Sentez vos misères, et soyez dans le deuil et pleurez; que votre rire se change en pleurs, et votre joie en tristesse.
Humiliez-vous devant le Seigneur et il vous élèvera. (Jacques IV, 9 et 10.)
Le monde reproche souvent à ceux qui font une profession ouverte et sincère de foi au Sauveur, d'être des orgueilleux, qui se croient sans défaut et sans péché. Il croit que quand ils disent qu'ils ont UNE FERME ESPÉRANCE DE LA VIE ÉTERNELLE, c’est comme s'ils disaient: Je la mérite, j'en suis digne. Hélas le monde, à cet égard, comme à tant d’autres, porte un jugement faux et injuste.
Les vrais chrétiens attendent, il est vrai, avec une douce confiance, le salut et la vie; mais c’est en toute humilité, c'est en se reconnaissant entièrement INDIGNES DE CE SALUT; c’est par pure grâce qu’ils l’attendent, c’est UNIQUEMENT PAR LES MÉRITES DE JÉSUS, leur Sauveur, en qui ils mettent leur espérance, et nullement par leurs mérites; ils savent que ceux-ci les conduiraient tout droit à la perdition.
Si donc de trop nombreux restes d’orgueil sont encore dans leurs cœurs, ils sentent pourtant leurs misères; leur orgueil même les afflige sincèrement; ils le déplorent, ils le combattent; et, comme Ezéchias, ils s'humilient de ce qu’ils se sont élevés. (2 Chroniques XXXII, 26.)
Cependant comme ils sont loin de sentir suffisamment leurs péchés, il ne sera pas inutile à leur bien et à la gloire de l’Évangile dont ils font profession, qu'ils les sentent encore mieux et que nous venions leur dire, dans ce but, avec la Parole de Dieu:
Sentez vos misères; soyez dans le deuil et pleurez; que votre rire se change en pleurs et votre joie en tristesse. Humiliez-vous devant le Seigneur, et il vous élèvera.
C’est donc ESSENTIELLEMENT aux enfants de Dieu, aux âmes converties et régénérées que nous allons aujourd’hui parler.
* * *
Sentez vos misères.
De quelles misères parle ici l'apôtre saint Jacques? Car il y en a de diverses sortes qui travaillent les hommes.
1) Il y a les misères temporelles ou corporelles, comme la pauvreté, les maladies, les injustices de nos semblables et tant d’autres.
En général, il n’est pas nécessaire d’exhorter qui que ce soit à sentir de telles misères. Nous les sentons ordinairement trop vivement.
Le monde le prouve par ses murmures, par son impatience.
Le disciple de Christ le prouve souvent par son abattement, et quelquefois par ses plaintes, quand il est sous le poids de l'épreuve; témoin Job. (Job III)
Cependant, quoique généralement de tels maux soient sentis, il est des cas, où ils ne le sont pas suffisamment et surtout d’une bonne manière.
Le monde oppose souvent aux châtiments de Dieu, un cœur dur, une âme fière; c’est là ce qu’il appelle de la force d’âme; c’est simplement une nouvelle preuve de sa faiblesse, de sa corruption.
Tu les as frappés, disait Jérémie à l’Éternel, et ils n'en ont point senti de douleur; tu les as consumés, ILS ONT REFUSÉ DE RECEVOIR INSTRUCTION; ils ont endurci leurs faces plus qu'un rocher; ILS ONT REFUSÉ DE SE CONVERTIR. (Jér. V, 3.)
Le chrétien ne sent pas toujours le châtiment comme il le faudrait. Il a aussi son insensibilité, sa dureté.
Mais les misères dont parle l'Apôtre dans mon texte, ce sont les misères spirituelles, C’EST LE PÉCHÉ; voilà les plus grandes de toutes, et pourtant les moins senties.
Enfants de Dieu, il vous a été donné de les sentir jusqu’à un certain point, comme nous l'avons déjà dit; mais nous venons vous exhorter à les sentir toujours davantage et vous en rappeler quelques-unes.
D’abord nous appelons votre attention sur la principale de vos misères spirituelles, sur la source de toutes les autres, LA FAIBLESSE DE VOTRE FOI; car comme la foi, qui unit l'âme à Jésus, est la source de toute vie spirituelle, de toute obéissance véritable:
La faiblesse de notre foi est la source de notre faible vie spirituelle,
du peu d'obéissance que nous rendons au Seigneur.
Vous avez sans doute la foi, et la foi vivante, grâce à Dieu qui vous l’a donnée!
Vous êtes persuadés:
- que Jésus-Christ est venu au monde pour sauver les pécheurs; (1 Tim. I, 15.)
- que sans lui vous êtes perdus;
- QU'EN LUI VOUS ÊTES SAUVÉS;
- que vous êtes sauvés par grâce, par la foi, que cela ne vient point de vous, que c'est un don de Dieu, que ce n’est point par les œuvres, afin que personne ne se glorifie, (Eph. II, 8-9.)
-
et que ce Sauveur, qui s'est chargé de faire ENTIÈREMENT votre
salut, est VRAI
DIEU ET VRAI HOMME.
(1
Tim. III, 16.)
Vous croyez ces vérités.
- Mais les croyez-vous d’une manière assez vivante?
- Comprenez-vous tout ce qu'il y a d’amour dans l'envoi du Sauveur?
- Cœurs froids, âmes languissantes que nous sommes, nous pensons au sacrifice étonnant du Fils de Dieu, bien souvent, avec froideur:
- nous le voyons quitter le ciel, habiter la terre,
- connaître les souffrances, mourir sur une croix,
- supporter dans son corps et dans son âme l'épouvantable châtiment du péché,
- supporter la malédiction de la Loi, la colère, l'abandon de Dieu.
Nous savons que C'EST POUR NOUS QU'IL A MONTRÉ UNE TELLE CHARITÉ; que c'est pour NOUS SAUVER DES HORREURS DE L’ENFER, et pour nous ouvrir le Paradis.
Tout cela nous semble fréquemment comme des événements ordinaires; nous possédons l'art malheureux et coupable de nous blaser sur ces choses; nous en sommes rarement pénétrés d'admiration; nous pouvons rarement dire, avec vérité: La charité (l'amour) de Christ me presse. (2 Corinth. V, 14.)
Nous sentons les bienfaits et les témoignages d'affection de nos frères; ces bienfaits trouvent nos cœurs sensibles; ils nous touchent; ils nous font même verser quelques larmes.
Ingrats que nous sommes envers Dieu!
Le plus grand des bienfaits émeut souvent beaucoup moins notre cœur, parce que notre foi, faible et petite par notre faute, ne nous fait pas voir dans leur grandeur les grâces de Dieu.
Ah! ne devons-nous pas regarder comme nous étant adressé ce reproche de Jésus à ses Apôtres: Ô race incrédule et perverse! (Matth. XVII, 17.) Ô gens de petite foi! (Matth. VI, 30.)
Ce n'est pas tout.
Croyez-vous tout ce qu'enseignent les Écritures?
Recevez-vous avec docilité ce qui y est écrit touchant la durée des peines des méchants?
Savez-vous comprendre, ô mes frères! que quand Jésus déclare que leur ver ne mourra points (Marc IX, 44-48.) il veut dire tout simplement qu'il ne mourra point, et qu’il ne veut nullement dire, que leur ver mourra un jour?
Savez-vous comprendre que quand Dieu dit, OUI,
cela signifie OUI,
et non pas non?
Croyez-vous que quand Jésus dit que ses brebis ne périront JAMAIS; que personne ne les ravira de sa main, (Jean X, 28.) ces paroles ne peuvent signifier autre chose, sinon que LEUR SALUT EST ASSURÉ?
Croyez-vous que quand la Parole dit, que tous ceux qui étaient destinés à la vie éternelle crurent, (Actes XIII, 48.) que Dieu nous a élus en Christ AVANT la fondation du monde, (Eph. I, 4.) ces paroles ont évidemment ce sens: il nous a élus, et non celui-ci: il ne nous a pas élus.
C'est une grande misère, mes frères:
- de ne pas croire tout simplement ce que Dieu dit;
- de ne pas savoir dire à notre raison: «TAIS-TOI!» quand elle veut raisonner contre Dieu, ce qui s'appelle, déraisonner;
- de ne pas imposer silence à notre orgueil et à Satan par ces mots: IL EST ÉCRIT; la bouche de I’Éternel a parlé; oui, mon Père, cela est ainsi, parce que tu l'as trouvé bon! (Matth. IV, 10; Ésaïe XL, 5; Matth. XI, 26.)
2) Une autre misère des enfants de Dieu, c’est qu’avec tant de raisons pour être heureux dans le Seigneur, ils ne le sont pas toujours; beaucoup, même, le sont rarement.
Un chrétien a dit:
«Le Sauveur veut que nous jouissions de ce qu'il nous a acquis par tant de souffrances. Ses heures d'agonie et sa mort amère, nous font du bonheur un devoir.»
Et pourtant, l’abattement, le découragement, l’ennui, voilà ce qui se trouve bien souvent, peut-être habituellement, chez un trop grand nombre de chrétiens vivants.
- On ne connaît pas ses privilèges.
- On est pauvre dans le sein de la plus grande abondance.
- On a faim devant une table chargée de mets.
- On se traîne avec tristesse dans le chemin de la vie, où le Seigneur nous a donné tout ce qu'il faut pour courir avec joie.
- On possède la vie éternelle, et on est misérable! Quelle misère, mes chers frères!
3) En voici une autre, qui en découle. On bénit peu le Seigneur, ou on ne le bénit point.
- Dans nos prières, nous demandons; mais nous bénissons rarement, et froidement.
- Nous voyons ce qui nous manque; nous ne voyons pas ce que nous avons reçu.
- Et que de grâces Dieu n'a-t-il pas répandues sur le plus faible de ses enfants!
Je pense que vous vous reconnaissiez pour le dernier des fidèles, pour le premier des pécheurs. (1 Tim. I, 15.)
Je vous suppose aussi infirme, aussi petit, que possible; je suppose que vous disiez en toute vérité: JE NE SUIS RIEN. (2 Corinth. XII, 11.)
Eh bien! chers enfants de Dieu, n’est-ce pas là une grâce bien grande qu’il vous a faite?
Est-ce votre cœur orgueilleux qui eût pu prendre cette idée de lui-même, se juger ainsi?
N’a-t-il pas fallu la puissance de Dieu, son infinie bonté, pour vous revêtir de ces sentiments?
Et n'avez-vous pas dans ces sentiments-là, un sujet constant d’actions de grâces?
Votre foi, quelque faible qu'elle soit, ne doit-elle pas vous porter à bénir celui qui vous l’a donnée? Si petite qu'elle soit, si elle est sincère, si c’est de Jésus qu’elle attend tout, vous avez la vie éternelle. (Jean III, 36.)
La vie éternelle!
Et vous ne béniriez pas le Seigneur qui vous l’accorde?
Votre foi, si petite qu'elle soit, si elle est du cœur, si c’est à Jésus qu’elle regarde, comme à l'unique auteur du salut, elle est l'ouvrage du pouvoir souverain de Dieu!
Ce grand Dieu a dû déployer en vous, une puissance semblable à celle par laquelle il a ressuscité Christ d’entre les morts. C’est ce qu'exprime l'Apôtre quand il dit:
Nous croyons part l'efficace de sa vertu toute puissante, qu'il a déployée en Christ, quand il l'a ressuscité des morts, et qu'il l'a fait asseoir à sa droite dans les lieux célestes. (Eph. I. 19-20)
Et vous ne béniriez pas le Seigneur pour un don si excellent?
Ah! bénissez-le pour tous ses dons! (Ps. CIII, 2.) Oui, tout doit être pour nous un sujet d’actions de grâces:
- les biens temporels, les biens spirituels,
- le privilège de posséder la Bible, de l’entendre expliquer, de la comprendre, de l’aimer, du moins, un peu;
- le privilège de la prière, de la communion fraternelle;
- la patience de Dieu envers tous;
- le règne de Dieu qui s'avance;
- les messagers de la Bonne Nouvelle qui partent pour prêcher au monde un Sauveur;
- les Évangélistes qui se multiplient;
- les âmes qui se convertissent;
- les fidèles qui s'affermissent;
- surtout le don qu'il nous a fait de son Fils et de son Esprit.
TOUS ces bienfaits doivent nous faire désirer de dire avec David:
Je bénirai l'Éternel en tout temps; sa louange sera continuellement dans ma bouche. (Ps. XXXIV, 1.)
C’est une grande misère que cette lenteur à le bénir!
Mais c’est une misère plus grande encore que de le remercier de la bouche, quand le cœur ne le remercie pas. Ne vous est-il jamais arrivé de dire dans vos prières, avec un cœur sans reconnaissance: «Je te bénis, ô mon Dieu?»
Mensonge, hypocrisie, que de telles bénédictions! Ah! mieux vaut mille fois dire: «Seigneur, je ne te bénis pas; pardonne mon ingratitude; brise ce cœur de pierre (Ez. XI, 19.) que je porte au-dedans de moi.»
Le cœur s'attendrit, en s'humiliant;
il s'endurcit en mentant.
Ne vous est-il jamais arrivé de chanter des cantiques de louanges, quand votre cœur n'était point d'accord avec les paroles? Mensonge encore, hypocrisie!
Lents à bénir, nous le sommes aussi à PRIER.
Nous avons de la peine à commencer; nous n'en avons point à finir, sauf dans les moments plus ou moins nombreux où nous éprouvons que nous approcher de Dieu, c'est notre bien. (Ps. LXXIII, 28.)
Parler au Seigneur, nous paraît rarement un privilège, un bonheur. Nous pouvons passer des heures dans des entretiens avec nos frères. Nous pouvons à peine passer quelques minutes dans des entretiens avec notre Père qui est aux Cieux.
Quelle misère, mes frères! Nous ferons profession d’aimer à nous rencontrer dans des réunions de prières; nous admirerons telle prière, qui s'est prononcée dans telle assemblée; nous en louerons l'onction, la vie, la beauté.
Ne semble-t-il pas, à nous entendre, que nous sommes des hommes de prières, que nous aimons beaucoup à prier?
- Mais avons-nous vraiment prié pendant ces belles prières?
- De qui avons-nous été le plus occupés, de celui qui priait ou de celui qu’on priait?
- Et rentrés dans nos demeures, avons-nous prié?
Pourquoi, si nous aimons réellement la prière, passons-nous de nombreuses heures avec nos frères sans nous agenouiller ensemble, quand il y a tant de choses à demander et tant dont il faut rendre grâces, et quand une si belle promesse est faite aux deux ou trois enfants de Dieu qui s*assemblent sur la terre pour demander quelque chose? (Matth. XVIII, 19.)
Pourquoi si l’un de vous a le sentiment qu’il faudrait prier, n’ose-t-il pas le dire?
Pourquoi la crainte qu’on ne le charge de cette fonction l'empêche-t-elle de proposer de prier?
Pourquoi si peu de simplicité?
Pourquoi ne pas oser parler devant des hommes, quand on ose parler à Dieu?
4) Une autre misère que partagent beaucoup de vrais chrétiens, c’est de trop peu apprécier la Bible.
Sans doute, l’enfant de Dieu, tout comme il aime jusqu’à un certain point prier, aime aussi, jusqu’à un certain point, lire et méditer la divine Parole. Mais que cet amour est souvent languissant!
Pourquoi faut-il fréquemment un effort pour la lire?
Pourquoi trouvons-nous souvent plus d’attraits dans un de ces livres composés par des serviteurs de Christ?
Quelque excellents qu’ils soient, la Parole de Dieu est autant au-dessus d’eux, que ce qui est parfait est au-dessus de ce qui est imparfait, que le ciel est au-dessus de la terre; et l'on peut dire de ces livres, ce que Jean-Baptiste disait de ses paroles comparées à celles de Jésus-Christ: (et à plus forte raison, puisque les paroles de Jean-Baptiste sont inspirées de Dieu et non pas les livres dont nous parlons) Celui qui est venu d'en haut est au-dessus de tous. Celui qui est venu de la terre, est de la terre et parle comme étant de la terre. Celui qui est venu du ciel est au-dessus de tous. (Jean III, 31.)
Lisons-nous, dans le secret de nos maisons, la sainte Parole aussi souvent que nous le pourrions?
La méditons-nous jour et nuit? (Ps. I, 2.)
Notre âme est-elle cet arbre planté près des ruisseaux d'eaux de la Loi de Dieu, et y puise-t-elle par ses racines, la fraîcheur, la fertilité et la vie?
Notre cœur est-il comme planté près de la source vive de la Parole et y plonge-t-il sans cesse, par toutes ses racines, par ses pensées habituelles,ou n’y puise-t-il que par quelques faibles racines?
Quelle place la Bible occupe-t-elle dans notre cœur?
EXAMINONS-NOUS, MES FRÈRES. Cet examen nous découvrira de nombreuses misères.
Cette divine Parole fait-elle, autant que cela devrait être le sujet de nos entretiens avec les enfants de Dieu, nos frères en Christ?
Sans doute, grâces en soient rendues à Dieu, vous avez, fidèles, quelquefois les uns avec les autres, de sérieux, d'humbles et de charitables entretiens, dont les vérités et les devoirs de la Bible sont le texte et le sujet. Mais vos conversations religieuses sont-elles toutes de cette nature?
Prenons-y bien garde, mes chers frères; tout entretien où se trouvent les mots conversion, régénération, sanctification, n'est pas, par cela seul, un entretien pieux. On peut se comporter comme un homme non converti, non régénéré, non sanctifié, tout en parlant beaucoup de ces choses, parce que le Royaume de Dieu ne consiste point en paroles, mais en vertu. (1 Corinth. IV, 20.)
On peut beaucoup manquer à la charité,
tout en parlant beaucoup de la charité.
Si, sans utilité réelle, nous nous occupons du mauvais état spirituel de notre prochain, si, du haut de notre sagesse, nous prononçons à tort et à travers nos jugements sur son compte, nous aurons pu souvent prononcer des paroles de la Bible, mais, par le fait, NOUS AURONS DÉSOBÉI À LA BIBLE.
Nous pourrons prétendre avoir eu de saints entretiens; mais nous aurons réellement médit et peut-être calomnié; aussi, le Seigneur Jésus, qui se trouve au milieu des deux ou trois assemblés en son Nom, (Matth. XVIII, 20.) ne s’est point trouvé avec nous, qui loin d'être assemblés en son nom, l’étions plutôt, si je puis ainsi dire, au nom de nous-mêmes, au nom de notre orgueil; il a dû s’éloigner de nous, et il nous a fait sentir son absence par le vide qu’ont produit, dans nos cœurs, d’aussi déplorables entretiens.
5) N’y a-t-il pas aussi de grandes misères dans nos conversations avec ceux de dehors?
Ne nous laissons-nous pas entraîner à mondaniser, pour ainsi parler avec le monde?
Une affreuse lâcheté nous laisse perdre beaucoup d'occasions de confesser notre foi, d’éclairer ceux qui sont encore dans les ténèbres, de leur montrer ce que dit la Parole de Dieu, touchant leurs maximes et leur conduite; nous prétendons nous taire, par prudence; mais n’est-ce pas, dans bien des cas, par timidité?
Si c’est par timidité, nous décorons du nom de vertu, un véritable péché. Nous appelons le mal bien. (Ésaïe V, 20.) Ou si nous nous décidons à parler, nous le faisons souvent sans mesure, sans charité: parce que nous avons précédemment trop peu dit, maintenant nous voulons trop dire. Et, comme pour nous dispenser à l’avenir de parler, nous voulons d’une seule fois jeter en dehors tout notre feu, pour nous débarrasser, une fois pour toutes, d’un devoir sacré. Animés ainsi d’un faux zèle, nous sommes durs et amers, et nous mettons de nouvelles barrières entre l'homme et la vérité.
Ah! si nous avions dans le cœur plus d'amour pour le Seigneur et pour le prochain, nous tomberions moins dans ces misères.
Oui, ô mes pauvres et chers compagnons de misères, c'est là ce qui nous manque.
NOUS AVONS PEU D'AMOUR.
Si notre cœur en était davantage rempli, nous aurions une source intarissable d'entretiens solides avec nos frères en Christ et avec tous.
L'amour infini du Seigneur pour nous, donne toujours de quoi parler à celui qui répond à cet amour, par un amour un peu vif. Mais aimons-nous le Seigneur de tout notre cœur, et notre prochain comme nous-mêmes?
Nous en sommes tous bien éloignés: et c'est encore ici une grande misère chez beaucoup d'enfants de Dieu, de croire qu'ils aiment ainsi.
Demandez à plusieurs d’entre eux, s'ils aiment Dieu de tout leur cœur, et leur prochain comme eux-mêmes; ils vous répondront: «Oui, sûrement;» tant on réfléchit peu à l’étendue, à la spiritualité de ce devoir.
Si nous aimions Dieu et le prochain à ce degré, il ne nous manquerait rien; nous accomplirions toute la Loi, puisque toute la Loi et les prophètes se rapportent à ces deux commandements: (Matth. XXII, 40.) nous aurions atteint la perfection de la sanctification.
Dire donc qu'on aime le Seigneur de tout son cœur et son prochain comme soi-même, c'est dire: «Ma sanctification est achevée!» Ah! loin d’aimer comme la Loi le veut, nous aimons très faiblement!
C'est cette faiblesse dans notre amour, qui nous laisse si languissants à la vue de l’étendue du règne de Satan sur la terre. Nous disons qu’il y a encore huit cents millions d'infidèles (Publié en 1833), sans compter tout ce qu'il y en a dans la chrétienté, comme nous dirions une chose tout ordinaire.
Si nous aimions avec quelque vivacité ces millions d’âmes, avec quelle ardeur nous multiplierions nos supplications pour leur salut!
Avec quel zèle nous nous joindrions aux réunions qui prient dans ce but, passant sur les imperfections qui peuvent se trouver dans de telles réunions, ou sur les obstacles par lesquels nous nous laissons empêcher de nous y rendre!
Avec quelle joie nous donnerions pour l’œuvre des missions!
Avec quel empressement nous travaillerions à avancer le règne de Christ dans la chrétienté!
Comme nous nous trouverions heureux de pouvoir envoyer ces missionnaires qui, sous le nom de traités religieux, annoncent la Bonne Nouvelle et dont le Seigneur Jésus approuve et bénit la mission! Nous en aurions toujours une provision avec nous, de peur de perdre quelque occasion d’en placer.
6) La faiblesse de notre amour se montre aussi dans nos rapports avec les enfants de Dieu.
Nous permettons à Satan d’élever dans nos cœurs des barrières, des murailles, des préventions, entre nos frères et nous, pour quelques différences de vues, sur des points secondaires, au lieu de demander au Saint-Esprit d’élargir nos cœurs pour tous ceux qui aiment Jésus.
Quelquefois, il ne nous suffit pas qu’un chrétien soit un bon soldat de Christ, qu’il combatte vaillamment contre le péché, qu'il soit dévoué de cœur à son Chef, pour que nous lui ouvrions nos bras; il faut encore qu’il ait, presque toutes les vues que nous avons.
Grande misère, mes chers frères! Que chacun de nous examine son cœur avec soin, pour voir s’il n’a rien à déplorer de semblable.
Quand nous témoignons une vive affection à quelque frère, que nous l’appelons «cher et bien-aimé,» est-il vrai qu’il soit bien aimé de nous?
Ne l'aimons-nous pas plus de paroles et de langue, qu'en effet et en vérité (I Jean III, 18.)?
Sommes-nous capables de nous imposer quelques sacrifices, quelques privations pour l’amour de lui?
Savons-nous nous déranger, comme l’on dit, pour aller donner à un frère affligé ou persécuté, un témoignage de charité fraternelle, et n'arrive-t-il pas que des visites et des occupations inutiles, indignes d’un chrétien, absorbent notre temps, de sorte que nous n’avons pas celui de consacrer quelques moments à ceux que nous appelons bien-aimés?
Quand nous recherchons avec un soin particulier la société de tels enfants de Dieu, est-ce bien la charité de Christ qui nous anime dans nos choix, dans nos préférences?
Ne serait-ce point quelquefois nous-mêmes, notre gloire, que nous cherchons, espérant que l'avancement spirituel de ceux que nous voyons familièrement fera penser que nous sommes nous-mêmes avancés?
Ne négligeons-nous pas les faibles, les chétifs, les petits qui croient au nom de Jésus, c'est-à-dire, ceux qui ont le plus grand besoin que nous les encouragions par notre charité; c'est-à-dire, CEUX QUE LE SEIGNEUR JÉSUS RECHERCHERAIT LE PLUS, s’il était encore sur la terre, et sur qui il a l’œil ouvert avec le plus d’attention, parce que la vraie charité dirige ses efforts, là où il y a le plus de nécessités? (Ésaïe XL, 11.)
C'est la faiblesse de notre amour qui nous laisse à une distance si grande de ce qui est dit: Soyez dans la joie avec ceux qui sont dans la joie, et pleurez avec ceux qui pleurent. (Rom. XII, 15.)
Nous ne savons pas nous réjouir de tant de conversions dont nous sommes les témoins et dont une seule cause une si grande joie, et à celui en qui elle s'opère et aux Anges de Dieu.
Nous ne savons pas mieux nous affliger des larmes que les souffrances et le péché font verser à un si grand nombre de nos semblables.
Nous ne savons pas pleurer sur les divisions, sur les hérésies que l’ennemi sème dans le champ.
Nous ne savons pas nous dire, quand des enfants de notre Père Céleste tombent dans quelque erreur, ou donnent du scandale par leur conduite, que c'est un de nos membres qui souffre; (1 Corinth XII, 26.) que c’est notre œil, notre pied qui sont malades: et fussent-elles par de là les mers ces âmes qui contristent le Saint-Esprit, ce sont toujours nos frères, et nos sœurs; ce sont toujours nos membres qui sont infirmes et languissants; c'est toujours, en quelque sorte, nous-mêmes qui sommes malades.
Je m’arrête. Il y aurait d’autres misères à indiquer. On ne peut tout dire, là où il y a tant à dire.
Je vous prie de voir si vous ne pourriez pas compter PARMI VOS MISÈRES, la colère, l’impatience, l'orgueil, la médisance, l'avarice, le mensonge, le luxe, les dépenses inutiles, la gourmandise, l’envie, la jalousie.
Je vous prie de penser à tous ces combats intérieurs, où vous avez lâchement laissé la victoire à l'ennemi. Ces défaites, pour être ignorées des hommes, connues de Dieu seul, n’en sont pas moins de grandes misères.
Des pensées mauvaises n'ont-elles pas souvent souillé votre imagination? Ne les avez-vous pas plus d’une fois nourries, au lieu de les repousser avec horreur?
Et au milieu même des moyens d’édification que Dieu vous fournissait, avez-vous toujours su maintenir votre âme dans la pureté?
Je vous prie, mes frères, de continuer cet examen que j'ai seulement commencé. Je vous prie de le faire avec la Parole de Dieu, en vous regardant devant ce miroir si fidèle; mais prenez garde que le souffle de votre orgueil, de vos préjugés, ne vienne à en ternir l'éclat et ne vous empêche d’y voir, telle qu’elle est votre face naturelle. (Jacques I, 23.)
Priez Dieu qu’il vous assiste de son Esprit, pour vous connaître comme il vous connaît.
Elles sont nombreuses et profondes nos misères, mes chers frères.
C’en est encore une bien grande que de si peu les sentir; que d'avoir tant de sujets de reconnaître sa corruption et que de se surprendre si souvent avec une coupable satisfaction de soi, avec l’idée d'être quelque chose, tout en n’étant rien. (Gal. VI, 3; 2 Corinth. XII, 11.)
Et c’est un surcroît de misères, si les sentant faiblement nous en parlons aux hommes et à Dieu, comme si nous les sentions fortement.
Ô mes chers frères en Christ, sentons nos misères; soyons-en vivement affligés. Soyons dans le deuil et pleurons. Que notre rire se change en pleurs et notre joie en tristesse (Jacques IV, 9.).
Que cette joie légère, à laquelle trop souvent encore le fidèle se livre, disparaisse pour toujours afin de faire place à une SINCÈRE REPENTANCE: et même que la joie chrétienne fasse place aussi, suivant l’état spirituel où l'on se trouve, à une légitime tristesse.
Agissons-nous ainsi, mes chers frères?
Avons-nous souvent le deuil dans le cœur à cause de nos péchés?
En avons-nous quelquefois versé des larmes de douleur?
Vous me direz, peut-être, que la Parole nous exhorte à être toujours joyeux.
Sans aucun doute, nos saints livres renferment cette exhortation: Soyez toujours joyeux; (1 Thess. V, 16.) et ce précepte est divin, comme tous les autres.
Mais d’abord, considérez qu’il s’agit là de LA JOIE SAINTE ET SÉRIEUSE, QUE DONNE LE SAINT-ESPRIT, et nullement d'une joie légère.
Ensuite faites bien attention à qui Saint Paul recommandait cette joie sérieuse:
Aux fidèles de Thessalonique, c’est-à-dire, à des chrétiens auxquels il rend le témoignage:
- d'avoir servi de modèles à tous ceux qui ont cru, dans la Macédoine, et dans l'Achaïe (1 Thess. I, 7.),
- d'être sa gloire et sa joie (1 Thess. II, 20.),
- de demeurer fermes en notre Seigneur (1 Thess. III, 8.),
- de s'exhorter les uns les autres, et de s'édifier tous l'un l'autre (1 Thess. V, 11.),
- en un mot, à des chrétiens dans un état spirituel très prospère.
Il était tout à fait convenable de leur dire: Soyez toujours joyeux.
St. Jacques écrit au contraire à DES CHRÉTIENS TIÈDES, RELÂCHÉS ET TOMBÉS.
Si donc vous êtes dans l’état spirituel des fidèles de Thessalonique, soyez toujours joyeux, tout en vous affligeant de vos péchés, soit de ceux commis avant votre conversion, soit de ceux commis dès lors et sur lesquels vous devez d'autant plus gémir que vous avez reçu plus de grâces: en effet, ces deux sentiments, joie chrétienne et tristesse chrétienne, se trouvent ensemble dans les cœurs qu'anime le Saint-Esprit. Réjouissez-vous avec tremblement, dit David. (Psaume II, 11.)
Mais si, tout en professant l'Évangile, vous vivez dans la tiédeur;
SI vous gardez volontairement de l'interdit dans votre cœur;
SI vous trouvez en vous les misères que j'ai décrites, et que vous ne les combattiez pas vigoureusement:
vous êtes en état de chute; alors assurément le Seigneur ne vous appelle point à la joie, mais aux larmes.
Le Seigneur ne dit jamais: «Réjouissez-vous infidèles, désobéissants, tièdes.» Alors il nous dit: PLEUREZ: alors il nous menace de nous vomir de sa bouche. (Apoc. III, 16.)
Pleurez donc; mais ne vous faites pas un devoir de toujours pleurer.
Le Seigneur vous appelle à revenir à la joie le plus promptement possible, par la prière, par la repentance, par la foi aux promesses; en sorte que comme votre joie a été changée en tristesse, votre tristesse soit à son tour changée en joie. (Jean XVI, 20.)
Mais, je le répète, il y a des circonstances où la joie chrétienne doit se changer en tristesse:
Pierre ne pouvait se réjouir au moment où il eut renié son Maître; ni David au moment où il eut tué et commis adultère.
Alors ils devaient pleurer, et ils pleurèrent; s'il n’eussent point pleuré, ils n’auraient jamais retrouvé la joie. Leur tristesse leur en fraya le chemin.
Quelques-uns diront, peut-être, que des crimes tels que ceux de David, de Saint Pierre, font des larmes un devoir impérieux; mais qu'eux ne sont pas tombés si bas.
Vous n’êtes pas tombés si bas! Eh! avec quelle mesure, je vous prie, mesurez-vous la profondeur de vos péchés?
Est-ce avec la fausse mesure de L'OPINION DU MONDE, ou avec CELLE DE LA PAROLE DE DIEU?
Hélas, je crains que ce ne soit avec celle de l'opinion du monde, que nous prenons encore souvent en main, sans le savoir, ou en le sachant; car pour la Parole de Dieu, elle nous dit que les timides, que les médisants, que les tièdes, n’hériteront pas plus le Royaume de Dieu que les adultères, et que les meurtriers. (Apoc. XXI, 8 , III, 16; 1 Cor. VI, 10; Apoc. XXII, 15.)
Ne pleurerez-vous pas sur des péchés au sujet desquels le Législateur qui peut sauver et détruire, prononce que ceux qui les commettent seront exclus du Royaume des cieux?
Et, dans le fait, y a-t-il un seul de nos péchés, pour lequel nous ne méritions l’éternelle condamnation, et sur lequel, par conséquent, nous ne devions gémir; car le salaire du péché (quel qu'il soit), c'est la mort. (Rom. VI, 23.)
Et si un seul doit exciter notre douleur, que doit donc produire cet ensemble de désobéissances que les plus fervents ont à se reprocher?
Cet ensemble ne doit-il pas mêler une juste tristesse, à la joie qu'excite en eux la pensée du DIEU QUI PARDONNE? Car un seul péché est la violation de la Loi d'un si bon Père. C'en devrait être assez pour nous porter à en gémir.
Faut-il vous en dire davantage pour vous engager à mener deuil sur vos péchés?
Il serait bien inutile de montrer à une mère qui a perdu son enfant, pourquoi elle doit pleurer. Rachel pleure ses enfants, parce quils ne sont plus; (Matth. II, 18.) parce qu'elle est malheureuse de les avoir perdus.
Nous devons gémir sur nos péchés, parce que c’est le plus grand des malheurs que de pécher, et que C'EST LA SOURCE DE TOUT MALHEUR.
Mais hélas, ne sentant que faiblement nos péchés, il est nécessaire de nous exciter à les sentir, de nous montrer pourquoi nous devons les déplorer.
Vous rappellerai-je que c'est le péché qui a introduit ici-bas toutes les misères, toutes les maladies, toutes les souffrances qui travaillent l’humanité; que c’est lui qui a introduit la mort dans le monde; que c'est lui qui a préparé pour l’autre, la mort seconde, l’épouvantable Enfer?
Vous dirai-je tout le mal que nous faisons par nos péchés, d’abord à nos frères dans la foi?
S’ils sont faibles, savez-vous si ce ne sont pas nos exemples qui les ont affaiblis?
S’ils sont médisants, n'est-ce pas notre ouvrage?
Il suffit d’un seul homme atteint de la peste, pour la communiquer à tout un peuple.
Il suffit de la seule contagion de nos misères, pour produire de grands ravages. Ainsi nous ne glorifions pas le Seigneur; et nous sommes cause que d’autres ne le glorifient pas.
Vous dirai-je tout le mal que nous faisons à ceux du dehors, toutes les armes que nous leur prêtons, contre Jésus, contre l’Évangile, contre la foi, dont ils prennent de fausses idées, d'après nous?
Savons-nous combien nous en avons éloignés de Christ?
N’y eut-il qu’une âme sur qui nous eussions produit cet effet, quel sujet pour nous d’être dans le deuil et de pleurer!
Par nos misères nous contristons l'Esprit de Dieu.
Ce Bon Esprit (Ps. CXLIII, 10.) comme l’appelle David;
Cet Esprit source de toute bonté, qui prend ce qui est à Christ et qui I'annonce aux élus; (Jean XVI, 14.) qui leur applique le divin remède; qui est l’auteur de notre foi, et qui empêche qu’elle ne défaille;
Ce Bon Esprit qui intercède pour nous par des soupirs ineffables; (Rom. VIII, 26.)
Ce Bon Esprit QUI EST NOTRE CONSOLATEUR; (Jean XIV, 16, 26.)
qui dissipe nos doutes; qui nous préserve du désespoir; qui combat avec nous; qui nous donne la charité, la joie, la paix, la patience, la douceur, la bonté, la fidélité, la bénignité et la tempérance; (Gal. V, 22.)
qui nous sanctifie; qui nous scelle pour le jour de la rédemption; (Eph. IV, 30.).
Cet Esprit si Bon envers nous: nous..., nous l’attristons!
Nous attristons celui qui nous ouvre la source de la joie et des consolations. Quelle ingratitude! Considérons chacune de nos misères sous ce point de vue, et aucune ne nous paraîtra légère, aucune indigne de nos larmes.
Enfants bien-aimés de Dieu, voulons-nous sentir nos péchés, alors portons nos yeux habituellement sur Jésus, le Fils de Dieu, l'homme de douleurs, qui a été navré pour nos forfaits et froissé pour nos iniquités. (Ésaïe LIII, 5.)
DANS CHACUNE DE SES SOUFFRANCES,
VOYONS L’EFFET DE NOS PÉCHÉS.
Ne voyons pas seulement Juda en Gethsemané; mais nous aussi.
Ne voyons pas seulement Pilate et sa garde dans le Prétoire; mais nous aussi.
Ne voyons pas seulement sur Golgotha des passants, des sacrificateurs, des soldats insultant Jésus-Christ; mais nous aussi.
Cette coupe devant laquelle Jésus recule d’horreur, qui l’a remplie de la colère de Dieu? C'est nous aussi.
Ces clous qui déchirent son corps, ces angoisses qui tourmentent son âme, qui les a préparées? C’est nous aussi.
Nos tiédeurs, notre peu de foi, notre peu de charité, notre peu de sérieux, nos médisances, nos vaines conversations; voilà aussi les bourreaux de Jésus-Christ. Considérons ainsi nos misères.
Aucune alors ne nous paraîtra légère; aucune indigne de nos pleurs!
Les considérer sur la croix de Jésus, ne serait-ce pas le sens de ce que dit mon texte: Humiliez-vous devant le Seigneur!
Remarquez ces paroles; il n'est pas écrit: Humiliez-vous loin du Seigneur; il est écrit: DEVANT LUI, PRÈS DE LUI.
Voir
ses
péchés, les sentir loin du Seigneur Jésus, en s'isolant de lui,
c’est la route de l’endurcissement, du découragement et même du
désespoir.
Humilions-nous, chrétiens, DEVANT le Seigneur.
Ne contemplons pas le Seigneur Jésus seulement dans les cieux; voyons-le aussi sur la terre, dans nos maisons, tout près de nous; car il y est avec toutes ses grâces. Approchons-nous donc de Lui, avec toutes nos misères;
Avouons-les, à ce miséricordieux Rédempteur, les unes après les autres, demandons-lui de nous les pardonner pour l’amour de son sang et de nous en délivrer par son Esprit.
Oui, allons à Jésus le Médiateur de la nouvelle alliance, et au sang de l'aspersion, qui prononce de meilleures choses que celui d’Abel, (Hébr. XII, 24.)
Allons à celui qui a porté nos péchés, en son corps sur le bois, (1 Pierre II, 24.)
à celui qui a fait les promesses et qui est fidèle. (Héb. X, 23.)
Dans la grandeur du sacrifice de DIEU MANIFESTÉ EN CHAIR, (1 Tim. III, 16.) nous verrons la grandeur de notre mal, qui a nécessité un tel remède; et ainsi un puissant motif à nous humilier profondément; et en même temps nous y verrons un remède parfaitement efficace, et un puissant motif à nous assurer en Jésus, à l'aimer, et à fuir le péché.
Pour s'humilier ainsi devant le Seigneur, devant sa croix, et pour que la vue de ses souffrances nous donne une sainte douleur d’avoir péché, il est nécessaire que l’Esprit de Christ soit répandu sur nous.
Je répandrai, disait prophétiquement Jésus, sur la maison de David et sur les habitants de Jérusalem, un Esprit de grâce et de supplication.
Et quel est le fruit de cette effusion de l'Esprit?
Le voici:
Et ils regarderont vers moi qu’ils auront percé; et ils en mèneront deuil, comme quand on mène deuil pour un fils unique, et ils en seront en amertume d'esprit comme quand on est en amertume pour un premier-né. (Zach. XII, 10.)
Je l’ai dit et je ne saurais trop le redire: jetons-nous aux pieds de Jésus avec toutes nos misères; mais j’ajoute: NE NOUS RELEVONS PAS AVEC TOUTES NOS MISÈRES.
Laissons-les, et ne les reprenons pas.
Portons le fardeau de nos péchés devant Jésus; mais déposons-le véritablement, et ne nous en chargeons pas de nouveau; relevons-nous, après nous être tellement humiliés, tellement répandus en prières, en supplications, avec des actions de grâces (Phil. IV, 6.) que nous ayons reçu quelque chose, en fait de grâces célestes, et perdu quelque chose en fait de péché; qu’après nous être humiliés devant le Seigneur, nous soyons élevés par lui.
C’est ce qui aura lieu, si vraiment nous nous humilions devant lui: car c'est la promesse, bien-aimés de Dieu, qui vous est faite:
HUMILIEZ-VOUS DEVANT LE SEIGNEUR ET IL VOUS ÉLÈVERA.
Il nous élèvera!
Comme le péché est l'opprobre (la honte) des peuples (Prov. XIV, 34.) en géneral et de chaque homme en particulier, la sainteté est leur gloire, leur véritable grandeur.
Si nous nous humilions devant le Seigneur, il nous élèvera à un état de sainteté, bien plus avancé que celui où nous sommes.
Nous nous serons humiliés SINCÈREMENT devant le Seigneur de notre esprit étroit, de notre cœur glacé pour des frères qui ne sont différants de nous que dans des points qui sont moins essentiels, sont appuyés sur le même fondement. (Ésaïe XXVIII, 16; 1 Corinth. III, 11.)
Eh bien! le Seigneur nous élèvera à une charité plus grande; il réchauffera notre cœur; il élargira nos entrailles.
Nous nous serons humiliés SINCÈREMENT devant le Seigneur de notre peu d'amour pour sa Parole. Il nous élèvera; il nous la rendra plus chère.
Nous nous serons humiliés SINCÈREMENT devant le Seigneur de notre tiédeur dans la prière. Il nous élèvera; il nous donnera, déjà au moment même, de prier avec plus de ferveur.
Il nous élèvera, en second lieu, à un état de joies et de consolations plus grandes, par le Saint-Esprit.
Nous nous plaignons souvent de manquer de joie. Une des causes de ce mal, c’est que nous ne nous humilions pas assez.
Plus nous serons petits à nos propres yeux, plus le Seigneur, qui aime les humbles, (Ésaïe LVII, 15; LXVI, 2.) s’approchera de nous et nous donnera de nous réjouir en lui. Souvent aussi nous voulons nous donner nous-mêmes de la joie; sûr moyen d’en manquer. C’est le Seigneur qui la donne; c’est lui qui élève; c'est à lui qu’il faut dire, avec David:
Rends-moi la joie de ton salut et qu’un Esprit d'affranchissement (de bonne volonté) me soutienne. (Ps. LI, 12.)
Il nous élèvera: cela signifie, enfin, qu'il nous donnera dans son Royaume une place d'autant plus élevée, que nous nous serons placés plus bas dans ce monde.
La première au repas céleste sera pour celui qui se sera mis à la dernière parmi ses frères.
La plus belle des couronnes appartiendra à celui qui se sera jugé le plus indigne d’en avoir une.
Ô mes chers frères, qu'un des premiers objets de nos prières soit donc de demander à Dieu, que nous sentions de mieux en mieux nos misères. Ayez la charité de faire cette demande pour celui qui vous parle, je vous en prie; et faisons-la les uns pour les autres.
* * *
Je m’adresserai maintenant en peu de mots à ceux d’entre vous qui, sentant leurs péchés, n’osent aller à Jésus: accepter, telles qu’elles sont, ses promesses de grâce, et confiez-vous en LUI.
Ô vous qui êtes dans cet état, qu’attendez-vous?
D’être moins méchants?
Si vous connaissiez mieux votre misère, vous seriez convaincus que jamais, hors de Jésus, vous ne deviendrez moins méchants, car il dit: SANS MOI VOUS NE POUVEZ RIEN FAIRE; (Jean XV, 5.) et que, bien au contraire votre mal s’aggravera toujours plus.
Écoutez donc l’invitation qu’il vous adresse: Venez à moi, vous tous qui êtes travaillés et chargés, et je vous soulagerai. (Matth. XI, 28.) Ne lui faites pas l’injure de penser qu’il vous appelle pour vous repousser.
Allez à lui, comme le malade va au médecin; il y va parce qu’il est malade et non parce qu’il se porte bien: et si les médecins sur la terre ne repoussent jamais celui dont le mal est le plus dégoûtant; ah! ne mettez pas le Sauveur au-dessous des hommes pécheurs, en doutant de la bonne réception qu'il vous fera si vous allez à lui, ô vous qui gémissez de vos maladies spirituelles, et qui en désirez la guérison.
* * *
Enfin ne m'adresserai-je pas aussi à ceux d'entre vous qui ne se sont pas encore humiliés devant le Seigneur, qui ne sont point affligés de leurs péchés?
Pour ne point les sentir, ces péchés n'en existent pas moins.
Un mal ignoré est d'autant plus un mal. Un affreux précipice vers lequel vous marchez, sans le savoir, n’en est que plus dangereux.
Ô vous qui êtes dans cet état, tremblez et ne dites pas: «j'ai mes misères; ceux qui s'appellent enfants de Dieu ont aussi les leurs, et de grandes, et de nombreuses; on le leur a assez dit aujourd'hui: il n'y a pas de différence entre eux et nous.»
Vous vous trompez, chers frères, la différence est totale.
Ils ont des misères; mais ils les haïssent, et non pas vous; car si quelque douleur du péché se fait sentir à votre âme, c'est ordinairement une douleur légère, et vous avez bien soin d’appliquer à ce mal le coupable remède de la distraction et du plaisir.
Les enfants de Dieu ont des misères; mais ils ne craignent pas qu’on les leur montre; ils me béniront de les leur avoir montré; ils prieront pour moi.
Vous, au contraire, vous redoutez de voir les vôtres; vous vous irritez contre ceux qui cherchent à vous les faire voir, surtout, si ne se bornant pas à vous découvrir le mal extérieur, ils vont jusqu'à la source du mal, et vous la montrent dans l'incrédulité et dans la corruption de votre cœur.
Et si l’on vous dit en face, d’après la Parole de Dieu, (Rom. I, 32.) que vous êtes de misérables pécheurs, dignes par vous-mêmes de l'Enfer; cela vous paraît dur.
Si l'on vous dit, d’après la Parole de Dieu, que toutes vos justices sont comme le linge le plus souillé; (Ésaïe LXIV, 6.) cela vous paraît pure exagération.
Si l’on vous dit, d’après mon texte, qu’il faut pleurer sur ses péchés; vous pensez que cela est bon pour de grands coupables; comme si nous n’étions pas tous de grands coupables devant le Saint des Saints!
Les enfants de Dieu ont des misères; mais ils cherchent sincèrement en Jésus la grâce qui pardonne le péché et qui en délivre; et VOUS, VOUS NE VOUS SOUCIEZ PAS DE GRÂCE; ce mot seul de grâce vous répugne; plus d’une fois, peut-être, vous avez fait de ce mot-là, le sujet de vos plaisanteries.
Vous ne désirez point d’être délivrés de vos péchés que vous aimez; ou si, parfois, vous éprouvez un certain désir d’obtenir pardon devant Dieu, et d’abandonner quelque péché; ce n’est pas par haine pour le péché même; c’est parce qu’il répand de la honte et des amertumes sur votre vie, et que vous en redoutez les châtiments dans l’éternité.
Vous avez pu éprouver une vive angoisse, comme Caïn, comme Juda; mais cette angoisse ne vous a point conduits à la vie, à la conversion, parce qu’elle ne vous a point conduits à Jésus.
Et vous pouvez trouver la preuve que ce n’est pas le péché lui-même qui vous afflige, si en rentrant dans votre cœur vous êtes forcés d’avouer que vous ne vous inquiéteriez pas du péché, si vous pouviez, tout en persévérant dans le mal, être heureux ici-bas et espérer de n’être point jetés dans le feu qui ne s’éteint point.
Et du reste, c’est par vous-mêmes, c'est par vos prétendues forces, par vos prétendues justices, et non par Jésus, que vous cherchez à obtenir la délivrance du péché et de la tyrannie qu'il exerce sur vous.
Les enfants de Dieu ont des misères; mais ils ont aussi des richesses, celles de la grâce de Jésus, (Eph. I, 7.) qui pardonne LEURS misères et vous, qui vous privez de ces richesses, vous êtes malheureux, et misérables et pauvres et aveugles et nus. (Apoc. III, 17.)
Vos péchés ne vous sont point pardonnés: la colère de Dieu demeure sur vous. (Jean III, 36.) Les enfants de Dieu vivent et vous êtes morts. (Rom. VI, 13.)
Ils ont des misères; mais elles diminuent: les vôtres vont toujours en empirant. (2 Tim. III, 13.)
Ils ont des misères: ils en seront bientôt affranchis pour toujours. Et vous, si vous mourez loin de Christ, vous en serez éternellement les esclaves.
JE LE RÉPÈTE, LA DIFFÉRENCE EST TOTALE. Ainsi on peut dire de vos misères ce que Moïse disait d’une portion d’Israël: Votre tache n'est pas une tache de ses enfants; vous êtes une génération perverse et revêche. (Deut. XXXII, 5.)
Tremblez donc, oui tremblez, ô mes frères; car il n’y a qu’une vapeur, qu’un songe, qu'une pensée entre votre âme et l’éternité. La vie présente n'est-elle pas ainsi nommée? (Jacques IV, 14; Ps. XC, 5, 9.)
Redoutant, comme vous le faites, des douleurs de quelques instants; ennemis, comme vous l’êtes, de tout ce qui peut vous attrister, ne frémiriez-vous pas à la pensée des pleurs et des grincements de dents qui ne finiront jamais? (Matth. XXV, 30, 46.)
Amis de la joie, ardents après le bonheur, ne désireriez-vous pas des joies et un bonheur que rien ne troublera et qui dureront toujours?
Sentir vos péchés, en gémir sincèrement, en chercher la délivrance et le pardon en Jésus, regarder à lui, crier à lui, voilà le chemin de la vie.
Entrez-y et marchez-y. Nous vous conjurons de le faire! Écoutez une voix amie qui vous en prie.
Considérez que la bonté de Dieu vous convie à la repentance. (Rom. II, 4.)
Et comme le dit le St. Esprit:
Si vous entendez aujourd'hui sa voix, n'endurcissez point vos cœurs; de peur qu'il ne dise de vous: Leur cœur s'égare toujours, et ils n'ont point connu mes voies: aussi jurai-je dans ma colère: si jamais ils entrent dans mon repos (Ils n'entreront pas dans mon repos). (Hébr. III, 7-11.)
Que Dieu ait pitié de vous, et vous amène à Jésus!
Amen!
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