Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

JÉSUS-CHRIST DANS GETHSEMANÉ.

***

Alors Jésus s'en alla avec eux dans un lieu appelé Gethsemané, et il dit à ses disciples: Asseyez-vous ici, pendant que je ni en irai là pour prier. Et ayant pris avec lui Pierre et les deux fils de Zébédée, il commença à être fort triste et dans une amère douleur. Et il leur dit:

Mon âme est saisie de tristesse jusqu'à la mort; demeurez ici et veillez avec moi. Et étant allé un peu plus avant, il se jeta le visage contre terre, priant et disant: Mon Père, que cette coupe passe loin de moi, s'il est possible!

Toutefois, qu’il en soit, non comme je le voudrais, mais comme tu le veux.

Puis il vint vers ses disciples et les trouva endormis; et il dit à Pierre: Est-il possible que vous n'ayez pu veiller une heure avec moi? (St. Matthieu XXVI, 36-40.)

On ne peut lire ce récit de l’agonie de Christ dans Gethsemané, sans une émotion profonde.

Il a un tel accent de vérité; il a tant de majesté et de grandeur; on y trouve un si profond sentiment de douleur, exprimé avec tant d’énergie, de dignité et de résignation; les couleurs de ce tableau sont si sombres et si mystérieuses, que l’âme, transportée au milieu de cette scène lugubre et recueillie en elle-même, éprouve des impressions que nul autre événement ne saurait lui faire ressentir au même point.

Quand celui dont nous parle l’Évangéliste, serait un des pauvres enfants d’Adam; quand il serait un étranger, avec qui nous n’eussions aucune relation; quand nous ne saurions pas que c’est à cause de nous qu’il a enduré de si grandes souffrances que c’est pour nous qu'il a été navré et froissé, ses cruelles angoisses suffiraient pour émouvoir notre cœur.

Quels ne doivent donc pas être nos sentiments, si nous pensons à la dignité, à l’infinie grandeur, à la parfaite sainteté de la victime; si nous nous rappelons que nous, pécheurs, NOUS SOMMES LES ARTISANS DE SON SUPPLICE; et si nous entrons dans les vues de Celui qui, du haut du trône de l’Éternel, s’est abaissé aussi profondément, s’est anéanti lui-même!

Mais ce n’est pas seulement une émotion passagère que je voudrais exciter en vous; il y a dans ce grand événement de quoi faire sur nous une impression ineffaçable; il y a de quoi nous réveiller pour toujours à salut:


jamais la terre étonnée n’avait vu un pareil spectacle;

jamais le ciel, dans toute sa gloire, ne reverra rien de semblable.


Méditons sur ces premières circonstances de la Passion de celui qui nous a aimés et qui s’est livré pour nous.

Je fixerai d’abord votre attention sur la grandeur des souffrances de Jésus-Christ en Gethsemané; ensuite, sur quelques-unes des importantes leçons qui en découlent.

Souffrir est dans la destinée de l’homme ici-bas; le péché l’a assujetti à une foule de maux, et a changé pour lui le paradis terrestre en une vallée de larmes et de misères:

mais quant au Fils bien-aimé de Dieu, souffrir n’était pas dans sa nature; jusqu’au moment de sa venue sur la terre, il avait joui, dans le royaume de Dieu, d’une félicité sans bornes.

Pour nous faire une idée de ce qu’il endura à Gethsemané, ce n’est pas assez de peser sa douleur à la balance de nos propres douleurs; il faut OPPOSER les souffrances qui furent son partage ici-bas, au bonheur dont il jouissait dans le ciel.

Avant de voir en lui le rejeté et le méprisé des hommes, il faut voir en lui l’objet des adorations des anges.

Avant de le voir dans Gethsemané, il faut le voir dans le sein de son Père, ayant en partage un bonheur qu'aucune parole ne peut décrire et dont l’homme ne peut se faire nulle idée.

Avant de le voir lorsqu’il n’avait pas un lieu où reposer sa tête, il faut le voir dans le séjour de la gloire.

Avant de le voir portant sa croix, il faut le voir soutenant toutes choses par sa parole puissante.

Quand nous serons parvenus à concevoir quelque chose de la majesté ineffable dont Christ jouissait avant les siècles, comme l’unique issu du Père; quand nous l’aurons contemplé des yeux de la foi habitant d’éternité en éternité cette cité du Dieu vivant dont la douleur n’approcha jamais, et goûtant une félicité sans mélange et sans limites, nous serons préparés à comprendre ce que dut éprouver le Fils de Dieu, quand il revêtit notre nature et vécut parmi les hommes.

Mais c’est surtout dans sa passion que nous reconnaissons sans cesse en lui l’homme de douleurs.

Sachant que son heure approche, l’heure pour laquelle il est descendu d’en haut; abattu, soit par la perspective du supplice, soit par le poids de la justice divine qui commence à s’appesantir sur lui, Jésus vient se livrer dans le jardin de Gethsemané au recueillement dont il sent le besoin.

À peine y est-il entré, qu’il s’éloigne de la plupart de ses disciples, prenant cependant avec lui, pour pénétrer dans cet asile solitaire, Pierre et les deux fils de Zébédée; et dans cette précaution de Jésus, qui ordinairement se retirait seul dans les lieux déserts pour prier, je vois une sorte de révélation des souffrances nouvelles et mystérieuses qui l’attendent, et contre lesquelles il veut réunir tout ce qui peut fortifier et consoler son âme.

Alors, dit l’Écriture, il commença à être fort triste et dans une amère douleur. Ses disciples bien-aimés voient l’angoisse qui l'accable; bientôt ils apprennent de la bouche même de leur Maître, combien il souffre.

Lui qui, jusqu’alors, s’était montré si peu sensible à ses propres maux, ne peut plus cacher ce qu’il éprouve.

Sa peine est si grande qu’il sent le besoin de la communiquer à ceux qu’il aime. Mon âme, dit-il, est de toutes parts saisie de tristesse jusqu’à la mort.

Quelles paroles!

Quelle profonde souffrance elles expriment!

Quelle idée terrible elles nous donnent de la sentence qui s’exécute sur Jésus!

Quelle inconcevable douleur que celle qui arrache de semblables expressions à Celui qui est la splendeur de la gloire de Dieu et l'image empreinte de sa personne!

Demeurez ici, ajouta-t-il, et veillez avec moi. Il lui semble que ce sera un adoucissement aux tourments qu’il endure; mais bientôt, il sent que ce n’est pas auprès des hommes qu’il faut chercher des forces.

Étant allé un peu plus avant, il se jeta le visage contre terre, priant et disant: Mon Père, que cette coupe passe loin de moi, s’il est possible!

Paroles mémorables, qui achèvent de donner des souffrances de Christ l’idée la plus effrayante!

Il est descendu d’en haut pour endurer ces souffrances;

il a consenti à être fait malédiction pour nous;

il a voulu être immolé pour la rémission des péchés;

il a tout prévu, tout accepté d’avance;

il vient pour tout accomplir; et cependant, il éprouve un instant le désir d’être délivré de ce fardeau dont il a voulu se charger.

Cette coupe est remplie de tant d’amertume, et ce supplice mystérieux est si déchirant, que l’âme de Christ, inébranlable en toute autre occasion, en est un instant ébranlée; tant le poids du péché est accablant! tant le rachat des âmes est cher! TANT IL EST TERRIBLE DE TOMBER ENTRE LES MAINS DE LA JUSTICE DIVINE!

Après sa prière, pendant laquelle sa sueur avait été comme des grumeaux de sang découlant en terre, Jésus se relève, et s’approche de ses disciples: mais un nouveau trait perce son cœur; il les trouve endormis.

Est-il possible, leur dit-il, que vous n'ayez pu veiller une heure avec moi?

Combien, dans un pareil moment, une telle indifférence dut être douloureuse pour lui!

Transportez-vous par la pensée aux époques les plus tristes de votre existence, où votre âme, accablée par la perte de ceux qui vous étaient chers, ou par des revers de fortune, ou par une maladie longue et dangereuse, avait un pressant besoin des consolations de l’amitié, des soins de la tendresse; et demandez-vous ce que vous auriez éprouvé, si ceux sur l’affection desquels vous comptiez s’étaient montrés alors d’une insensibilité profonde; si, dans l’agonie de la douleur, vous n’aviez rencontré autour de vous que les regards d’une froide insouciance?

Il est toujours triste d’être délaissé quand on souffre; mais être délaissé par ceux qu’on aime, par ceux qu’on a choisis pour ses amis, par ceux qu’on a bénis des plus précieuses bénédictions, par ceux sur lesquels on a acquis les droits les plus sacrés; être abandonné par eux quand on a le plus grand besoin de leur attachement; les trouver insouciants quand on va mourir pour eux, n’est-ce pas le comble de l’infortune?

Jugez donc de ce que dut ajouter aux souffrances de Jésus la conduite de ses disciples bien-aimés.

Ah! celui-là seul qui a bu jusqu’à la lie dans cette coupe, en connaît toute l’amertume; mais quoique l’idée que nous nous en formons soit bien imparfaite, elle suffit pour faire sortir ce cri du fond de nos cœurs:


Battu de Dieu, délaissé par ceux qu’il aimait,

jamais il n’y a eu de douleur comparable à sa douleur.


Arrêtons-nous ici, mes frères: sans aller plus avant dans l’histoire de la Passion, recueillons-nous pour méditer sur le lugubre spectacle que nous venons de contempler par la foi. Au milieu de ces inconcevables souffrances, dont nous ne pouvons lire le récit sans une émotion profonde, Jésus nous parle; écoutons ce grand Rédempteur.

Il me semble entendre sortir de Gethsemané UNE VOIX QUI APPELLE À LA REPENTANCE et à une grande humiliation tous les pauvres enfants d’Adam.

Les souffrances que Jésus y endure sont une révélation frappante de la nature du Très-Haut, et de l’état de l’homme pécheur.

Dieu y manifeste le bras de sa sainteté , et il publie la paix et le salut;

l’homme y découvre son état de condamnation et de mort.

Pourquoi, en effet, Christ est-il en proie à cette agonie déchirante, dont on n’aperçoit aucune cause extérieure?

Qu’est-ce donc qui abat si profondément celui qu’Ésaïe appelle l'Admirable, le Conseiller, le Dieu fort et puissant, le Père d'éternité, le Prince de la paix?

RÉPONDEZ,

vous qui n’avez point compris quel outrage le péché fait à Dieu;

vous qui ne croyez pas que la sentence prononcée contre la transgression de la loi divine, soit tombée sur Christ;

vous qui n’admettez pas la nécessité d’une grande et solennelle expiation du péché pour la réconciliation du pécheur avec Dieu.

RÉPONDEZ,

vous qui regardez bien Jésus comme un docteur de morale et sa vie comme l’exemple de toutes les vertus, mais qui ne regardez pas ses souffrances comme un acte de propitiation.

RÉPONDEZ,

vous qui ne voyez dans la mort de Christ autre chose que la mort d’un martyr scellant de son sang la vérité de sa mission et de sa doctrine.

D’où vient que la perspective de la mort abat ainsi son âme, et qu’il n’est pas capable, comme tant de martyrs le furent, d’entonner, au sein de la douleur, l’hymne de joie et d’espérance qu’on entendit souvent sortir du milieu des flammes qui dévoraient les confesseurs de son nom?

L’âme de Christ Serait-elle moins ferme que l'âme de ses disciples?

Et lui qui leur donna si souvent de supporter, avec tant de calme et de courage, des supplices ignominieux et cruels, ne saurait-il triompher lui-même de la douleur?

Si la justice divine ne frappait pas alors le Sauveur, s’il ne portait pas déjà alors la peine de nos iniquités, à quoi faut-il attribuer ces souffrances extraordinaires?

Où est l’instrument de son supplice?

Où est le fer qui le transperce?

Où est la main qui le frappe?

Tout est tranquille, tout est calme, dans cette retraite où Jésus s’est rendu avec ses disciples chéris; et cependant son âme y est saisie de tristesse jusqu'à la mort.

Ah! cette agonie est inexplicable pour quiconque ne veut pas voir en Jésus-Christ le représentant d’une race déchue et coupable, devant la majesté d’un Dieu infiniment juste et infiniment saint; pour quiconque ne croit pas que l'Éternel a fait venir sur lui l'iniquité de nous tous.

Chrétien! tu es le seul qui puisse soulever ce voile mystérieux, comprendre ce qui se passe dans Gethsemané, et rendre raison de ce supplice invisible qui accable le Christ.

Dans ces souffrances de ton Rédempteur pour l’expiation du péché, non seulement Dieu manifeste sa miséricorde; mais il proclame avec force sa parfaite sainteté, et son inflexible justice; il déclare qu’il a les yeux trop purs pour voir le mal; que le péché lui est en abomination; qu’il est déterminé à le punir; et que c’est une chose terrible que d’avoir à porter le poids des justes jugements prononcés contre toute espèce de souillure.

Ô pécheur! toi pour qui Jésus a tant souffert, envisage, si tu le peux, tes transgressions avec indifférence. À la vue du Fils de Dieu prosterné la face contre terre, sous le poids du péché:

crois, si tu l’oses,

que Dieu ne prendra pas garde à tes transgressions;

que tu n’es guère coupable devant lui;

que tu peux fonder sur tes vertus, tes espérances de salut;

qu’en demeurant dans l’impénitence, tu échapperas aux jugements du Seigneur:

crois, si tu l’oses,

que Dieu est un Dieu indulgent envers les pécheurs qui persévèrent à l’offenser;

que ce même Dieu qui a navré son Bien-aimé pour tes forfaits, et qui l’a froissé pour tes iniquités, laissera impunies des fautes dont, malgré les leçons de sa parole et le secours de son Esprit, tu ne le seras pas repenti, et tu n’auras pas secoué le joug.

Ou plutôt:

vois tes fautes, tes propres fautes, vois ta tiédeur, ton orgueil, ta sensualité, ton égoïsme, ton indifférence pour Dieu et pour ton prochain;

vois tes désobéissances de tout genre, non pas comme un monde ennemi de Dieu et de ton salut voudrait le les représenter, car le monde ne sera pas ton juge;

MAIS VOIS TES FAUTES SOUS CET ASPECT ODIEUX QUE LEUR DONNENT LES ANGOISSES DE JÉSUS EN GETHSEMANÉ.

C’est là que le Dieu juste Juge prononçait une première sentence contre le péché.

Apprend donc, ô homme! à connaître le Dieu dont tu dépends, et dans les mains duquel tu tomberas au sortir de cette vie d’épreuve.

En le voyant déployer sur son propre Fils toute la rigueur de ses jugements, que les larmes d’une sincère contrition coulent de tes yeux; qu’aucune de tes transgressions ne te paraisse sans conséquence: puisqu’elles ont précipité ton Rédempteur dans cet abîme de misère, elles ne peuvent pas être peu de chose aux yeux de Dieu, ni sans danger pour toi.

Réveille-toi donc pour vivre saintement! Dieu ne peut être moqué.


Le péché puni si sévèrement dans la victime innocente et sans tache,

pourrait-il demeurer impuni dans l’homme qui,

par son impénitence, aura foulé aux pieds le Fils de Dieu?


Chrétien! ne perds jamais de vue cette grande leçon.

Quand tu te sentiras près d’oublier tes résolutions, de céder à l’ennemi de ton âme; quand l’amour du bien s’affaiblira dans ton cœur, transporte-toi, par la foi, au milieu de cette scène de douleur; contemple, en esprit, l'Agneau de Dieu, qui ôte les péchés du monde; vois-le abattu sous le poids de la sentence qui pèse sur sa tête innocente; écoute les accents déchirants qui sortent de sa bouche adorable; médite fréquemment sur ses souffrances afin que cette méditation t’inspire l’horreur du mal.

Les saintes leçons de Gethsemané sont trop importantes pour qu’il soit permis de les perdre jamais de vue; si tu les oublies, tu redeviens léger et insouciant sur tes fautes; et par ton cœur impénitent tu t'amasses des trésors de colère pour le jour de la colère:


SI TU LES OUBLIES,

TU LE PERDS.


Mais les souffrances du Sauveur en Gethsemané ne nous donnent pas seulement une leçon de repentir et d’humiliation devant Dieu, elles sont encore une exhortation solennelle à aimer de toute notre âme celui qui est entré, pour l’amour de nous, dans cette carrière de douleur.

Pauvres pécheurs que nous sommes, que deviendrions-nous, qu’aurions-nous à attendre, pendant les longs jours de l’éternité sans le sacrifice de ce Prince de la paix, qui a opéré la grande oeuvre de notre réconciliation avec le Saint des Saints?

Cette tristesse jusqu'à la mort, cette sueur découlant en terre comme des grumeaux de sang, sont pour nous des titres de gloire et de salut.

Christ s'est fait pauvre pour nous, afin que par sa pauvreté nous fussions rendus riches; il s’est humilié aussi profondément, afin de nous élever jusqu’au trône de Dieu et jusqu’à la félicité éternelle.

Oh! mes frères, de quel abîme il nous a tirés, et dans quelle profondeur de misère il est venu nous chercher, pour nous faire obtenir cet héritage incorruptible qui ne peut ni se souiller, ni se flétrir, et qui est réservé dans les cieux pour nous!

N'aimerons-nous pas de toute notre âme le grand Rédempteur qui nous a fait passer de la mort à la vie, de la malédiction à la bénédiction?

N’y a-t-il rien dans l’état déplorable dont il nous a tirés, rien dans la félicité glorieuse qu’il nous a acquise, qui puisse déposer dans notre âme un germe impérissable de gratitude? Par quel plus grand bienfait Dieu pouvait-il demander le don de notre cœur?

Si vous ne croyez pas encore au Rédempteur, si vous n’avez pas encore découvert l’état de condamnation dans lequel vous êtes naturellement devant Dieu, pensez-vous que vos doutes puissent rien changer à votre profonde misère et qu’elle soit moins réelle, moins grande, PARCE QUE VOUS NE VOULEZ PAS LA VOIR; ou pensez-vous que vos doutes puissent rendre moins certain, ou moins précieux le salut que le Fils bien-aimé du Très-Haut nous offre?

Non, mes frères; votre manière de voir à cet égard, ne peut rien changer à ce qui est.

Vous pouvez bien, par votre insouciance religieuse, par votre orgueil spirituel, ou par votre incrédulité, rendre inutile pour vous tout ce que Christ a souffert; vous pouvez faire de votre titre à l’immortalité bienheureuse, votre titre à une plus terrible condamnation; vous pouvez vous perdre: mais il n’en est pas moins vrai que le salut vous est annoncé, que Christ l’a mis à votre portée; et que vous devez, dès là, à ce grand Rédempteur toute la reconnaissance dont vous êtes capables.

Mais Jésus-Christ sollicite le don de notre cœur, non seulement par les biens inappréciables auxquels ses souffrances nous donnent des titres, mais encore par l’amour infini qu’il nous a témoigné, en se soumettant pour nous à de semblables souffrances.

S’il est quelque chose qui puisse faire naître l’amour dans notre âme, c’est l’amour qu’on nous témoigne; c’est là une loi de notre nature morale, dont nous faisons l’expérience dans toutes nos relations avec nos frères.

PLUS NOUS SOMMES AIMÉS, PLUS NOUS DEVONS AIMER À NOTRE TOUR, plus notre coeur trouve doux et facile d’aimer.

Ainsi, plus la charité de Jésus paraît dans ce qu’il a entrepris et souffert pour nous, plus nous lui devons une profonde gratitude.

Et quelle charité, que celle qui le porta à échanger pour un temps les joies du ciel, contre les douleurs de Gethsemané et le supplice de la croix!

Dans un pareil sacrifice, il y a un prodige de dévouement incompréhensible pour des âmes comme les nôtres.

Qui peut, ici-bas le sentir assez profondément?

Pesez la charité de Christ à la balance de vos propres sentiments; comparez l’amour qu’il vous a montré avec les plus vifs témoignages d’affection que se soient jamais donnés les hommes entre eux, en est-il que vous osiez, un seul instant, mettre à côté de la charité de Jésus?

Où trouverez-vous un si profond abaissement, au renoncement aussi parfait, un oubli aussi entier de soi-même?

Et tout cela, pour des êtres qui en étaient profondément indignes et qui n’avaient en eux-mêmes que leur misère pour exciter les bontés du Seigneur!

Pécheur! qui n’as pas cru, n'y aurait-il rien dans un pareil amour, qui dissipât les doutes de ton esprit, et étouffât les révoltes de ton orgueilleuse raison contre l’éternelle vérité?

Si ton âme n’est pas immortelle; si tu n’es pas menacé de la condamnation; si Dieu n’est pas descendu d’en haut pour t’y soustraire; si ce n’est pas lui qui était en Gethsemané; s’il n’était pas en Christ réconciliant le monde avec soi, à quelle source avait-il donc puisé cette charité toute divine, que rien n’arrête, que rien ne ralentit, et qui va de sacrifices en sacrifices?

Un pareil amour n’est point né sur la terre; il est tout céleste: il n’est point de ce monde; il est d’en haut!

Vois si tu veux y croire, et te dévouer à Celui qui t’a tant aimé. Il ne te sera point donné de plus grand témoignage d’amour; si celui-là ne te satisfait pas, s’il ne te révèle pas ton Dieu, rien ne te le révélera.

Pécheur qui n’es point touché de la charité de Christ; qui, tout en professant de croire en Jésus, mérites encore l’anathème prononcé contre celui, qui n’aime point le Rédempteur, entre dans Gethsemané; perce les ombres de la nuit qui enveloppent la victime; entends les gémissements qui s’échappent de son âme; contemple sa mystérieuse agonie; mesure à la grandeur de ses souffrances la grandeur de son amour!

RAPPELLE-TOI QU’IL SOUFFRE POUR TON SALUT; que son angoisse est la délivrance.

Ouvre les yeux sur ta profonde misère; elle n’est pas si cachée que tu ne puisses la découvrir.

Supplie ton Dieu qu’il te donne d’ajouter foi à tout ce que son Fils bien-aimé a fait pour t’en tirer.

Crois à son œuvre d’amour; qu’elle soit ton unique espérance.

Crois, non seulement afin de pouvoir être pardonné, mais afin de pouvoir aimer. On n’a point cru, si l’on n’aime point; on n’a point cru, si l’on oublie habituellement la charité de Christ, et si l’on ne se dévoue point à lui.

Un enfant n’a point compris la tendresse de sa mère, s’il ne l’aime pas; ni un ami l’affection de son ami, s’il n'y répond pas.

De stériles protestations d’amour filial ou d’amitié, ne sont rien pour payer un attachement véritable et prouvé par des sacrifices; nous n’acceptons pas de nos frères de vains simulacres d’affection, au lieu de sentiments réels. Et, soyez-en sûrs:


Christ ne nous reconnaît pour ses disciples,

qu’autant que nous lui donnons notre cœur.


Il ne nous admettra en sa présence que si nous l’avons aimé par-dessus tout.

Il ne couronnera JAMAIS l’ingratitude, l’oubli de ses bienfaits, la persévérance dans une criminelle tiédeur.

Sans un amour vrai pour Celui qui nous a tant aimés, nous n’avons de chrétien que le nom. Le moment viendra, il est bien près pour quelques-uns de nous, où cet amour deviendra notre seule espérance.

Puissions-nous y songer tandis qu’il en est temps encore!

Amen.


 

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