Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !


DISCOURS FAMILIERS

D'UN PASTEUR DE CAMPAGNE

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VŒUX MUTUELS

DU PASTEUR ET DU TROUPEAU


(Pour le premier jour de l'année)

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Béni soit celui qui vient au nom de l’Éternel! Nous vous bénissons dans la maison de l’Éternel. (Ps CXVIII, 26.)

Mes Frères; ce jour qui, dans la nature, n'a rien de différent des autres, est bien intéressant, bien solennel aux yeux de la religion; c’est le commencement d’une de ces périodes de la vie, d’une de ces années qui passent comme un songe, qui nous semblent se succéder les unes aux autres avec une rapidité toujours croissante, jusqu’à ce que le petit nombre de celles que Dieu nous a assignées étant rempli, nous entrions dans l’éternité, où l’on ne compte ni par siècles, ni par années.

Ce jour est donc celui des réflexions sérieuses: elles se présentent d’elles-mêmes à l’esprit.

Les hommes les plus légers, les plus terrestres y sont rappelés du milieu de leurs distractions et de leurs folles joies: ils éprouvent je ne sais quelle disposition nouvelle au recueillement, à la méditation: leurs yeux se tournent vers le grand Être, seul éternel, seul immuable, qui voit couler à ses pieds le torrent des siècles et des générations humaines, dont il a mesuré la durée, lis s’écrient involontairement:


Ô Dieu! nos jours sont dans tes mains.

(Psaume XXXI, 15/16)


Mais il est un autre point de vue sous lequel on peut envisager cette journée. C’est une époque de rapprochement et de redoublement d’affection entre les hommes aussi bien que de retour au Seigneur.

Oui; lorsque nous voyons commencer une de ces années, qui sont pour l’homme UN GRAND PAS VERS L’ÉTERNITÉ, il semble que nos liens se resserrent; il semble que les sentiments qui nous attachent les uns aux autres prennent un caractère plus animé, plus touchant.

C’est ainsi qu’après une action fatale à plusieurs guerriers, ceux qui survivent se sentent plus unis ensemble.

Ainsi des voyageurs après avoir franchi le passage qui leur a coûté quelqu’un de leurs compagnons, se regardent avec une affection mêlée d’attendrissement.

Voilà l’origine de ces vœux mutuels, pour que la carrière qui s’ouvre devant nous soit heureuse. Cet usage est respectable; il sera toujours cher aux âmes sensibles. La religion l’autorise: le christianisme en particulier le consacre; il en fait au cœur une douce loi, comme le fruit de la charité, de ce premier devoir, de ce commandement par excellence dont Jésus a fait la livrée de ceux qui sont à lui.


Mais il faut sanctifier cet usage:

il ne faut faire monter vers le ciel QUE DES VŒUX DIGNES DU DIEU QU’ON IMPLORE et de ceux pour qui nous les formons;

des vœux que le cœur dicte, que la piété purifie et QUE LE CIEL PUISSE EXAUCER.

C’est là, je m’assure, votre dessein, Fidèles, qui avez compris quelle doit être la première destination de cette journée; qui vous êtes rendus avec empressement dans ce temple.


C’est ici qu’après avoir adoré le Dieu créateur, le Dieu sauveur;

après vous être prosternés devant celui qui vous a faits, qui vous conserve, qui vous a rachetés;

après avoir tourné les yeux encore une fois sur l’année qui vient de finir, pour REMERCIER LE SEIGNEUR DE TOUTES SES GRÂCES, pour renouveler l’aveu de votre ingratitude, pour implorer votre pardon au nom de Jésus-Christ;

C’est ici, dis-je, qu’après avoir rendu à votre Père céleste cet hommage religieux, vous venez avec ceux qui vous sont chers VOUS METTRE SOUS SA GARDE, et ne formant plus qu’une grande famille, réclamer en commun sur vous tous sa protection soit pour le corps, soit pour l’âme.

C’est ici que vous venez lui dire, comme le Roi prophète dans le verset qui précède notre texte: ÉTERNEL, SAUVE-NOUS! ÉTERNEL, FAIS-NOUS PROSPÉRER!

Mes chers Frères, ces sentiments sont aussi les nôtres. Nous venons nous joindre à vous dans la maison de Dieu pour assiéger de concert le trône des miséricordes divines.

Nous venons élever en votre faveur des mains suppliantes, et nous recommander ensuite nous-mêmes à vos prières.

Livrons-nous donc au sentiment qui doit remplir nos cœurs. Que ce discours soit la naïve expression des vœux que le pasteur fait pour son troupeau, et de ceux qu’à son tour le troupeau formera pour son pasteur.

Oui, mes Frères bien-aimés, réunissons en ce jour nos prières; élevons tous ensemble nos cœurs vers le trône du Dieu des miséricordes, afin de trouver grâce et d'être secourus dans nos besoins. Ainsi soit-il. (Héb. IV, 16.)


I.


Bénir tous les membres de l’Église, c’est la fonction la plus intéressante de notre ministère.

Dieu lui-même en donna l’ordre à Moïse en ces termes: Parle à Aaron et à ses fils. Dis-leur: Vous bénirez les enfants d’Israël... Vous réclamerez mon nom sur eux, et je vous exaucerai. (Nomb. VI, 23, 27)

Fonction chère à notre cœur autant qu’elle est honorable, avec quelle joie nous nous en acquitterons aujourd’hui! Avec quelle ardeur de sentiments et de vœux nous dirons à cette heure:


NOUS VOUS BÉNISSONS DANS LA MAISON DE L'ÉTERNEL!


Église dans laquelle il a daigné nous établir pasteur, nos premiers vœux seront pour toi! Dépôt sacré qu’il nous a confié, et que nous n’envisageons qu’avec une tendre sollicitude, objet de nos soins, de nos travaux, de nos prières, notre âme est liée à toi, et selon l’expression d’un apôtre: Nous sommes jaloux de toi d’une sainte jalousie, parce que nous t’avons consacrée à Jésus-Christ, et que nous voudrions te présenter à lui comme une vierge chaste. (2 Cor. XI, 2)

PUISSENT L’INCRÉDULITÉ, LES VICES, LES SCANDALES DISPARAÎTRE DU MILIEU DE TOI!

Puisses-tu désormais par la sincérité de ta foi, par la pureté de tes mœurs, honorer le beau nom que tu portes, d’Église chrétienne et réformée!

Puisse chacun de tes membres faire de continuels progrès dans la grâce et dans la connaissance de notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ! (2 Pier. III, 18)

Qu’il daigne lui-même, ce grand Pasteur des âmes, (1 Pier. II, 25) veiller à la garde de celles qu’il a mises sous ma conduite!

Ô Toi qui peux tout!

conserve-les pour la gloire de ton nom!

Comble de tes plus précieuses bénédictions celles qui répandent parmi nous la bonne odeur de l’Évangile!

Qu’elles soient longtemps l’honneur et l'édification de cette Église!

Ramène celles qui s’égarent!

Ne permets pas que l’irréligion, le péché, ces monstres odieux, te les ravissent et les dévorent!

Puissent ces mêmes assemblées que nous formons ici devant Toi, puissent-elles, ô mon Dieu, ô mon Sauveur, se trouver un jour réunies toutes entières aux pieds de ton trône pour célébrer tes louanges, pour avoir part à ta félicité!


Vous tous qui habitez ces campagnes...!

Nous vous bénissons dans la maison de l'Éternel!

Dieu veuille soutenir vos forces, adoucir vos travaux!

Dieu veuille faire prospérer l’œuvre de vos mains et vos justes entreprises!

Que les rosées des cieux, que les pluies de la première et de l’arrière-saison tombent sur vos champs et les rendent fertiles!

Mais pour cela cherchez à plaire au Seigneur:

par votre éloignement pour la débauche;

par votre amour pour le travail,

par un esprit de concorde et de charité,

par votre respect pour les choses saintes,

pour le jour que Dieu s’est réservé;

par votre empressement à lire sa parole, à l’invoquer, à marcher en sa présence, à lui rendre un culte public et particulier; à le servir dans son temple et dans vos familles;

par l’heureuse habitude de lui rapporter toutes vos actions; d’avoir toujours pour but de faire sa volonté.

Cherchez à lui plaire en travaillant moins pour l'aliment qui périt que pour celui qui subsiste en vie éternelle; (Jean VI, 27) en désirant premièrement le royaume de Dieu et sa justice, afin que, selon sa promesse, les autres choses vous soient données par dessus. (Matth. VI, 33)


Pères et mères, soyez bénis dans vos enfants!

Ils sont un héritage donné par l'Éternel, (Ps. CXXVII, 3) et votre bonheur ne peut être séparé de leur bonheur. Voulez-vous donc qu’ils soient heureux, à jamais heureux:


ÉLEVEZ-LES DANS LA CRAINTE DE DIEU,

DANS L’AMOUR ET DANS L’ATTENTE DE CHRIST.


Sachant voir en eux des êtres faits pour l’éternité, occupez-vous:

de leur âme immortelle plus que de leur corps,

de leur salut plus que de leur fortune,

de leurs progrès dans la piété plus que de leur avancement dans le monde.

Si Dieu vous appelait à les perdre, oh! qu’il vous donne lui-même la soumission nécessaire pour supporter un tel coup! ou plutôt, Seigneur, que ce soient eux qui nous ferment les yeux! Qu'après les avoir vus croître en grâce et en sagesse devant Toi et devant les hommes, (Luc II, 52) nous puissions, en les quittant, en les recommandant à ta bonté, en les mettant avec confiance sous ta protection, nous puissions leur appliquer ces paroles de notre Sauveur: Ils ne sont pas du monde. Père saint, préserve-les du mal: sanctifie-les par ta vérité! (Jean XVII, 11, 15-17)

Puissions-nous ainsi descendre en paix dans la tombe avec la douce espérance de retrouver dans l’éternité ceux qui nous furent chers sur la terre, et de reçevoir dans l’assemblée des bienheureux ceux que nous introduisîmes dans cette vallée de larmes!


Mes Enfants...!

Nous vous bénirons aussi dans la maison de l’Éternel.

Dieu veuille vous faire la grâce de répondre aux soins éclairés de ceux qui vous ont donné le jour!

Dieu veuille vous faire la grâce de commencer dès à présent à imiter votre Sauveur, qui, dans les jours de sa jeunesse était soumis à ses parents. (Luc II, 51)

Dieu veuille enfin vous bénir, en vous conservant les vôtres! Sans doute s’il vous les retirait, il serait lui-même votre Père. Sans doute vous pourriez dire, comme le Psalmiste:


Quand je n’aurais pour moi père ni mère;

Quand je n'aurais aucun secours humain,

Le Tout-Puissant, en qui mon âme espère,

Pour me sauver me prendrait par la main.

(Ps. XXVII)


Non, il ne vous abandonnerait point, pourvu que vous ne l’abandonnassiez pas vous-mêmes; mais puisqu’il vous a donné ces appuis naturels, ces guides, ces protecteurs précieux et chéris, priez-le avec nous de vous les conserver, d’éloigner de vous le deuil, si lugubre à votre âge, et vos prières simples et innocentes lui seront agréables.


Jeunes gens, écoutez aussi notre voix...!

Montrez-vous dignes d’être bénis dans la maison de l'Éternel.

Les années s’accumulent sur la tête de ceux qui vous précèdent. Le temps s’approche où nous nous reposerons auprès du Seigneur. Encore quelques-unes de ces courtes années, et votre pasteur, vos parents, vos maîtres, seront couchés dans la tombe à côté de nos ancêtres qui nous attendent.

CE SERA VOUS ALORS QUI FORMEREZ LA SOCIÉTÉ.

Puisse-t-elle être pour vous florissante et tranquille, plus tranquille qu’elle n’a été pour vos pères!

Puissiez-vous couler des jours heureux, sans regrets, sans remords! et pour le pouvoir, préservez-vous de la contagion des mauvais exemples et des passions de la jeunesse. (II Tim. II, 22)

Souvenez-vous de votre Créateur... avant que les jours mauvais viennent ;(Eccl. XII, 1/3) et puisque vous avez reçu Jésus-Christ pour votre Seigneur, attachez-vous à lui dans toute votre conduite. Soyez fondés et enracinés en lui. (Col. II, 6-7) C’est ainsi que vous préparerez le bonheur de toute votre vie. C’est ainsi que vous serez semblables à l’homme prudent qui bâtit sa maison sur le roc. (Matt. VII, 24)


Vieillards dont nous honorons les cheveux blancs...!

Recevez aussi nos vœux et nos bénédictions. Vous touchez à la fin de votre carrière, et quoique d'autres puissent descendre avant vous dans la tombe, vous ne pouvez vous dissimuler que l’heure de votre départ ne saurait être éloignée. Ne perdez donc pas un instant pour vous préparer à la mort, par une conduite digne de votre vocation, en ne vivant plus que dans la foi au Fils de Dieu qui nous a aimés. (Gal. II, 20)

Faites ainsi respecter votre vieillesse et bénir votre mémoire. Dieu veuille fortifier en vous l’homme intérieur à mesure que l’homme extérieur s’affaiblit! (2 Cor. IV, 16) Dieu veuille être lui-même votre soutien et votre guide quand vous traverserez la vallée de l’ombre de la mort, (Ps. XXIII) et lorsque cette tente où vous logez sur la terre sera détruite, lorsque cette maison de poussière que vous habitez s’écroulera sur ses fondements, Dieu veuille vous ouvrir dans le ciel cet édifice, ce domicile éternel qui n’est point l’ouvrage des hommes, (2 Cor. V, 1)JÉSUS EST ALLÉ NOUS PRÉPARER UNE PLACE, (Jean XIV, 2) et où nous demeurerons auprès du Seigneur! (2 Cor. V, 8)


Vous, pauvres, qui venez chercher des consolations.

Nous vous bénissons dans la maison de l'Éternel,

Dieu veuille vous conserver les forces et la santé qui vous sont nécessaires pour fournir à vos besoins!

Dieu veuille vous conserver la bienveillance de ceux qui peuvent adoucir votre misère!

Mais surtout, Dieu veuille vous aider à rendre votre pauvreté honorable par votre entière résignation à sa volonté, par votre reconnaissance pour vos bienfaiteurs, par vos efforts pour vous suffire à vous-mêmes, par votre horreur pour la fraude et l’injustice!

Dieu veuille vous apprendre à regarder votre état des yeux de la foi, comme celui dans lequel votre Sauveur, le Fils de Dieu, voulut naître et passer sa vie!

Dieu veuille que marchant sur ses traces, vous puissiez un jour lui dire avec confiance:

Ô mon Sauveur! reçois dans le séjour du repos ce pauvre qui, comme toi, ne possédait pas seulement un lieu où sa tête put reposer; (Matt. VIII, 20) qui se nourrit d’un pain arrosé de ses sueurs et souvent baigné de ses larmes; ce pauvre qui n’a point murmuré, qui n’a point envié le sort des riches, qui a marché par la foi, et qui gémit désirant avec ardeur d’être introduit dans son domicile céleste! (2 Cor. V, 2, 7)


Vous tous qui dans l’année que nous venons d’achever avez fait quelque perte, essuyé quelque revers, enduré quelque maladie, nous vous bénissons dans la maison de I'Éternel.

Nous prions Dieu qu’il vous donne l’esprit consolateur, qu’il ranime votre âme abattue, qu’il fasse succéder le calme à l’orage, qu’il change votre deuil en allégresse, en sorte que si la tristesse est entrée dans vos demeures, elles puissent désormais retentir d’un chant de triomphe et d'actions de grâce.

Nous le prions surtout que vous n’ayez pas souffert en vain, mais que, vous souvenant des promesses que vous lui faisiez aux jours de la douleur, et cherchant désormais le bonheur qui ne se trouve qu’en lui, vous éprouviez enfin que nos légères afflictions qui ne durent qu’un moment, produisent pour nous le poids éternel et une gloire infiniment excellente. (2 Cor. IV, 17)


Vous mes chers Frères, que le Seigneur a placés dans une honnête médiocrité; qui pouvez, sans trop de fatigues, vous procurer le nécessaire et quelquefois l’agréable, nous vous bénissons dans la maison de l’Éternel.

Nous prions Dieu de vous conserver cette heureuse aisance, de fortifier en vous le goût de la simplicité, de l’ordre, du travail, de la sobriété, de la bienfaisance et de cette piété qui a les promesses de la vie présente aussi bien que de celle qui est à venir. (1 Tim. IV, 8)

Nous le prions de vous accorder la consolation de voir vos enfants marcher sur vos traces et soutenir votre maison. Puissent-ils transmettre vos vertus aux enfants qui naîtront d’eux! Puisse votre exemple apprendre à ceux de nos frères qui sont moins prudents ou moins laborieux que vous, quel est le vrai moyen de se tirer de l’indigence, ou de la prévenir!


Terminerons-nous ici nos vœux, mes Frères, et ne nous souviendrons-nous pas des absents?

Oublierions-nous ceux de nos concitoyens que l’hiver a rappelés dans les murs de Genève?

Les oublierions-nous, eux qui ne nous ont point oubliés, qui ne nous ont quittés qu’en nous laissant des preuves de leur bienfaisance, et qui sont toujours prêts à partager nos peines, à les adoucir?

Dieu veuille les conserver, les protéger, les bénir.

Puissent-ils lorsqu’une saison plus riante embellira nos campagnes, revenir habiter parmi nous, et nous donner longtemps encore l’exemple de la piété et de la charité!

Oublierions-nous les membres de notre communauté qui sont en voyage, que leurs affaires ou le désir de s’instruire ont conduits loin de nous?

Ah! ils sont présents à notre pensée, et notre cœur les suit partout où le Seigneur les appelle. Que le Tout-Puissant daigne les préserver de tout péril! Qu’il les couvre de son bouclier! Qu’il ordonne à ses anges de les garder et d’assurer leur route! (Ps. XCI, 11)

Surtout qu’il conserve ou qu’il fasse naître dans leur âme son amour, et la crainte de son nom! Qu’il nous les rende pleins de foi et de piété, ou s’il juge à propos d’abréger pour eux l’épreuve de la vie, qu’il les reçoive dans son sein; qu’il leur fasse goûter près de lui le bonheur qu’on ne trouve point sur la terre!

Oublierions-nous ceux de nos frères que le poids des années, les infirmités ou la maladie ont privés de la consolation de paraître avec nous aujourd’hui devant le Seigneur?

Ah! de l’intérieur de leur demeure, de leur foyer solitaire ou de leur lit de souffrance, ils se joignent à nous par le désir et par la pensée; ils demandent d’avoir part à nos prières. Que notre âme s’élève donc en leur faveur dans la maison de l'Éternel.

Prions Dieu de jeter sur eux un de ses regards qui sont la délivrance même; de leur rendre la santé, s’il le juge à propos pour sa gloire et pour leur salut, de leur donner avec l'épreuve la force de la supporter, la grâce de se sanctifier par elle et cette foi chrétienne qui nous justifie et nous fait avoir la paix avec Dieu. (Rom. V. 1) Cette foi qui ne nous rend pas insensible aux maux, mais qui nous y rend supérieurs, qui les charme par l’espérance; cette foi qui peut changer les afflictions en joie, et les amertumes en consolation!

Vous aurez aussi part à nos vœux, vous que nous n’apercevons point dans cette assemblée, et qui n’avez pas eu de raison légitime pour vous en tenir éloignés, vous tous dont la tiédeur ou l’irréligion nous afflige et nous épouvante.

Nous prierons Dieu de ne pas vous priver de ces bénédictions qu’il se plaît à répandre sur les hommes droits et pieux, quoique vous n’en sentiez pas le prix, quoique vous méprisiez les trésors de sa bonté, de sa patience et de sa longue attente. (Rom. II, 4)

Nous le prierons de frapper encore à la porte de votre cœur et de ne pas permettre que vous la passiez dans l’oubli de son nom, cette année que vous commencez peut-être sans penser à lui, sans le remercier de ce qu’il a prolongé votre existence.

Nous le prierons d'ouvrir les yeux de votre entendement afin que vous compreniez, tandis qu’il est temps encore, que c’est à nous de nous réconcilier avec Dieu PAR Jésus-Christ, à travailler à notre salut avec crainte et tremblement, (Philip. II, 12) que nos jours doivent être employés; que c’est là notre grande affaire, LA SEULE CHOSE NÉCESSAIRE; (Luc X, 42) et qu’il n’y a de vrai bonheur ici-bas que pour ceux qui aiment le Seigneur, qui mettent en lui leur confiance, qui cherchent en lui leur consolation et leur souverain bien.


Voilà, mes chers Frères, les vœux que votre pasteur forme aujourd’hui pour vous: les voilà exprimés avec simplicité et de l'abondance du cœur.

Maintenant ne nous rendrez-vous pas amour pour amour et vœux pour vœux?

Quand nous vous disons avec le Psalmiste: Nous vous bénissons dans la maison de l'Éternel, ne répondrez-vous pas avec les Hébreux: Béni soit celui vient au nom de l'Éternel!

Nous ne vous le cacherons pas; ce qui nous a frappés dans ce texte, ce qui nous a séduits comme par un charme secret, c’est cette réponse de l’Église au pasteur qui prie pour elle; ce sont les bénédictions qu’elle lui donne à son tour.


II.


Bénissez-nous donc, mes Frères,

1° par votre affection et votre attachement.

Recevez-nous dans votre cœur, (2 Cor. VII, 2) nous vous dirons avec un apôtre. Si ceux qui voudraient faire le mal sans essuyer de reproches, sans éprouver de remords, regardent leur pasteur comme un inspecteur incommode, comme un censeur fâcheux; s’ils fuient sa présence, craignant d’entendre de sa bouche des vérités désagréables; pour vous, chrétiens:

Regardez-nous toujours comme l'envoyé de votre Père céleste, comme votre premier ami même pour les choses de la terre, qui s’empressera toujours d’employer en votre faveur ses bons offices, dès que vous le désirerez; qui envisage comme une douce prérogative de sa place, de prendre en main la cause du faible et du pauvre, de faire pour lui ce qu’il ne peut pas toujours faire lui-même.

Regardez-nous surtout comme l'ami de votre âme, qui vous éclaire sur vos plus chers intérêts, qui se réjouissant des biens que Dieu vous accorde, vous presse, vous conjure d’en faire un bon usage; qui s’affligeant avec vous de vos peines, cherche à les adoucir, à vous en faire recueillir des fruits de salut, qui prie avec vous au lit de la mort, et vous aide à mourir en paix, à pouvoir dire comme saint Étienne: Seigneur Jésus, reçois mon esprit. (Actes VII, 59)

Ne l’oubliez jamais: toutes nos fonctions, tous nos travaux, tous nos vœux, tendent à vous préserver des malheurs du vice, à vous faire jouir de la vie et voir des jours heureux, à faire régner parmi vous l’ordre et la justice, à vous faire connaître l'amour de Christ qui surpasse toute connaissance, afin que vous soyez remplis de tous les dons de Dieu. (Eph. III, 19) Ainsi vous êtes TOUS nos frères bien-aimés en Jésus-Christ; nous vous chérissons TOUS, les uns parce qu’ils le méritent, les autres parce que nous espérons les gagner et les ramener au Seigneur.

Si la douleur de voir l’esprit de la religion éteint chez plusieurs nous a quelquefois arraché des plaintes et des censures; Si dans le cours de notre ministère nous avons dit quelquefois au pécheur des vérités dures, mes chers Frères, ne l’attribuez qu’à l’intérêt qui nous presse pour votre salut, qu’au zèle dont un pasteur doit être animé pour la gloire de Dieu. Notre intention n’a jamais été d’humilier personne, mais de vous avertir, de vous reprendre, de vous exhorter, comme un bon père avertit, reprend, exhorte ses enfans, et leur parle avec d’autant plus de vivacité qu’il les aime et les chérit davantage.


2° Bénissez-nous encore par la communion de vos prières.

Priez tous ensemble pour moi, disait saint Paul aux fidèles; (Col. IV, 3) et à combien plus forte raison devons-nous tenir ce langage, nous qui dans un profond sentiment de notre indignité sommes réduit à dire: Qui suis-je, o mon Dieu, pour que tu m'envoies à ce peuple! (Exode III, 11)

Ainsi donc que l’Église tout entière s’élève au Ciel en notre faveur dans ce temple! Que ses membres se souviennent de nous dans leurs dévotions particulières! Demandez à Dieu non qu’il nous accorde des bénédictions temporelles; à cet égard nous ne devons souhaiter que ce qu’il voudra lui-même, mais qu’il nous donne D’ÊTRE FIDÈLES DANS L’EMPLOI DONT IL NOUS A REVÊTUS, de ne pas nous laisser décourager par la contradiction des pêcheurs, de prêcher toujours l’Évangile avec liberté, avec autorité, et de ne jamais en affaiblir l’impression par notre conduite.

Demandez-lui qu’il nous ouvre la porte pour la prédication de la parole, afin que nous puissions annoncer le mystère de Christ, et le faire connaître à tous. (Col. IV, 3-4)

En un mot demandez-lui qu’il nous accorde l’esprit de force, de charité, de prudence, (2 Tim. I, 7) dont nous avons besoin pour travailler à votre sanctification et à la nôtre. Si les prières d’un bon pasteur sont le canal par lequel Dieu se plaît à faire passer ses grâces sur le troupeau, sans doute aussi les prières du troupeau pour son pasteur sont un moyen puissant pour obtenir de la grâce divine les bénédictions dont le pasteur se reconnaît indigne.


3° Bénissez-nous enfin, mes Frères, par vos progrès dans la foi et dans la sanctification.

Ce que nous, désirons en effet, ce que nous désirons surtout, c'est de vous voir mourir au péché et vivre pour Dieu en Jésus-Christ notre Seigneur, (Rom. VI, 11) vous dépouiller du vieil homme qui se corrompt par les passions qui le séduisent, et vous renouveler dans votre esprit et votre entendement, vous revêtir du nouvel homme créé à l’image de Dieu, dans une justice et dans une sainteté véritables; (Eph. IV, 22-24) en un mot, renoncer à l'impiété et aux convoitises mondaines, (Tite II, 12) et vous convertir à Dieu, pour servir le Dieu vivant et vrai, et pour attendre du ciel son Fils Jésus qu’il a ressuscité, et qui nous délivre de la colère à venir. (1 Thess. I, 9-10)

Sans cela, si notre ministère ne produit pas au milieu de vous ces fruits de vie, de quel prix seraient à nos yeux les marques d’estime et d’affection que vous pourriez nous donner?

Ah! Chrétiens, elles nous humilieraient; il semblerait que nous avons plus à cœur de vous plaire que de vous gagner à Jésus-Christ.

Ô mes chers Frères! si votre cœur est susceptible de quelque mouvement de charité; si vos entrailles peuvent être émues par quelque sentiment de reconnaissance; s’il y a quelque consolation en Christ, quelque union d’esprit, quelque affection cordiale; (Philip. II, 1) si vous voulez que nous puissions vous bénir avec succès; si vous voulez qu’elles soient efficaces ces prières ardentes que nous faisons en votre faveur, recevez avec douceur, avec docilité, la parole qui peut sauver vos âmes. (Jac. I, 21)

Rendez ainsi notre joie parfaite; car quelle est notre espérance, notre joie et la couronne dont nous faisons notre gloire? N’est-ce pas vous qui devez l’être en la présence de notre Seigneur à son avènement. (1 Thess. II, 19)

Mes Frères, mes chers Frères, s’il existe désormais entre nous ce concert ravissant du pasteur et du troupeau, que nous laisserait-il à désirer? Il attirerait sur chacun de nous les grâces les plus précieuses, et après avoir fait sur la terre notre bonheur mutuel, il nous disposerait à la quitter avec la douce espérance de nous retrouver un jour recueillis, réunis auprès du Seigneur, pour être à jamais les heureux objets de ses miséricordes et de son amour.

Ainsi soit-il.



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