Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

MÉDITATIONS POUR TOUS LES JOURS DE L’ANNÉE

AVRIL

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note de la bibliothèque «Regard»: nous avons modifié certaines constructions de phrase et certains mots afin de rendre le texte plus facile à comprendre; le texte original fut publié en 1759)


1er avril

Sur le respect humain mal approprié.


1er Point.

C'est une faiblesse incompréhensible quand il s'agit de pratiquer la vertu et de se faire arrêter par le respect humain.

Que va-t-on dire?

Que va-t-on penser de moi?

Quel est donc ce monde dont vous redoutez les regards et les discours?

Rien d'autre qu'un assemblage de gens que l'on peut connaître sans les mépriser et que l'on ne doit pas craindre si on ne les connaît pas.

C'est cependant au jugement frivole et inconsidéré de cette multitude que vous sacrifiez le salut de votre âme alors que vous avez la possibilité d'opposer à leurs vains discours, votre raison, votre «Religion», votre conscience et, par-dessus tout: VOTRE DIEU!

Quiconque aura honte de moi et de mes paroles au milieu de cette génération adultère et pécheresse,

le Fils de l’homme aura aussi honte de lui, quand il viendra dans la gloire de son Père, avec les saints anges. (Marc VIII. 38.)


2e Point.

Quand il s'agit de satisfaire ses passions, on brave le respect humain!

Si l'on nous dit que l'éclat de nos dérèglements étonne, scandalise, révolte les personnes les moins raisonnables; nous ne nous en inquiétons pas!

De quel droit, disons-nous, ces gens-là ont-ils à critiquer ma conduite?

Suis-je obligé de leur rendre compte de mes actions?

Ma réputation et ma gloire dépendent-elles de leurs discours?

C’est ainsi que le respect humain fait tomber le pécheur en contradiction avec lui-même; c’est ainsi que nous sommes d’un côté, faibles et timides pour le bien; de l’autre, hardis, intrépides et magnanimes pour le mal.


* * *

2 avril

Sur les moyens de surmonter la faiblesse du respect humain mal approprié.


1er Point.

C'est d'abord de considérer l'exemple de Jésus-Christ.

Quand bien même la pratique des vertus Chrétiennes nous attirerait de cruels opprobres, des humiliations accablantes, Jésus-Christ, lui-même, n’en a-t-il pas souffert de plus grandes pour notre salut?

Ne sommes-nous pas les Disciples de ce Dieu humilié et anéanti?

N’est-il pas notre maître et notre modèle?

Que serions-nous devenus, s'il ne s'était pas humilié et rendu obéissant jusqu’à la mort?

Et à quelle mort!

À la mort de la croix, c’est-à-dire jusqu'au dernier excès de l’opprobre et de l’infamie!


2e Point.

Considérer l'avertissement de Jésus-Christ.

Il avait en vue la faiblesse de ce respect humain mal approprié, quand il disait:

Si quelqu'un rougit de moi et de mes paroles, le fils de l'homme rougira aussi de lui lorsqu'il viendra dans sa gloire.

Car quiconque aura honte de moi et de mes paroles, le Fils de l’homme aura honte de lui, quand il viendra dans sa gloire, et dans celle du Père et des saints anges. (Luc IX. 26. V. S.)

Nous verrons alors lequel des deux est le plus à craindre:


DES JUGEMENTS DU MONDE

OU DE CELUI DE DIEU.


Est-ce à moi, dites-vous, à condamner le monde par ma conduite en m'éloignant de sa façon de vivre et de ses maximes?

Était-ce à vous, dira le souverain Juge, à condamner l'Évangile en désobéissant à mes Lois?


* * *

3 avril

Sur le crime du respect humain mal approprié.


1er Point.

Il offense Dieu dans sa grandeur puisqu'il nous fait respecter et craindre la créature plus que le Créateur.

Cette crainte placée entre Dieu qui nous fait connaître ses volontés, et l'homme qui les désapprouve, ce respect mal approprié:


NOUS ENGAGE À ÊTRE REBELLES À DIEU

pour ne pas déplaire à l’homme.


Que devient donc cette préférence entière et absolue que nous devons au souverain Maître?

N’est-elle pas anéantie?

Et si elle subsiste encore en spéculation et en idée, en reste-t-il la moindre trace dans la pratique?

Comment peut-il se faire qu’un Chrétien ose dire à son Dieu:

Je te servirais, Seigneur, si le monde à qui je veux encore plaire, n’était pas ennemi de ton Service.


2e Point.

Ce genre de respect, de crainte, offense Dieu dans sa bonté.

Ces dispositions à une vie Chrétienne plus régulière qu’on n’a pas le courage de suivre; ces désirs de se donner à Dieu, qui demeurent sans effet: 


SONT POURTANT DES GRÂCES QUE SA BONTÉ NOUS ACCORDE POUR NOUS ATTIRER À LUI.


Ce sont des dons du Saint-Esprit, des fruits précieux de la rédemption de Jésus-Christ que le respect humain mal approprié, la crainte des hommes, nous fait perdre.

Notre Salut, selon le cours ordinaire de la Providence, était attaché à ces grâces; mais la crainte des vains jugements du monde en arrête toute la vertu.

Ainsi ce respect humain, cette crainte, qui offense Dieu dans sa grandeur, nous porte également à mépriser les avances de sa miséricorde et les richesses de sa bonté.


* * *

4 avril

Sur le péché de ceux qui dénigrent la piété.


1er Point.

Ce péché est d’autant plus grave qu'il attaque directement la Majesté Divine.

Quoi! Vous voyez un homme disposé à servir Dieu et vous osez le détourner de son service? Vous faites auprès de lui l’office du Démon!

Vos discours et vos railleries ne servent qu’à détruire et à faire disparaître le culte du Dieu vivant: comment pourriez-vous donc regarder ces discours et ces railleries comme des fautes légères?

Ces Tyrans qui renversaient autrefois ses temples et ses autels étaient-ils plus coupables que vous?

Non; ils l’étaient moins sans doute puisqu'ils connaissaient à peine le Dieu d'Israël alors que vous, vous avez appris à le connaître.

Dieu est bien moins jaloux de ce culte extérieur qu’ils voulaient abolir, que de ce culte intérieur que vous détruisez dans les âmes.


2e Point.

Ce péché est d'autant plus grave puisqu'il n'en revient aucun avantage à ceux qui le commettent.

Quand vous aurez anéanti tout sentiment de piété dans cette âme fidèle, que vous en reviendra-t-il?

Quel fruit, quelle satisfaction pouvez-vous attendre d’un pareil attentat?

En serez-vous plus riche ou plus heureux?

J’ai beau me rappeler toutes les différentes passions qui vous dominent, je n’en vois aucune qui puisse en tirer le moindre avantage.

Vous commettez donc un péché de pure malice, un péché d’autant plus funeste que les suites en sont souvent irréparables.


* * *


5 avril

Sur les oeuvres de piété faites par
 respect humain.


1er Point.

On peut édifier les hommes par devoir ou par respect humain.

On les édifie par DEVOIR quand on pratique les oeuvres extérieures de la piété que Dieu nous commande et que notre état exige, SANS RECHERCHER L’APPROBATION DES HOMMES, et sans redouter leur censure.

Alors ces oeuvres se rapportent véritablement à Dieu; nous ne cherchons à édifier ceux qui en sont les témoins, QUE POUR LE GLORIFIER ET POUR LUI PLAIRE; et c’est proprement ce rapport et cette intention qui sanctifie nos actions et qui en fait le mérite.


2e Point.

On édifie les hommes par respect humain, lorsqu’on pratique les oeuvres extérieures de la piété pour des motifs qui ne servent pas à la gloire de Dieu.

Pour ne pas s’écarter des usages reçus; pour ne pas violer des coutumes établies;

Pour satisfaire à des bienséances, que le monde regarde comme indispensables:

CE N'EST PLUS LE DÉSIR DE PLAIRE À DIEU QUI NOUS FAIT AGIR!

C’est un respect mal compris du monde à qui vous ne devez rien, et un oubli néfaste d’un Dieu à qui vous devez tout.


* * *

6 avril

Sur la vraie pénitence ou plus exactement les vrais fruits de la repentance.


1er Point.

En quoi consiste la vraie repentance?

Si vous la considérez dans sa nature, elle consiste dans UNE HORREUR VOLONTAIRE DU PÉCHÉ, regardé comme une offense faite à Dieu, jointe à la résolution de le réparer et de prendre toutes les précautions nécessaires pour ne le plus commettre.

Remarquez que cette horreur n’est pas une simple interruption, un simple dégoût du péché: c’est une haine, une aversion douloureuse et accompagnée de repentir et de regret.

Cette horreur du péché n’est pas un sentiment passager et compatible avec une rechute et le retour au péché, puisqu’elle doit être jointe à la résolution de le réparer, de le détruire par des remèdes et des précautions convenables, quitte à se séparer définitivement de l'objet qui nous a conduits à pécher.

Cette horreur du péché commis ne regarde pas le péché par rapport à sa forme, sa laideur et aux inconvénients temporels et humains qu'il peut produire:


ELLE L’ENVISAGE COMME UNE OFFENSE ENVERS DIEU.


Voilà ce que la vraie repentance nous fait haïr et détester dans le péché.

Produisez donc du fruit digne de la repentance... (Matth. III. 8.)

J’ai prêché la repentance et la conversion à Dieu, avec la pratique d’oeuvres dignes de la repentance. (Actes XXVI. 20.)


2e Point.

Si vous la considérez dans son étendue, elle se rapporte à tous les péchés sans exception.

Conservez-vous encore de l’attachement pour un seul péché?

Vous n’êtes pas encore vraiment repenti! Votre repentance n’est qu’une disposition contradictoire par laquelle vous vous tournez en même temps vers Dieu et contre Dieu:

VERS DIEU pour l’aimer, en renonçant à quelques péchés;

CONTRE DIEU pour l’outrager, en demeurant attaché aux autres!


* * *


7 avril

Sur la promptitude et la vivacité de
 la vraie repentance.


1er Point.

Elle ne saurait être trop rapide.

N’est-ce pas témoigner un grand mépris pour Dieu, n’est-ce pas braver en quelque sorte sa miséricorde et sa bonté, que de savoir que l’on est tombé dans sa disgrâce par le péché, que l’on est devenu son ennemi, qu'il est disposé à nous pardonner, et que, malgré tout,


ON PASSE DES MOIS ENTIERS, DES ANNÉES ENTIÈRES

SANS NOUS RÉCONCILIER AVEC LUI?


Que l’on n’y pense pas dans les moments où l’ardeur insensée des passions nous emporte, on ne s’en étonne pas; un homme transporté de fureur ne sent pas sa blessure dans la chaleur du combat; mais quand le calme est revenu, quand l’ardeur des passions est éteinte, ou du moins suspendue:

Comment peut-on demeurer encore un instant dans l'état du péché sans recourir à la repentance?


2e Point.

Elle ne saurait être trop vive.

Combien ne doit pas être vif et douloureux le repentir d’un Chrétien qui a eu le malheur d’offenser Dieu!

Ce n’est pas seulement une douleur amère et profonde que l'on nomme REMORD , parce qu’il ne blesse pas seulement le coeur; il le brise, il le déchire.

Car si la mesure d’aimer Dieu, doit être, selon Saint Augustin, de l’aimer sans mesure:


jusqu’où ne doit pas s’étendre la douleur et le repentir

de ne pas l’avoir aimé en restant si longtemps dans le péché?


* * *

8 avril

Sur la repentance du coeur.


1er Point.

C’est le coeur qui est proprement la source de tous les péchés.

Notre corps n’est qu’un instrument aveugle qui obéit aux mouvements et à la direction de notre coeur:


NOS SENS EXTÉRIEURS NE FONT QU’EXÉCUTER CE QUE LE CŒUR A CONÇU.


C'est du coeur, selon la parole de Jésus-Christ, que viennent les mauvaises pensées, les homicides, les adultères, les fornications, les larcins, les faux témoignages, les blasphèmes.

Car c’est du dedans, c’est du coeur des hommes, que sortent les mauvaises pensées, les adultères, les impudicités, les meurtres, les vols, les cupidités, les méchancetés, la fraude, le dérèglement, le regard envieux, la calomnie, l’orgueil, la folie. (Marc. VII. 21. V. S)

Une action extérieure, involontaire et forcée, quelque déréglée qu’elle puisse être, ne rend pas l’homme autant coupable si son coeur n’y entre pour rien; MAIS S’IL LA DÉSIRE, s’il y donne son contentement avant même qu’elle s’exécute, l’homme est déjà coupable.


2e Point.

C'est par le coeur que doit commencer la repentance, il est le premier coupable.

Vous jeûnez, vous vous couvrez de cendre; mais SI LE CŒUR N’EST PAS CHANGÉ, s’il ne sacrifie pas à Dieu cette attache criminelle qui a été la cause de vos égarements:


Toutes vos démonstrations extérieures de repentance

ne seront d’aucun prix aux yeux de Dieu.


Faites-vous un coeur nouveau, disait l'Éternel à son peuple par ses Prophètes, Pleurez, gémissez, déchirez vos coeurs; je dis vos coeurs et non pas vos habits.

Maintenant encore, dit l’Éternel, Revenez à moi de tout votre coeur, Avec des jeûnes, avec des pleurs et des lamentations!

Déchirez vos coeurs et non vos vêtements, Et revenez à l’Éternel, votre Dieu; Car il est compatissant et miséricordieux, Lent à la colère et riche en bonté... (Joël II. 12-13. V. S.)

C’est ce SEUL changement du coeur, cette SEULE contrition du coeur qui est l’âme de la repentance.


* * *

9 avril

Sur la miséricorde de Dieu.


1er Point.

Les hommes ne savent pas pardonner.

Ils ne savent point être miséricordieux.

Ils pardonnent difficilement, on peut en juger par la difficulté dans laquelle ils se trouvent bien disposés à pardonner les injures et à se réconcilier avec leurs ennemis.

Plusieurs pardonnent imparfaitement; il reste presque toujours dans leur coeur un fond de ressentiment et de rancune qu’ils ont peine à dissimuler et qui éclate trop souvent quand l’occasion s’en présente.

Ils pardonnent quelquefois de légères offenses, mais ont de la peine à se décider pour pardonner des injures.

Ils pardonnent peut-être une première injure; mais à la seconde, à la troisième, à la quatrième, ils deviennent irréconciliables.

Alors Pierre s’approcha de lui, et dit: Seigneur, combien de fois pardonnerai-je à mon frère, lorsqu’il péchera contre moi? Sera-ce jusqu’à sept fois?

Jésus lui dit: Je ne te dis pas jusqu’à sept fois, mais jusqu’à septante fois sept fois. (Matth. XVIII. 21.)


2e Point.

Dieu au contraire pardonne facilement, il ne rejette jamais l’hommage d’un coeur vraiment contrit et vraiment humilié.

IL PARDONNE ENTIÈREMENT ET SANS RÉSERVE.

David n’a pas plutôt imploré sa miséricorde avec tous les sentiments d’une vraie repentance que le Prophète lui dit: Le Seigneur a oublié ton péché!

David dit à Nathan: J’ai péché contre l’Éternel! Et Nathan dit à David: L’Éternel pardonne ton péché, tu ne mourras point. (2 Samuel XII. 13. V. S.)

Il pardonne les grandes fautes comme les petites: David était coupable de meurtre et d’adultère;

il pardonne même la rechute dans un péché déjà pardonné pourvu que le retour à lui soit sincère et accompagné d’un véritable repentir.

Que le méchant abandonne sa voie, Et l’homme d’iniquité ses pensées; Qu’il retourne à l’Éternel, qui aura pitié de lui, A notre Dieu, qui ne se lasse pas de pardonner. (Ésaïe LV. 7.)


* * *

10 avril

Sur la confiance qu'un Chrétien doit avoir dans la miséricorde de Dieu.


1er Point

Cette confiance est utile quand elle conduit le pécheur à retourner à Dieu.

L'espérance chrétienne n'est jamais trompée; elle ne peut être confondue!

Mais, qu'est-ce que l'espérance Chrétienne dans un pécheur converti?

- C'est la confiance d'un homme qui se repent, et qui espère que Dieu aura égard à sa repentance;

- C’est la confiance d’un homme pleinement convaincu que la miséricorde de Dieu est infiniment plus grande que la malice, et qui se hâte d’y avoir recours.


2e Point.

Elle est fausse et pernicieuse quand elle s'engage à persévérer dans ses péchés.

DIEU EST BON, dit le pécheur, il est miséricordieux: quand j'aurais commis tous les crimes imaginables, il me les pardonnera.

DIEU EST BON; oui sans doute; mais faut-il encore que sa bonté ne soit pas utilisée comme un prétexte pour être l’appui de votre impiété?


Dieu est bon; mais si vous abusez de sa miséricorde,

IL N'ÉCOUTERA PLUS QUE SA JUSTICE.


IL EST BON, mais sa bonté ne sauvera pas ceux qui la prennent comme soutien pour l'offenser en restant dans le péché.

Encore une fois, DIEU EST BON, mais si vous ne persévérez dans vos désordres parce que vous espérez dans sa bonté, une telle espérance ne conduira qu'à de grandes désillusions.


* * *

11 avril

Sur la sincérité de la repentance


1er Point.

Elle ne consiste pas seulement dans la sincérité de l'accusation des péchés.

C'est cependant par la plénitude et par la sincérité de cette accusation intéreure que la plupart des hommes jugent de la sincérité de leur repentance.

Ils mettent leur esprit à la torture; ils fouillent avec une attention scrupuleuse dans tous les replis de leur mémoire pour ne rien omettre; et si leur accusation leur semble bien fondée, ils croient leur repentance parfaite.

Ai-je tout dit?

N'ai-je rien oublié?

Voilà l’unique sujet de leur inquiétude!

Ils ne songent qu’à étourdir pour un temps les remords de leur conscience par un détail exact de leurs iniquités.

Ils ne songent pas à éteindre ces remords jusque dans leur source par LE CHANGEMENT DE LEUR VOLONTÉ.


2e Point.

La sincérité de la repentance consiste principalement dans la sincérité du renoncement au péché.

C’est sans doute un grand sacrifice que de s’abaisser aux pieds d’un homme et de partager avec lui des connaissances que l’on voudrait quelquefois pouvoir se cacher à soi-même:

mais ce sacrifice ne suffit pas: J’ai péché, dit Saül au Prophète Samuel; le Seigneur m’avait donné des ordres, et j’y ai contrevenu.

Quelle fut la réponse du Prophète?

L’Éternel te rejette, afin que tu ne sois plus roi sur Israël.

Il n’y avait plus de pardon pour lui!


Dieu n’est pas touché par nos discours

quand le coeur n’est pas changé.


* * *

12 avril

Sur la haine du péché.


1er Point.

On doit haïr le péché, parce qu'il déplaît à Dieu; et comme tous les péchés lui déplaisent, nous devons aussi tous les haïr.

Point de réserve ni d’exception dans la haine que Dieu a pour tout ce qui s’appelle péché!

Il ne doit donc y avoir, ni exception, ni réserve dans cette aversion, cette répugnance salutaire qu’un pécheur – qui veut devenir fidèle – a conçu pour tout ce qui déplaît à Dieu.

Cette aversion s’étend jusqu'aux objets qui le portent au péché, jusqu'aux occasions capables de l’y engager.

Descendez ici dans les profondeurs de votre conscience:

N’y a-t-il pas quelque péché, quelque habitude, quelque occasion dangereuse, que vous ne pouvez vous résoudre à sacrifier parce que vous y tenez plus qu'à tout le reste?


2e Point.

On doit haïr le péché pour toujours.

Si la colère de Dieu contre le péché était capable de se ralentir;

- S’il le haïssait moins dans un temps que dans un autre;

- Si les péchés de la jeunesse lui paraissaient plus légers que ceux de l’âge avancé;

- Si les désordres qui ont passé en coutume pouvaient trouver grâce à ses yeux:

notre haine contre le péché pourrait croître ou diminuer selon les usages, selon les jours et selon les âges.

Mais non; la haine que Dieu porte au péché est une haine constante et invariable, une haine indépendante des temps et des vicissitudes des années et des siècles: la nôtre doit, s'il se peut, égaler la sienne:


QUAND ON RENONCE UNE FOIS AU PÉCHÉ,

IL FAUT Y RENONCER POUR TOUJOURS.


Tes yeux sont trop purs pour voir le mal,

Et tu ne peux pas regarder l’iniquité.

Pourquoi regarderais-tu les perfides, et te tairais-tu... (Habakuk I. 13.)


* * *

13 avril

Sur les caractères de la vraie et de la fausse repentance.


1er Point.

La vraie repentance nous fait regarder le péché comme une offense envers Dieu;

Par conséquent comme le plus grand des maux, comme le seul mal qui soit proprement à craindre:


LE PÉCHÉ EST LE SEUL MAL DONT NOUS NE POUVONS JAMAIS TIRER

AUCUN AVANTAGE POUR LA VIE FUTURE.


C’est sur ce principe que la vraie repentance nous fait haïr le péché plus que la douleur, la honte et la pauvreté, plus que tout ce qui peut nuire à notre fortune, à notre gloire, à nos biens, à notre repos et à notre vie.

Oui, un Chrétien est obligé de risquer tous ces maux, de les négliger, de les apporter, de les embraser plutôt que de consentir à violer la Loi de Dieu:


Autant que nous devons aimer Dieu,

autant sommes-nous obligés de haïr le péché.


2e Point.

La fausse repentance est plus limitée dans ses sentiments.

Elle use de restriction et de réserve dans la haine qu’elle a contre le péché et dans les moyens qu’elle prend pour le réparer ou pour l’éviter.

Elle traite, elle compose, pour ainsi dire, avec Dieu, à moindres frais qu’il est possible.

Elle étudie l’art de conserver, sans remords, des biens mal acquis ou de paraître les restituer sans rien perdre de son bien-être.

Elle cherche les moyens de tenir encore au monde en feignant de s'en détacher; marque infaillible que l’offense de Dieu n’est pas ce qui la touche le plus, et que la voix de l’amour-propre est encore plus forte dans le coeur que celle de la conscience.


* * *

14 avril

Sur la force des penchants qui nous portent au péché.


1er Point.

Cette force sert de prétexte à la plupart des pécheurs pour justifier leurs désordres.

Qui est-ce qui ne dit pas comme Saint Paul:

Je sens dans mes membres une Loi qui combat contre la loi de mon esprit, et qui me rend captif sous la loi du péché. Malheureux homme que je suis, qui me délivrera de ce corps de mort! Je ne fais pas le bien que je veux, et je fais le mal que je ne veux pas. (Rom. VII. 21-23.)

On rejette donc toutes ses iniquités sur la force impérieuse de cette concupiscence, cette convoitise rebelle: elle l’emporte, dit-on, sur toutes mes résolutions, sur tous mes efforts; c’est un tyran qui règne malgré moi dans mon coeur:

Si Dieu est juste, il faut qu’il m’en délivre, ou qu’il ne me punisse pas d'avoir obéi au péché!


2e Point.

Fausseté de ce prétexte.

Remarquez que Saint Paul, qui nous fait une si vive peinture de ce combat de la chair contre l'esprit qu’il éprouvait comme nous, a soin de nous avertir que sa conscience ne lui reprochait rien;

- qu'il prenait toutes les précautions possibles pour éviter le péché;

- qu’il traitait rudement son corps,

- et qu'il le réduisait en servitude.

Quant à vous, mondains, vous vous plaignez de la violence de vos penchants, et vous ne songez qu'à les flatter;

Travaillez donc comme Saint Paul, à DOMPTER VOTRE CHAIR, et vous pourrez gémir comme lui de votre faiblesse sans en éprouver les funestes suites.


* * *

15 avril

Sur le combat de la chair contre
 l'esprit.


1er Point.

Ce combat est l’épreuve de notre vertu.

Il y a dans un Chrétien deux hommes différents:

- L’homme charnel et l’homme spirituel!

- L'homme de Dieu et l’homme de péché;

- L’enfant de la colère et l’enfant de la grâce:

- L’un est le rejeton impur et terrestre d'Adam pécheur et désobéissant;

- L’autre est enté, greffé, sur Jésus-Christ et régénéré par la grâce.

Or il y a un combat perpétuel entre ces deux hommes; ce que l’un approuve l’autre le condamne; ce que l’un recherche l’autre le craint;


l’un veut toujours suivre la Loi de la chair,

l’autre n’obéit qu’à celle de l’esprit.


Il est sans doute humiliant et douloureux pour le Juste, d’avoir à soutenir cette guerre intestine, et de trouver en soi deux volontés différentes et toujours opposées; mais cette opposition était nécessaire pour exercer et pour éprouver sa vertu.


2e Point

Moyens de triompher dans ce combat.

La foi, la prière, la vigilance, la confiance en Dieu, la mortification des sens sont les armes que nous devons employer pour combattre et pour vaincre cet homme charnel et terrestre, cet homme de péchés ce dangereux ennemi que nous portons dans nous-mêmes.


C’EST DIEU QUI NOUS DONNE CES ARMES DE LUMIÈRE,

et c’est le secours de sa grâce

qui contribue principalement à les rendre victorieuses.


* * *

16 avril

Sur la réparation du péché.


1er Point.

La réparation est absolument nécessaire.

Il ne suffit pas de pleurer son péché, de le détester, d’y renoncer pour toujours, il faut encore le réparer par des oeuvres directement contraires à ce péché; sans quoi, quelque témoignage que vous puissiez donner de votre retour à Dieu: vous contrefaites la repentance, selon la parole de Saint Augustin; mais vous ne la faites pas!

- Vous avez usurpé le bien d’autrui ou vous le possédez injustement, il faut le restituer;

- Vous lui avez fait ressentir les effets de votre haine, il faut qu’il éprouve les effets de votre charité.

C’est à cette réparation généreuse que l’on reconnaît la vraie repentance; le reste n’en est que l’écorce; la réparation en est le fruit, et C’EST PAR LE FRUIT QU’ON JUGE DE L’ARBRE!


2e Point.

Deux qualités essentielles de la réparation du péché.

1° Elle doit être proportionnée à l’offense, et par conséquent si le péché a été public, l'éclat de la réparation doit égaler, autant qu’il est possible, le scandale du péché:

2° elle doit s’appliquer aux mêmes objets que le péché.

On ne répare pas la calomnie par la prière,

l’injustice, par l’aumône;

ni la vengeance par l’austérité.

Aucune règle ne permet de rendre précisément à Dieu ce que l’on a enlevé au prochain, ni d’appliquer à la charité ce que l’on doit à la justice.


* * *


17 avril

Sur l'expiation du péché.


(note de la bibliothèque «Regard»: Pour une meilleure compréhension de ce sujet, nous avons choisi un autre texte plus facile à comprendre que celui présenté puisqu'il met l'oeuvre de Jésus-Christ en avant plutôt que celle de l'homme.)


1er Point.

Définition

L'expiation est l'action par laquelle on répare, par la peine qu'on subit, un crime, une faute quelconque. Le mot hébreu signifie couvrir.

- Dans l'AT il fallait un autel et des victimes,

- Dans le NT Christ, par une seule offrande, sur la croix, sauve tous ceux qui mettent leur confiance en Lui.

Le péché n'est plus seulement couvert, mais ÔTÉ (Hébreux 10.10-14), retiré de la vue de Dieu (Ps 32.1)


2e Point.

La nécessité de l'expiation

Les iniquités de l'homme font séparation entre Dieu et lui (Ésaïe 59.2)

- Il est spirituellement mort (Éphésiens  2.1)

- Il est esclave du péché (Romains 6.20)

- Il est ennemi de Dieu (Romains 5.10)

- Il est insoumis à la loi de Dieu (Romains 8.7)


3e Point.

L'oeuvre expiatoire de Jésus Christ

Elle est la manifestation de l'amour de Dieu pour l'homme (1 Jean 4.10), elle est la réponse aux exigences de Dieu et à l'état de perdition de l'homme.

CHRIST EST LE SEUL HOMME A AVOIR ACCOMPLI LA LOI DIVINE, par cela même il a pu subir, à la place des coupables la punition qu'ils méritaient: C'est la substitution (Ésaïe 53.5).

CHRIST A RÉTABLI LA PAIX ENTRE DIEU ET L'HOMME (Colossiens 1.20), c'est la réconciliation (2 Corinthiens 5.19-20)

CHRIST A PAYÉ LE PRIX DU RACHAT AFIN QUE NOUS AYONS LA LIBERTÉ (Jean 8.36), c'est la rédemption (la délivrance par le paiement d'un prix)


CHRIST A VAINCU LA MORT ET SATAN

AFIN QUE NOUS AYONS LA VIE.


Source: https://www.info-bible.org/credo/2.2.2.htm


* * *


18 avril

Sur une des manifestations de la repentance.


1er Point.

Il est avantageux de la pratiquer souvent.

Cette obligation de se repentir nous impose de rentrer en nous-mêmes et d’examiner l’état de notre conscience particulièrement lorsqu'elle nous reprend, et selon les circonstances, d'en rendre compte au Ministre de Jésus-Christ (ancien ou pasteur).

Nous nous arrêterons alors pour écouter la voix de notre conscience, la voix de ce Juge intérieur que nous entendons à peine au milieu du trouble et de la dissipation du monde.

En découvrant les plaies de notre âme à celui que Dieu a placé sur notre route, nous lui donnons la possibilité d’éclairer notre conscience, et de nous faire rougir de nos égarements.

Quoi de plus propre à fixer notre légèreté naturelle que ce partage intime et religieux où l'on emploie d’un côté la sincérité, la droiture, la confiance et la docilité, et de l’autre une autorité divine, une sagesse puisée dans la Loi de Dieu, et par conséquent supérieure à celle du monde.

Confessez donc vos péchés les uns aux autres, et priez les uns pour les autres, afin que vous soyez guéris.

La prière fervente du juste a une grande efficace. (Jacques V. 16)


2e Point.

Combien il est dangereux de s’en éloigner.

Malheur à vous si la confession vous gêne, si elle vous rebute, si vous la regardez comme un assujettissement pénible, comme un joug odieux et insupportable et si le dégoût qu'elle vous inspire vous engage à vous en éloigner!

Vous témoignez par là que vous avez peu d’amour pour Dieu, peu le désir d'acquérir ou de conserver la pureté du coeur et par conséquent peu de zèle pour le salut de votre âme.

Vous ressemblez à un malade qui serait assez ennemi de lui-même pour craindre de découvrir ses plaies, parce qu’il craint d’en être guéri.

- Plus on s’éloigne de la confession, plus on s’affaiblit;

- Plus on se relâche, plus on s’accoutume au péché;

- Plus on se rapproche de l’impénitence.


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19 avril

Sur l'oisiveté.


1er Point.

Il n'y a rien de plus favorable pour nourrir ses passions que l'oisiveté.

Elles s'emparent sans peine et sans effort, d’une âme que rien n'occupe.

Si ces passions nous attaquent quelquefois au milieu de nos travaux, comment ne viendraient-elles pas nous surprendre et nous vaincre lorsqu’elles nous trouvent sans occupation?

Lorsque nul travail, nulle application, nulle inquiétude n’arrête cette pente naturelle qui nous porte à les satisfaire, nous irions provoquer nous-mêmes ces ennemis s’ils ne se réveillaient pas.


2e Point.

Rien de plus contraire aux passions que l'application au travail.

Si vous attachez votre esprit à quelque occupation qui le fixe; si vous combattez cet amour du repos de la tranquillité et de l'oisiveté, ce fond de paresse et d’indolence qui vous domine et qui vous rend ennemi du travail et de la réflexion:

Vous conserverez sans peine, ou avec beaucoup moins de peine, l’innocence et la pureté de votre âme.

Occupez-vous donc sans cesse à des travaux utiles et propres de votre état; et s’ils sont pénibles et dégoûtants, occupez-vous-en avec un esprit de mortification, c'est ainsi que vous amortirez ces passions vives que fomente l’oisiveté et vous leur fermerez l’entrée de votre coeur.


* * *

20 avril

Sur l'obligation de mener une vie mortifiée loin des plaisirs du monde.


1er Point.

N’aimez point le monde, ni les choses qui sont dans le monde. Si quelqu’un aime le monde, l’amour du Père n’est point en lui. (1 Jean 2: 15)

Toute la vie d’un Chrétien doit être une séparation continuelle. Remarquez:

- qu’on ne dit pas quelques actions particulières de la vie, mais la vie elle-même;

- qu’on ne dit pas quelques années, quelques jours ou quelques moments, mais toute la vie;

- qu’on ne dit pas la vie d'un Solitaire retiré dans le désert; mais d’un Chrétien, et de tout Chrétien de quelque état qu’il puisse être!

Tout Chrétien est membre et Disciple de Jésus-Christ, de ce fait, il ne peut espérer être sauvé que pour autant qu’il aura CONFORMÉ SA VIE ET SA CONDUITE À CELLE DE JÉSUS-CHRIST:


Son Maître,

Son Sauveur,

Son Chef,

Son Modèle.


2e Point.

Nous le devons comme pécheurs, puisque devant Dieu, il n'y a pas un Juste, pas même un seul (Ps. XIV. 3.)

Serait-il possible d’allier la vie de sainteté demandée (1Pierre I. 15.) avec les épanchements de la joie, la satisfaction des désirs de l'ivresse et de la volupté du monde?

Un pécheur racheté proportionne à son état et à ses forces la mortification extérieure de ses sens: il sait que Jésus-Christ n’a pas mené une vie aussi austère que celle de Jean-Baptiste; mais il ne met point de bornes à la mortification de ses passions; et c’est par là surtout qu’il s’efforce d’atteindre, autant qu’il est possible, la perfection de son divin modèle.

Ne savez-vous pas que les injustes n’hériteront point le royaume de Dieu?

NE VOUS Y TROMPEZ PAS:

Ni les impudiques, ni les idolâtres, ni les adultères, ni les efféminés, ni les infâmes, ni les voleurs, ni les cupides, ni les ivrognes, ni les outrageux, ni les ravisseurs, N’HÉRITERONT LE ROYAUME DE DIEU. (1Cor. VI. 9-10.)


* * *

21 avril

Sur la vie du monde.


1er Point.

On ne pense presque jamais à Dieu.

Et comment trouverait-on le temps d'y penser?

Tous les moments n’en sont-ils pas remplis par un cercle continuel de divertissements, d'inutilités, d’amusements frivoles ou de soins qui paraissent sérieux aux hommes charnels et qui, dans le fond, ne sont pas moins frivoles ni moins puérils que les amusements?

Il y a donc toute une panoplie qui nous fait oublier Dieu et notre salut.

Et si l’on y pense encore quelquefois, ce n’est tout au plus que pour prononcer quelques courtes prières par habitude et sans réflexion.

Encore arrive-t-il souvent que ce minimum manque quand le dégoût de la «religion» nous prend, quand la paresse nous gagne, ou que les distractions du monde nous appellent.


2e Point.

On n'y fait rien pour Dieu.

On n’y veille, on n’y travaille que pour s’enrichir, ou pour s’avancer; l’imagination n’est remplie que de vues humaines, de prétentions, de projets de fortune.

TOUTES les pensées, TOUS les désirs, TOUTES les paroles, TOUTES les démarches et presque tous les pas n’ont pour but que de satisfaire la vanité, l’ambition, l’avarice ou la volupté. Telle est la vie du monde!

Peut-on se persuader qu’une pareille vie soit propre à nous conduire à la félicité éternelle?

Ne faudrait-il pas s'inquiéter du salut de ceux qui sont engagés dans le monde?

Sache que, dans les derniers jours, il y aura des temps difficiles.

Car les hommes seront égoïstes, amis de l’argent, fanfarons, hautains, blasphémateurs, rebelles à leurs parents, ingrats, irréligieux, insensibles, déloyaux, calomniateurs, intempérants, cruels, ennemis des gens de bien, traîtres, emportés, enflés d’orgueil, AIMANT LE PLAISIR PLUS QUE DIEU... (2 Tim. III. 1-4.)


* * *

22 avril

Sur la nécessité de sanctifier sa vie par de bonnes oeuvres.


1er Point.

La plupart des chrétiens mondains ne sont pas persuadés de cette nécessité.

ILS SE CROIENT dans la voie du salut, quand ils ne sont ni injustes, ni ravisseurs du bien d’autrui, ni médisants, ni vindicatifs, ni esclaves de l’avarice et de la volupté.

Que peut-on me reprocher, disent-ils? Je ne fais tort à personne: est-on damné sans avoir commis aucun crime?

Ils avoueront sans peine qu’ils ne sont pas du nombre de ces Chrétiens fervents qui se font une extrême violence pour gagner le Ciel, mais ils ne peuvent se persuader qu’ils soient du nombre des pécheurs.


2e Point.

On peut être réprouvé pour la simple omission des bonnes oeuvres.

Car, pour être sauvé, dit l’Écriture, il ne suffit pas d’éviter le mal, IL FAUT FAIRE LE BIEN!

Le salut de l'homme roule sur ces deux points et l'un sera compté pour rien si on le sépare de l’autre.

- L’arbre stérile est jeté au feu, quoiqu’il ne fît point d’autre mal que celui d’occuper inutilement la terre.

- Le serviteur négligent est pareillement condamné aux ténèbres extérieures, non pour avoir perdu son talent, mais pour avoir omis de le mettre en valeur.

Dans l’arrêt qui sera prononcé contre eux au dernier Jugement, Jésus-Christ ne leur reprochera QUE des péchés d'omission: j'ai eu faim, dit-il, et vous ne m'avez pas donné à manger. (Matth. XXV. 42 et suiv.)

Travaillez donc sans cesse à sanctifier votre vie par de bonnes oeuvres, et ne perdez jamais de vue cette maxime indubitable dans les principes de la «Religion», que c’est un très grand mal devant Dieu, que de ne pas faire le bien quand on en a le pouvoir.


Celui donc qui sait faire ce qui est bien, et qui ne le fait pas,

COMMET UN PÉCHÉ.

(Jacques IV. 17.)


* * *

23 avril

Sur le souvenir des jours que l'on a passé dans l'oubli de Dieu et de ses devoirs.


1er Point.

Le temps passé n'est qu'un songe à l'égard des biens de ce monde dont on a profités.

Que vous revient-il présentement de ces vains plaisirs, de ces frivoles distinctions qui ont fait si longtemps la douceur et l’agrément de votre vie; en eussiez-vous joui pendant plusieurs années, quel avantage avez-vous sur celui qui ne les aurait goûtés qu’un instant?

Tout est également passé pour vous et pour lui, et le passé n’est rien, il n’a pas d’existence ni de réalité; c’est un songe qui a disparu; c'est une ombre, une vapeur, un son qui se dissipe; il n’en reste que le souvenir, et ce souvenir sera bientôt effacé.


2e Point.

Le temps passé est un mal réel à l'égard des péchés que l'on a commis.

Ils ne sont plus, mais ils ont été.

Le charme s’est évanoui, mais la tache subsiste encore dans la mémoire.

Ne vous y trompez pas, disait Saint Bernard, vos péchés ont passé hors de la main, hors de l’action; mais ils sont restés sur votre conscience.

Vous ne les commettez plus, mais il sera toujours vrai que vous les avez commis, raison pour laquelle il est malséant de parler du «BON VIEUX TEMPS» ce temps où l'on vivait dans le péché SANS CONNAÎTRE DIEU.

C’est MOI (l'Éternel), MOI QUI EFFACE TES TRANSGRESSIONS pour l’amour de moi, ET JE NE ME SOUVIENDRAI plus de tes péchés. (Ésaïe XLIII. 25.)

VOUS avez été lavés, mais VOUS avez été sanctifiés, mais VOUS avez été justifiés au nom du Seigneur Jésus-Christ, et par l’Esprit de notre Dieu. (1 Cor. VI. 11.)


* * *

24 avril

Sur le bon usage du temps présent.


1er Point.

Le présent est le seul temps dont nous puissions faire un bon ou un mauvais usage.

Le passé n’est plus, l’avenir n’est pas encore: IL N’Y A QUE LE TEMPS PRÉSENT QUI NOUS APPARTIENNE!

Mais ce présent n’est qu’un instant rapide et fugitif, un point presque imperceptible qui cesse d’être aussitôt que nous y avons pensé.

Représentez-vous le temps comme un vaste torrent qui vient à vous avec une rapidité inconcevable.

- Ce qui s’est écoulé ne reviendra plus: c’est le passé;

- Ce qui coule à vous n’y est pas encore arrivé: c’est l’avenir;

- Ce qui est parvenu jusqu’à vous; c’est le présent: vous en pouvez profiter.


2e Point.

Quel usage en doit-on faire?

Point d’autres que de l’appliquer au soin de son salut, pour s’assurer un mérite et une récompense qui dure éternellement.


Travaillez à votre salut avec crainte et tremblement.

(Philip. II. 12.)


Non, il n’y a aucun moment dans notre vie qui puisse nous empêcher de travailler à notre salut;

- Aucun qui ne nous fournisse pas une occasion pour pratiquer quelque vertu;

- Aucun où nous sommes dispensés d'être prêts à paraître devant Dieu pour lui rendre compte de nos actions;

- Aucun, enfin, qui ne puisse pas être un moment décisif pour notre salut.


* * *

25 avril

Sur l'incertitude de l'avenir.


1er Point.

L'avenir terrestre est incertain et c'est celui qui nous préoccupe le plus.

Nous pensons toujours à l'avenir, mais jamais au présent; l'un comme trop loin, l'autre comme trop rapide.

Nos pensées errent dans des temps qui ne sont pas encore et nous ne pensons point au seul moment qui nous appartienne, celui durant lequel nous devons nous préparer pour l'éternité.

Nous disons: J’irai, je ferai, j’obtiendrai telle ou telle grâce, je parviendrai à tel degré d’élévation et de fortune. Je détruirai et je rebâtirai, disait ce riche insensé, dont il est parlé dans l’Évangile, formant des projets sans savoir qu'il était à la veille de sa mort.

Dieu lui dit: Insensé! cette nuit même ton âme te sera redemandée; et ce que tu as préparé, pour qui cela sera-t-il? (Luc XII. 20.)


2e Point.

L'avenir est incertain, et cependant nous l'attendons pour nous donner à Dieu.

Vous différez de jour en jour de vous donner ENTIÈREMENT à Dieu:

- Vous attendez, dites-vous, que vous soyez parvenu à un âge plus avancé; mais y arriverez-vous?

- Vous attendez la vieillesse; mais y aura-t-il une vieillesse pour vous?

- Vous attendez le parfait dégagement d’une multitude d’affaires qui vous occupent, mais êtes vous sûr d’en voir la fin?

- Vous attendez le jour à venir; mais y en aura-t-il un pour vous?

Dans cette nuit-même on vous demandera peut-être compte de votre âme; et si vous mourez dans votre péché ou dans la désobéissance, que deviendrez-vous?


* * *

26 avril

Sur le délai de la Conversion ou du retour à Dieu.


1er Point.

Ne tardez pas, dit le Sage, de vous convertir au Seigneur et ne différez pas de jour en jour parce que vous n'êtes par sûr du temps.

Quand viendra-t-il en effet, ce temps où vous vous proposez de changer de vie: Peut-être sera-t-il encore plus rempli des embarras et des sollicitudes du siècle que celui que vous négligez?

De nouveaux liens, de nouvelles difficultés, de nouveaux obstacles s’opposeront encore à ces projets de conversion ou de retour à Dieu, des obstacles qui n’ont rien de réel.


2e Point.

Vous n'êtes pas sur de vous-même?

L’homme est inconstant pour le bien et confiant pour le mal. Vous regardez votre conversion comme un fruit qui n’est pas encore mûr; mais qui mûrira dans son temps.

Vous vous figurez qu’en ce temps-là:

- vos résolutions seront plus fermes,

- vos passions moins vives,

- vos répugnances moins fortes,

- vos attachements moins sensibles.

Désabusez-vous: ce temps pourra venir; mais vous n’en profiterez peut-être pas comme vous le pensez!

Ce sera plutôt ce mouvement de piété que vous ressentez actuellement QUI S'AFFAIBLIRA;

ce sera ce désir de conversion, de retour à Dieu, QUI DISPARAÎTRA; vous vous sentirez de plus en plus dégoûté de la vertu, et plus affermi dans le vice:


vous n’aurez plus les mêmes sentiments pour Dieu et pour votre salut;

vous ne serez le même QUE pour le monde et pour le péché.


* * *

27 avril

Sur la fausse idée que les Pécheurs se forment de la miséricorde de Dieu.


1er Point.

Ils la croient infinie et ils se rassurent: ils s’en font même une raison et un motif pour persévérer dans leurs désordres.

Ils ne se trompent pas en ce qu’ils croient cette miséricorde infinie, puisqu’elle l’est en effet, ainsi que tous les autres attributs de Dieu; mais ils se trompent en ce qu’ils ne prennent pas conscience que cette miséricorde est infinie dans un sens, mais bornée, limitée dans l'autre.

En quoi est-elle infinie?

Elle l’est en ce qu’elle s’étend à tous les hommes et à tous les péchés; en ce qu’elle ne met aucune distinction entre le Juif et le Gentil, parce qu'ils n'ont tous qu'un même Seigneur qui répand ses richesses SUR CEUX QUI L'INVOQUENT; en ce qu’elle pardonne les crimes les plus noirs, les forfaits les plus inouis; et c’est pour cette raison que les plus grands pécheurs ne doivent jamais désespérer de leur salut.


2e Point,

En quoi est-elle bornée?

Elle l’est quand le pécheur S’OBSTINE, quand il RÉSISTE, quand il DIFFÈRE toujours de se convertir.

C'est alors que LE SEIGNEUR, DONT IL A LASSÉ LA PATIENCE, ferme les entrailles de sa miséricorde et refuse d’entendre la voix de ceux qui s'endurcissent à la sienne.

C’est ce qu’annonçait à tout le genre humain, cet Ange dont il est parlé dans l’Apocalypse (Apoc. X. 1 et suiv.), qui ayant mis un pied sur la terre et l'autre sur la mer, leva la main vers le Ciel, et jura par le nom de l'Éternel, que le temps était fini; c’est-à-dire:


Que le temps de la miséricorde était passé,

et que le Seigneur allait donner un libre cours à sa justice.


* * *

28 avril

Sur la préparation à la mort.


1er Point.

Cette préparation doit durer toute la vie.

Il n’est donc permis ni de la différer, ni de l’interrompre, et c’est pour cette raison que Jésus-Christ dans son Évangile ne nous dit pas seulement: Préparez-vous, mais SOYEZ TOUJOURS PRÊTS.

On doit donc distinguer deux sortes de préparation à la mort.

- Une préparation qui précéde les dernières heures de la vie;

- Une préparation continuelle qui s'étend sur tous les moments de la vie par le soin que nous prenons à nous sanctifier.


2e Point.

Cette préparation continuelle ne doit point diminuer notre application à tous les devoirs de notre état.

Au contraire, elle doit l’augmenter; puisque c’est pour être toujours en état de paraître devant Dieu que nous nous attachons à ces devoirs avec tout le zèle et toute l’attention dont nous sommes capables.

Le vrai Fidèle ne perd jamais de vue cette maxime de Saint Jérôme:


Travaillez comme si vous deviez toujours vivre,

et vivez comme si vous deviez toujours mourir.


* * *

29 avril

Sur la repentance repoussée à l'heure de la mort.


1er Point.

Le pécheur qui diffère sa repentance jusqu’à l’heure de sa mort, compte sur ce qu'il fera pour Dieu dans ses derniers moments.

ESPÉRANCE MAL FONDÉE.

Car enfin, en fera-t-il plus que ces Vierges imprudentes qui n’étant point préparées d’avance à la venue de l'Époux, au moment qu’il arrive, s’efforcent de réparer le temps perdu?

Elles demandent du secours; elles reviennent avec leurs lampes allumées; et cependant lorsqu’elles frappent à la porte, on leur répond: Je ne vous connais pas; parce que leur piété n’est qu’extérieure, et que leur coeur n’est point changé (Matth. Chap. XXV.).


2e Point.

Le pécheur compte sur ce que Dieu fera pour lui.

Il pense que Dieu lui donnera la grâce d’une sainte mort; mais cette grâce finale et décisive, Dieu ne la doit à personne; elle dépend uniquement de sa volonté, parce qu’il faut que le salut de l'homme soit toujours dans ses mains et accompli au travers de l'oeuvre de Jésus-Christ.

Le plus grand Saint doit toujours trembler:


Si le juste se sauve avec peine,

que deviendront l’impie et le pécheur?

(1 Pierre IV. 18.)


VOUS PÉCHEUR, vous jouissez d’une assurance que ce Juste n’a pas, Dieu vous l’a-t-il donc promis cette grâce si précieuse et si désirable?


* * *

30 avril

Sur la fausse sécurité des Pécheurs.


1er Point.

Elle est fondée sur la promesse que Dieu a faite au pécheur pénitent de lui pardonner ses péchés.

Mais cette promesse ne concerne point le pécheur résolu de persévérer dans son péché jusqu’à la mort.

Le Seigneur a considéré dans le monde deux sortes de pécheurs:

- les uns faibles et découragés qui n’espèrent pas assez,

- les autres téméraires et présomptueux, qui espèrent trop.

Il dit aux premiers: Rassurez-vous; car quelques péchés que vous ayez commis, au moment que vous viendrez ou reviendrez à moi, je vous pardonnerai.

Tremblez, dit-il aux autres; parce que quelque inviolable que puisse être ma promesse, elle ne s’étend point jusqu’à favoriser votre impénitence.


2e Point.

Elle est fondée sur les traits de la miséricorde de Dieu envers les pécheurs, selon ce que nous lisons dans l'Écriture.

David n'a pas plutôt pleuré son péché, que le Prophète lui annonce qu’il est pardonné; à l'instant même où la femme pécheresse vient verser des larmes aux pieds de son Sauveur, tous ses péchés lui sont remis.


Oui, mais aucun de ces pécheurs

n’avait renvoyé sa repentance à l’heure de la mort.


Le pécheur impénitent peut encore moins se prévaloir de la conversion de cet heureux criminel qui fut crucifié sur le calvaire à côté de Jésus-Christ.

Il est vrai que celui-ci ne se convertit qu’à la dernière heure de sa vie: mais, C’ÉTAIT AUSSI LA PREMIÈRE HEURE DE SA FOI.

Dès qu’il commença à connaître Jésus-Christ, il commença à l’aimer; et quelque tardif que paraisse son repentir, jamais conversion ne fut plus prompte!


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