Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

LA MOISSON

OU

MÉDITATION SUR LA PARABOLE DE L’IVRAIE.

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Lire: Matth. XIII. 24-30.

En parcourant les belles campagnes dont le Créateur s’est plus à orner notre Canton, j’admirais dans un pieux recueillement la diversité des objets qui s’offraient à moi; les bois, les prairies émaillées de fleurs, les vignobles arrosés si souvent de la sueur de l’homme.

La vue de ces diverses portions du tableau qui était devant mes yeux, me faisait remonter par la pensée, à cette Providence dont la bonté est inépuisable. Mais l’aspect des champs couverts d’épis abondants, attira surtout mes regards.

À cette époque de l'année, les laboureurs s’empressent déjà de recueillir le fruit de leurs travaux:

HEUREUX ceux qui, en rassemblant dans leurs greniers les produits de la terre, reconnaissent quelle est la main puissante qui les leur envoie!

HEUREUX ceux qui s'empressent d’en faire part à leurs frères dans le besoin, pénétrés d’amour envers ce Dieu bon qui, avec ces biens terrestres, leur en a donné de plus excellents, savoir, la foi en son Évangile, la paix et le salut éternel!


Comme de tels tableaux sont propres à faire naître de saintes réflexions dans une âme qui se plaît à tout rapporter à son Dieu!

N’est-ce pas ainsi que nous devons contempler les merveilles de la nature?

Bornerions-nous notre vue à ces objets matériels, quelque beaux qu’ils soient en eux-mêmes?

N’élèverions-nous pas nos regards vers Celui qui donne à tous la vie, le mouvement et l'être. (Act, XVII. 28.)


Lorsque l’orage grondait sur nos têtes il y a peu de temps encore, et qu’il semblait prêt à dévaster ces mêmes campagnes, le fidèle se rappelait avec une pieuse sérénité, ces paroles du Psalmiste: La voix de l'Éternel est sur les eaux, le Dieu glorieux fait tonner, l'Éternel est sur les grandes eaux. (Ps. XXIX. 3.)

(Le 20 mai 1827 – en une heure ou deux il tomba tant d'eau sur Genève, que des murs furent abattus, des ponts emportés, des voitures renversées, des personnes sur le point d'être noyées. Eh bien, aux jours du déluge, des orages de ce genre vinrent sur la terre pendant quarante jours et quarante nuits....)

Dans ces instants où les éléments semblent déclarer la guerre à l’homme, les enfants de Dieu n’oublient pas que tout procède de ce Père qui les aime, qui les a reçus en grâce, et qui veille sur eux pour les protéger et pour les bénir.


C’EST À CELUI QUI EST SANS ESPÉRANCE ET SANS DIEU DANS LE MONDE, (Eph. II. 12.) à trembler au fracas du tonnerre et à la lueur des éclairs; un instant peut l’amener au pied du redoutable Tribunal!

Mais en tout temps, l’heureux Chrétien auquel Jésus a dit: Va-t-en en paix, ta foi t'a sauvé, (Marc V. 34) éprouve cette douce paix que Christ seul peut donner; (Jean XIV. 27.) car il sait que si cette demeure terrestre est détruite, il a dans le ciel un édifice qui vient de Dieu, une maison éternelle qui n'a point été faite par la main des hommes. (2 Cor. V. 1.)

Quand Dieu n’ouvre la main que pour bénir la terre, ses vrais enfants, tout en lui rendant leurs sincères actions de grâce, se plaisent à voir dans les scènes offertes à leurs regards, les grandes vérités du salut que l’Écriture Sainte nous représente sous tant d’images différentes.

Le tableau de la moisson que j’avais sous les yeux, me rappela la parabole de l'ivraie et du bon grain.

Je pris le Livre Saint et je fus frappé plus que jamais de la justesse et de la force des images que cette similitude nous présente.

Voici les pensées auxquelles je me livrai, en nourrissant alors mon âme de cette Parole divine.

Matth. XIII. 24: Jésus leur proposa une autre similitude, en disant: Le Royaume des deux est semblable à un homme qui avait semé de la bonne semence en son champ.

Jésus-Christ venait de faire comprendre à ses disciples, par la parabole du semeur, combien il arrive souvent que la Parole du Royaume de Dieu (v. 19.) est prêchée en vain.

Ici il leur apprend, sous la figure de ce qui se passe à la moisson, quels sont les grands évènements qui auront lieu au jour solennel des rétributions.

C’est dans son champ, c’est à dire, dans le monde, que le Fils de l'homme a semé la bonne semence, savoir les enfants du Royaume, (v. 37. 38.) les élus de Dieu, ses saints et ses bien-aimés. (Col. III. 12.)

C’est Lui qui les a engendrés par son divin Esprit, qui les a fait naître de nouveau (Jean III. 3.) pour avoir part à sa félicité et à sa gloire.

Tout comme ces grains de blé ont été jetés dans ces sillons, de même le Seigneur a placé ici-bas ceux qu’il a rachetés de la malédiction du péché. Il veut que ses enfants parcourent cette vallée d’épreuves où ils ne sont que voyageurs et étrangers; (1 Pierre II, 11.) mais Il connaît ceux qui sont à Lui, puisque c’est Lui qui les a sauvés au prix de son propre sang.


Ô mon âme! qui sais par le témoignage de Dieu Lui-même que tu peux L’appeler ton Père, (Rom. VIII. 15.) tu es placée dans le champ du Seigneur; attends patiemment le moment où Celui qui t’y a appelée accomplira envers toi ses promesses.

Mais si tu crois fermement ton Dieu, tu sens aussi que tout ce que tu as vient de Lui: Qu’as-tu que tu ne l’aies reçu, et si tu l’as reçu, pourquoi t’en glorifierais-tu?

Regarde donc toujours à ce Sauveur par lequel tu as la vie.

Tu subsistes par la foi, ne t’élève donc pas par l’orgueil, mais crains. Considère la bonté et la sévérité de Dieu; sa sévérité à l’égard de ceux qui sont tombés, et sa bonté envers toi; autrement tu seras aussi retranché. (Rom. XI. 20-22.)

Veille donc et prie, de peur que tu ne tombes en tentation. (Matth. XXVI. 41.)

Dans le champ du Seigneur croissent une multitude d’épis que le maître de la moisson rassemblera un jour dans son grenier. Ah! si toutes les plantes qu'il y a dans le champ étaient de cette bonne semence que le père de famille a semée! Mais Jésus nous dit qu’avec là bonne semence il y a de l’ivraie.


v. 25: Pendant que les hommes dormaient, son ennemi vint, qui sema de l’ivraie parmi le blé et s’en alla.

L’ivraie ce sont les enfants du malin; l’ennemi qui l’a semée c’est le Diable, (v. 38. 39.)

C’est bien là qu’on reconnaît l’ennemi du genre humain, celui qui fut meurtrier dès le commencement. (Jean VIII. 44) Il tient sous son cruel empire TOUS CEUX QUI FERMENT LEURS YEUX À LA LUMIÈRE DE CHRIST.

Puisqu'il tourne autour des fidèles comme un lion rugissant, cherchant qui il pourra dévorer, (1 Pier. V. 8.) dans quels liens étroits n’enchaîne-t-il pas les infortunés qui préfèrent suivre sa voix plutôt que celle du Sauveur qui les appelle?

C’est cet ennemi terrible qui séduisit nos premiers parents et qui attira sur leurs descendants le courroux du Très-Haut.

Jésus dont la puissance était infinie, même dans le temps où il habitait sur cette terre, permit que Satan le conduisit dans le désert pour le tenter, (Matth. IV.) et là cet adorable Sauveur résista à toutes ses séductions.

Ne nous apprend-il pas ainsi que puisque le prince du péché a osé tenter le Maître, il essayera aussi de porter ses mains sur les disciples?

Non seulement le diable règne avec puissance sur ceux qui sont ses serviteurs et ses enfants, mais encore, il les envoie parmi les brebis du Seigneur comme des loups ravissants.

Il sème l'ivraie parmi le bon grain, et s'en va.

Il se tient caché dans l’ombre; on ne voit pas ses ruses et ses efforts; s’il est appelé le Prince des ténèbres, c’est parce que les ténèbres sont son empire.

Ceux qui sont armés du bouclier de la foi peuvent éteindre tous les traits enflammés du malin; (Ephés. VI. 16.) mais qu’elles sont terribles les armes dont il se sert, pour tous ceux qui ne sont pas unis à Jésus par la foi! Avec quelle adresse il se sert de toutes leurs passions et de toute la corruption de leur cœur pour les perdre de plus en plus!

Comme il sait bien les éblouir et les tromper! Combien on voit d’infortunés qui, séduits par ses artifices, se laissent conduire dans le chemin qui mène à l’abîme des douleurs!


v. 26. Et après que la semence eut poussé et qu'elle eut produit du fruit, l’ivraie parut aussi.

Il y a quelques mois qu’on ne savait pas distinguer dans nos champs le bon grain du mauvais; ils étaient confondus dans les mêmes sillons; les uns et les autres élevaient leurs tiges et préparaient en silence leurs fruits; et maintenant qu’ils ont poussé et que les épis ont paru, on voit quelle est l’ivraie et quel est le bon grain.

Il en est de même dans le champ du Seigneur:

c’est lorsque les fidèles et les enfants du Malin montrent leurs fruits, qu’on sait les connaître.

Vous les reconnaîtrez à leurs fruits, a dit Jésus. (Matth. VII. 16.)


L’enfant du royaume montre sa foi par ses œuvres; il brille comme un flambeau au milieu de la race perverse; il est comme une ville située sur une haute montagne. (Matth. V. 14. 15.)

Les fruits de l’Esprit qui est en lui, se manifestent au grand jour; car il n'a point honte de l'Évangile de Christ.

Sa charité, sa joie, sa paix, sa patience, sa douceur, sa bonté, sa fidélité, sa bénignité, sa tempérance, (Gal, V. 22.) sont la livrée à laquelle on reconnaît qu'il appartient au Royaume de Dieu; c'est par là qu’on le distingue des enfants de ténèbres.

Ceux-ci se montrent aussi par leurs fruits.

Leur gosier est un sépulcre ouvert,

ils se servent de leur langue pour tromper.

Ils n’ont pas connu le chemin de la paix.

La crainte de Dieu n’est point devant leurs yeux. (Rom. III. 13-18.)

Leur haine pour les enfants de Dieu, leur mépris de sa Parole sainte, leur opiniâtreté à fermer leur cœur aux appels de la grâce, leur persévérance à faire le mal, tels sont les fruits des esclaves du péché.


C’est vers le temps de la moisson que le blé atteint son degré de maturité: Les rosées abondantes durant la nuit, les chaleurs actives du soleil pendant le jour, et de temps en temps des pluies fécondes, contribuent ensemble à hâter le moment où l'agriculteur verra ses espérances remplies.

Ah! puissé-je aussi avancer de plus en plus dans la carrière du salut, à mesure que j’approche de l’éternité!

Puisse mon amour pour mon Dieu devenir toujours plus vif, ma foi toujours plus active, et mes désirs vers ma céleste patrie s’accroître de jour en jour, jusqu’à ce que je sois parvenu à l’état d'homme fait et à la mesure de la stature parfaite de Christ! (Eph. IV. 3.)


v. 27.28: Alors les serviteurs du père de famille lui vinrent dire; Seigneur, n'as-tu pas semé de la bonne semence dans ton champ? D’où vient donc qu’il y a de l’ivraie?

Mais il leur dit: C’est un ennemi qui a fait cela. Et les serviteurs lui répondirent: Veux-tu donc que nous allions la cueillir?

À la vue de l'ivraie qu’il y a dans le champ du Seigneur, nous lui faisons quelquefois dans nos cœurs la même question. Peut-être, hélas! qu’il nous est souvent arrivé de lui dire, dans notre criminelle impatience, comme Jaques et Jean à l'égard des Samaritains: Seigneur, veux-tu que nous disions que le feu du Ciel descende sur eux et qu’il les consume? (Luc IX. 54.)

Nous ne savons alors de quel esprit nous sommes animés! car le Fils de l’homme n'est pas venu pour faire périr les hommes, mais pour les sauver. (Luc IX. 55. 56.)


v, 29: Et il leur dit: Non, de peur qu’il n'arrive qu'en cueillant l’ivraie vous n’arrachiez le froment en même temps.

Ce n'est pas sur cette terre que la distinction complète du froment et de l’ivraie aura lieu. Dieu ne donne pas à des hommes le pouvoir de séparer entièrement l’un d’avec l’autre. Aussi le Maître dit à ses serviteurs;


v. 30: Laissez-les croître tous deux ensemble jusqu'à la moisson, et dans le temps de la moisson, je dirai aux moissonneurs: Arrachez premièrement l'ivraie, et liez-là en faisceaux pour la brûler, mais amassez le froment dans mon grenier.

Laissez arriver le fidèle et l’infidèle jusqu’au terme assigné par le Tout-Puissant:

Que celui qui est injuste, soit encore injuste;

que celui qui est souillé, se souille encore

que celui qui est juste, devienne encore plus juste;

et que celui qui est saint, se sanctifie encore davantage.

Or voici, je vais venir bientôt, et j’apporte mon salaire avec moi, pour rendre à chacun selon ses œuvres. (Apoc. XXII. 11, 12.)


Bientôt nous serons emportés comme cette paille légère qui tombe sous la faucille du moissonneur; toute chair est comme l’herbe, et toute gloire de l’homme comme la fleur de l’herbe; l’herbe sèche et sa fleur tombe. (1. Pierre I. 24)

Encore un peu de temps et nous suivrons dans le sépulcre les générations qui nous y ont précédés.

Voyez ces épis, comme ils tombent l’un après l’autre sous les efforts du moissonneur! Aucun n’échappe à la faux qui les poursuit; les gros et les petits, ceux d'ivraie et ceux de froment, TOUS SONT COUPÉS!

Que cette image peint avec force la mortalité qui atteint les enfants d'Adam! Riches, pauvres, justes et méchants, TOUS SONT ABATTUS ET DESCENDENT DANS LA TOMBE.

Tous y demeureront jusqu'au grand jour où les Cieux passeront avec le bruit d'une effroyable tempête, où les éléments embrasés seront dissous, et où la terre sera entièrement brûlée avec tout ce qu’elle contient. (2. Pierre III. 10.)

C’est alors que le Fils de Dieu paraîtra dans toute sa gloire, et qu’il séparera pour toujours l’ivraie et le froment. Comme on ramasse l’ivraie, et qu’on la brûle au jeu, il en sera de même à la fin du monde. Le Fils de l’homme enverra ses anges qui ôteront de son Royaume tous ceux qui sont une occasion de chute et ceux qui font des oeuvres d’iniquité. (Matth. XIII. 40. 41.)

Ce sera alors que se fera cette grande et solennelle moisson, dont celle qui frappe actuellement mes regards dans nos riantes campagnes est une image pour le fidèle.


Tout comme l’agriculteur amasse le froment dans son grenier et lie en faisceaux l’ivraie pour la brûler,

ainsi les justes seront recueillis dans le ciel, et ils luiront comme le soleil, dans le Royaume de leur Père; (v. 43.)

tandis que les enfants du Malin seront jetés dans la fournaise ardente, où il y aura des pleurs et des grincements de dents. (v. 42.)

Jour terrible, jour de lamentations pour tous ceux qui n’auront pas écouté la voix du Bon Berger!

Mais jour de joie et de félicité pour les enfants du Royaume dont les noms sont inscrits dans le Livre de vie!


Ô enfants de Dieu, réjouissez-vous et tressaillez d’allégresse;

car le Seigneur viendra bientôt;

il vous a lui-même préparé la place;

encore un peu de temps, et ses promesses de félicité seront accomplies.

Amen!





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