!

Pleurez, amis, gémissez en silence vous qui vous sentez atteints dans les sources de la vie. Votre douleur est sans espoir. La condamnation a frappé sa victime, la mort triomphe!

Réjouissez-vous plutôt, car la mort a été détruite par la résurrection du Christ!

Ce corps ressuscitera.

La tombe qui l’enferme et l’étouffe se fendra pour lui livrer passage;

la terre qui l’a reçu comme une proie le rendra comme un dépôt sacré.

Revêtu de gloire et d’immortalité, et paré de lumière, il prendra son essor vers LE CIEL SA VÉRITABLE ET ÉTERNELLE PATRIE, et rentrera en possession de son âme sanctifiée et glorifiée.

Alors tous les cieux s’écrieront avec l’accent du triomphe final:

«Ô mort! ou est ton aiguillon?

Ô enfer! où est ta victoire? . . . .

Grâces soient rendues à Dieu, qui nous a donné la victoire par notre Seigneur Jésus-Christ» (I Corinthiens XV. 55, 57).

Que dirais-je maintenant de la condamnation que fait disparaître la destruction du péché lui-même?

Le Christ en sa mort a détruit le péché lui-même, aussi bien que la peine du péché.

Il est notoire que l'amour du péché n'existe plus dans le cœur du chrétien.

Il le déteste, et ce n'est que malgré lui, comme à son corps défendant, qu'il le commet.

Aussi est-ce à raison que l'apôtre Jean dit avec l'énergie paradoxale qui le caractérise: «Quiconque est né de Dieu, ne commet point le péché il ne peut pécher» (I Jean III, 9).


LE CHRÉTIEN EST MORT AU PÉCHÉ, comme il était mort à Dieu et au bien.

C'est pourquoi Paul a pu dire:

«Demeurerons-nous dans le péché afin que la grâce abonde?

NULLEMENT! Nous qui sommes morts au péché, comment vivrions-nous encore en lui?

En effet, si nous sommes entièrement unis à Christ par une mort semblable à la sienne, nous le serons aussi par une résurrection semblable, sachant que notre vieil homme a été crucifié avec lui, afin que le corps du péché fût détruit, pour que nous ne soyons plus esclaves du péché; car celui qui est mort au péché est libre du péché» (Romains VI, 1-7).


Ainsi, frères bien-aimés, nous sommes libres de toutes les condamnations par celui qui a été condamné à notre place.

Libres de la condamnation à la peine du péché,

libres de l’esclavage du péché,

libres de la condamnation au tombeau.

Enfants de Dieu par la foi en Jésus-Christ, nous avons la paix de l’âme ici-bas et la vie et le bonheur des deux en perspective pour l’éternité.


«Sur cette terre où tu veux que j’habite,

O mon Sauveur! mon Dieu! je suis à toi.

Et dans le ciel, où ta grâce m’invite,

Encore à toi, toujours à toi!»


Que cette douce certitude nous porte à nous réjouir de la joie sainte des enfants de Dieu. En ce jour heureux, OUBLIONS LES CHOSES DE LA TERRE, laissons de côté nos ambitions mondaines, faisons taire nos murmures, ignorons nos misères, nos souffrances et nos infirmités d’un jour, pour nous repaître de notre bonheur.

Enivrons-nous de la douce pensée que nous sommes au Christ, que le Christ est à nous, et que rien dans le ciel ou sur la terre ne pourra jamais nous séparer de l’amour que Dieu nous a témoigné en son Fils Jésus, ou nous ravir la place qu’il nous prépare dans ses tabernacles éternels.

Et que, dans la célébration de cette cène qui nous rappelle d’une manière si vive notre affranchissement du joug de Satan et notre entrée dans le royaume de Dieu, notre communion les uns avec les autres soit sincère et cordiale.

Nous sommes tous frères et sœurs par la même foi et les mêmes espérances, comme nous le sommes par les mêmes chutes et les mêmes afflictions. Aimons-nous donc d’un amour pur, et que nos âmes sanctifiées s’embrasent d’un amour infini pour notre Dieu-Sauveur.

Cependant, que les saintes réjouissances de cette heure ne nous fassent pas oublier le péché qui se tient toujours à la porte.


Il n’y a maintenant aucune condamnation pour nous

À LA CONDITION QUE LE PÉCHÉ NE RECOUVRE PAS SON EMPIRE SUR NOUS;

autrement la condamnation renaîtrait infailliblement.


«Le péché entraîne la mort pour le justifié comme pour le non-justifié.

Il n’y a donc qu’un moyen pour que le péché ne nous fasse pas périr, c’est qu’il périsse lui-même.

LA GRÂCE NE SAUVE PAS EN PATRONNANT LE PÉCHÉ, MAIS EN LE DÉTRUISANT» (Godet).


Faisons donc une guerre incessante au péché qui nous enveloppe si aisément. Et que Dieu nous fasse trouver dans la célébration de la sainte cène une nouvelle mesure de forces, de courage et de persévérance pour que nous puissions lutter sans défaillir dans cette nuit du péché qui nous environne, jusqu’à «l’aurore de ce jour éternel que les insensés appellent la mort!»

Alfred B. Cruchet.






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