Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

LA PAIX

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SERMON


sur ces paroles:

HEUREUX CEUX QUI PROCURENT LA PAIX, CAR ILS
SERONT APPELÉS ENFANTS DE DIEU.

(Matth. V, 9.)


On recommande à l'appui de cette exhortation la lecture attentive des portions suivantes de la Sainte Écriture:

Psaumes 4, 37, 62, 72, 85,116, 118, 125.

Proverbes, chap. 12, 17, 29.

Ésaïe, chap. 9, 26, 32, 52, 53.

Jérémie, chap. 6, 33.

Matthieu, chap. 5, 6, 7, 18.

Luc, chap. 6, 10, 17, 23.

Jean, chap. 8, 13, 14, 16, 17.

Romains, chap. 5, 12, 13, 14, 15.

Ire épître aux Corinthiens, chap. 13.

Éphésiens, chap. 4, 5, 6.

Philippiens, chap. 4.

Tite, chap. 3.

1e épître de St. Jean, en entier, etc.


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LA PAIX!

Un bruit sourd agitait l'Orient, une fermentation secrète y régnait: les uns attendaient un dominateur, les autres un libérateur; et tout Israélite, envisagé comme fidèle au pays et à la religion de ses pères, appelait de ses vœux les combats et les victoires du Messie.

Des tentatives, des luttes de divers genre en étaient résultées; le sang avait coulé dans les rues de Jérusalem; le désordre et la division, sous divers prétextes, tenaient les esprits en suspens.

C'est alors, c'est aux foules émues rassemblées autour de lui, que notre Seigneur prononça sur une montagne ce discours toujours admiré, et pourtant toujours en opposition avec les inclinations naturelles de l'âme humaine.

C'est alors qu'il proclama, au milieu des hommes de parti, des zélotes, des pharisiens, des sadducéens, des esprits tiraillés en tout sens par le conflit des opinions et des passions,

le bonheur des pauvres en esprit,

le bonheur des âmes affligées, des débonnaires, c'est-à-dire de ceux qui unissaient la douceur à l'humilité.

C'est alors qu'il adresse à ces cœurs agités les paroles que nous méditons: «Heureux ceux qui procurent la paix, car ils seront appelés enfants de Dieu!»


Vous conviendrez, mes Frères, qu'elles sont aussi FAITES POUR NOUS; elles semblent vraiment écrites pour le moment où nous vivons.

Qu'est-ce donc que procurer la paix?

Quel est le bonheur de ceux qui la procurent?

Suivez-nous, mes Frères, dans l'examen de ces questions, afin que revêtant les dispositions pacifiques de l'enfant de Dieu, nous puissions contribuer, par le secours du Saint-Esprit, au précieux règne de la paix.

Amen!


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JÉSUS EST LE «PRINCE DE LA PAIX;» et pourtant c'est lui qui disait à ses disciples:

«Ne pensez pas que je sois venu apporter la paix sur la terre; je suis venu apporter, non la paix, mais l'épée(Matth. X, 34.)

Cela ne peut paraître contradictoire qu'à un monde qui met l'intérêt du repos au-dessus de celui de la justice et de la vérité.

Il y a incompatibilité absolue entre la lumière et les ténèbres, il y a répulsion réciproque; il est donc inévitable que dans les temps où la vérité fait luire ses bienfaisants rayons, le royaume des ténèbres se soulève contre elle;


Il est impossible de prêcher un Sauveur unique sans prêcher parallèlement la perdition de ceux dont il n'est pas le Sauveur;

Il est impossible que le chrétien professe être sauvé par lui sans être accusé d'orgueil par ceux qui ne l'ont pas reçu;

Il est impossible qu'on annonce l'Évangile comme la loi des consciences, sans occasionner la révolte chez ceux qui aiment mieux «les ténèbres que la lumière, parce que leurs œuvres sont mauvaises (Jean III, 19.)


Aussi Jésus ne promet-il pas à ses disciples une paix absolue de la part du monde, puisque, d'abord après les paroles de notre texte, il ajoute: «Bienheureux ceux qui sont PERSÉCUTÉS pour la justice!» (Matth. V, 10.)

Il faut le dire, à la décharge des chrétiens qui sont souvent accusés de semer la division dans le monde, on serait injuste d’exiger, dans tous les cas de leurs discours ou de leurs actes, des conséquences pacifiques. «Le serviteur n'est pas plus que son maître.» (Jean XV, 20.)


Il faut la vérité AVEC la charité; on ne peut attendre la charité QUE de la vérité.

Les intérêts de la vérité avant tout.


Il peut arriver qu'on cherche la paix sans la trouver, comme disait le Psalmiste: «Je suis un homme de paix; mais lorsque j'en parle, ils ne respirent que la guerre.» (Ps. CXX, 7.) C'est pourquoi l'Apôtre nous dit: «S’il se peut faire, et AUTANT QU'IL DÉPEND DE VOUS, ayez la paix avec tous les hommes (Rom. XII, 18.)

Après cette observation nécessaire, nous déclarons que la paix est le grand but de l'Évangile, et quelle doit être recherchée par tous les moyens; mais ici nous avons encore à relever une idée trop humaine et trop étroite, que plusieurs se font de ces paroles: «Heureux ceux qui procurent la paix(Matth. V, 9.)

On ne voit là-dedans qu'un ordre de s'interposer entre des ennemis, de rétablir la bonne harmonie au milieu d’un désordre.

Sans doute cette idée appartient à notre sujet, mais elle est beaucoup trop rétrécie. Ce point de vue extérieur, terre à terre, matériel, si je puis m'exprimer ainsi, avait déjà été reconnu par les rabbins des Juifs, et les philosophes des Grecs.

On peut prêcher la paix en faveur même de l’égoïsme, car elle est commode; on peut la prêcher par un esprit d'ordre, même sans piété.

Mais ainsi on ne remonte pas au principe de toute paix:


LA PAIX ENTRE L'HOMME ET DIEU,

PAR JÉSUS-CHRIST NOTRE SAUVEUR.


Ceux qu'il désigne par ces paroles: «Heureux sont ceux qui procurent la paix!» sont d'abord ceux qui la possèdent pour eux-mêmes; ceux pour lesquels la grande énigme de là vie, Où vas-tu? est résolue; ceux qui, «étant justifiés par la foi, comme dit St Paul, ont la paix avec Dieu(Rom. V, 1.) connaissant Jésus comme celui qui en est l'auteur.

Mais il est impossible de posséder cette paix sans chercher à la répandre et à la faire connaître, quand ce ne serait que par cet instinct social qui conduit un homme à communiquer à ses semblables quelque découverte dont il s'est bien trouvé, soit pour sa santé, soit pour les autres besoins de la vie.

Mais il y a plus, cette paix renferme en elle-même un principe éminemment propagateur, dans la foi dont elle procède: «J'ai cru, c'est pourquoi j'ai parlé(2 Corinth. IV, 13.) dans le bonheur qui en résulte pour l'âme, bonheur qui ne saurait rester muet, ni devant Dieu, ni devant les hommes; dans la charité et la fidélité qui en sont inséparables.

Celui qui a reçu la paix, est créé par là même «héraut de la paix», et il faut nécessairement que, devenu ainsi ambassadeur de Christ, «il supplie» ses semblables «au nom de Christ» d'être «réconciliés avec Dieu(2 Corinth. V, 20.)


Ceux qui procurent la paix sont donc ceux qui la possèdent

et qui tendent à la propager.


C'est ainsi, et ainsi seulement, que peuvent se produire les heureux effets qui se présentent d’abord à l'esprit à la lecture de notre texte.

C'EST PAR LA PAIX AVEC DIEU QUE S'ÉTABLIT LA BIENVEILLANCE ENTRE LES HOMMES.


Procurer la paix, c'est donc tout premièrement remonter au principe et s'affermir soi-même dans la paix de Dieu.

Quand nous regardons à Dieu, sans doute elle est ferme, invariable, immuable, «Qui intentera accusation contre les élus de Dieu?» (Rom. VIII, 33.) dit St Paul.

Mais qui ne sait que, considérée en l'homme, elle est trop souvent semblable à la lumière de l'astre du jour réfléchie par la surface d'une eau agitée et tremblotante; le rayon, quelque direct, quelque brillant qu'il soit, se brise, serpente, se reflète, s’efface même et disparaît tour à tour.

Il faut donc que cette paix soit affermie, il faut donc que l’âme du fidèle fixe ses regards sur la source de la lumière, pour être ainsi calmée par elle et pour la réfléchir utilement.

En ceci, comme en d’autres choses, il faut «nettoyer premièrement le dedans de la coupe et du plat» (Matth. XXIII, 25.), il faut conserver la vraie paix, pour travailler efficacement à toute œuvre de pacification. «Détourne-toi du mal et fais le bien, cherche la paix et la poursuis,» dit le Psalmiste. (Ps. XXXIV, 14.)

Celui donc qui veut être un ouvrier de paix, doit premièrement travailler sur lui-même, établir l'harmonie AU-DEDANS, afin de la faire régner AU-DEHORS; dominer son propre cœur, s’abstenir «des convoitises charnelles qui font la guerre à l’âme(1 Pierre II, 11.) éviter tout ce qui trouble l’intérieur, réprimer l’impétuosité du caractère, la vivacité désordonnée, l’irritation; selon cette parole: «Que tout homme soit prompt à écouter, lent à parler, lent à se mettre en colère». (Jacques I, 19.) Ce n’est pas par la violence, hors de la ligne la plus stricte du devoir, qu’on peut marcher à la paix.


Si vous cherchez à procurer cette précieuse paix, rappelez-vous bien que la manière dont vous vous rencontrerez avec vos semblables, peut avoir une grande importance.

Si deux hommes remplis de la paix céleste devaient se rencontrer, vous n’auriez point d’inquiétude pour eux; vous n’en auriez pas même si vous saviez qu’au moins l’un d’entre eux est dans cette heureuse disposition.

Mais s’ils s’abordent mutuellement par les angles de leur nature corrompue, il est impossible qu’il n’en résulte pas un choc douloureux.


Que l’ouvrier de paix prépare donc son âme, qu’il prenne des précautions contre lui-même.

S’agiter beaucoup d'un côté, puis de l'autre prêcher la paix, n'est pas le moyen de réussir.

Pourquoi entend-on quelquefois cette plainte au sujet des chrétiens, qu'ils ne sont pas aimables?

Loin de nous l'orgueil, la vanité, les prétentions, la susceptibilité, la suffisance.

«Revêtez-vous donc comme les élus de Dieu, ses saints et ses bien-aimés, des entrailles de miséricorde de bonté, d’humilité, de douceur, de patience, vous supportant les uns les autres, et vous pardonnant les uns aux autres.

Si quelqu'un de vous a quelque sujet de plainte contre l'autre, comme Christ vous a pardonné, vous aussi usez-en de même; mais surtout soyez revêtus de la charité qui est le lien de la perfection.» (Col. III, 12-14.)


PROCURER LA PAIX, c'est par là même éviter tout ce qui dans notre conduite pourrait contribuer à la troubler; tout ce qui pourrait avoir quelque chose de blessant soit dans nos propos, soit dans nos manières.

La calomnie, la médisance, les mauvais rapports, les jugements téméraires, la facilité à croire et à accueillir le mal, sont de funestes éléments d'agitation.

Si donc vous voulez la paix:

VOUS VEILLEREZ SUR VOS LÈVRES, pour éviter non seulement tout mensonge dans vos récits, tous ces moyens perfides et indignes du chrétien par lesquels on envenime la plaie des cœurs, mais encore toute exagération, toute insinuation;

Vous travaillerez à détruire; autant qu’il est en vous, tout germe de fermentation fiévreuse;

Vous supprimerez avec soin les questions irritantes, les questions vaines et folles;

Vous ferez taire les récriminations;

en un mot, vous tâcherez d'ensevelir dans l'oubli et dans le silence tout ce qui ne se rapporte pas au devoir, tout ce qui est de nature à fomenter la discorde.


C'est après avoir pris ces précautions contre lui-même, que l'enfant de Dieu devra aussi s'occuper des autres comme pacificateur.

Il travaillera à cette bonne œuvre dans les familles, dans la société, dans l'Église, avec une grande compassion pour ceux qui sont égarés par autrui, pour ceux qui s'égarent eux-mêmes; avec beaucoup de ménagement pour les faibles, avec une grande bienveillance pour tous.

Vous prêcherez la réconciliation, les égards, le support mutuel;

Vous engagerez ceux qui se fuient à se rapprocher, à s'écouter réciproquement, à s'entendre;

Vous exhorterez, vous supplierez, vous excuserez, vous apaiserez;

Vous engagerez vos frères à toute espèce de bons offices, dont vous donnerez vous-même l'exemple.

C'est alors que vous réaliserez cette parole:


«Heureux ceux qui procurent la paix, car ils seront appelés enfants de Dieu!»


* * *


Que seraient les familles et les sociétés, si elles n'étaient composées que de pacificateurs chrétiens!

Tout comme on éteint soigneusement une étincelle en pensant au grand feu qu'elle peut allumer, ainsi toute étincelle de division y serait immédiatement supprimée. Un lien de douceur, de ménagement, d'affabilité, de support, formerait de cette maison ou de ce peuple-là un robuste faisceau.

On y verrait régner l'ordre, la modération, la charité, le contentement d'esprit; ce serait une pépinière pour le ciel, un paradis anticipé. Aussi Jésus dit-il: «Bienheureux ceux qui procurent la paix, car ils seront appelés enfants de Dieu!»


Ils seront appelés «ENFANTS DE DIEU,» reconnus pour tels devant Dieu et devant les hommes.

C'est celui qui est la vérité même, qui leur rend ce témoignage!

Qui le démentira?

Ne sera-t-on pas forcé de reconnaître l'enfant à sa ressemblance avec le père?

Celui qui «PROCURE LA PAIX» n'est-il pas le fils du «DIEU DE PAIX

Aussi seront-ils appelés enfants de Dieu, parce qu'ils le sont réellement.


C'est par l'adoption du Père qu’ils ont connu la paix.

Cette paix, ils l'ont communiquée à d'autres, elle s'est répandue autour d'eux comme une source bienfaisante portant avec abondance la vie et la fertilité.

N'est-ce pas là un caractère incontestable de celui qui est «né de Dieu(1 Jean V, 18.)


ILS SERONT APPELÉS ENFANTS DE DIEU, c'est-à-dire, qu'étant ainsi manifestés et confirmés, comme lui appartenant, ils jouiront de tous les privilèges attachés à cette qualité. «Participants de la nature divine(2 Pierre I, 4.) ils en goûteront le bonheur ineffable.

Comme Prince de paix, Jésus, est dans le sein du Père, eux aussi reposeront par Jésus dans le sein paternel; ils vivront dans sa communion; leurs prières, leurs communications avec lui ne seront point troublées; ils marcheront sous le regard de sa charité et de son approbation; ils seront les objets de sa protection tendre, fidèle et souveraine.

Lorsqu'ayant cherché la paix vous n'aurez pas réussi dans vos efforts, vous trouverez son sein comme un refuge; ce sera pour vous une tranquille oasis au milieu d'un désert battu de l'orage; ce que Jésus a dit à ses disciples s'accomplira pour vous.


LA PAIX QUE VOUS AUREZ OFFERTE EN SON NOM, AYANT ÉTÉ MÉPRISÉE, RETOURNERA SUR VOUS, et remplira votre âme d'un ineffable témoignage de la grâce de votre Dieu.

Et celui qui a cherché la paix, qui en a la conscience trouvera toujours, dès que la guerre éclate, un bras puissant pour le soutenir; il aura d'autant plus de force au combat, qu'il a eu de charité et de sincérité dans l'intention de l'éviter. —Il sera «APPELÉ ENFANT DE DIEU»:

C’est-à-dire qu’il aura sa bénédiction, car un enfant reçoit la bénédiction de son Père;

C'est-à-dire qu'il aura son héritage, car un enfant est l'héritier de son Père.


Au jour où les pensées des cœurs seront révélées, et où Dieu rendra à chacun sa louange, il sera hautement manifesté que ceux qui procurent la paix ont voulu ce que Dieu veut, ont aimé ce que Dieu aime, ont fait ce que Dieu fait; et s’étant donné à eux-mêmes, EN VERTU DE LEUR FOI, le titre d’enfants de Dieu, ils ne seront pas démentis par leurs œuvres.

Ayant eu, aimé, cherché la paix, ils entreront pour toujours dans les demeures de la paix, dans le repos éternel réservé au peuple de Dieu.


* * *


Puisqu'il en est ainsi, procurons la paix!

Mais pour la procurer il faut la connaître, la posséder: nous l'avons vu; et il en est peut-être plusieurs parmi ceux auxquels s'adressent ces paroles, qui ne l'ont pas encore, soit qu'agités au fond de leur conscience ils cherchent à se déguiser à eux-mêmes cet état de guerre intestine, soit qu'endormis ils ne s'occupent pas de leurs intérêts éternels.

Il n'est pas besoin de dire aux uns: Vous n'avez pas ce qu'il vous faut: la guerre n'est pas la paix!

Ils ne le savent que trop, quoiqu'ils ne le sentent pas assez.

Est-il besoin de dire aux autres: La Paix de Dieu n’est pas le sommeil?

Ne le savent-ils pas au fond?

Mais leur sommeil même les empêche d'en tirer les conséquences. Nous leur désirons la paix, nous voudrions la leur procurer; mais il faut auparavant qu'ils sachent ce que c'est que la guerre:


la guerre la plus redoutable au fond,

la guerre dans la conscience,

la guerre du remords,

la guerre de la part du «Roi des Épouvantements(Job XVIII, 14.)

la guerre de l'éternité menaçante qui se lève comme un géant devant eux.


Sans cela jamais ils ne se réfugieront dans les bras de Jésus, jamais ils ne connaîtront «le chemin de la paix(Rom. III, 17; Ésaïe LIX, 8.)

Et tout comme pour faire du pain il faut que la pâte lève, que par conséquent le levain y soit placé, il faut aussi, pour le bonheur et la paix de ces hommes, il faut, pour qu'ils soient de ces enfants de Dieu qui procurent la paix, que le levain de la loi soulève leurs consciences, que la Parole de la foi les rassure, et que le témoignage de l'Esprit les remplisse.

Que si vous connaissez ce témoignage, pensez que vous ne pouvez rien faire sans lui.

POUR PROCURER LA PAIX, IL FAUT PARTIR DU PRINCIPE DE LA PAIX, je le répète.

Ce principe est absolument nécessaire aux effets qu'on veut produire; hors de là on ne peut trouver que des palliatifs.

Sans condamner, et même en approuvant des efforts civiques ou philanthropiques pour avancer la cause de la paix, on peut dire que ces moyens ont toujours quelque chose de précaire et d’imparfait; ils sont souvent de nature à faire naître les réclamations, à réveiller de nouvelles susceptibilités; ils ont quelque chose de superficiel qui ne pénètre pas jusqu'au fond de la plaie sociale.


Pour avoir des fleurs, on peut en faire d'artificielles, qui ressembleront aux autres par les formes et les couleurs, mais qui n’auront pas la vie.

Le moyen le plus simple, le seul moyen au fond, c'est de les semer!

Si la paix de Jésus est autre que la paix que donne le monde, c'est par Jésus et non par les moyens de ce monde qu'il faut la produire.


C'EST PAR LA PAIX QUI EST EN CHRIST,

PAR CETTE PAIX SEULE, QU'ON PEUT PACIFIER.


Aussi exprimerai-je ici ma profonde, mon intime conviction, c’est que Genève ne peut prospérer, se soutenir, se conserver, subsister, que par sa «religion».

Et quand je dis «sa religion», je ne parle pas de celle qui est sortie du grand naufrage du siècle passé, comme un vaisseau dont les flancs ont été ouverts par les vagues, dont les mâts et les vergues ont été brisés et balayés par les vents; mais je parle de la religion de nos pères, celle de la Réformation:


LA BONNE NOUVELLE DE LA PAIX

APPORTÉE AUX PÉCHEURS PAR CHRIST!


«Dieu manifesté en chair(1 Jean IV, 2.)

la rédemption par son sang,

la justification par la foi,

le salut uniquement par la grâce du Dieu de paix.


Si cette religion se réveille et s’étend au milieu de nous, elle multipliera parmi nous les enfants de paix.

Courage donc, enfants de Dieu! poursuivez votre carrière de paix; portez vos regards sur votre chef, le Prince de la paix; appliquez-vous cordialement à votre belle vocation de pacificateurs; veillez sur vous-mêmes; veillez autour de vous; vous avez une grande œuvre devant vous: œuvre de persuasion, de bons offices, de charité, de droiture, de fidélité.


La paix dans vos cœurs, la paix dans vos maisons, la paix dans votre ville, voilà la devise d’aujourd’hui!

Faites-la régner entre vos domestiques et vos ouvriers, entre vos enfants, entre les membres de vos familles, entre vos concitoyens.

Saisissez tant de mains qui se retirent les unes des autres pour les placer les unes dans les autres; parlez aux esprits, aux cœurs, aux consciences; rappelez-leur surtout cette parole du Christ, tirée du même discours que notre texte:

«Moi je vous dis: Aimez vos ennemis, bénissez ceux qui vous maudissent, faites du bien à ceux qui vous haïssent, et priez pour ceux qui vous outragent et qui vous persécutent, afin que vous soyez enfants de votre Père qui est dans les cieux; car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et il fait pleuvoir sur les justes et sur les injustes.

Car si vous n'aimez que ceux qui vous aiment, quelle récompense en aurez-vous? Les péagers mêmes n'en font-ils pas autant? Et si vous ne faites accueil qu'à vos frères, que faites-vous d’extraordinaire? Les péagers mêmes n'en font-ils pas autant?» (Matth. V, 44-46)

«Recherchez la paix, non seulement avec ceux qui invoquent le Seigneur d'un cœur pur, mais encore avec tout le monde(Hébr. XII, 14; 2 Tim. II, 22.)


Mais quand on pense à toutes les causes qui peuvent compromettre la paix;

à l'état des cœurs ou Dieu ne règne pas du tout,

à l'état des cœurs partagés,

aux misères individuelles,

aux défauts et aux torts de ceux qui connaissent la lumière,

aux frottements pénibles qui en résultent, et qui de plus augmentent encore ce grand mal;

quand on considère le mal collectif, les funestes influences des passions, des préventions, des préjugés, de l'irritation, des froissements, des maximes relâchées et du train de ce monde;

quand on aperçoit au milieu de ces orages l'ennemi de Dieu et des âmes qui s'en prévaut, tournant au profit des ténèbres toutes nos faiblesses, toutes nos funestes inclinations, toutes nos émotions charnelles, cet esprit qui agit «avec efficace dans les enfants de rébellion(Nom. XVII, 10.) et qui a aussi ses journées, dans lesquelles il semble remporter la victoire sur la justice, l'ordre et la sainteté; quand on contemple la grandeur de l’orage et l'imminence des dangers, on ne peut que s'écrier:


«SEIGNEUR, SAUVE-NOUS, NOUS PÉRISSONS!»

(Matth. VIII, 25.)


C'est aussi le moyen le plus efficace d'obtenir la paix. Si les ondes refoulées du Léman venaient envahir notre cité, que ferions-nous?

Dans le sentiment de l’impuissance humaine, nous en appellerions à la puissance divine.

Ah! soyez persuadés, si vous désirez la paix, si vous avez à cœur de la procurer, que c'est la prière au nom de Jésus qui l'obtiendra.

Ici vous ne direz pas: «Que nous sommes faibles!» La force du Seigneur s'accomplira dans notre infirmité.

«Priez pour la paix de Jérusalem! Que ceux qui t'aiment jouissent de la paix! Que la paix soit dans tes murs! À cause de mes frères et de mes amis, je prierai maintenant pour la paix.»

Jésus s'est écrié: «Je voyais Satan tomber du ciel comme un éclair(Luc X, 18.) Jésus l'a détrôné, lui a arraché sa puissance.

Priez donc, au nom de Jésus! et «le Dieu de paix écrasera bientôt Satan sous vos pieds.» (Rom. XVI, 20.)


Il semble bien souvent que le monde nous crie: Malheur! malheur! la société humaine, la tranquillité, le repos, la prospérité terrestre, étant semblables à un édifice dont les colonnes se remuent et s'ébranlent.

La Parole de Dieu crie aussi: MALHEUR! MALHEUR!

«Malheur à ceux qui appellent le bien mal, et le mal bien!

Malheur à ceux qui sont sages dans leur opinion!

Malheur à ceux qui pensent à l'iniquité!

Malheur à ceux qui sont à leur aise!

Malheur à vous qui riez maintenant!

Malheur au monde, à cause des scandales!» (Ésaïe V, 20-21; Michée II, 1; Amos VI, 1; Luc VI, 25; Matth. XVIII, 7.)


Combien nos âmes ont besoin d'écouter le Dieu de clémence visitant la terre et guérissant ses plaies en s'écriant: BONHEUR! BONHEUR!

Non pas d'un bonheur éphémère qui brille un instant pour s'évanouir; mais d'un bonheur réel, riche, durable, assuré.

Écoutez donc celui qui en est l'auteur, et qui vous crie aujourd'hui par ma voix:


«Heureux ceux qui procurent la paix, car ils seront appelés enfants de Dieu!»

«Que le Seigneur de la paix

vous donne lui-même toujours la paix, en toutes manières

(2 Thess. III, 16.)

Amen!




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