Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !



DISCOURS FAMILIERS

D'UN PASTEUR DE CAMPAGNE

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L’OBLIGATION

DE CONCOURIR À L’ÉDUCATION RELIGIEUSE DES ENFANTS.

(Pour le jour de la distribution des prix)

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Instruis le jeune enfant dès l’entrée de sa carrière. (Prov. XXII, 6.)

Instruis l’enfant selon la voie qu’il doit suivre; Et quand il sera vieux, il ne s’en détournera pas. (V. Segond)


Mes Frères; il n’est point de devoir dont on sente plus généralement l’importance que celui de donner à la jeunesse une bonne éducation. On ne peut se dissimuler qu’en entrant dans le monde, en faisant les premiers pas dans la carrière de la vie, l’enfant ressemble au voyageur qui se met en route, et qui, pour ne pas se perdre ou ne pas s’égarer, a besoin d’être bien instruit du chemin qu’il doit suivre. C’est la persuasion où nous sommes de cette vérité qui fait pour nous l’intérêt de cette journée; nous l’attendons avec impatience: nous nous empressons de venir à cette époque dans le sanctuaire pour applaudir au succès de nos enfants; nous ne les voyons pas sans émotion recevoir les prix qu’ils ont remportés.

Mais vous le sentez, mes Frères, il ne suffirait pas d’éprouver cette émotion, cet intérêt, ces sentiments, si nous ne faisions rien d’ailleurs pour concourir au grand but de cette institution; si nous ne sentions pas à quoi chacun de nous est tenu pour contribuer à l’instruction de la génération naissante, et POUR L’AMENER À JÉSUS-CHRIST.

On se persuade trop aisément qu’on est dispensé de cette tâche, parce qu’on a pour la remplir moins de facilité que d’autres, ou qu’on y est appelé moins directement. Combien de personnes en effet qui, parce qu’elles n’ont point d’enfants ou que leurs enfants sont élevés, s’imaginent qu’un discours sur l’instruction religieuse de la jeunesse ne les regarde point!

Combien de pères eux-mêmes croient pouvoir se décharger de ces soins sur d’autres, ou prétendent en être dispensés, parce qu’ils n’ont pas, disent-ils, assez de talents et de lumières!

Or je dis, mes Frères, que le précepte de Salomon, dans notre texte, s’adresse à tous les individus et à toutes les classes de la société Je dis qu’il n’est aucun être raisonnable qui soit entièrement étranger à ce devoir, qui ne puisse et qui ne doive y concourir.


COMPRENONS ENFIN NOS OBLIGATIONS sur ce point capital, et encourageons-nous à les remplir.

Dieu veuille que ce soit là le fruit de ce discours et de la fête qui nous rassemble!

Dieu veuille qu’en réveillant l’émulation de nos enfants, sa parole et l’onction de sa grâce excitent aussi la nôtre; qu’en faisant naître chez eux le désir de profiter des leçons qu’on leur donne, elles nous fassent prendre l’engagement de leur consacrer des soins toujours plus tendres, plus assidus et plus religieux!

Ainsi soit-il.


I.


C’est d’abord aux pasteurs et aux maîtres établis pour l’éducation de la jeunesse à s’appliquer l’exhortation du Sage. C’est leur grand devoir; c’est leur occupation la plus douce; c’est le fondement de leurs plus chères espérances. Et comment un pasteur, un ministre de Jésus-Christ n’imiterait-il pas son Maître, qui reçut avec bonté les petits enfants qu’on lui présentait, leur imposa les mains et les bénit? (Marc X, 16)

Ah! s’il pouvait les voir sans attendrissement; s’il négligeait de les nourrir du lait de la doctrine sainte; s’il les admettait à la communion des Fidèles, sans avoir fait tous ses efforts pour leur donner l’intelligence de l’engagement qu’ils contractent, pour les pénétrer de sa sainteté et pour amener toutes leurs pensées captives à l’obéissance du Christ; (2 Corinth. X, 5) s’il faisait des chrétiens sans religion, sans foi, comment réparerait-il jamais à leur égard le défaut de ces premiers soins?

Quel fruit pourrait-il attendre de ses prédications?

Que pourrait-il élever là où il n’aurait posé aucun fondement?

Quel bien pourrait faire dans la suite un pasteur plus fidèle, qui ne trouverait dans cette malheureuse paroisse aucune connaissance de la religion; qui serait forcé de ramener aux premières instructions de l’enfance des hommes faits, que leur âge et leurs occupations en rendraient incapables?

L’instruction de la jeunesse, voilà donc une des parties les plus essentielles de la tâche d’un ministre de Jésus-Christ; voilà ce qu’une église a droit d’exiger de son pasteur.

S’il y apportait de la négligence, il serait indigne de la place qu’il occupe; mais s’il y met de l’ardeur, s’il en fait le grand objet de ses travaux, par quels témoignages de confiance et d’amour son Église pourra-t-elle le récompenser dignement?

J’en dis autant des maîtres appelés à le seconder et à préparer les enfants à ses instructions. Soutenez-Ies, mes Frères, dans leur pénible tâche: soutenez-les par votre reconnaissance et par vos égards. NE LES DÉTOURNEZ JAMAIS DE LEURS IMPORTANTES FONCTIONS; et s'ils n’y mettaient pas la constance, l’activité, l’intérêt qu’elles demandent, qu’ils sachent qu’à vos yeux ils seraient très coupables. Mais s’ils s’en acquittent avec fidélité, profitez avec empressement d’un si précieux secours. Profitez de leurs leçons et des nôtres. Laissez venir à nous vos enfants et ne les en empêchez point. (Matth. XIX, 14)


II.


Ne croyez pas cependant, pères et mères, que les soins donnés par nous à vos enfants puissent leur suffire, et que le pasteur ou le maître le plus zélé vous remplace jamais pleinement auprès d’eux. Hélas! l’instruction la plus prompte est encore trop tardive, puisque l’homme a le pouvoir et l’inclination de faire du mal avant que son esprit soit en état de réfléchir et d’enchaîner les idées les plus simples.

C’est donc à vous, pères et mères, à commencer l’éducation de vos enfants dès l'entrée de leur voie, et longtemps avant qu'ils puissent venir à nous.

C’EST à vous de jeter dans leurs jeunes cœurs les semences des vertus chrétiennes et les premiers principes des vérités saintes que nous travaillerons ensuite à développer.

Si vous laissez perdre ce temps précieux de l’enfance, vous les priverez vous-mêmes de toutes les ressources qu’ils pourraient trouver dans nos instructions, car ils manqueront, pour ainsi dire, d’un sens, d’un organe nécessaire pour les retenir et les comprendre; ils seront comme ces plantes qu’on a laissées languir, sécher dès leur naissance, et qui, lors même que dans la suite on les arrose, on les cultive, ne sont plus susceptibles d’accroissement. VOUS DEVEZ DONC ÊTRE LEUR PREMIER PASTEUR, LEUR PREMIER MAÎTRE. Vous le devez, et vous le pouvez!

Je sais qu’il est des parents qui ne craignent pas d’alléguer leur incapacité; et si j’avais à parler à ceux qui se servent de cette excuse pour déguiser leur négligence, leur indifférence pour la religion, je me contenterais de leur demander de quel droit ils ont cru pouvoir être pères, lorsqu’ils n’étaient pas en état d’en remplir le premier devoir, ou pourquoi ce sont eux précisément qui sont les moins attentifs à nous envoyer leurs enfants et à venir avec eux à nos catéchismes, afin d’apprendre à les instruire avec simplicité.

Mais j’aime à penser que je parle à des parents chrétiens, qui nous exposent de bonne foi une crainte que leur inspire la tendresse paternelle, et je leur répondrai que pour donner à un enfant les premiers principes de la religion, pour l’élever dans la crainte de Dieu et dans l’amour de son Sauveur, il ne faut pas beaucoup de loisir ou de lumières.

Ce qu’il faut surtout, c’est un intérêt vif et pressant, un cœur droit, un jugement sain. Les vérités sur lesquelles sont fondés les devoirs de l’homme, furent autrefois entrevues, du moins en partie, par quelques philosophes qui, renfermés dans l’enceinte de leurs écoles, les communiquaient mystérieusement à un petit nombre de disciples; mais depuis que Jésus joignant à une sagesse divine cette admirable simplicité qui le caractérise, depuis que Jésus, l’ami des hommes, est venu les instruire et découvrir les trésors de sagesse et de science qui étaient auparavant cachés, (Col. II, 2-3) on a pu dire que le soleil de justice a lui sur l’univers, et toutes les vérités morales ont acquis une évidence qui ne laisse rien à désirer.


Lisez donc avec vos enfants ce Livre le plus attrayant pour le sage et le seul dont il ne se lasse jamais; ce Livre qui, tel qu’une riche mine d’or où chacun puise à proportion de ses forces, est à la portée du plus simple, tandis qu’il offre au savant le sujet des méditations les plus sublimes.

Lisez avec eux non pas ces livres prophétiques de l’Ancien Testament, trop profonds ou trop élevés pour leur âge, mais ces belles histoires des patriarches, dont les mœurs simples ont encore tant de charme pour nous, quoique nous nous en soyons tant éloignés; celle du jeune Joseph, où brillent avec tant d’éclat la sagesse de la Providence et le triomphe de la vertu.

Lisez avec eux cette étonnante histoire de la prédication des Apôtres, ce monument éternel de leur zèle, de leur fidélité, de leurs travaux, de leurs souffrances et des triomphes de l’Esprit saint.

Lisez surtout cette vie du Sauveur, où son céleste caractère est empreint à chaque ligne; où toutes les perfections divines sont réalisées, pour ainsi dire, dans sa personne; où ils apprendront de bonne heure à le connaître et à l’aimer, comme celui qui représente et remplace pour nous le Dieu invisible; où ils apprendront qu’étant riche il s’est fait pauvre pour nous, afin que par sa pauvreté nous fussions enrichis; (2 Corinth. VIII, 9) qu’il est descendu du ciel pour chercher et sauver ce qui était perdu; (Luc XIX, 10) qu’il a souffert pour nous délivrer de la condamnation et de la mort; qu’il a porté sur la croix la peine de nos péchés; qu’il est ressuscité et monté au ciel pour nous y préparer une place, pour nous envoyer l’Esprit de lumière et de sainteté, et que pour tant d’amour il ne nous demande que de l’aimer à notre tour, de nous réconcilier avec Dieu, (2 Corinth. V, 20) de ne pas recevoir sa grâce en vain. (2 Corinth. VI, 1)


Parents religieux qui, dans le cours du jour du repos et de ces douces soirées d’hiver que vous passez au sein de votre famille, faites lire à vos enfants ces intéressants récits, vous pourriez nous dire avec quel plaisir ils s’y attachent, et quel charme vous trouvez à les entendre sortir de leur bouche naïve!

S’il fallait d’autres preuves de la bonté de cette méthode, nous citerions un fait bien digne d’attention: c’est que les habitants des vallées du Piémont qui, longtemps avant la réformation, existaient dans leur petit pays comme un rejeton de la primitive Église, n'ont guère eu que ce moyen pendant bien des siècles, pour instruire leurs enfants dans la voie du Seigneur.

Chaque père faisait réciter à sa famille:

le Symbole des Apôtres,

l’Oraison dominicale,

le Décalogue;

et soit dans la maison, soit au milieu des travaux champêtres, il lui racontait l’histoire sainte mise en cantiques, pour que les enfants pussent mieux l’apprendre et la retenir.

C’est ainsi qu’au milieu d’eux se conserva d’âge en âge la pureté, la première simplicité de la religion de Jésus.

Mais il est encore un livre où la main de Dieu lui-même a gravé ses perfections et son existence. Il n’a pas suffi, je l’avoue, pour empêcher les hommes de s’égarer; cependant ils y ont senti la présence de la Divinité. Ce livre c’est la nature, l’univers; et vos travaux eux-mêmes vous invitent sans cesse à y faire lire vos enfants.

Habitants des campagnes, heureux agriculteurs, votre profession n’est pas seulement la plus ancienne, la plus utile, la plus noble de toutes; elles vous rapproche de la Divinité; vous travaillez plus particulièrement sous ses yeux, sous cette voûte éthérée et brillante que nous regardons comme le séjour de sa gloire.

C’est de lui que vous recevez directement et sans intermédiaire les biens et les maux. Apprenez donc à vos enfants à écouter la voix de tous ces objets qui vous parlent du Créateur.

Lorsqu’au point du jour ils vous accompagnent à vos champs, et que le soleil levant remplissant la nature de son éclat, vient frapper leurs yeux éblouis, entretenez-les du Dieu qui tira du néant ce bel astre.

S’ils s’arrêtent pour prêter l’oreille aux accents mélodieux des habitants de l'air, dites-leur qu’ils bénissent le Créateur à leur manière et qu’ils nous invitent à le bénir à notre tour.

S’ils vous échappent pour cueillir la fleur qui s’épanouit, dites-leur que c’est lui qui donne aux animaux leur pâture et qui revêt les lis des champs. (Ps. CIV, 27; Matth. VI, 30)

Lorsqu’après avoir sillonné la surface de la terre, vous y jetez ce grain qui doit faire votre richesse, dites-leur: Tout mon art, tout mon pouvoir finit là; c’est Dieu qui le fera germer, pousser en herbe tendre, puis en épis dorés: Je plante, j’arrose; mais c’est Dieu qui donne l’accroissement.1 (1 Corinth. III, 6)

Quand vers la fin du jour vous reprenez le chemin de vos demeures, apprenez-leur à bénir le Dieu qui donne du repos à l'homme, et sous la garde duquel vous allez vous délasser de vos travaux.

Si des fléaux destructeurs viennent flétrir vos espérances, faites-leur respecter en eux les ministres du Très-Haut. Dites-leur qu’il fait des vents ses anges; (Ps. CIV, 4) qu’il rend quand il le veut, les cieux d’airain. (Deut. XXVIII, 23)

Si le succès répond à vos soins, que vos fils bénissent avec vous Celui qui envoie les pluies bienfaisantes et les saisons fertiles; Celui qui n’oublie point de rendre témoignage de ce qu’il est; Celui qui remplit vos cœurs de joie. (Actes XIV, 17)

Quand la plus riche des saisons amène pour vous de brillantes récoltes, quand vous les serrez avec un cœur satisfait, quand vos enfants bondissent autour de vous, n’oubliez pas alors de vous élever avec eux à Celui de qui vous tenez tous ces biens; embellissez, ennoblissez votre joie par le sentiment d’une si juste reconnaissance.

Lorsque vous formez vos enfants aux travaux et aux soins de la terre, formez-les de la même manière pour le monde à venir.

Dites-leur qu’il existe une terre plus fortunée, mais invisible, pour laquelle il faut semer, comme pour celle qui frappe leurs regards.

Dites-leur que c’est là qu’ils seront dédommagés, récompensés de leurs peines, de leurs sacrifices, par une récolte magnifique, qu’aucun orage ne peut détruire, qu’aucun insecte ne peut gâter, qu’aucun larron ne peut enlever.


Faites mieux encore.

Répétez-leur les leçons mêmes de ce Jésus qui, des scènes et des objets de la nature, tirait sans cesse des images pour nous instruire de nos devoirs et pour élever nos pensées à l’Auteur, au Conservateur de toutes choses.

Ainsi, par exemple, en cultivant votre champ, racontez-leur la parabole du semeur. Dites-leur ensuite: Votre âme, mes chers enfants, est le champ qu’il faut aussi cultiver. Ces pierres, ces épines, ces mauvaises herbes qui gâtent nos semailles, c’est la fidèle image de ces passions, de ces attachements déréglés, de ces désirs terrestres, qui étouffent si souvent dans le cœur humain la semence de la parole.

Nous cultivons nos champs avec soin; nous en arrachons les plantes inutiles; nous ne négligeons rien pour empêcher les hommes et les animaux d’y faire du dégât.


LAISSERIONS-NOUS NOTRE ÂME COMME UNE TERRE EN FRICHE, COUVERTE DE RONCES ET D’ÉPINES, COMME UN CHAMP TOUT OUVERT, FOULÉ AUX PIEDS ET RENDU STÉRILE?


En travaillant à votre vigne, apprenez-leur ce que dit le Seigneur dans l’Évangile: Je suis le cep et vous en êtes les sarments. Comme la branche de la vigne ne saurait porter du fruit, si elle ne demeure attachée au cep, ainsi vous n'en pouvez porter aucun; vous ne sauriez produire aucune œuvre véritablement bonne, si vous ne demeurez en moi; (Jean XV, 4) si vous ne vous attachez à moi dans toute votre conduite.

Si vos enfants se laissent aller à la crainte ou à l’inquiétude, faites-leur lire ces touchantes paroles: NE VOUS INQUIÉTEZ PAS.... Considérez les oiseaux de l'air. Ils ne sèment ni ne moissonnent; ils n'amassent rien dans des greniers, mais votre Père céleste les nourrit. Ne valez-vous pas beaucoup plus qu’eux?.... Voyez comment croissent les lis de la campagne. Ils ne travaillent ni ne filent. Cependant je vous dis que Salomon même dans toute sa magnificence na jamais été si bien vêtu que l’est un de ces lis. Or si Dieu prend soin de vêtir de la sorte une herbe des champs, qui fleurit aujourd’hui et qu’on jettera demain dans le four, combien plus prendra-t-il soin de vous vêtir, gens de peu de foi! (Matth. VI, 25-30)

À la vue d’un champ qu’on moissonne, racontez-leur la parabole du bon grain et de l’ivraie, et l’explication que le Sauveur en a donnée: dites-leur: Comme on amasse l'ivraie et qu’on la brûle dans le feu, il en sera de même à la fin du monde. Le Fils de l'homme enverra ses anges, qui enlèveront de son royaume tous ceux qui font des oeuvres d’iniquité.... mais les justes luiront comme le soleil dans le royaume de leur Père. (Matth. XIII, 40-43)

Quand ils jetteront les yeux sur un troupeau de brebis que garde un vigilant berger, apprenez-leur que l’Ami de nos âmes, le Sauveur des hommes, le Fils de Dieu se présente à nous comme LE BON BERGER qui nourrit ses brebis, qui les garde et les défend, qui va chercher celles qui s’égarent, les prend dans ses bras et les rapporte avec joie dans le bercail; qui les aime si tendrement qu’il a donné sa vie pour elles. C’est ainsi, mes Frères, que vous leur apprendrez à la fois à lire dans la nature et dans l’Évangile. C'est ainsi que vous les formerez le mieux à la sagesse et à la piété.

Vous pouvez encore instruire vos enfants par les événements dont ils sont témoins dans la société, par ce qui arrive tous les jours autour d’eux. Vous leur ferez voir tantôt comment la main du diligent l’enrichit; (Prov. X, 4) tantôt comment la maison du paresseux s’abaisse et penche vers sa ruine.

Vous leur montrerez la honte et la misère poursuivant l’ivrogne et le libertin; l’œil du mépris se fixant sur lui comme s’il avait une marque attachée à son front.

Voyez, au contraire, leur direz-vous, cet homme dont la vieillesse est honorée, que sa nombreuse famille chérit et que le public respecte. Des travaux utiles ont rempli les années de sa vigueur, et ses cheveux ont blanchi dans la carrière de l’honneur et de la probité.

Remarquez ce jeune homme dont tout le monde s’accorde à dire du bien, que chacun s’empresse à placer, à recommander et voudrait approcher de soi; c’est un fils tendre et soumis, respectant les vieillards, pieux, diligent, assidu au travail; il se souvient de son Créateur; il s’est donné à son Sauveur; il fuit les écarts et les dissipations de la jeunesse.

Voilà, ô mes fils, le modèle que vous devez vous proposer.

Voilà l’enfant que Dieu chérit et sur lequel reposent toutes ses bénédictions.

C’est ainsi qu’en regardant autour de vous, il n’y a point de vice ou de vertu dont vous ne puissiez trouver un exemple propre à frapper l’imagination vive et mobile de l’enfance, propre à lui faire reconnaître et adorer les dispensations de la Providence.

Vous devez et vous pouvez encore apprendre à vos enfants à lire dans la conscience, à reconnaître sa voix, à la respecter, à la consulter comme la voix de Dieu même. Interrogez-la dans tous les événements de leur vie.

Lorsqu’ils ont eu quelque tort envers un de leurs semblables, demandez-leur s’ils voudraient qu’on en agît ainsi envers eux: Voudrais-tu, mon fils, qu’un homme plus fort que toi abusât de sa force pour te ravir ce que tu possèdes?

Voudrais-tu qu’on divulguât tes fautes, ou qu’on te raillât de tes défauts, qu’on te blâmât, qu’on te condamnât, qu’on te jugeât sans t’entendre?

Et leur conscience droite et pure vous répondra toujours: Non. Alors vous graverez dans leur âme cette belle maxime, abrégé des devoirs de l’homme envers ses semblables:

Ne faites pas aux autres ce que vous ne voudriez pas qu’ils vous fissent. Tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le de même pour eux. (Matth. VII, 12)

Lorsque ensuite il vous feront l’aveu de quelque faute et que leur visage ingénu se couvrira de rougeur, descendez avec eux au fond de leur cœur; apprenez-leur que ce trouble, cette honte, ce malaise qu’ils éprouvent, est inséparable du mal.

Dites-leur que c’est là ce qui dès ici-bas justifie la Providence et fait le supplice du méchant.

Dites-leur que cet aiguillon qui les blesse légèrement aujourd’hui deviendrait, s’ils étaient jamais coupables de fautes graves, un poignard aigu et déchirant.

Lorsque au contraire l’approbation que vous donnerez à leur conduite remplira leur jeune cœur d’une vive satisfaction, apprenez-leur que cette joie inexprimable est une première récompense de la vertu, celle que Dieu lui a préparée dès ici-bas; et déclarez-leur que dans tout le cours de votre vie, vous n’avez point éprouvé de jouissance plus vraie, plus sensible.

S’il était cependant quelque père qui ne sût pas se servir de ces moyens d’instruction si naturels et si simples, il lui resterait une ressource puisssante.

S’il ne peut définir à son enfant la vertu, et lui parler de la piété, qu’il la fasse parler elle-même DANS TOUTE SA CONDUITE; qu’il la mette en action SOUS SES YEUX; que son fils le voie s’élever chaque matin, chaque soir à son Dieu, à son Sauveur, marcher toujours en sa présence, se rendre assidûment dans son temple pour l’invoquer, pour écouter sa parole; qu’il le voie supporter sans se plaindre la fatigue et la douleur, toujours sobre, diligent, doux et charitable.

Alors, n’en doutez pas, vous verrez ce jeune imitateur, attentif à sa conduite, la prendre pour modèle; et quand vous lui demanderez raison de quelqu’une de ses actions, il vous répondra: C’EST AINSI QU’AGIT MON PÈRE.

Et si ce père ajoute à l’influence de son exemple le soin d’accoutumer de bonne heure son fils à l’obéissance aux commandements de Dieu; s’il lui en fait faire un apprentissage, un exercice journalier; s’il le conduit dans la carrière du devoir, comme en lui donnant la main, il assurait ses premiers pas, ne réussira-t-il pas à lui rendre cette carrière douce et facile?


Oui, mes Frères, c’est surtout en pratiquant la religion qu’on s’en instruit et qu’on se fait une heureuse habitude de la vertu.

En accoutumant vos enfants à se contenter de peu, vous les rendrez sobres et patients; diligents et appliqués,

en leur assignant des travaux utiles et en ne souffrant pas qu’ils s’en distraient; maîtres de leurs passions,

en exigeant quelquefois qu’ils en fassent le sacrifice; pieux,

en leur faisant élever chaque jour leurs mains et leurs cœurs vers le ciel; sensibles au sort de leurs semblables,

en les engageant souvent à se priver de quelques jouissances pour l’amour d’eux;

enfin, mes Frères, en leur donnant une part dans vos œuvres de bienfaisance;

en faisant passer par leurs mains les secours que vous accordez aux malheureux;

en leur apprenant à les soigner, à les servir, à voir en eux Celui qui a déclaré qu’il regarde comme fait à lui-même ce qu’on aura fait pour le plus petit de ses frères, (Matth. XXV, 40)

VOUS OUVRIREZ LEUR ÂME À LA TENDRE COMPASSION, À LA CHARITÉ ÉVANGÉLIQUE; ils s’y livreront avec tant d’ardeur, qu’en ces moments heureux vous seriez tentés de croire que rien n’est plus facile que de porter un jeune homme à la vertu.

Mais, entraîné par l’intérêt de mon sujet, j'oublie qu’il me reste à peine quelques moments et qu’il est encore une foule de personnes à qui je dois adresser ce précepte: Instruis le jeune enfant dès l'entrée de sa carrière.


III.


Tels sont d’abord ceux qui peuvent être appelés à remplacer les pères et mères; d’autres membres de la famille, par exemple; les parrains encore, les tuteurs, les amis, les maîtres envers leurs jeunes serviteurs.

En l’absence d’un père ou lorsqu’il remplit mal son devoir envers ses enfants, un aïeul, un oncle ou quelque autre parent respecté dans la famille, se trouve obligé d’y suppléer.

(Histoires de la Bible tirées du vieux et du nouveau Testament pour l'instruction de la jeunesse. Par J.J. HUBNER – 1806 Texte original)

«Tous les peres et meres sont obligés en conscience d'élever leurs enfans dans la crainte de Dieu, afin qu'ils apprennent de bonne heure:

à régler leurs sentimens sur la vrai foi,

à mener une vie conforme à la sainteté de la religion Chrétienne,

et à pouvoir s'assurer de leur salut à l'article de la mort.

Si les peres et meres n'ont pas eux-mêmes assez de capacité, ou assez de loisir pour le faire, ils doivent remettre ce soin à quelqu'autre personne, ou Dieu leur redemandera le sang de leurs enfans mal élevés...»


Un parrain le serait-il moins, lui qui, de concert avec le père, s’est solennellement engagé à prendre soin que l’enfant qu’il présentait au Seigneur fût instruit dans sa doctrine et marchât dans les sentiers de sa loi!

Oublierait-il ses promesses?

Ce serment consacré par tout ce que les hommes révèrent, ne lui paraîtrait-il qu’une vaine formule?

Cette relation touchante ne lui semblerait-elle qu’une démarche d’usage, un acte de complaisance ou de politesse, et ne dirait-elle rien à son cœur, à sa conscience? 


Un tuteur obligé de conserver le bien de ses pupilles autant que le sien propre, croirait-il n’être point tenu à former leurs mœurs?

Ferait-il moins de cas de leur âme que de leur fortune?

Et tandis qu’il travaille avec intégrité, peut-être avec zèle pour améliorer leur sort, négligerait-il de les faire instruire dans la science du salut, de leur donner l’habitude des vertus qui peuvent embellir leur vie? 


Des amis ne se doivent-ils pas l’un à l’autre de veiller réciproquement sur la conduite de leurs enfants?

Peuvent-ils se donner une preuve plus touchante d’affection qu’en s’aidant sur ce grand objet, de leurs conseils et de leurs soins? 


Des maîtres se regarderaient-ils comme étrangers à ce devoir vis-à-vis de leurs apprentis ou de leurs domestiques?

Et comment ne revêtiraient-ils pas des sentiments paternels pour des enfants qui vivent dans leur maison, sous leur garde, et qui font en quelque sorte partie de leur famille?

Les former pour le Seigneur, n’est-ce pas les former pour eux-mêmes?

N’est-ce pas le vrai moyen de leur inspirer une vive, une éternelle reconnaissance, de s’assurer à jamais de leur zèle et de leur fidélité? 


Et ceux qui ont reçu dans leur maison quelqu’un de ces enfants abandonnés que nourrit la charité publique, croiraient-ils ne leur devoir rien que de bons traitements et une nourriture suffisante?

Pourraient-ils, sans injustice et sans remords, leur refuser ce que nos sages et pieux Directeurs exigent par-dessus tout et mettent au premier rang, des conseils, de l’attention sur leurs mœurs, le temps et les moyens de s’instruire et de chercher dans la religion le bonheur qu’ils ne peuvent guère espérer ici-bas?

Voudraient-ils les priver de la seule ressource, du seul appui, du seul Père qu’il aient dans l’univers?

C’est ainsi, mes Frères, que nos relations avec la jeunesse se multiplient à l’infini; mais pourquoi m’arrêter davantage à l’énumération qu’on en peut faire! Disons tout en un mot.


IV.


Il n’est personne, dans quelque situation, dans quelque état que vous le supposiez, qui ne doive s’appliquer les paroles de mon texte, et qui ne puisse trouver l’occasion de contribuer à l’instruction de la jeunesse

Vous, mon cher Frère, vous pouvez donner un avis utile à ce jeune homme qui est dans une position embarrassante, reprendre cet autre qui tombe en votre présence dans quelque faute, avertir un père des désordres de son fils et des périls auxquels il s’expose.

Vous, qui êtes distingué par vos lumières ou par votre fortune, vous pouvez fonder ou soutenir ces établissements précieux destinés à former la jeunesse, à la remplir d’une généreuse émulation, à la préserver du vice et de l’indigence.

Les uns et les autres, vous pouvez toujours respecter l’innocence des enfants, lorsqu’ils se trouvent dans votre société.

QUEL ATTENTAT, mes Frères, ET QU’IL EST COMMUN CEPENDANT, que celui de tenir en leur présence des discours qui blessent la pudeur, la décence, qui souillent leur imagination, lui impriment une activité funeste, et portent la première atteinte à leurs mœurs!

«Que rien ne blesse les yeux ou la vue dans une maison qui renferme un enfant, disait un ancien sage. Si tu es tenté de faire une action honteuse, arrête-toi par égard pour l’enfant et respecte son innocence. Crains de lui apprendre des choses vicieuses avant même qu’il sache ce que c’est que le vice.»

Des chrétiens seraient-ils moins délicats, moins sévères?

Mais ce ne serait pas assez d’éviter de tels excès. Lorsque nous avons près de nous des enfants, pesons avec un nouveau soin nos discours et nos démarches.

Conduisons-nous avec eux comme nous ferions dans un jardin rempli d’arbustes fragiles et précieux, où nous n’oserions marcher qu’avec précaution.

En louant trop de frivoles avantages, craignons d'exciter leur vanité; leur ambition, en paraissant mettre trop de prix au crédit et à la grandeur; leur cupidité, en exaltant la fortune.

Que toutes nos paroles servent à les éclairer, à leur donner une juste idée des biens, des maux, des événements de la vie; à leur faire désirer ce qui est vraiment le tout de l'homme, suivant ce beau précepte de l’Écriture:

Que tous vos discours soient propres à édifier, selon que le besoin le demande, afin qu’ils communiquent la grâce à ceux qui vous écoutent. (Eph. IV, 29)

Qu’il ne sorte de votre bouche aucune parole mauvaise, mais, s’il y a lieu, quelque bonne parole, qui serve à l’édification et communique une grâce à ceux qui l’entendent. (V. Segond)

C'en est assez sans doute pour réveiller la vigilance des parents chrétiens; pour leur indiquer les ressources qui sont en leur pouvoir; pour apprendre à tous les membres de la société qu’ils sont tenus à les seconder, et ce qu’ils ont à faire à cet égard.

Réunissons-nous donc, mes Frères, pour remplir dignement cette belle tâche.

Pères, pasteur, maîtres, tuteurs, amis, parents, qui que nous soyons, jetons les yeux sur ces enfants, qui nous intéressent à tant de titres; et dans ce temple, en présence du Dieu qui nous les a confiés et qui nous entend, RENOUVELONS NOS ENGAGEMENTS ENVERS EUX, et prions le Seigneur de nous aider à les instruire, à les former pour lui.


Mes chers Frères, nous parlons souvent des maux de la société, de ses besoins; nous témoignons tous le désir de lui être utiles; mais nous ne pensons pas assez à ce que nous pouvons faire pour elle: il nous semble trop que servir l’État c’est le privilège exclusif d’un petit nombre d’individus, des hommes en place, des hommes distingués par leur crédit ou leur fortune.

Ne l’oublions pas; ici comme en beaucoup d’autres occasions, les moyens les plus simples sont les plus efficaces.

Nous pouvons tous contribuer en quelque chose à faire à l’Église, à la patrie, le plus beau don, l’offrande dont elle a le plus besoin, une génération plus pénétrée de l’esprit de l’Évangile, plus éclairée sur les espérances et sur les devoirs du chrétien.

Plein de cette idée, je ne négligerai rien pour élever vos enfants selon le Seigneur.

Plus que jamais je désire leur consacrer ce qui me reste de force et d’ardeur; mais sans votre concours je ne puis rien, et mes efforts inutiles ne feraient que retomber sur mon cœur pour le déchirer.

Si vous me secondez au contraire; si nous prions, si nous travaillons de concert, quelle espérance il nous est permis de concevoir!

Quelle grâce de Dieu se répandrait sur cette Église!

Quelle réforme dans les mœurs!

Quelle paix, quel bonheur dans les familles!

Ô Seigneur! pour l'amour de ton Christ, ô mon Dieu! exauce ces vœux ardents, qui de nos cœurs s’élèvent vers ton trône!


Que ton œuvre se manifeste sur tes serviteurs et sur leurs enfants!

(Ps. XC, 16)


Amen. Amen.



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