Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

DISCOURS FAMILIERS

D'UN PASTEUR DE CAMPAGNE

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LA COMMUNION DU FIDÈLE AVEC DIEU.

(Pour un jour de communion)

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SI nous marchons dans la lumière comme il est lui-même dans la lumière, nous avons communion avec lui, et le sang de son Fils Jésus-Christ nous purifie de tout péché. (1 Jean I, 7)

Mes Frères, un des plus beaux noms que l’on ait donné au sacrement de la Sainte Cène est celui de la Communion; communion des hommes entre eux; communion des hommes avec leur Sauveur et leur Dieu. Ainsi, l’on a voulu faire envisager cette cérémonie comme une chaîne qui embrasse tous les membres de l’Église et les rattache à leur divin Chef, à leur Père commun. Telle fut l’intention du Sauveur en l’instituant. Sur le point de mourir pour nous, certain de satisfaire à la justice divine et de nous rétablir dans tous les droits de l’innocence, il voulut que la Sainte-Cène, représentant sa mort fût un gage de notre réconciliation avec le Dieu que nous avions offensé, et servît à nous unir à lui de la manière la plus intime.

Grande et sublime idée! auguste privilège! Mais tous ceux qui s’approchent de la Sainte Table y reçoivent-ils ce don précieux?

Question importante sur laquelle il faut nous éclairer et nous garantir de toute illusion.

Dans notre texte nous en fournit le moyen. Il parlait ici de l’état habituel du fidèle; et sans doute l’union du chrétien, sa communion avec Dieu:

est de tous les jours, de tous les instants;

elle n’est pas bornée à une époque, à une cérémonie

Mais comme cette cérémonie en est le sceau; comme la religion n’a rien de plus tendre, de plus puissant, de plus propre à nous attacher à Dieu, à confirmer cette union, à la rendre aussi parfaite qu’elle peut l’être ici-bas, ces paroles s’appliquent naturellement à la circonstance qui nous rassemble: elles nous invitent à réfléchir sur les signes de notre communion avec Dieu et sur le bonheur qui doit en résulter.

Accordez-nous une attention religieuse, et veuille l’Esprit Saint répandre l’onction de sa grâce sur cette méditation!

Ainsi soit-il.


I.


La lumière est prise ici non seulement pour la Connaissance de la vérité, mais aussi pour la pureté, la droiture du cœur, l’intégrité de la vie. Tel est le sens de ce mot dans plusieurs endroits de l’Écriture, car:


Dans le langage du Très-Haut, vertu et vérité doivent être synonymes.


Les justes sont appelés enfants de lumière. (Luc XVI, 8) Jésus est la véritable lumière qui éclaire tout homme venant au monde. (Jean I, 9)

Il est le soleil de justice qui porte la santé dans ses rayons. (Mal. IV, 2)


La doctrine évangélique est la lumière par excellence, la seule nécessaire à l'homme. Elle est la lumière éternelle, émanée de Dieu; cette lumière dont il avait fait luire quelques rayons dans notre cœur, et dont son Fils est venu rallumer le flambeau.

Cette expression de mon texte fait naître l’idée d'éclat, aussi bien que celle de clarté. C’est qu’aux yeux de Celui qui démêle les pensées et les intentions du cœur, devant qui tout est nu et à découvert, (Héb. IV, 12-13) il n’y a d’éclat que dans la vertu.

Tout ce qui nous éblouit sur la terre, toute la gloire de ce monde n’est devant lui que comme un point obscur. Du haut de son trône, il voit briller le fidèle au milieu d’une génération méchante et perverse, (Philip. II, 15) comme ces feux qui interrompent les ténèbres de la nuit.


Celui qui veut avoir communion avec Dieu, marche dans la lumière.

Cela signifie donc:

1° que non content de connaître la vérité, il l’aime, il la suit, tel qu’un homme attentif à ne point perdre de vue un flambeau placé près de lui pour diriger ses pas: Quiconque fait le mal fuit la lumière, dit le Sauveur; il ne s’approche point de la lumière, de peur que ses œuvres ne soient condamnées; mais celui qui se conduit selon la vérité, s’approche de la lumière, afin que ses œuvres soient en évidence; parce qu’elles sont faites selon Dieu. (Jean III, 20-21)

Cette vérité céleste, déposée dans nos Saints Livres, est toujours devant ses yeux: son plus vif désir est d’éclairer par elle tous les points de sa route, de voir tous les objets comme elle les lui présente.

ELLE EST, suivant le langage du Roi-Prophète, UNE LAMPE À SES PIEDS. (Ps. CXIX, 105)

Il craint par dessus tout les nuages des passions, les illusions, les sophismes qui peuvent en obscurcir la clarté, se placer entre elle et lui.

Il n’est aucune de ses actions qu’il désire couvrir d’un voile; il n’est aucun moment de sa vie où il cherche à s’abuser lui-même, à tromper autrui; ses penchants, ses paroles, ses actions, portent l'empreinte de la droiture et d’une belle simplicité.

Il peut dire avec saint Paul: Ce qui fait notre gloire, c'est le témoignage que nous rend notre conscience, que nous nous sommes conduits dans le monde... avec un cœur simple et sincère devant Dieu, non selon la prudence charnelle, mais selon la grâce que Dieu nous a donnée. (2 Corinth. I, 12)

Toute son ambition est de suivre fidèlement les traces de son divin Chef, car il sait que celui qui le suit n'est point dans les ténèbres et qu’il a la lumière de la vie. (Jean VIII, 12)


Il marche dans la lumière, c’est-à-dire: qu’il ne s’arrête point, qu’il s’attache aux œuvres de lumière chaque jour avec plus d’ardeur.

Le caractère de la vertu chrétienne est d’avancer sans cesse, de tendre à la perfection. (Hébr. VI, 1)

Partout dans l’Écriture, elle nous est présentée comme une tâche qu’il faut achever, comme une carrière dans laquelle il n’est pas permis de se ralentir: Je laisse les choses qui sont derrière moi, disait un grand apôtre, et m’efforçant d’aller vers celles qui sont devant moi, je poursuis ma course vers le bout de la carrière, pour remporter le prix auquel Dieu m’appelle par Jésus-Christ. (Philip. III, 13-14)

Notre Sauveur, si j’ose le dire, nous a donné le même exemple. Si la sublimité de sa nature ne nous permet pas de penser qu’il y ait eu un progrès dans ses vertus, du moins il les déploya aux yeux des hommes d’une manière progressive. Il semble qu’il voulut apprendre au chrétien comment il doit fournir sa carrière.

À mesure qu’il avança dans le cours de son ministère, ses exhortations devinrent plus fortes et plus touchantes, ses travaux plus étonnants, ses miracles plus éclatants et plus nombreux; ses vertus parurent plus célestes, et le dernier moment de sa vie fut celui où elles brillèrent toutes ensemble d’un éclat divin.

Et si le but de cet adorable Sauveur fut de nous ramener à Dieu, de retracer en nous avec Dieu, son image, à quel degré nous sera-t-il permis de nous arrêter?

Celui qui se propose pour modèle un Être tout parfait,

celui qui sent son cœur pressé du besoin de répondre à une miséricorde, à un amour infini,

celui qui aspire à une couronne immortelle, doit-il connaître la tiédeur et le relâchement?


Que penser de ces chrétiens sans ardeur et sans courage que l’on retrouve toujours à la même place?

Que penser d’eux, si ce n’est qu’ils méconnaissent le grand but de l’Évangile, ou qu’ils y sont indifférents?

Sont-ce là ces guerriers généreux qui combattent dans le bon combat? (2 Tim. IV, 7)

Sont-ce là ces violents dont il est dit qu'ils ravissent le royaume des cieux? (Matth. XI, 12)

Ah! sans doute, une âme qui voit et qui aime la lumière ne s’arrête point; elle fait chaque jour quelque progrès; chaque jour elle voudrait s’affermir davantage dans la foi, l’espérance, la charité; elle voudrait se purifier davantage et perfectionner sa sainteté par la crainte de Dieu. (2 Corinth. VII, 1)

Voilà, mes Frères, comment il faut marcher dans la lumière; et sans cela nous ne saurions avoir communion avec Celui qui est le principe et la source de toute lumière, de toute perfection, avec Celui qui est charité. (1 Jean IV, 8) Il ne peut y avoir de société (d'accord), dit l’Écriture, entre la justice et l’iniquité: il ny a point de communion entre la lumière et les ténèbres, point d’accord entre Christ et Bélial (2 Corinth. IV, 14-15) Mais si nous marchons dans la lumière, comme Dieu lui-même est lumière, nous avons communion avec lui.

Mais, direz-vous, comment suivre un modèle si relevé! comment nous flatter d’en approcher assez pour nous unir à lui!

Sans doute, mes Frères, nous ne le pouvons point par nous-mêmes; mais:


Ce qui est impossible aux hommes est possible à Dieu.

(Luc XVIII, 27)


3° J’ajoute que le seul moyen de parvenir à marcher dans la lumière, c’est de sentir ce qui nous manque et de recourir au Grand Médiateur, au Sauveur des hommes en qui nous pouvons tout, (Philip. IV, 13) et dont LE SANG, dit l’Apôtre, nous purifie de tout péché.

Oui, mes Frères, celui à qui Dieu fait la grâce de voir combien nous sommes naturellement éloignés de lui, et qui aspire à s’en rapprocher, en vient bientôt à soupirer de sa faiblesse.

Il en est d’autant plus vivement frappé qu’il voudrait plus vivement la surmonter. Il tourne sur lui-même ce flambeau, dont la clarté le conduit, et il s’effraie en voyant son infirmité, ses souillures.

Ô mon Dieu! s’écrie-t-il, quelque désir que j’éprouve de m’unir à toi, je ne puis t’offrir que des vertus imparfaites, des œuvres souillées, des chutes grandes et nombreuses, un cœur fragile, une nature dégradée.

Ah! si je n’espérais dans Ie sacrifice et l’intercession de ton Fils, je ne verrais rien en moi qui ne dût allumer ta colère; je frémirais à l’ouïe de cette déclaration du Sauveur à saint Pierre: Si je ne vous lave, vous n'aurez point de part avec moi. (Jean XIII, 8)

Ainsi, de la connaissance de lui-même et du désir sincère de s’approcher de Dieu, naît chez le chrétien un sentiment profond de son insuffisance, de son indignité; un recours ardent au Rédempteur des hommes qu’il embrasse par la foi et de qui seul il attend le pardon et les secours dont il a besoin: Alors le sang de Jésus le purifie de tout péché.


Oui, dès que nous ne comptons plus sur nos forces, et que nous attendons tout du Seigneur; dès que nous ne nous appuyons plus sur notre propre justice, mais uniquement sur les mérites du Sauveur, DIEU NOUS VOIT D’UN ŒIL DE MISÉRICORDE; il nous voit en Jésus-Christ, il nous revêt de sa justice et nous régénère par son Saint Esprit: Il nous crée de nouveau, dit l’Écriture, pour toute sorte de bonnes œuvres. Jésus-Christ devient pour nous sagesse, justice, sanctification, rédemption. (Eph. II, 10; 1 Corinth. I, 30)

Le voilà donc, ce grand mystère de piété (1 Tim. III, 16) également d’accord avec la sainteté et la miséricorde divines!

Le sang précieux du Rédempteur n’a point coulé pour nous tranquilliser dans nos égarements ou dans notre tiédeur.

Le Fils de Dieu n’est point descendu pour favoriser l’empire du péché, mais pour le renverser et le détruire.

L’homme qu’il réconcilie avec le Très-Haut, c’est celui qu’il retire de ses iniquités; (Actes III, 26) celui qu’il met en état de dire: Je ne vis plus pour moi-même, mais pour Celui qui m’a aimé. Ce n’est plus moi qui vis, c’est Christ qui vit en moi. (Gal. II, 20)

Ô quelle douceur pour l’homme faible et souillé de taches, qui, retenu par le sentiment de son indignité, n’osait ni ne pouvait s’approcher de ce Dieu dont les yeux sont trop purs pour voir le mal; (Hab. I, 13) qui se tenait en arrière, intimidé par cette sainteté devant laquelle les anges se couvrent de leurs ailes. (Ésaïe VI, 2) Quelle douceur pour lui de pouvoir se dire:


Le sang de Jésus-Christ me purifie de tout péché


Non seulement il me fait trouver grâce auprès de mon Juge, mais il m’obtient un cœur nouveau, un esprit nouveau; (Ez. XXXVI, 26) il me rend le droit, il me rend capable d’avoir communion avec mon Dieu!

Ici, mes Frères, il faudrait EXAMINER SI NOUS POUVONS TENIR CE LANGAGE, si nous trouvons en nous-mêmes les signes que je viens de vous retracer et auxquels on reconnaît que l’on a communion avec Dieu.

Il faudrait examiner si nous savons envisager la Sainte-Cène sous ce beau point de vue, et nous en faire cette noble et juste idée, ou si nous ne voyons en elle qu’un devoir d’usage, de décence, ou tout au plus un acte de profession du christianisme.

Il faudrait examiner si, lors même que notre cœur prend quelque part à la cérémonie, lors même que nous avons en effet quelque désir de nous approcher de Dieu, nous apportons à l’autel les dispositions nécessaires pour avoir communion avec lui:

un esprit sérieux, attentif,

un cœur docile aux leçons de Celui qui est la lumière et la vérité;

une âme pressée du désir de s’avancer dans la route qu’il nous a frayée;

cette foi vive qui nous fait mettre en lui toute notre confiance et ne chercher de salut qu’en lui;

cette foi qui nous purifie, en même temps qu’elle nous affranchit de la condamnation.

C’est à la conscience de chacun de nous à répondre.

Pour moi, dans ce jour de propitiation et de salut, au lieu de porter la sonde plus avant dans vos âmes, j’aime mieux essayer de les émouvoir en vous faisant sentir le bonheur de celui qui a communion avec Dieu.


II.


Pour le concevoir, il suffit de considérer le sens de ce mot communion. Il signifie une union parfaite, une union où tout est en commun.

Il est si peu de telles unions sur cette terre, où l’intérêt personnel, l’amour-propre mettent presque toujours quelque réserve dans les liaisons les plus intimes; il en est si peu qu’il est difficile de vous en offrir une image.

Lorsque vous vous figurez un ami parfait qui ne laisse rien à désirer à votre cœur, quels traits employez-vous pour le peindre?

Rapport de goûts, de pensées, de sentiments, de volontés; jouissance commune de tous les avantages particuliers; affection sans inégalité, sans altération, sans mesure; voilà sans doute ce qui vous paraît nécessaire pour former cette heureuse union.

Mais serait-il donc possible que l’homme mortel soutînt avec le Créateur une relation si étroite et si tendre?

Pouvons-nous le penser sans témérité, sans blasphème?

Les petites conceptions de l’homme peuvent-elles s’unir à la sagesse infinie, sa faiblesse à la toute-puissance, sa nature fragile à la suprême perfection?

Oui, mes Frères, rien n’est plus certain; quelque étonnant que soit ce prodige, quelque impossible qu’il fût pour l’homme de la nature, pour l’homme abandonné à lui-même, l’amour et la foi l’opèrent en faveur du chrétien régénéré.

Il s’unit à Dieu:

par son esprit, qui envisage toutes choses comme Dieu les envisage;

par son cœur, qui aime tout ce que Dieu aime, qui veut tout ce que Dieu veut.

Il possède tout ce qu'il désire, parce qu’il ne désire rien au delà de ce que son Dieu veut qu’il possède.

II ne souffre de maux que ceux qu’il veut souffrir, parce qu’il veut souffrir tous ceux que son Dieu lui envoie,

Il ne craint point ce que craignent les autres hommes, et il n’est point troublé. (1 Pierre III, 14)

Il est supérieur à tout, parce qu’il n'y a rien dans le ciel et sur la terre qu’il voulût changer, quand il pourrait le changer, tant il est persuadé que tout ce que Dieu fait est bien fait (Marc VII, 37) et qu'il fera tourner (concourir) toutes choses au plus grand bien de ceux qui l'aiment. (Rom. VIII, 28)

C’est ainsi que par son abandon à la volonté souveraine, il s’associe, en quelque sorte, aux perfections augustes de la Divinité.

C’est ainsi que, contemplant, comme dans un miroir, la gloire du Seigneur, il est transformé en son image. (2 Corinth. III, 18)

C’est ainsi qu’il participe à cette paix de Dieu, à cette paix délicieuse, à ce calme inaltérable qui fait son essence et sa félicité.


Dès lors, le fidèle a droit à toutes les grâces du ciel. Tout ce qu’il y a dans nos Saints Livres de déclarations consolantes, de tendres assurances, de magnifiques promesses, de ravissantes espérances, c’est lui qui peut se les appliquer; C’EST SA PORTION, c’est son bien.

C’est pour lui que furent écrites ces belles paroles:

L'Éternel est notre Dieu, notre grande récompense, notre héritage à jamais. Ô que sont grands les biens QUE DIEU RÉSERVE À CEUX QUI LE CRAIGNENT À CEUX QUI SE RETIRENT VERS LUI!

Toutes choses sont à vous, et vous êtes à Christ.

Soit que nous vivions, soit que nous mourions, nous sommes au Seigneur.

Ceux qui sont conduits par l’Esprit de Dieu sont enfants de Dieu.... et si nous sommes enfants, nous sommes aussi héritiers; héritiers de Dieu et cohéritiers de Jésus-Christ. (Gen. XV, 1; Ps. XXXI, 19/20; 1 Cor. III, 22-23; Rom. XIV, 8; VIII, 14-17.)

Mais, quelque vifs que soient ces traits par lesquels j’essaie de vous peindre la félicité de celui qui a communion avec Dieu, ce n’est pas assez; non, ce n’est pas assez pour donner une idée suffisante de cette relation que Dieu daigne former avec l’homme, et pour rendre dans toute son étendue le sens de ces expressions de l’Écriture:

Vous êtes le temple du Saint-Esprit.

Je serai TOUJOURS avec vous.

Il n’y a qu’un seul Dieu, qui est le père de tous.... et en vous, tous. Si quelqu'un m’aime, mon Père l'aimera, nous viendrons chez lui, et nous y établirons notre demeure. (1 Cor. VI, 19; Matth, XXVIII, 20; Ephés. IV, 6. Jean, XVI, 23.)

Mes Frères, il ne nous appartient pas d’expliquer comment Dieu habite dans l’âme qui s’unit à lui. Ce mystère est grand, (Eph. V, 32) dit saint Paul parlant de l’union de Christ avec l’Église; mais L’ÉVANGILE NE NOUS PERMET PAS D’EN DOUTER.

Oui, ce Dieu qui remplit l’univers, ce Dieu qui était en Christ, réconciliant le monde avec soi-même; (2 Corinth. V, 19) ce Dieu dont la majesté réside dans nos temples, ce Dieu se communique de la manière la plus intime au cœur du fidèle.


Le fidèle sent sa présence:

Il reconnaît la présence de son Dieu dans mille circonstances où il peut dire comme saint Paul; Ce n’est pas que de nous-mêmes nous soyons capables de telles choses, mais c'est Dieu qui nous en rend capables. (2 Corinth. III, 5)

Il reconnaît la présence de son Dieu à ces hautes pensées, à ces sentiments vifs et généreux, à ces nobles résolutions, qu’il voit sortir de cet esprit sujet à tant d’incertitudes, d’erreurs, de petitesses, ou de ce cœur si faible et si fragile.

Il reconnaît la présence de son Dieu à cette force inconnue qui se déploie dans son infirmité; qui l’élevant au-dessus de lui-même, le soutient dans la tentation et l’en fait triompher; qui lui donne, ce qui est bien plus merveilleux encore, de savoir s’humilier, renoncer à soi-même, résister à la voix séduisante de l’amour-propre, pour n’écouter que Celui qui nous parle des cieux. (Hébr. XII, 25)

Il reconnaît la présence de son Dieu à cette abondance de consolations, à ce sentiment de confiance qu’il éprouve, comme le faible enfant qui repose dans les bras d’un tendre père; à ce sentiment intime, délicieux, qui change pour lui la nature des choses, et dans les événements les plus contraires, fait souvent goûter les jouissances les plus exquises.

Il reconnaît la présence de son Dieu....

Mais que fais-je? Homme pécheur, esprit borné, comment pourrais-je exprimer ce qui se passe entre le fidèle et le Seigneur!

Le fidèle sent la présence de son Dieu, c’en est assez. Objets de la terre, disparaissez pour lui! Que vos beautés périssables, que votre éclat frivole, que vos plaisirs trompeurs, s’évanouissent devant ce Dieu qui pour ceux qui l’aiment, pour ceux à qui il se communique, est la source, l’unique source de la paix, de la vertu et de la félicité.

Il l’a dit dans sa parole:

Celui qui demeure en moi et en qui je demeure, porte beaucoup de bons fruits; mais vous ne pouvez rien produire, étant séparés de moi.

Je vous ai dit ces choses, afin que ma joie demeure en vous et que votre joie soit parfaite. (Jean XV, 5, 11)


Mes Frères, que ces idées sont grandes!

Après les avoir méditées avec vous, que me reste-t-il qu’à prier Dieu de les rendre efficaces dans vos cœurs, et de vous les retracer vivement toutes les fois que vous vous approcherez de la Table Sainte.

Il me semble impossible que nous nous en occupions sans qu’elles fassent naître en nous quelques désirs de nous approprier de tels privilèges, sans qu’elles nous portent à faire des efforts pour revêtir les dispositions auxquelles ces privilèges sont attachés.

Faudrait-il donc, Grand Dieu, que des grâces si précieuses nous fussent offertes en vain; qu’elles s’élevassent en témoignage contre nous; que cette circonstance solennelle et touchante qui nous invite à nous unir à toi, ne servît qu’à nous en éloigner davantage!

C’est à vous que j’en appelle, Chrétiens.

Un père, et c’est sous ces traits que Dieu daigne se peindre lui-même, un père qui consent à se réconcilier avec un fils rebelle, qui ouvre ses bras et ne met point de réserve, point de mesure dans le retour de son affection, s’il ne trouve au fond du cœur de son fils rien qui réponde aux mouvements du sien, dans une occasion si propre à l’émouvoir, ne sera-t-il pas plus sensible à cette froideur qu’à toutes ses offenses passées?

Seigneur, que nous ne nous rendions pas coupables envers toi de ce crime, le plus grand de tous!

Que nous n’outragions pas ton amour et tes miséricordes!

Que nous ne soyons pas du nombre de ceux dont tu as dit:

Ce qui les condamne, c'est que la lumière est venue dans le monde, et qu'ils ont mieux aimé les ténèbres que la lumière, parce que leurs œuvres étaient mauvaises! (Jean III, 19)

Dieu tout-puissant, que ta grâce daigne nous prévenir aujourd’hui!

Qu’elle émeuve, qu’elle fléchisse nos cœurs!

Qu’elle excite en nous un désir vrai, ardent, d’avoir communion avec toi, et que recevant à l’autel le gage de cette douce union, NOUS MARCHIONS DÉSORMAIS EN ENFANTS DE LUMIÈRE afin d’être admis un jour auprès de toi dans le royaume de la lumière et de la félicité, dans ce royaume glorieux où nous te verrons comme face à face, (Luc XVI, 8; 1 Corinth. XIII, 12) où nous goûterons des joies dont nos joies les plus délicieuses ne sont ici-bas qu’un faible avant- goût!

Ainsi soit-il.




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