Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

SERMON

SUR

LA CONDITION DE L’HOMME ICI-BAS.

***


Note de la bibliothèque «Regard»: nous avons modifié certaines constructions de phrase et changé certains mots afin de rendre le texte plus facile à comprendre.


* * *

Je suis Voyageur (étranger) sur la terre. (Ps. CXIX, 19.)


Mes Frères,

On rapporte d’un Arabe qui s’était logé dans une des Galeries extérieures d’un Palais, qu’essuyant des reproches du Monarque qui y faisait sa demeure et lui reprochait de ce qu’il semblait considérer son Palais comme une hôtellerie publique, il ne lui répondit qu’en lui demandant qui avaient été AVANT lui les Propriétaires et qui en seraient APRÈS lui.

Le Prince lui nomma ses Ancêtres et ses Descendants.

Une Maison, répliqua l’Arabe, une Maison, qui change si souvent de Maître est plutôt une hôtellerie qu'un Palais.


Mes Frères, ne pourrait-on pas faire de ce mot une application fondée à la Terre que nous habitons?

Il y a cent ans que nos Aïeux y séjournèrent comme nous le faisons aujourd’hui. Maintenant il ne reste plus rien d’eux, ici-bas, qu’une cendre inanimée!

Dans moins de cent ans la génération actuelle aura disparu de la surface du globe: une autre y aura pris sa place, et des Révolutions de ce genre s’y perpétueront jusqu’à la consommation (la fin) des Siècles, comme elles s’y sont succédées depuis la Création de ce Monde.

Qu’est-elle donc cette Terre qui change si souvent d’habitants, si ce n’est un lieu de pèlerinage?

Cela posé, sous quel point de vue doit-on envisager ces habitants?

N’est-ce pas sous le même point de vue, sous lequel les anciens Fidèles se représentaient leur état dans ce Monde: Ils faisaient profession, dit Saint Paul, d'être étrangers et voyageurs sur la terre. (Hébr. XI, 13.)

Si la chose pouvait être contestée, il nous serait aisé de trouver, dans les discours et dans la conduite des Patriarches, plus d’une preuve de la vérité de cette assertion de l’Apôtre.

Mais des détails de ce genre nous écarteraient du but particulier que nous nous proposons.

Il nous suffira donc de remarquer que presque partout dans ses Cantiques le Roi Prophète CONSIDÈRE LA VIE HUMAINE COMME UN PÈLERINAGE.

En particulier c’est sous cet emblème qu’il la représente constamment dans le Psaume dont notre texte fait partie; et qu’il ne peut rien y avoir de plus vrai sur ce sujet que la déclaration que ce texte même contient. Je suis, dit David en termes formels, JE SUIS VOYAGEUR SUR LA TERRE.


Chrétiens, mes très Chers Frères, notre condition à tous est EXACTEMENT SEMBLABLE à celle de David.

OUI. Quelle que soit la différence de nos circonstances extérieures:

que nous soyons placés au faîte des Grandeurs, ou que nous coulions nos jours dans la Bassesse:

que nous nagions dans l’Opulence, ou que nous éprouvions les amertumes de la Pauvreté:

il n’en est pas moins certain, que nous n’avons tous qu’une seule et même vocation:


nous n'avons point ici-bas de cité permanente;

nous sommes tous Voyageurs sur la terre.


Qui contestera cette Vérité? Il n’y a que les Ennemis de l’Évangile. . . Que dis-je?

Il n’y a que les Ennemis de toute Religion qui puissent la refuser ou la mettre en doute, mais il faut peu de chose pour dissiper leur impie incertitude!

Dès lors qu’il y a une autre Vie pour laquelle notre existence actuelle nous prépare quelle est la conclusion qui en découle?

C’EST QUE NOTRE CONDITION SUR LA TERRE EST EXACTEMENT CELLE DE VOYAGEURS.

Mais où nous conduit notre pèlerinage?

Vous le savez..., et l’Évangile l’annonce partout!


Ce pèlerinage nous conduit nécessairement,

ou dans le Ciel, ou dans les Enfers.


Le terme de notre course terrestre est la Mort, et après la mort suit un jugement qui décidera irrévocablement du Bonheur ou du Malheur de notre destinée future.

Il est réservé aux hommes de mourir une seule fois, APRÈS QUOI vient le jugement (Hébr. IX, 27. V. S.)

Où est l’homme assez stupide, pour ne pas préférer parvenir à la fin de son Voyage dans un lieu de repos et de félicité plutôt que dans un lieu de tourments et d’infortune?

Où est l’homme assez forcené (fou, insensé), pour renoncer à tout espoir d’être heureux dans le Monde à venir et pour souhaiter que les horreurs de l’Enfer soient à jamais la portion de son héritage?

J’avoue que lorsqu’on fait attention à la conduite des hommes, on ne saurait se dissimuler, qu’il n’y en ait en grand nombre qui agissent sans réfléchir. Ils se séduisent eux-mêmes au moyen de TOUTES LES ILLUSIONS qu’ils se font:

tant sur leur état actuel, que sur une réforme de moeurs, qu’ils projettent pour l’avenir;

tant sur la nature des Conditions du salut, que sur l’étendue de la Bonté Divine.

Ils parviennent à se flatter que, quelque vicieux, quelque corrompus, quelque endurcis, qu’ils soient encore, ils pourront cependant trouver grâce et miséricorde dans la Journée du Seigneur.


Chrétiens....! Une Espérance de ce genre n’est-elle pas la vôtre?

Je n’examinerai point jusqu’où chez plusieurs d’entre vous elle est légitime et fondée, mais du moins puis-je en tirer cette conclusion:

C’est que, si nous nous regardons tous comme VOYAGEURS SUR LA TERRE,

tous aussi NOUS ENVISAGEONS LE CIEL COMME LE LIEU DE NOTRE DESTINATION ÉTERNELLE, COMME NOTRE VÉRITABLE PATRIE.


Heureux, si cette persuasion était chez nous assez vive pour nous engager à régler toujours nos sentiments et notre conduite en conséquence!

C’est pour contribuer à un effet salutaire, que nous nous proposons d’insister, dans ce Discours sur les principaux usages, qui découlent de la Vérité, énoncée dans notre texte.

Si nous sommes Voyageurs sur la terre:

1. Nous devons nous informer soigneusement de la Route qui conduit à notre céleste Patrie.

2. Nous ne devons accorder aux Biens d’une terre, qui n’est pour nous qu’un lieu de passage, qu’un attachement modéré.

3. Nous devons supporter avec patience les Incommodités inévitables de la route.

4. Nous devons toujours nous conduire à l’égard de nos Semblables, comme envers des compagnons de voyage.

5. Enfin. Nous devons voir approcher sans répugnance, et même avec joie, le Terme de notre pèlerinage terrestre.


Mes Frères, suivez-nous dans le développement de ces cinq Conséquences.

Pendant que nous vous exposerons l’influence que la Vérité, dont David fait une profession solennelle, doit avoir sur notre conduite morale, repliez-vous sur vous-mêmes pour décider jusqu’où vous pouvez, sur chacun des Articles que nous vous proposerons, vous considérer comme étant sans reproche.

Dieu veuille, qu’éclairés de plus en plus sur notre état et sur nos obligations, nous laissions là les choses, qui sont en arrière pour nous avancer constamment vers le but de notre Vocation céleste, afin de nous assurer l’entrée de cette Cité dont Dieu est l'Architecte et le Fondateur! Amen!


* * *


I.


PREMIÈRE CONSÉQUENCE.

Si nous sommes Voyageurs sur la terre, nous devons nous informer soigneusement de la Route qui conduit à notre céleste Patrie.

Cette Conséquence est si naturelle mes Frères, que vous regarderiez certainement tous les détails où nous pourrions entrer pour la justifier comme absolument superflus et inutiles.

Qui ne taxerait point de folie, et même de démence, un Voyageur, qui se trouvant dans une terre étrangère, et désirant retourner dans Sa Patrie, négligerait de prendre les précautions requises pour ne pas s’égarer et suivrait au hasard le premier chemin qui s’offrirait à sa vue?

Plût à Dieu qu’à cet égard aussi ne se vérifiât pas trop souvent ce mot du Sauveur: Les Enfants de ce Siècle sont plus prudents dans leur génération, que les Enfants de lumière! (Luc XVI, 8.)

En effet...., sans même parler de tant de Chrétiens qui, dominés par leurs Passions désordonnées, n’ont pour ainsi dire d’autres règles de conduite que LES SUGGESTIONS DE CES CONVOITISES CHARNELLES dont l’Apôtre nous exhorte si fortement à nous en abstenir: (1 Pierre II, 11.) combien n’en est-il pas qui, cherchant avec un certain degré de sincérité à s’instruire de la voie du salut, se font cependant les illusions les plus dangereuses, sur ce qu’ils doivent faire pour y parvenir!

Aveuglés par les préjugés de l’Éducation,

subjugués par l’autorité de leurs Docteurs,

séduits par les maximes relâchées du Monde,

entraînés par l’exemple de la Multitude:


Ils marchent dans des voies qui leur semblent droites,

mais dont la fin est la mort!


Y a-t-il lieu de s’étonner si, après qu’ils se soient égarés dès l’entrée de la carrière, ils s'égarent, pour parler avec un Prophète, d'un égarement continuel? (Jér. VIII, 5.)

Craignons, mes Chers Frères, craignons de nous rendre coupables d’un égarement de ce genre.

Il serait d’autant plus «criminel», qu’il serait absolument volontaire.

OUI. Il dépend de nous de CHOISIR et de SUIVRE, pour parvenir au Salut, UN GUIDE AUSSI ÉCLAIRÉ QUE FIDÈLE.

Ce Guide, c’est ce Dieu même qui a préparé ce Salut pour les Siens; qui, pour en ouvrir l’accès à l’homme déchu, N'A PAS ÉPARGNÉ SON PROPRE FILS et qui, tant par la Raison et la Conscience, que par Sa Parole et Son Esprit, ne cesse de nous adresser cette encourageante invitation:


C'EST ICI LE CHEMIN. MARCHEZ-Y.

(Ésaïe XXX, 21.)


Dieu nous l'adresse cette invitation pour cette Raison qui nous distingue si glorieusement de toutes les autres créatures terrestres, et par laquelle nous sommes en état, non seulement de DISCERNER LE BIEN D’AVEC LE MAL, mais encore de comprendre qu’il y a une relation essentielle et éternelle entre ce Bien et le Bonheur, entre ce Mal et l’Infortune.

Cultivons donc avec soin cette Raison.

Que cet oeil de notre âme soit toujours conservé sans tache.

Efforçons-nous sérieusement d’écarter ou de dissiper les nuages par lesquels les Préjugés et les Passions pourraient l'offusquer.

Mettons notre étude et notre gloire à rapporter à notre perfection morale cette précieuse prérogative, et sentons qu’elle ferait notre opprobre si elle ne nous faisait pas acquiescer en tout temps à cette sentencieuse assertion.


Voilà la crainte du Seigneur est la sagesse,

et se détourner du mal est l'intelligence.

(Job XXVIII, 28.)


C'est ici le chemin: marchez-y.

Dieu nous adresse cette invitation par cette Conscience qui, avec bien plus de promptitude encore que la Raison, nous met devant les yeux les choses qui appartiennent à notre paix.

CETTE CONSCIENCE, même lorsque la Raison est troublée par des Passions qui ne nous offre que de fausses lueurs, NOUS RETRACE SI FORTEMENT NOS DEVOIRS et nous interpelle puissamment, lorsque nous avons eu le malheur de les enfreindre que même la Corruption la plus invétérée ne saurait la réduire pour toujours au silence.

Éclairons donc soigneusement cette Conscience.

Étudions-nous, comme Saint Paul, à la conserver toujours sans reproche, devant Dieu et devant les hommes. (Actes XXIV, 16.)

Que jamais elle ne perde chez nous de sa délicatesse.

Que jamais ses dictamens (ce qui est dicté par la Conscience) ne soient négligés:


que jamais nos coeurs ne s'endurcissent à sa voix;

car la voix d’une Conscience éclairée est la voix de Dieu même.


C'est ici le chemin: marchez-y.

Dieu nous adresse cette invitation par cette Parole qu’il nous a donnée dans Sa Bonté pour suppléer à l’imperfection de nos connaissances naturelles et pour rendre plus sûres les décisions de la Conscience.

Ah! Que l’incrédule audacieux la rejette, la méprise, la tienne pour une chose profane; pour nous, Chrétiens, bénissons le Père des lumières de nous avoir fait connaître dans sa Révélation, non seulement le chemin qui mène à notre céleste Patrie:

mais encore tous les détours, que nous devons éviter,

tous les pièges qui peuvent nous être tendus,

tous les obstacles, que nous pouvons rencontrer,

tous les sacrifices, auxquels nous devons nous résoudre.

Que la lecture de cette Révélation, si propre à donner de l'intelligence aux Simples, et à épurer de plus en plus les connaissances des Sages, soit donc pour nous une occupation journalière, une occupation chérie.

Enquérons-nous diligemment des Écritures.

Méditons avec un esprit humble et soumis, avec un coeur honnête et bon leurs enseignements, tout à la fois lumineux et sublimes.

Que la Parole de Dieu soit pour nous un fanal, que nous ne perdions jamais de vue, et convaincus avec David que:


Bienheureux sont ceux, qui marchent en la loi de l'Éternel.


Adoptons avec lui et justifions toujours notre conduite par ce langage.


Ô Dieu! l'entrée de Tes Paroles illumine.

Ta Parole est une lampe à mes pieds et une lumière à mes sentiers.

Tes Témoignages sont mes plaisirs et les gens de mon conseil!

(Psaume CXIX, 1, 130, 105, 24.)


C'est ici le chemin: marchez-y.

Dieu nous adresse enfin cette invitation par cet Esprit qu'Il répand avec tant d’abondance sur ceux qui, ayant besoin de Sagesse, la Lui demandent AVEC FOI, et mettent constamment à profit toutes les bénédictions spirituelles qu’il leur a déjà départies.

Ne cessons donc point de fléchir les genoux devant le Père de notre Seigneur Jésus-Christ, afin que, selon les richesses de Sa grâce, Il nous donne de connaître avec tous les Saints, quelle est l'espérance de notre vocation.

Soyons attentifs à tous les bons mouvements que Sa Grâce excite dans nos âmes en Lui présentant chaque jour cette belle prière du Psalmiste:

Éternel! Enseigne-moi à faire ta volonté! Car tu es mon Dieu. Que ton bon esprit me conduise sur la voie droite! (Psaume CXLIII, 10. V. S.)

Montrons, par notre docilité à suivre en tout temps et sans délai ses inspirations sanctifiantes, que la Requête de nos lèvres EST l’expression fidèle du voeu de nos Coeurs. C’est ainsi, mes Frères, qu’à l’instar des anciens Israélites que guidait au milieu d’incultes déserts, UN SYMBOLE AUGUSTE DE LA PRÉSENCE DIVINE, nous pouvons, en nous proposant toujours l'Éternel devant nous, nous assurer le Privilège de L’avoir pour Conducteur dans notre Pèlerinage terrestre.

OUI...! ô Homme! ô Chrétien:


Reconnais-le dans toutes tes voies,

ET IL APLANIRA TES SENTIERS.

(Prov. III, 6. V. S.)


* * *


II.


SECONDE CONSÉQUENCE.

Si nous sommes Voyageurs sur la terre, nous ne devons accorder qu'un attachement modéré aux Biens d'une terre qui n'est pour nous qu'un lieu de passage.

Durant leur séjour dans ce Monde les hommes peuvent obtenir la possession de certains Biens temporels qui mettent ceux qui en jouissent à même de se procurer des plaisirs ou des aisances.

D'autres en sont naturellement privés par la Providence qui n’a pas jugé à propos de départir ces Biens dans une aussi grande mesure.

La Santé, la bonne Renommée, les Richesses, les Dignités du siècle, les Charmes de l’Amitié; voilà des Biens de ce genre... dont certains sont bien nantis et d'autres plus ou moins privés.

Ce ne serait pas juste vis-à-vis de la Morale, de vous les représenter comme entièrement indignes de nos soins.

Mais jusqu’où peut-on porter la recherche de ces Biens?

Quelle est la mesure d'attachement qu’il est raisonnable, de leur accorder?

Ce sont là certainement des Questions auxquelles nous avons tous le plus grand intérêt et, Grâces à Dieu, il ne faut, ni des connaissances supérieures, ni des efforts de méditation pour y répondre puisque la Vérité que notre texte renferme fournit à ces Questions la Réponse la plus juste et tout à la fois la plus aisée à saisir.

OUI. La mesure d'attachement que nous pouvons, et que nous devons accorder aux Biens de la terre est exactement semblable à celle qu’un sage Voyageur accorde à CERTAINES COMMODITÉS, à CERTAINS AGRÉMENTS, qu’il trouve sur sa route.

Il n’est pas assez ennemi de lui-même pour les rejeter avec dédain s’il peut en jouir SANS PRÉJUDICIER AU GRAND BUT QU’IL SE PROPOSE.


Ce but est de parvenir de la manière la plus sûre et là plus prompte au terme de son Pèlerinage.

C’est à ce but capital qu’il rapporte toutes ses démarches et, par cela même, il dédaignera toute aisance, tout plaisir, qui pourrait mettre obstacle à son heureuse arrivée au lieu de sa destination.

Imitons, mes Chers Frères, la conduite de ce sage Voyageur.


ÉTRANGERS SUR LA TERRE,

NOUS FAISONS PROFESSION DE TENDRE À NOTRE CÉLESTE PATRIE.


Il ne doit donc y avoir pour nous qu'une seule chose nécessaire (Luc X, 42.): c’est de nous en assurer l’entrée.

C’est là qu'est notre trésor, c’est aussi là que doit être notre coeur. (Matth. VI, 21.)

Je l’avoue. Ni la Sagesse, ni la Religion, ne nous défendent d'user de ce monde, de jouir dans un esprit de modération et de reconnaissance des plaisirs qu’il peut nous offrir, de rechercher même jusqu'à un certain, point ses avantages lorsqu’ils n’ont rien de «criminel» en eux-mêmes.

Mais la Sagesse et la «Religion» nous défendent:

non seulement de ne point préférer ces choses visibles, qui ne sont que pour un temps, aux choses invisibles, qui sont éternelles;

non seulement de ne jamais nous permettre, soit pour les acquérir, soit pour les conserver, des pratiques contraires à ce qu’exigent notre Conscience, notre Devoir et notre Salut.

Elles nous défendent encore de nous former des idées exagérées de l’influence que les Biens de la terre peuvent avoir sur notre véritable félicité.

Elles nous défendent de les regarder, comme tellement essentiels à cette félicité que nous nous persuadions qu’il ne saurait y avoir pour nous de bonheur si Dieu ne juge pas à propos de nous les accorder ou qu’après nous en avoir fait jouir durant quelque temps IL JUGE CONVENABLE DE NOUS EN PRIVER.

Des Sentiments de ce genre et combien de fois, hélas! nos discours et nos actions ne témoignent-ils pas ici contre nous?

Des sentiments de ce genre montreraient évidemment que nous nous faisons des illusions sur la nature de notre condition ici-bas et, en nous détournant de la voie Royale ou en y arrêtant à chaque instant nos pas mal assurés, ils nous prépareraient, à coup sûr, les plus amers regrets pour l’avenir.


En effet, mes Frères, sous quel point de vue envisagerons-nous cet attachement excessif pour quelque Bien terrestre que ce soit, lorsque l’heure approchera où nous quitterons pour jamais le lieu de notre exil?

Alors, après avoir recueilli la tempête, pour n’avoir semé que du Vent, ne gémirons-nous pas d'avoir préféré si souvent les oignons empoisonnés d’une Égypte cruelle (Nomb. XI, 5.) aux fruits vivifiants de notre céleste Canaan?

Si nous sommes assez malheureux pour persister dans notre aveuglement jusqu'à notre dernier soupir, qu’il sera terrible le moment, où nos yeux dessillés nous découvriront toutes les horreurs de l’abîme, dans lequel cet amour du Monde, qui est inimitié contre Dieu, (Jacques IV, 4.) nous aura précipités!

Nous sommes Voyageurs sur la terre.

Persuadons-nous donc fortement, que ses douceurs ne sont des Biens pour nous que lorsque par elles nous nous frayons le chemin à des avantages plus précieux!

Que, loin d’être des Biens, elles se changent pour nous en Maux réels lorsque la MANIÈRE DONT NOUS NOUS LES PROCURONS ou celle dont nous en jouissons met obstacle à notre entrée dans la Sion d’en-haut.

Cherchons donc toujours, selon le précepte exprès du Sauveur:

CHERCHONS PREMIÈREMENT LE ROYAUME DE DIEU ET SA JUSTICE, et nous n’accorderons aux autres choses qu’un attachement secondaire, convaincus qu’elles peuvent, il est vrai, nous procurer quelque satisfaction passagère, mais jamais — non jamais — le véritable Bonheur.


* * *


III


TROISIÈME CONSÉQUENCE.

Si nous sommes Voyageurs sur la terre, nous devons supporter avec patience les Incommodités inévitables de la route.

Ramenant cette définition à la réalité, vous sentez mes Frères, que par ces Incommodités nous avons dessein de désigner ces Désagréments, ces Chagrins et ces Maux auxquels nous sommes sans cesse exposés pendant notre séjour en ce Monde.

Est-il en effet un seul âge de la Vie, où l’homme en soit exempt?

Ouvre-t-il les yeux à la lumière, il les ouvre pour répandre des larmes et ses premiers accents sont des cris de douleur.

Augure trop fidèle des larmes qu’il versera, des cris qu’il poussera, dans les différentes périodes de son existence terrestre! Ah! sans cesse et toujours:

Combien de Job, couverts de douloureuses plaies!

Combien d’Ezéchia, languissants dans des lits d’infirmité!

Combien de Paul, priant avec instance le Seigneur d’être délivré de douloureuses échardes!

Combien de Lasare, réduits à mendier un pain, qu’ils trempent dans leurs pleurs!

Combien de Joseph, persécutés par l’envie, ou calomniés par le vice!

Combien de David, abandonnés de leurs proches et de leurs amis au jour de la détresse!

Combien de Naomi, pleurant avec amertume la perte de ceux dont la tendresse faisait le bonheur de leurs jours!

Combien de Jacob et de Rachel qui refusent d’être consolés parce que leurs Enfants ne sont plut! . .

Mais comment achever l’énumération de toutes les afflictions qui sont le partage inséparable de l’humanité et dont il n’y a ni rang, ni naissance, ni vocation, ni opulence, ni gloire, qui puissent nous préserver.

Une Voix dit, CRIE; et QUE CRIERAI-JE? Ah! sans être Prophète, ni fils de Prophète, je puis vous annoncer à tous des croix et des tribulations! Dussiez-vous ne voir dans votre situation actuelle que des présages propices d’une situation plus fortunée pour la suite, je n’en suis pas moins fondé à vous adresser ce mot du Sauveur à ses Apôtres,


Vous aurez des tribulations dans le monde...

(Jean XVI, 33. V. S.)

Et s’il en est ainsi mes Frères, s’il est vrai, comme l’affirme Eliphaz, que l'homme naît pour être travaillé, comme l'étincelle pour s'élever en l'air, (Job V, 7.) n’est-il pas de la dernière évidence qu’il doit CONSTAMMENT SE TENIR EN GARDE entre les impressions trop fortes que pourraient faire sur lui les maux qui lui tombent en partage?

Non qu’avec de soi-disant Philosophes, tant anciens que modernes, nous veuillons préconiser une Insensibilité fastueuse et mensongère. Une Insensibilité de ce genre répugnerait à notre devoir quand même elle n’anéantirait pas notre nature.

Mais nous laisser tellement abattre par nos maux au point que nous nous mettions hors d’état de remplir les obligations auxquelles notre Vocation terrestre et notre Vocation céleste nous appellent;

Défaillir entièrement dans notre courage, lorsque nous essuyons les calamités de la Vie.

Nous plaindre en temps et hors temps et d’une manière exagérée, de la rigueur de notre sort.

Taxer, du moins indirectement, les Voies du Dieu Fort de n'être pas bien réglées à notre égard.

Surtout chercher à alléger nos souffrances, ou à nous en délivrer par des moyens que la Conscience réprouve que la «Religion» condamne:


C’est là pousser à l’excès la sensibilité aux maux de ce Monde.


Quel est le Voyageur qui n’endure pas avec constance les désagréments, les fatigues d’une route qu’il sait le conduire dans ce lieu de repos et de félicité dont il fait l’objet de ses ardents désirs?


CHRÉTIENS...,

NOUS, NOUS SOMMES VOYAGEURS

VERS UNE ÉTERNITÉ BIENHEUREUSE.


Encore un peu de temps et arrivés dans notre céleste Patrie, nous n’aurons plus ni faim, ni soif, ni peines, ni douleurs!

Encore un peu de temps et ces tentes de Méschec et de Kédar feront place à cette nouvelle Jérusalem où recueillis dans le sein d'Abraham ou plutôt dans le sein de ce Jésus qui par son sang, nous en a ouvert l’entrée, nous nous reposerons à jamais de nos travaux!

Une persuasion de ce genre ne nous inspirera-t-elle pas en tout temps un courage supérieur à l’impression, que peuvent faire sur nous des souffrances passagères?

Et à quel degré ne porterons-nous pas ce courage religieux, si nous pensons, que dans les vues de notre Père céleste ces souffrances sons destinées à nous faciliter le chemin du Ciel et, qu'une fois endurées DANS DES DISPOSITIONS CONVENABLES, elles contribueront même à augmenter notre éternelle béatitude.

Alors, pourquoi notre âme s’abattait-elle?

Pourquoi nos mains deviendraient-elles lâches ou nos genoux tremblants?

Alors la Sérénité de notre esprit et la Tranquillité de notre coeur ne seraient-elles pas à l’épreuve des plus navrantes catastrophes?

Alors nous glorifiant, comme Saint Paul, même dans nos tribulations, ne serons-nous pas en droit de nous écrier avec lui: Je suis affligé; mais non pas accablé; comme attristé, et toutefois toujours serein; comme n'ayant rien, et toutefois possédant toutes choses; comme mourant, et toutefois je vis; et je vis joyeux en espérance! (Rom. V, 3; 2 Corinth. 9-10.)



* * *


IV


QUATRIÈME CONSÉQUENCE.

Si nous sommes Voyageurs sur la terre, nous devons toujours nous conduire à l'égard de nos Semblables, comme envers des Compagnons de voyage.

Mes Frères, chacun de nous se regarde comme étant Voyageur vers le Ciel, et ne serait-ce pas sous le même aspect que nous considérerions ceux, qui ont avec nous une même vocation?

S’il en est, qui malheureusement marchent encore à travers champs, ne nourririons-nous pas, au fond de nos coeurs, la douce espérance que le Dieu de toute grâce daignera encore éclairer leur esprit et sanctifier leur coeur, en sorte que se détournant de leur mauvais train, avant que les choses, qui appartiennent à leur paix, soient pour jamais cachées à leurs yeux, ils puissent avoir part avec nous à l'Héritage des Saints dans la lumière.

Chrétiens! Si nous nous pénétrons vivement de cette idée, comment pourrons-nous concevoir et nourrir envers nos Compagnons de service des sentiments d’orgueil ou de haine?

Quoi? Nous pourrions nous croire plus excellents qu’eux parce que pendant les quatre jours, que nous séjournons ensemble dans une terre étrangère, nous jouissons d’un peu plus de considération ou d’aisance, tandis que dans notre céleste Patrie ils seront peut-être rendus à jamais possesseurs d’un degré de gloire et de bonheur, supérieur à celui, qui nous y échoira en partage?

Quoi? Nous pourrions les haïr, les outrager, les calomnier, les rendre malheureux dans ce Monde autant que nous l'avons été tandis que, dans quelques jours peut-être, nous nous trouverons réunis dans la Maison de notre Père commun pour y participer au siècle des siècles à une même félicité?

Au faîte même de l’Opulence ou des Grandeurs nous ne nous arrogerons point une supériorité injuste sur nos Concitoyens éternels; nous ne traiterons jamais comme des Ennemis ceux en qui nous souhaitons, en qui nous espérons de trouver des Amis qui nous recevront ou que nous accueillerons nous-mêmes dans ces Régions fortunées de l'Éternité ou cette Charité qui demeure à toujours sera, dans le sens le plus sublime, le lien de la perfection. (Col. III, 14.)


Surtout, mes Chers Frères, ni nous regardons nos Semblables, comme créés avec nous pour une Immortalité bienheureuse, quelle sainte horreur n’aurons-nous pas pour tout ce qui pourrait contribuer à leur en fermer l’accès?

Et avec quel zèle ne saisirons-nous pas plutôt toutes les occasions, propres à les conduire ou à les affermir dans les voies de cette Sanctification, sans laquelle nul ne verra le Seigneur? (Hébr. XII, 14.)

Malheur! Oui, Malheur à ces hommes pervers qui ne respectent – POUR SATISFAIRE LEURS PASSIONS EFFRÉNÉES – ne respectent ni l'Honneur, ni la Vertu, ni le Salut, cherchent, parce que l'art infernal de séduire, de suborner et de corrompre peut offrir de moyens, à les jeter ou à les retenir dans les sentiers de l’opprobre, du Vice et de la perdition!


Mes Frères, si la Justice humaine, si l’Exécration (la répulsion) publique ne poursuivent pas toujours ceux qui se rendent coupables «d’attentats» de ce genre; — ceux-là mêmes qui portent le «crime» et l’impudence (l'effronterie) jusqu’à s’en glorifier ouvertement:

ils n’échapperont pas à une Justice, infiniment plus sévère, à une Malédiction, mille fois plus redoutable..., vils Suppôts de Satan!


Mes Frères, si la langue m’avait fourni des termes plus propres à exprimer tout à la fois le mépris et l’horreur, je les aurais employés.

OUI. Vils Suppôts de Satan, s’ils se sont montrés ici-bas TENTATEURS, SÉDUCTEURS! Comme lui, ils éprouveront AVEC lui, durant toutes les Périodes d’une épouvantable éternité, combien:


C’EST UNE CHOSE TERRIBLE,

QUE DE TOMBER ENTRE LES MAINS DU DIEU VIVANT!

(Hébr. X, 31.)


Ah! Chrétiens! Que la grâce de Dieu nous préserve d’être jamais de pareils émissaires du Prince des ténèbres; — ou qu’elle nous fasse pleurer — et pleurer avec des larmes de Sang, le malheur d’en avoir grossi le nombre!

Tous ensemble, regardons toujours comme notre gloire, non moins que notre devoir, d’être ici-bas les Gardiens de nos Frères.

Montrons-nous attentifs, industrieux, ardents à coopérer, autant qu’il dépend de nous, au salut de tous ceux, sur qui nous pouvons avoir quelque influence.

Et quel aiguillon puissant ne nous offre pas l’idée de nous assurer des droits à leur Reconnaissance éternelle!

OUI. Réunis avec nous dans la Sion céleste, ils nous béniront d’avoir été dans la main de Dieu des Instruments pour leur faire commencer ou achever sur la terre leur sanctification dans la crainte du Seigneur.

Modérez donc, ou plutôt sanctifiez vos regrets et vos larmes, ô Vous, à qui une Mort inexorable a enlevé des Enfants, des Proches, des Amis, au Salut desquels vous avez contribué par vos leçons, vos conseils, votre exemple. — Là, où ils sont maintenant, ils rendent grâces à leur Dieu et à votre Dieu d’avoir eu le Bonheur de vous appartenir dans ce Monde. — Là, où ils sont maintenant, ils s'égayent dans le Seigneur en pensant à la période fortunée qui vous réunira avec eux pour jamais.


Et Vous pleureriez sur leur tombe

comme ceux qui n'ont point d'espérance!


* * *


V.


Enfin, mes Frères, si nous sommes Voyageurs sur ta terre, nous devons voir approcher sans répugnance et même avec joie le Terme de notre pèlerinage.

Si nous avons pour l’ordinaire tant d’attachement pour notre Patrie terrestre; si, quand nous en sommes éloignés des mouvements secrets nous y rappellent sans cesse; si même elle paye notre attachement d’indifférence ou d’ingratitude, nous n’en sommes pas moins disposés quelquefois à le manifester par les plus coûteux Sacrifices:

Quel pouvoir ne devrait pas avoir sur nous l’amour si fondé de notre Patrie céleste!

Étrangers en Babylone les Juifs ne cessaient de se ressouvenir avec attendrissement de Sion:

Si je t’oublie, Jérusalem, Que ma droite m’oublie! Que ma langue s’attache à mon palais, Si je ne me souviens de toi, Si je ne fais de Jérusalem Le principal sujet de ma joie! (Psaume CXXXVII, 5-6. V. S.)


Et Nous, mes Frères; nous, qui avons dans les Cieux notre droit de Bourgeoisie, nous déshonorerions-nous par un oubli, qui nous rendrait indignes de cette Prérogative?

POUR PEU QUE NOUS EN DISCERNIONS LE PRIX, sera-ce avec tristesse, avec effroi, que nous verrons approcher le moment, qui va nous en mettre en possession pour jamais?

Ô Terre, où nous fûmes assujettis à tant d’infirmités corporelles et à tant de douloureuses souffrances;

Ô Terre, où des travaux pénibles et assidus ne nous procurèrent si souvent d’autre fruit que le triste regret d’avoir usé nos forces pour le néant;

Ô Terre, où le chagrin, l’ennui, le dégoût, nous firent dire tant de fois le matin: Qui nous donnera de voir le soir! et le soir: Qui nous donnera de voir le matin?

Ô Terre, où l’envie, la haine et l'injustice nous livrèrent continuellement de si cruels combats; et où les relations les plus intimes et les plus tendres ne furent que trop fréquemment les sources des chagrins les plus sensibles et les plus navrants;

Ô Terre, où les tentations au péché naquirent presque partout sous nos pas et où de flétrissantes chutes ne justifièrent que trop à notre égard ce mot du Sauveur: l'Esprit est prompt, mais la chair est faible. (Matth. XXVI, 41.)

Ô Terre, où un Tempérament rebelle, un Esprit rempli de ténèbres, un Coeur inconstant et trompeur, un Monde séducteur et perfide, nous mirent plus d’une fois à deux doigts de notre perte éternelle;

Ô Terre, Terre, dont même les douceurs et les avantages portent l'empreinte sinistre de la malédiction qu’attira sur toi la chute de tes premiers Habitants; — redouterions-nous l’instant fortuné où en terminant sur ton sol impur et ingrat notre course incertaine, nous qui serons transportés dans cette Cité de Dieu, dont les choses les plus magnifiques nous ont été dites!

Là nous ne serons plus tourmentés par cette soif de bonheur, que rien ici-bas ne pouvait satisfaire!

Là nous ne serons plus exposés à ces besoins, à ces maux, qui remplirent si souvent nos jours d’amertume?

Là nous n’aurons plus à déplorer ces effets de notre fragilité, ces restes de notre corruption naturelle et acquise, qui nous firent verser de si douloureuses larmes!

Là, associés aux millions de ces Rachetés de toute langue et tribu qui nous auront précédés, accompagnés, ou suivis dans la carrière du Salut, nous partagerons au siècle des siècles avec eux les occupations béatifiantes des Anges et des Séraphins!

Là, contemplant des yeux de la chair le Rédempteur de nos âmes, nous recevrons éternellement de sa plénitude grâce pour grâce!

Là, en un mot, la Béatitude, dont notre union ineffable avec le Dieu bienheureux sera le principe, croîtra comme la clarté de l'aurore, jusqu'à ce que le Jour du salut soit en sa perfection.

Ou plutôt la Perfection de ce Jour de salut consistera dans une progression illimitée de félicité SANS QUE JAMAIS NOTRE CAPACITÉ D’ÊTRE HEUREUX TROUVE DES LIMITES.

Puisque nous avons de telles promesses, considérerions-nous encore avec douleur, avec crainte, la révolution, les changements qui doivent se faire en nous pour que nous puissions en recueillir les effets?

Précédés de l’Arche de l'Alliance, les Israélites passèrent avec intrépidité le Jourdain, et arrivés en Canaan ils y élevèrent un monument solennel de leur allégresse et de leur reconnaissance.

Chrétiens! Les eaux profondes de la vallée de l'ombre de la mort nous séparent encore de notre Terre promise.

Entrons dans ces eaux avec courage, ayant les yeux fixés, sur l'Ange de l'Alliance qui, en les traversant avant nous et pour nous, nous y a frayé un chemin.

Une fois parvenus sur les rives de notre Canaan céleste nous érigerons nos coeurs — nos coeurs brûlants de gratitude et inondés de joie — nous les érigerons en Autels à la Gloire d’un Dieu Rédempteur.

Ah! Lassés, et tant de fois découragés de ne rencontrer partout dans cette vallée de misères, que peines, obstacles, dangers, combats ou sacrifices, étendons avec confiance nos regards sur cette Patrie céleste, dont une mort bienheureuse nous ouvre l’accès.

Si les Années qui s’accumulent sur nos têtes;

si le Dépérissement de notre tente d’argile;

si les Infirmités et les Douleurs d’un corps fragile et caduc;

si la Brièveté et l’Incertitude de la Vie;

si nos Compagnons de Voyage, nos Proches, nos Amis, nos Enfants, terminant leur course, souvent au plus beau de leurs jours, nous crient qu’il n'y a plus peut-être qu'un pas entre eux et la mort, pourquoi nous laisserions-nous aller à un lâche et dangereux abattement?

Réjouissons-nous plutôt à cause de ceux qui nous disent: Vous avez marché dans la carrière qui vous était prescrite ici-bas.


VOUS ALLEZ ENTRER POUR JAMAIS

DANS LE REPOS, DESTINÉ AU PEUPLE DE DIEU.


Ou si ce Dieu Tout sage et Tout bon juge plus convenable à Sa Gloire et à notre Salut de prolonger encore le temps de notre épreuve, que chaque nouveau délai, en embrasant nos désirs, excite dans nos coeurs une sainte impatience!

Faisons seulement une chose, mes Chers Frères, et faisons-la tous les jours de notre vie:


Que notre conversation sur la terre soit déjà celle de Bourgeois du Ciel.


Renouvelons-en le voeu solennel chaque matin, avant de nous livrer à nos occupations ou à nos plaisirs; et chaque soir, avant de nous abandonner au sommeil, interrogeons-nous nous-mêmes sérieusement, et comme en la Présence du Scrutateur des coeurs et des reins, sur la manière, dont nous aurons rempli cet engagement.

Par là nous ferons dans la Sanctification les plus rapides progrès.

Par là, supérieurs en tout temps à cette crainte de la mort, qui tient les Mondains en servitude, NOTRE DÉSIR TENDRA TOUJOURS À DÉLOGER POUR ÊTRE AVEC CHRIST.

L’Heure solennelle sonne où ce désir va être rempli.

Les Anges, entourant notre lit de mort se disposent à transporter dans les Régions de la Vie NOS ÂMES, RACHETÉES PAR LE SANG DE JÉSUS ET SANCTIFIÉES PAR L’ESPRIT DE GRÂCE.

Et nos lèvres défaillantes balbutient avec ravissement cet Hymne triomphal:


Portes de ma Patrie céleste, élevez vos linteaux!

Portes éternelles, haussez vous!

car

un Enfant de la gloire entrera!
 AMEN!

(d'après le Psaume XXIV, 7.)



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