Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

DISCOURS FAMILIERS

D'UN PASTEUR DE CAMPAGNE

----------

LE BONHEUR DU FIDÈLE QUI EST EN CHRIST.

(Pour un jour de communion)

----------


Il n'y a maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont en Jésus-Christ, qui ne marchent pas selon la chair, mais selon l'esprit. (Rom. VIII, 1.)

Sous quel beau point de vue l’Apôtre nous présente la religion, mes Frères! c’est un traité de miséricorde entre un Dieu offensé et les pauvres mortels. Elle vient nous apporter nos lettres de rémission, et NOUS ANNONCER AVEC CERTITUDE CE PARDON sur lequel la raison nous fournit à peine des conjectures.

Cette raison nous dit, je l'avoue, que l’Auteur de notre existence est BIENFAISANT par sa nature, qu’il doit aimer son ouvrage; mais elle nous le montre aussi comme le Vengeur de l’ordre, le Juge souverain.

Nous ignorons ce que sa justice peut permettre à sa clémence; nous ignorons jusqu’où s’étendent les droits de sa sainteté, de sa majesté suprême, outragées par nos fautes. Ce sont des abîmes que l’œil ne peut fixer; dès qu’il s’y arrête, l’imagination se trouble et s’égare.

Nous ignorons encore s’il n’est pas des fautes que rien n’expie, pour lesquelles il n’est point de grâce. Ah! que ces pensées doivent paraître formidables à l’homme pécheur!

Pour dissiper l’angoisse où elles le jettent, ce n’est pas assez d’une confuse espérance, fondée sur une notion tout aussi vague de la bonté céleste. Il a besoin qu’on lui dise au nom et avec l’autorité du Juge des hommes: Il n'y a plus de condamnation; et l’Évangile seul peut le lui dire, l’Évangile seul a fait entendre à la terre cette parole de paix: Il n'y a maintenant aucune condamnation POUR CEUX QUI SONT EN JÉSUS-CHRIST.


Aucun enfant d’Adam n’est repoussé,

aucun coupable n’est exclu de l’amnistie.


Et ce qui est digne d’admiration, c’est que tout infinie qu’est cette clémence divine, loin défavoriser le relâchement, elle nous attache plus puissamment à la vertu, elle nous fait une obligation plus pressante de la repentance et de la sanctification


Il n’y a plus de condamnation; mais pour qui?

Remarquez-le, mes Frères: pour ceux qui sont en Jésus-Christ , qui ne marchent pas selon la chair, mais selon l’esprit; pour ceux qui, touchés du pardon et des secours qui leur sont offerts en Jésus-Christ, travaillent à surmonter les penchants déréglés qu’ils tiennent de leur premier père; qui s’appliquent à retracer dans leur âme l’image auguste du Créateur; qui sont pressés du désir:

non d’amasser des biens fragiles,

non de goûter des plaisirs passagers,

non de satisfaire des passions sensuelles,

mais d’avancer dans le chemin de la sainteté, de se former sur le modèle de leur Sauveur; pour ceux qui sont EN Christ, car ce mot dit tout.

En effet, mes Frères, être en Christ, ce n’est pas seulement recourir à l’efficace de son sacrifice et de son intercession; ce n’est pas seulement faire profession de lui appartenir comme sa créature et son racheté, mais:

C’EST SE DONNER À LUI PAR UN LIBRE CHOIX;

c’est être animé de son Esprit, de cet Esprit qui nous régénère et nous unit à ce divin Sauveur, comme le sarment de la vigne est uni au cep dont il tire sa subsistance et sa vigueur, suivant la comparaison de Jésus lui-même.

C’est en un mot , vivre COMME lui, vivre PAR lui et POUR lui.

Ainsi, bien différent de ces religions mensongères où l’on prétendait purifier le coupable par de vaines cérémonies qui ne changeaient rien dans son âme et lui laissaient toutes ses souillures, l’Évangile nous donne à la fois la paix et la vertu; nous y trouvons tout ce dont notre cœur a besoin.

Sujet au trouble et à la crainte par ce fond de corruption qu’il sent en lui-même et qu’il ne peut surmonter, il demande qu’on le rassure dans ses alarmes, qu’on l’affranchisse de ses inquiétudes et de ses misères. L’Évangile , par un accord merveilleux, le calme à la fois et le sanctifie: Il n'y a maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont en Christ.

Venez, Chrétiens, venez méditer avec nous ces belles paroles si bien en harmonie avec la solennité de ce jour , où nous célébrons le sacrifice du Grand Rédempteur, qui nous a réconciliés avec le Ciel et lavés de la tache originelle, qui a vaincu la mort et le péché.

Puissions-nous être aujourd’hui dans la main du Seigneur un instrument pour vous disposer à l’aimer et à vous approcher de lui!

Ainsi soit-il.


Si l’homme fût toujours demeuré pur et fidèle à ses devoirs, il aurait conservé tous les privilèges de l’innocence; rien n’eût altéré sa félicité. Semblable aux anges, il aurait vu couler ses jours dans une paix profonde; il eût pu communiquer avec le Seigneur , et le ciel n’aurait presque rien eu de plus à lui offrir.

Hélas! cette réflexion est pour ses descendants une source de regrets amers.

Pourquoi faut-il que le péché ait paru sur la terre, qu’il y ait apporté la tristesse et la désolation, qu’il ait mis dans le cœur des enfants d’Adam le trouble, les alarmes, la crainte de la justice divine?

Tel est le droit de Dieu, dit un apôtre; ceux qui commettent le péché méritent la mort, c’est-à-dire la condamnation: et quoique, à proprement parler, Dieu seul prononce cette condamnation, saint Paul dans notre texte semble l’envisager sous divers aspects qui concourent à effrayer le coupable.


1° En effet, il est condamné d’abord par la loi; cette loi qu’il a connue et violée, s’élève en témoignage contre lui.

De là ce que disait Moïse aux Israélites après leur avoir donné les ordres qu’il avait reçus du Seigneur: Je prends les cieux et la terre à témoins que j'ai mis aujourd'hui devant vous la vie et la mort, la bénédiction et la malédiction. (Deut. XXX, 19)

De là encore cette énergique expression de saint Paul: La puissance du péché, c'est la loi. (1 Corinth. XV, 56)

C’est elle en effet qui nous apprend à le connaître, qui nous fait sentir tout ce qu’il y a de criminel, de funeste, qui nous en découvre toute la malignité.

C’est le péché à son tour qui rend la loi redoutable pour l’homme; c’est lui qui l’expose à voir s’accomplir pour son malheur, les menaces qu’elle renferme et l’arrêt qu’elle prononce: Maudit est quiconque ne persévère pas en toutes les choses qui sont écrites dans ce livre pour les faire.


2° II est condamné en second lieu par la conscience, du fond de laquelle s’élève cette voix: Qu'as-tu fait? du fond de laquelle s’élève ce remords, qui annonce à celui qui l’éprouve, qu’il est digne non seulement de censure, mais de châtiment.

C’est en regardant la conscience sous ce point de vue, que les écrivains sacrés lui donnent des noms empruntés des formules de la procédure criminelle. C’est ainsi qu’ils l’ont appelée un témoin qui nous accuse ou nous défend; un juge qui nous absout ou nous condamne. (Rom. II, 15; 1 Jean III, 20-21)


3° Il est condamné par les maux qu’il souffre, par les revers qui l'accablent et qu’un sentiment secret lui présente comme un signe du courroux céleste.

Lorsqu’il éprouve un malheur inattendu, son âme se replie naturellement sur sa conduite passée et, si le souvenir d’une faute grave vient le frapper, quelque étrangère qu’elle paraisse à son infortune:

il s’y arrête malgré lui;

il s’y arrête avec inquiétude, avec épouvante; elle s’associe dans son imagination avec ce qu’il souffre;

il croit voir le bras de Dieu étendu sur sa tête, et ce qu'avec une conscience tranquille il nommerait revers de fortune, il le regardera comme une punition du Ciel.

La plupart des hommes éprouvent ce sentiment; ceux-là même dont le cœur s’éloigne habituellement de la Divinité et brave témérairement son pouvoir, dès que l’adversité se fait sentir, sont contraints à reconnaître le Tout-Puissant sous le caractère le plus terrible, celui de vengeur du crime.

Ainsi les frères de Joseph, aux jours de leur prospérité, semblent avoir oublié leur forfait; mais à peine sont-ils jetés dans les fers et menacés de la mort, qu’ils sentent leur conscience se réveiller; ils croient voir le bras de l’Éternel prêt à les frapper, et ils s’écrient: Certes, nous sommes coupables à l’égard de notre frère, car nous avons vu l’angoisse de son âme, quand il nous demandait grâce, et nous ne l'avons point exaucé; c’est pour cela que nous nous trouvons dans la même détresse. (Ge. XLII, 21)


4° Enfin le pécheur est condamné par la mort.

Au moment où elle s'avance, le glaive levé sur lui, pour le coucher dans le sépulcre, alors se placent devant ses yeux les images redoutables qu’il écartait durant la santé.

Il voit ce Juge, suprême devant lequel il doit comparaître au sortir de la vie;

il voit le tribunal dressé,

il voit les livres ouverts.

Ces grands objets que la mort dévoile lui apparaissent comme autant de fantômes effrayants qui le glacent de terreur; et CETTE MORT QUI L’APPELLE À RENDRE COMPTE, est à ses yeux le ministre de la justice céleste; elle est déjà pour lui un juge redoutable.

Ainsi donc, infortunés que nous sommes, tout s’élève contre nous, et la loi que nous avons bravée, et notre propre cœur qui prononce notre arrêt, et les peines que nous éprouvons ici-bas comme, par anticipation, et la mort.enfin qui vient nous dire: il n’y a plus de temps. (Apoc. X, 6)


Comment, comment échapper à toutes ces voix de condamnation qui retentissent à nos oreilles?

Mes Frères, il en est un moyen, un moyen sûr, mais unique. Saint Paul nous l’indique dans notre texte:


Il n’y a maintenant aucune condamnation

pour ceux qui sont en Jésus-Christ.


Le VRAI disciple de Jésus-Christ, le VRAI chrétien n’a PLUS RIEN à redouter.


1° La condamnation de la loi ne saurait l’atteindre.

Ce n’est plus contre lui qu’elle lance ses foudres et ses anathèmes; il n’est plus sous son joug inflexible:

il est sous une alliance de miséricorde;

il a reçu des promesses positives de pardon: Tu marcheras devant le Seigneur pour préparer ses voies et publier la rémission des péchés. (Luc I, 76-77)

Telle fut la mission du Précurseur, et voici comme il s’en acquitta:

Celui qui CROIT au Fils, disait-il, a la vie éternelle; celui qui REJETTE le Fils, ne verra point la vie, mais la colère de Dieu demeure sur lui.2 (Jean III, 36)

En vérité, nous dit Jésus-Christ lui-même, celui qui croit en moi a la vie éternelle, il n’est point sujet à la condamnation;mais il est déjà passé de la mort à la vie. (Jean VI, 47; V, 24)

Le grand sacrifice offert pour nous sur la croix, est le fondement légitime, le gage assuré de la vérité de ces déclarations consolantes.

UNE VICTIME D’UN PRIX INFINI, le Fils de Dieu, a porté la peine de NOS forfaits, a satisfait pour nous à la loi: Il nous a rachetés de la malédiction qu'elle prononçait, ayant été fait malédiction pour nous. (Gal. III, 13)

Maintenant la justice a été exercée, le péché puni:

le Ciel est apaisé; il pardonne.

Le fidèle a des lettres de grâce scellées dans son cœur: Il n’est plus sous la loi, dit l'Écriture, mais SOUS LA GRÂCE. (Rom. VI, 14) La loi fut donnée par Moïse, mais LA GRÂCE ET LA VÉRITÉ NOUS SONT VENUES PAR JÉSUS-CHRIST. (Jean I, 17)


2° Délivré des terreurs de la loi, le fidèle l’est aussi et par cela même, des alarmes et des remords de la conscience, qui n’est au fond que la loi écrite dans le cœur de l’homme.

Pour être tranquille, pour avoir le sentiment du pardon de ses péchés, il suffit qu’il reçoive son Sauveur avec humilité, qu’il embrasse son sacrifice par une foi vive, sincère, efficace en toute sorte de bons fruits; et il sent alors qu’il croit de cœur, qu’il est animé de cette foi qui fait obtenir la justification. (Rom. X, 10)

II sent, il est vrai, qu’il a toujours à combattre les restes du vieil homme, mais il sent aussi que le péché n'a plus d'empire sur lui, qu’il ne règne plus dans son corps mortel pour lui obéir en suivant ses désirs déréglés, (Rom. VI, 12-14) parce qu’en lui accordant le pardon, Dieu lui donne aussi son Saint-Esprit, qui le remplit de reconnaissance et d’amour aussi bien que de paix et de joie.

Il sent qu’il a DANS SON CŒUR UNE AUTRE LOI, la loi de l’Esprit de vie qui est en Jésus-Christ, et qui l’affranchit de la loi du péché et de la mort. (Rom. VIII, 2) II peut dire avec saint Paul:

Étant justifiés par la foi, nous avons la paix avec Dieu. Nous n’avons pas reçu un esprit de servitude pour être encore dans la crainte, mais nous avons reçu l’Esprit d’adoption par lequel nous disons à Dieu: Abba, père!  (Rom. V, 1; VIII, 15) 


3° Le chrétien n’est point condamné par l’affliction.

C’est ici, mes Frères, le triomphe de l’Évangile! Ces mêmes afflictions que l’homme irrégénéré regarde comme un jugement sévère, l’Évangile enseigne au fidèle à les voir comme un bienfait. Il nous dit: Dieu châtie celui qu’il aime; il nous châtie pour notre bien, afin de nous rendre participants de sa sainteté. (Héb. XII, 6, 10)

C’est une épreuve destinée:

à purifier notre âme,

à perfectionner notre obéissance,

à nous faire obtenir une plus belle couronne.

C’est la route que Jésus a suivie, et par laquelle il fait passer les siens.

Si nous souffrons avec lui, nous dit-il, nous régnerons aussi avec lui (2 Tim. II, 12) Le chrétien sait d’ailleurs que son Père Céleste ne l’éprouvera pas au delà de ses forces;

il sait qu’il sera soutenu dans le combat:

il combat donc et il est soutenu:

il prie et il est exaucé: la grâce céleste mêle à ses adversités une douceur divine;

Il se glorifie même dans l’affliction, sachant que l’affliction produit pour lui la patience; la patience..... une espérance qui n’est point trompeuse, parce que l’amour de Dieu est répandu dans son cœur par le Saint-Esprit. (Rom V, 3-5)


4° Enfin, mes Frères, le chrétien n’est point condamné par la mort.

Il a pleuré ses fautes; il est revenu à son Dieu; il a vécu, IL MEURT DANS LA FOI EN JÉSUS; il meurt en prononçant le nom de Jésus.

Que peut-il craindre?

La mort n’est plus à ses yeux un tyran sourd et cruel qui vient l’abattre sous son joug de fer; c’est un messager d’heureuses nouvelles. C’est une amie qui vient lui annoncer cette heure du repos après laquelle il a souvent soupiré.

Elle tire le rideau qui lui dérobait l’avenir; et quelle perspective magnifique, ravissante, s’ouvre devant lui! comme elle fortifie son âme! comme elle adoucit ses douleurs!

IL VA QUITTER CE MONDE, mais ce n’est pas pour demeurer enseveli dans la solitude obscure et lugubre du tombeau. Ce n’est pas pour errer sans guide dans les déserts effrayants de l’éternité; c’est POUR ENTRER DANS LA JÉRUSALEM CÉLESTE, dans cette patrie des âmes heureuses vers laquelle se portaient dès longtemps son cœur et ses vœux, qu’il habitait déjà par le désir et l’espérance.

C’est là qu’il retrouvera ces parents, ces amis vertueux auxquels son âme était liée.

C’est là qu’il formera de douces et nobles relations avec les anges, avec les justes de tous les temps.

C’est là qu’il ne fera qu’un cœur et qu’une âme avec toutes ces créatures glorieuses qui bénissent sans cesse le Dieu qu’il a adoré.

C’est là, ô bonheur ineffable! c’est là qu’enfin il contemplera ce Jésus qu'il aime sans l'avoir vu; en qui il croit, quoiqu'il ne le voie pas encore, tressaillant déjà d’une joie glorieuse, remportant ainsi le salut de son âme pour récompense de sa foi. (1 Pierre I, 8-9)

C’est là qu’il sera parfaitement uni avec le Dieu pour lequel son cœur fut formé.

C’est là, qu’affranchi des misères de ce corps périssable, et voyant Dieu comme face à face, (1 Corinth. XIII, 12) il l’aimera sans tiédeur, sans distraction , comme il a toujours désiré de l’aimer.


Ô mort! où est donc ton aiguillon?

ô sépulcre! où est ta victoire?

(1 Corinth. XV, 55)


Non, non; tu n’as plus rien qui puisse effrayer le fidèle; les spectres hideux qui formaient ton cortège ont disparu; tu présentes aux enfants de Dieu l'héritage qui ne peut ni se souiller ni se flétrir et QUI NOUS EST RÉSERVÉ DANS LE CIEL. (1 Pierre I, 4)

Grâces soient rendues à Dieu qui nous donne la victoire par notre Seigneur Jésus-Christ!  (1 Corinth. XV, 57)

Tel est le bonheur du vrai disciple de Christ; telles sont ses prérogatives.

Après les avoir méditées et nous en être pénétrés, non, mes Frères:

nous ne nous laisserons point remettre sous le joug que Jésus a brisé.

Nous ne croirons point qu’après la mort il est encore une condamnation à subir, qu’il est un lieu de purification et de souffrance où doivent passer la plupart des rachetés avant d’arriver au séjour du bonheur.

Non; nous ne craindrons point ce que le Sauveur nous a appris à ne pas craindre; nous le savons:


LE PLUS COUPABLE DES HOMMES N’A BESOIN D’AUCUNE AUTRE EXPIATION

QUE DE CELLE QUI NOUS EST ACQUISE

PAR LE SANG DE CHRIST

SELON LES RICHESSES DE SA GRÂCE.

(Eph. I, 7)


Ce sang précieux nous purifie de tout péché; (1 Jean I, 7) dès que nous en sommes couverts par la foi, dès que nous recevons Jésus dans notre cœur, dès lors le fidèle est LAVÉ, JUSTIFIÉ, SANCTIFIÉ. (1 Corinth. VI, 11)

A son heure dernière, tu t’approcheras de lui, Ô mon Sauveur, tu seras son guide et son soutien , tu lui diras que la mort est le dernier ennemi qu’il ait à vaincre, (qu’au delà du tombeau, il n’y a pour lui ni douleurs ni combats à redouter) tu lui diras, comme autrefois à ton Apôtre: Heureux dès à présent ceux qui meurent au Seigneur, car ils se reposent de leurs travaux et leurs œuvres les suivent. (Apoc. XIV, 13)

Mais, d’un autre côté, prenons garde de ne pas nous attribuer sans examen, avec une indiscrète présomption, LES PRIVILÈGES QUI NE CONVIENNENT QU’AUX ENFANTS DE DIEU.

Hélas! c’est une des plaies de l’Église!

Quand nous parlons du sacrifice du Grand Médiateur , et de cette réconciliation du Ciel avec la terre opérée par son sang, il faut craindre de tranquilliser trop et mal ceux qui nous écoutent; il faut nous hâter de prévenir les conséquences qu’ils sont tout prêts à tirer de nos discours.

Leur âme se repose aisément sur ces vérités consolantes; mais, ce qui est douloureux à penser, au lieu de s’en faire un nouveau motif d’ardeur, de dévouement, de zèle, ils s’en autorisent en secret pour se laisser aller au relâchement. Il leur semble, ô mon Sauveur!

IL LEUR SEMBLE (à tord) que tu es venu remplir notre tâche à notre place, que tu as combattu pour nous dispenser de combattre, que tu as vaincu le péché pour nous épargner la peine de résister à nos passions.

Ah! loin de nous, mes Frères, cette sécurité fatale!

N’oublions jamais que ce beau privilège d’être exempt de la condamnation et de la crainte n’appartient pas à tous ceux qui se disent chrétiens, mais à ceux qui le sont réellement, à ceux qui disent du fond du cœur avec l’Apôtre:

Demeurerons-nous dans le péché afin que la grâce soit plus abondante?

À Dieu ne plaise!....

Ne savons-nous pas que nous tous qui ayons été baptisés pour appartenir à Jésus-Christ.., nous avons été ensevelis avec lui.., afin que comme il est ressuscité par la gloire du Père, nous marchions aussi dans une vie nouvelle? (Rom. VI, 1- 4)


N’oublions jamais qu’il y aurait une horrible impiété à penser que le Saint et le Juste n’est venu QUE pour nous apporter l’impunité, et nous permettre de persévérer dans le péché.

N’oublions jamais que s’il nous procure le pardon, IL VEUT EN MÊME TEMPS NOUS AFFRANCHIR DU PÉCHÉ; il veut que nous cherchions en lui, que nous recevions de lui l’une et l’autre de ces grâces, et que:


CERTAINEMENT sa justice ne nous sera pas appliquée,

si nous ne désirons pas sincèrement

d’être conduits par son Esprit et animés de sa vie.


Examiner vous maintenant, mes Frères, voyez devant Dieu si vous pouvez vous rendre le témoignage:

que vous êtes en Christ ,

que vous marchez sur ses traces,

que c’est son Esprit qui vous anime ,

que vous offrez les traits de sa ressemblance, sa charité, sa piété, son détachement du monde, son humilité, ou du moins que vous vous attachez de toutes vos forces à imiter ces vertus,

et que, sentant votre impuissance, vous demandez sans cesse le secours qui vient d’en haut.

Voyez si cette tranquillité qui est dans votre âme est véritablement la paix de Dieu, ou si ce n’est que le calme imposteur qui précède l’orage, une sécurité funeste qui s’évanouira au dernier jour à l'ouïe de ces terribles paroles:

RETIREZ-VOUS DE MOI: je ne vous connais point, vous qui faites des œuvres d'iniquité. (Matth. VII, 23)


Mes chers Frères, je vous en conjure; mettons-nous en état d’être véritablement en paix, soit dans la vie soit dans la mort.

Est-il rien de plus beau, de plus grand, de plus heureux que d’être délivré des terreurs de la loi, des remords de la conscience et de l'esclavage du péché?

Est-il rien de plus beau, de plus grand, de plus heureux, que cette disposition d’une âme qui attend avec une fermeté modeste, avec une douce confiance, le bonheur à venir; qui porte ses regards sur la demeure des justes comme sur sa patrie, et sur les palmes immortelles comme sur un prix assuré; qui peut s’écrier avec saint Paul:

Qui accusera les élus de Dieu? DIEU EST CELUI QUI JUSTIFIE. Qui les condamnera?

Christ est mort et de plus il est ressuscité IL INTERCÈDE CONTINUELLEMENT POUR NOUS. (Rom. VIII, 33-34)

Ah! sans doute, il n’y a que la félicité des bienheureux qui puisse surpasser une telle félicité.

Qu’elle est bien faite pour notre âme, pour cette âme intelligente, sensible, avide de bonheur, et que rien ne contente ici-bas!

Quelle ressource au milieu des dégoûts, des amertumes, des secousses de la vie!

Quel bonheur de porter, en soi-même cette assurance de la miséricorde et de l’amour du Seigneur, cette paix céleste, contrepoids plus que suffisant de toutes les peines de la terre!


CHRÉTIENS, CETTE FÉLICITÉ PEUT ÊTRE LA NÔTRE.


II ne faut que le vouloir; il ne faut que chercher en Jésus notre délivrance, car nous trouvons tout en lui: Il est devenu par la volonté de Dieu notre sagesse, notre justice, notre sanctification, notre rédemption. (1 Corinth. I, 30)

S’il nous impose des devoirs qui paraissent difficiles, coûteux, il nous promet en même temps de nous donner la force nécessaire pour les observer , et de nous y faire trouver le contentement et le bonheur.

Il ne faut que montrer la sincérité de notre foi en cessant enfin d’être ingrats, insensibles.

Il ne faut après tout que nous livrer aux sentiments les plus naturels, aux émotions qu’excite la vue de ces symboles augustes, monument des souffrances du Rédempteur.

Regardez-les: songez aux événements qu’ils retraçent, à ce sang versé, à ce corps sacré rompu pour vous, et vous vous direz chacun à soi-même: Oui, il est juste que je vive dans la foi au Fils de Dieu, qui m'a aimé et qui s'est donné pour moi. (Gal II, 20)


Ô Jésus! ô Dieu Sauveur vivre pour toi, c’est travailler à notre vrai bonheur.

Vivre pour toi, nourrir cette âme que tu es venu sauver, la nourrir des sentiments délicieux de l’amour, de la piété, de l’espérance, c’est être sage et fortuné.

Allons, mes chers Frères, allons le promettre à la Table sainte;

allons le promettre avec sincérité; non, comme nous l’avons fait tant de fois, souvenir cruel! pour l’oublier en sortant du sanctuaire, mais allons le promettre pour le tenir, pour l’exécuter sans délai;

allons le promettre, mais désabusés de toute confiance en nos propres forces;

allons demander avec ardeur, avec humilité, la foi et la sagesse à Celui de qui elles émanent.

Allons lui dire:

Dieu tout bon, qui nous as donné ton Fils, nous voudrions enfin t'appartenir sans réserve et t’aimer sans partage! C’est ta grâce qui forme en nous ces heureux projets. Seigneur, donne-nous de les accomplir!

Ainsi soit-il.


 

Table des matières