LA PIOCHE ET LA TRUELLE

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LA TENTATION

Alors Jésus fut emmené par l'Esprit dans le désert pour y être tenté par le diable. (Mat. 4, 1)

Faut-il qu’il soit fort, Satan, pour oser s’attaquer au Fils de Dieu!

Combien cette assurance représente-t-elle de victoires remportées sur l’homme?

Quel orgueil effroyable!

Quelle puissance plus terrible encore!

C’est au moment même où Jésus sort des eaux du baptême que Satan entame la lutte avec lui, c’est-à-dire quand Jésus, au terme de son développement physique et moral, vient de recevoir l’approbation de Dieu et l’hommage du prophète.

Le ciel s’est ouvert sur sa tête, et l’on a entendu descendre des profondeurs des nuées la grande voix de Dieu qui disait: «C’est ici mon Fils bien-aimé en qui j’ai mis toute mon affection.»

Jean-Baptiste a désigné Jésus à la multitude comme lui étant supérieur:

«C’est moi qui aurais besoin d’être baptisé par Toi,» lui dit-il. C’est donc contre le Fils de Dieu dans le plein épanouissement de sa puissance spirituelle que le Diable affronte la lutte et ne désespère pas de vaincre.

Ce seul fait en dit long sur les chutes de l’homme.

Qui a pu résister à Satan de tous ceux qui ont eu une chair semblable à la nôtre? Aucun.

Tous, tant qu’ils étaient, il les a attaqués et terrassés.

Il n’y a pas un juste, dit la Bible, pas même un seul.

Les plus grands serviteurs de Dieu ont des taches dans leur vie; on peut reprocher à Moïse son impatience, à Élie son découragement, à l’un ce péché, à l’autre cette faiblesse; David, Abraham, les meilleurs ont leurs fautes; ils ont été victimes des séductions de Satan.

Personne ne lui a su résister.

Il est le Maître du monde.

«Le diable le mena sur une haute montagne et lui montra tous les royaumes du monde et leur gloire et lui dit: Je te les donnerai, si te prosternant, tu m’adores.»

Je te les donnerai! Ils sont à lui! Il n’y a pas une âme, dans ces millions d’hommes, qui ne soit soumise à son empire!


Le pouvoir de Satan est terrifiant, dès qu’on s’y arrête un instant.

Il a l’habileté d’un être qui connaît absolument toutes les faiblesses du cœur de l’homme, toutes les tentations qui doivent le faire tomber: qui a derrière lui des milliers et des milliers d’années d’expérience; qui a des ruses à l’usage des enfants, des ruses à l’usage des jeunes gens, d’autres pour les hommes faits, d’autres pour les vieillards.

C’est un vieux général qui a assiégé plusieurs milliards de places fortes et qui a su s’emparer de toutes. Comment voulez-vous que nous espérions lui échapper?

Jésus, lui, a résisté!

«Alors le diable le laissa.»

Satan a donc enfin trouvé son Maître! Pour la première fois il s’est heurté à plus fort que lui. C’est en fait maintenant, IL CÉDERA TOUJOURS LA PLACE À CELUI QUI L’A VAINCU.

Voyez la fin du chapitre.

On apporte à Jésus des malades, des gens atteints de divers maux, des démoniaques, des lunatiques, des paralytiques. Il les guérit. Jésus en rencontre tous les jours, des démons: ils crient de terreur à son approche. «Ah! Ah! disent-ils, qu’y a-t-il entre toi et nous, Jésus Nazaréen? Es-tu venu pour nous perdre?» Ils l'implorent, ils le supplient de ne pas leur faire de mal: «Es-tu venu pour nous tourmenter avant le temps?»

Dans l’Évangile de saint Luc, les apôtres à leur tour, sont enthousiasmés d’avoir reçu le don de chasser les démons, et Jésus lui-même s’écrie dans le transport de sa joie: «Je voyais Satan tomber du ciel comme un éclair!»

Avant Gethsémané, le diable renouvela l’assaut. Peine perdue. Vaincu une première fois par Jésus, il l’est définitivement. «Il vient, disait Jésus à ses disciples, mais il n’a rien en moi.»

Voilà ce qui nous rassure:

«RÉSISTEZ AU DIABLE, a dit saint Jacques, ET IL S’ENFUIRA DE VOUS.»

Oui, avec l’Esprit de Jésus-Christ, nous lui résisterons. Avec nos seules forces humaines, non.

Pour résister à des forces surnaturelles comme celles de Satan, il nous faut des forces surnaturelles plus grandes, celles de Jésus; il n’y a pas à sortir de là.

En dehors de Jésus, nous sommes destinés à rester les jouets de Satan;

MAIS

avec Jésus, nous sommes appelés à devenir les triomphateurs de Satan.

Samuel Vincent.

La pioche et la truelle N° 69 (1898)