Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

LES LEÇONS DE LA PAROLE DE DIEU

SUR L’ÉTAT DE L’HOMME DANS L’ÉTERNITÉ


***

7.° L’ÉTERNITÉ DES PEINES


Nous abordons maintenant la plus délicate de toutes les questions qui ont pour objet le sort futur de l’homme.

Elle est tellement hérissée de difficultés, qu’on ne peut les éviter toutes, quelle que soit la thèse qu’on adopte.

À peine pouvons-nous apercevoir les bords de l’éternité, comment pourrions-nous en trouver le fond? Aussi quel respect ne devons-nous pas avoir pour le mystère même et pour les divers points de vue sous lesquels on le considère; il est bien entendu qu’on ne le considère qu’en vue de la plus grande édification à procurer, et EN S’APPUYANT SUR LA PAROLE DE DIEU.

S’il ne s’agissait que de consulter la philosophie, nous aurions bientôt pour réponse que les peines des méchants finiront, parce qu'elle ne partirait que du sentiment de la bonté de Dieu; elle ne présenterait les peines que sous de faibles couleurs; elle les atténuerait presque au point de les annuler, et ne les appliquerait qu’à ces grands criminels qui ont troublé la société par de graves attentats; hors de cela, elle dirait de tous ceux qui meurent, ils sont bienheureux. Certes, c’est bien là, encore une fois, la voie large, le chemin de la perdition.

Il n’en est pas ainsi de la parole de Dieu. Si ce Livre divin proclame les miséricordes du ciel, c’est en accompagnant cette proclamation de terreurs qui n’inspirent pas la tentation d’en abuser.


L’homme naturellement enfant de colère, sujet par lui-même à la condamnation, ayant en soi des penchants vicieux à déraciner, capable de se perdre par la force des habitudes et par l’endurcissement de sa volonté, capable aussi par l'étendue immense de ses facultés d'un bonheur ou d’un malheur dont il est impossible de calculer le terme, a besoin de la pensée d’un jugement redoutable, et de la déclaration expresse et positive que SANS LA SAINTETÉ NUL N'ENTRERA DANS LES CIEUX, (Héb. XII, 14; Ap. XXI, 27) et qu’il faudra répondre de tout le mal qu’on aura fait et de tout le bien qu’on aura négligé de faire.

Certes, quand après avoir médité sur l'étendue et la gravité des peines à venir, telles que nous les représente la parole de Dieu, on se demande s’il est prudent de s'y exposer, à supposer même qu'elles puissent finir un jour; on sent bien, au contraire, LA NÉCESSITÉ DE LA CRAINTE DE DIEU.


Mais enfin, ces peines finiront-elles une fois ou ne finiront-elles jamais?

Telle est la question à discuter.

Chacun des deux systèmes qu’on peut adopter a ses avantages et ses inconvénients, ses preuves et ses oppositions, ce qui tient à la profondeur du mystère, à celle de notre ignorance, et à celle de la sagesse de Dieu qui a jugé à propos de laisser quelque obscurité sur ce sujet, pour entretenir par ce moyen les deux grands mobiles des actions humaines, l’espérance et la crainte et de les contrebalancer l’un par l'autre au profit du zèle et de la foi.

Nous présenterons donc dans toute leur force les deux doctrines, autant du moins que cela dépendra de nous; nous exposerons les raisons sur lesquelles leurs partisans respectifs les appuient, et nous tirerons de chacune d'elles les conséquences pratiques qui en découlent pour nous-mêmes, la nécessité de la vigilance; et envers nos frères, la nécessité de la tolérance et l’obligation de faire servir leurs principes à leur avancement dans les vertus chrétiennes.

Arrêtons-nous aujourd’hui à la doctrine de l'éternité absolue des peines.

Elle tire ses preuves de ses avantages même, des DÉCLARATIONS DE LA PAROLE DE DIEU et des arguments que fournit la raison.


$ I – Avantages


Quand nous disons que cette doctrine a pour preuve ses avantages, nous n’entendons par là qu’une preuve indirecte et secondaire, qu’une preuve qui peut faire pencher la balance dans le cas où les arguments directs seraient d’un égal poids.

Nous dirons de même pour la doctrine opposée: rigoureusement parlant, un avantage n’est pas une preuve, puisque l’erreur a souvent les siens; et la vérité, ses inconvénients.


La doctrine des peines sans fin paraît être la plus propre à prévenir l’abus de la miséricorde de Dieu.

Supposez la possibilité du pardon après la mort à une époque quelconque, même aussi éloignée que l’imagination peut se la représenter:

Où sera le frein de tant de scélérats que la crainte des peines sans fin peut seule retenir?

Où sera celui de tant de gens qui, sans se rendre coupables de grands crimes envers la société, se livrent à leurs passions, se reposant sur le temps pour se convertir et sur la miséricorde de Dieu pour obtenir leur pardon?

Où sera le stimulant nécessaire à tant de prétendus chrétiens qui, contents d’un peu de foi et de vertu, ne pensent nullement à la perfection qu’ils doivent acquérir, sans laquelle cependant ils ne peuvent voir Dieu, et à laquelle il n’est plus temps de travailler après que le terme de la miséricorde divine est expiré?

Le présent sensible, quelque peu important qu’il soit, nous frappe infiniment plus par les jouissances qu’il procure et par les maux qu’il fait souffrir, que la crainte de maux éloignés dont on sait bien qu’ils seront affreux, mais auxquels on espère presque toujours d’échapper: que sera-ce si la crainte de les souffrir est affaiblie par la certitude d’en atteindre le terme?

Il est des âmes sans doute qui n'ont pas besoin d’un tel motif, et auxquelles le sentiment de l’amour de Dieu dit plus que toutes ses terreurs: aussi l’Évangile a-t-il pour elles des soutiens et des encouragements qui leur conviennent.

MAIS N’OUBLIONS PAS L’ÉPOUVANTABLE CORRUPTION DU CŒUR HUMAIN! N’oublions pas:

avec quelle facilité nous nous laissons séduire,

avec quelle ruse le prince des ténèbres nous attaque et se rend maître de nous,

avec quelle promptitude nous pouvons tomber dans la mort,

avec quelle difficulté nous pouvons être ramenés de nos égarements,

avec quelle impossibilité de nous repentir nous pouvons nous trouver dans certaines circonstances.

L’expérience de tous les jours ne prouve que trop cette triste vérité.


$ II – Parole de Dieu.


Écoutons d'abord ce que St Pierre nous dit des MÉCHANTS, et en particulier de CEUX QUI ONT QUITTÉ LE DROIT CHEMIN:

Si après être échappés des souillures du monde par la connaissance de notre Seigneur et Sauveur J. C., ils viennent à être vaincus en s'y engageant de nouveau, leur dernière condition est devenue pire que la première.

Car il leur eût été plus AVANTAGEUX de n'avoir point connu la voie de la justice, que de se détourner, après l’avoir connue du saint commandement qui leur avait été donné (2 Pier. II, 20-21).

C’est ce fâcheux état de rechute que J. C. avait représenté sous l'image d’une maison qui avait été balayée et ornée, et qu’un esprit de ténèbres venait de nouveau souiller en s'aidant pour cela de sept autres esprits pires que lui, tout comme un brigand qui se voyant repoussé revient à la charge avec de nouvelles forces, et prend de nouvelles mesures pour que sa proie ne puisse plus lui échapper.

C’est pourquoi J. C. ajoute, que la dernière condition du maître de cette maison est pire que la première (Matt. XII, 43-45)..... 

St Paul nous parle le même langage:

Il n'est pas possible que ceux qui ont été une fois éclairés, qui ont goûté le don céleste, qui ont eu part au St. Esprit y qui ont goûté l'excellence de la parole de Dieu et des merveilles du siècle à venir, et qui sont retombés, soient portés de nouveau à la repentance, puisqu'autant qu'il est en eux ils crucifient de nouveau le Fils de Dieu et l'exposent à l'ignominie.

En effet, lorsqu'une terre qui est souvent abreuvée de la pluie, produit des herbes utiles à ceux qui la cultivent, elle reçoit la bénédiction du Seigneur; mais quand elle ne produit que des épines et des chardons, on l'abandonne, elle est prête d'être maudite, et enfin on y met le feu (Héb. VI, 4-8).

J. C. parlant de ceux qui auront commis le péché contre le St. Esprit, dit que ce péché ne leur sera jamais pardonné, mais qu'ils seront sujets à une condamnation éternelle. N’est-ce pas dire bien clairement que leur supplice sera SANS FIN (Marc III, 29).

Que ce soit au littéral ou au figuré qu’il faille entendre ce qui est dit dans l’Écriture Sainte d’une fournaise ardente, L’IDÉE QUE NOUS DEVONS NOUS FAIRE DE SA DURÉE, C’EST QU’ELLE EST ÉTERNELLE, puisque c’est un feu qui ne s'éteint point, et que la fumée du tourment des méchants qui y seront tourmentés jour et nuit s'élèvera aux siècles des siècles.


St Jean se sert trois fois de cette expression,

1.° au sujet des adorateurs de la bête, tandis qu’il est dit des Saints qu’ils se reposent et que leurs œuvres les suivent: voilà le malheur des uns et le bonheur des autres exprimés, sans qu’il soit dit littéralement que ce sera pour toujours.


Si on conclut que le malheur des méchants peut finir,

pourquoi ne pas conclure de même à l’égard du bonheur des gens de bien?


2.° au sujet de la grande prostituée dont la sentence est répétée dans les mêmes termes, en opposition avec le banquet des noces de l’Agneau, qui sera le commencement d’un bonheur sans fin;

3.° au sujet de Satan et de sa troupe, qui après le règne de mille ans chercheront à séduire et à persécuter les élus, mais qui bientôt après seront précipités dans l’étang ardent de feu et de soufre, pour y être tourmentés jour et nuit AUX SIÈCLES DES SIÈCLES.

Suit le jugement universel; les méchants sont jetés dans le feu, et la nouvelle Jérusalem reçoit les élus. TOUT CELA ANNONCE UN SORT DÉFINITIF DE PART ET D’AUTRE (Ap. XIV, 11; XIX, 3, 9; XX, 9-15. XXI, 1-4).


J. C. dit qu’il est vivant aux siècles des siècles:

St Jean voit et entend un Ange qui jure par celui qui vit aux siècles des siècles, qu'il n'y aura plus de temps, mais qu’au jour où le septième Ange fera entendre sa voix et sonnera de la trompette, le mystère de Dieu sera accompli (Ap. I, 18; XI, 15; X, 5-7).

Plus de temps, c’est bien là la désignation de l’éternité.

Plus de succession, c’est la permanence, et en même temps la simultanéité de tout ce qu’on peut être à la fois.

C'est encore cette permanence qui est exprimée par l’expression AUX SIÈCLES DES SIÈCLES.

St Jean dit qu’après que Dieu aura renouvelé les cieux et la terre en faveur des Saints, les méchants seront laissés dehors.

Quelle peut en être la cause, si ce n’est que leur renouvellement moral sera devenu impossible?

Comment pourraient-ils sortir de cet abîme de misères, quand tous les moyens de la miséricorde pour les convertir ayant été inutilement épuisés, ils boiront du vin de la colère de Dieu versé pur dans la coupe de sa colère (Ap. XXII, 15; XIV, 10; IX, 20-21).

Et quand J. C. dit que la nuit vient dans laquelle nul ne peut travailler, il fait bien sentir qu’il est IMPOSSIBLE à l’homme de travailler à son salut après sa mort.

Dans la nuit du tombeau personne ne peut remplir la tâche qu’il devait remplir ici-bas pour se préparer au ciel: comment la perdition ne serait-elle pas sans ressources?


Là où l'arbre tombe, il y reste, soit du côté du salut ou de celui de la réprobation (Jean IX, 4; Ecc. XI, 3).

Cela même résulte de ce qu'il n'y aura plus de victimes pour les péchés, mais un jugement terrible et un feu qui doit dévorer les rebelles (Héb. X, 26-27).

Comment serait-il possible que des pécheurs auxquels il sera dit: allez au feu éternel préparé au Diable et à ses Anges, des pécheurs qui seront associés au sort des esprits infernaux et envoyés dans le séjour des peines éternelles, tandis que les justes iront à la vie éternelle, ne se trouvent pas livrés à des misères sans fin (éternelles)?

En vain dirait-on que le mot (grec1) désigne le SIÈCLE, et (grec2) ce qui dure DES SIÈCLES: (grec3) dérive de (grec4) qui signifie TOUJOURS et nous avons vu que l’expression aux siècles des siècles signifie la même chose, puisque:

On ne peut pas supposer que J. C. qui s’applique cette expression ne doive être vivant que pour un nombre fini et déterminé de siècles!

St Paul dit que les méchants seront punis par une perdition éternelle (grec5).

Il met au rang des doctrines élémentaires le jugement éternel (grec6).

Le péché contre le St. Esprit sera puni par une condamnation éternelle (grec7).

Les ténèbres seront éternelles (grec8); ou ne dureraient-elles qu'un siècle?

Il est évident que dans toutes ces citations le mot (grec9) ne peut pas se prendre dans le sens rétréci de siècle, de temps passager, parce qu’il s’agit du résultat final des choses (2 Th. I, 9; Héb. VI, 2; Marc III, 29; 2 Pier. Il, 17).

Daniel avait déjà parlé des peines éternelles, lorsqu’il avait dit:

Les uns se réveilleront pour la vie ÉTERNELLE, et les autres pour des opprobres et une infamie ÉTERNELLE.

C’est la même expression, pour les récompenses et pour les peines. (Dan. XII, 2).


St Paul semble donner la clef de cette vérité quand il dit que les choses invisibles sont immuables parce qu’elles sont le terme où l'on aboutit, l’essence même des choses, tandis que les choses visibles sont passagères, parce qu’elles ne sont qu’un moyen de passage à l’éternité.

Pour le voyageur en route tout passe et il passe lui-même; arrivé à sa destination, tout est fixe et il l'est lui-même. Mais, qu’une essence soit bonne ou mauvaise, elle n'est pas moins la racine d’une certaine chose et dès lors immuable. Cela donc peut être vrai de l’enfer aussi bien que du paradis (2 Cor. IV, 18).

Ajoutons encore que. J. C. dit de Judas, qu'il aurait mieux valu qu'il ne fût pas né, ce qu’il n’aurait pas dit si les peines de ce malheureux devaient finir un jour. Du monde, il dit qu'il ne prie pas pour lui; c’est donc bien l’abandonner à sa misère. (Matt. XXVI, 24; Jean XVII, 9).


Ainsi donc, aux termes de l’Écriture Sainte, la peine des méchants est:

un feu qui ne s’éteint point,

un ver qui ne meurt point,

un tourment sans relâche aux siècles des siècles,

une peine éternelle comme le sont les récompenses (elles aussi éternelles).

Les expressions sont les mêmes pour désigner la durée du bonheur et celle du malheur, tellement que les terribles menaces du Seigneur font le contrepoids de ses brillantes et riches promesses.


$ III Preuves tirées de la raison.


Aux déclarations de l'Écriture Sainte peuvent joindre quelques considérations, qui ont la parole de Dieu même pour fondement, aussi bien que la nature de l’homme.


1.° La conduite de chaque homme doit avoir nécessairement un résultat final, mais bien différent, SELON qu’on a fait le bien ou qu’on s’en est éloigné: LE JUSTE ET LE MÉCHANT NE PEUVENT ABOUTIR AU MÊME TERME.

S'il y a finalement un renouvellement de toutes choses pour le juste, il doit aussi y avoir pour le méchant une dégradation de toutes choses:

pour l’un le paradis consistera dans le parfait bonheur sans possibilité de rechute,

pour l'autre l'enfer doit consister dans le parfait malheur sans possibilité de délivrance, parce que chez l'un il n’y aura plus de contact avec le mal; et chez l’autre, plus de contact avec le bien.

Chacun étant devenu immuable dans son fond, pourra recevoir de ce fond des développements nouveaux pendant toute l'éternité, comme un arbre sur lequel on ne peut plus rien greffer, mais qui restant ferme sur ses racines, produisant chaque année de nouveaux fruits par chacune de ses branches.

PLUS DE TEMPS! Alors, il semble évident quant à la possibilité de la déviation des Saints ou de la conversion des méchants que chacun jouira ou souffrira en fonction des résultats naturels de l'emploi qu’il aura fait du temps.

L’homme est essentiellement esprit. Il devrait donc se hâter pendant qu’il est ici-bas d’assouplir sa volonté, de la soumettre à celle de Dieu, de bénir la Sagesse Suprême quand elle l’afflige, le châtie, et le purifie au creuset de la douleur! Il devrait s’appliquer à sentir vivement sa misère et à s’humilier devant le Seigneur!


2.° Disons ensuite que l'éternité suppose l’immutabilité (la constance, l'impossibilité de changer).

Le temps passe, l’éternité reste.

Le temps est la durée passagère des choses qui se succèdent comme ne pouvant exister que l’une après l’autre;

L'éternité est pour ces mêmes choses leur coexistence; leur simultanéité.

Le temps n’engendre que l’une après l’autre les plantes qui doivent naître d’une première graine; l’éternité est le champ où toutes les productions qui ont résulté de cette semence peuvent être réunies, présenter une pleine végétation et maturation avec leurs fruits devenus impérissables.

Là donc où est l’éternité, il n’y a plus de succession ni de changement, et par conséquent:


PLUS DE RETOUR EN ARRIÈRE

POUR PASSER DU BIEN AU MAL OÙ DU MAL AN BIEN.


Pourrions-nous donc mettre trop de zèle à racheter le temps, à le sanctifier, et pour cet effet à employer le peu qui nous en reste de la manière dont Jésus nous a appris à le faire pendant sa vie terrestre, lui qui est le Prince du temps et le Roi des siècles?


3.° La considération des perfections de Dieu, de ces adorables perfections dont le mystérieux conseil ne fait rien d’arbitraire, nous conduit à la même conséquence, l’éternité absolue des peines.

Quelle n’est pas l'énormité du péché qui offense la majesté infinie de Dieu?

Comment les réprouvés, devenus incapables de repentir, pourraient-ils satisfaire la justice de Dieu, au moins par le retour à lui?

Comment pourraient-ils expier assez ce qu’ils ont fait souffrir à J. C. inutilement crucifié pour eux?

Comment en obtiendraient-ils le pardon?

Comment auraient-ils part aux mérites du sang de J. C. tant de fois rejeté et méprisé?

La grandeur même de ce sacrifice ne prouve-t-elle pas L’ÉTERNITÉ DES PEINES, puisqu’il n’aurait pas été nécessaire, s’il ne se fût agi que d’un châtiment passager à épargner aux pécheurs?

Entre ceux qui admettent la doctrine des peines sans fin, il se trouve des personnes qui l’appuient particulièrement sur ce que Dieu ayant tout créé pour manifester ses perfections, il était dans l'ordre des choses que la postérité d’Adam étant tombée tout entière dans la dégradation et la mort par la chute de son chef, et se trouvant par-là dans un état incompatible avec la vie céleste: QUE DIEU MANIFESTÂT SA JUSTICE par la réprobation éternelle d’une partie des hommes et sa miséricorde par le salut gratuit des autres.

C’est pourquoi il est dit que ceux qui heurtent contre la parole par rébellion y ont été destinés; déclaration qui n’annonce pas un salut universel (1 Pier. II, 7/8).

Mais sans nous arrêter à cette considération, sans remonter à la cause première du mal, et en nous arrêtant à celle qui se trouve dans LA LIBERTÉ DE L’HOMME, nous pouvons dire que Dieu ayant proposé aux hommes une récompense ou une peine infinie en durée, ILS SONT LIBRES DE CHOISIR, par conséquent il n’y a point d’injustice en Dieu à laisser les méchants en proie aux misères dont ils ont pris volontairement et sciemment le chemin.

D'ailleurs si la menace d’une peine sans fin ne suffit pas pour retenir la multitude de faire le mal, combien moins la menace d’une peine passagère suffira-t-elle à cela?

Et puisque Dieu a juré que les rebelles n'entreraient pas dans son repos, comment ne les priverait-il pas à jamais du ciel.....?


Pour résumer, on peut se demander par où arriverait la délivrance des réprouvés?

Serait-ce par un acte de la miséricorde de Dieu?

Le temps en est passé; toutes les ressources ont été épuisées, c'est le règne de la justice.

Serait-ce par un acte de la justice de Dieu?

Il faut au contraire que cette Justice suive son cours par l'expiation du mal qu’on a fait.

Serait-ce par la conversion des pécheurs?

Elle est devenue impossible: les souffrances provoquent le désespoir; le désespoir augmente la résistance à Dieu; la résistance multiplie les péchés, et prolonge, aggrave l'expiation: c'est une roue de misères morales et physiques, une roue sans fin dans son mouvement, et ce sont les démons acharnés à la perte des hommes qui sans relâche la meuvent dans l'étang ardent de feu et de soufre.


NON, LES RÉPROUVÉS NE PEUVENT RIEN FAIRE POUR APAISER LA JUSTICE DE DIEU:

c’est le règne de la nuit dans laquelle nul ne peut travailler;

c'est l'empire de l’éternité qui a succédé à celui du temps;

ce sont les choses immuables qui ont remplacé les passagères,

c'est une satisfaction infinie qui doit répondre à la majesté infinie de Dieu;

c’est la responsabilité de la mort de J. C. qui pèse de tout son poids sur les coupables;

c'est l'association au sort des mauvais Anges dont le salut est aussi impossible que la conversion;

c’est une prédestination irrévocable à manifester éternellement la justice de Dieu, comme les élus doivent manifester éternellement sa miséricorde.

Ainsi le fruit de la rédemption ne sera que pour ceux-ci; ils obtiendront seuls le salut qui est en J. C.; quant aux autres, ou en tant que dégradés en Adam et chargés de sa coulpe ou en tant que pécheurs PERSONNELLEMENT RESPONSABLES DE LEURS PROPRES ACTIONS, ils seront à jamais privés du salut.

Tel est le décret immuable de la Justice du ciel.....!

Deux hommes quittent en même temps cette vie, l'un par la porte qui conduit au ciel, l’autre par celle qui aboutit à l’enfer:

Celui-là se développe aussitôt dans l'élément de la gloire dans laquelle il fait des progrès sans fin;

Celui-ci se développe dans l'élément du désordre et du malheur, perd tout ce qu’il avait de grâces et de biens....


* * *


Arrêtons-nous sur le bord de l'abîme infernal, et réfléchissons.

Qui êtes-vous, ô mon frère, que je vois consterné, abattu, le regard de l’effroi fixé sur cet abîme, et suspendant votre marche vers le ciel?

Des peines sans fin! Le désespoir s’est emparé de moi. Pécheur comme je le suis, offensant chaque jour mon Dieu malgré le désir que j'ai de lui plaire, m’attirant chaque jour sa condamnation, bronchant ou tombant presque à chaque pas sur ce chemin glissant, comment arriverais-je au terme? Comment ne tomberais-je pas dans ce gouffre de misères?

Les terreurs de la Justice divine m'épouvantent et m’arrêtent: je voudrais espérer, et je ne vois que mon Juge.

Rassurez-vous, âme timorée, et regardez plus haut.

À travers ces nuages n'apercevez-vous pas la main de votre Père?

Ne voyez-vous pas arborée, sur le bord de la cime de la montagne, la croix de votre Sauveur?

N’entendez-vous pas sa voix d’amour qui vous crie avec tendresse et avec force: venez à moi, vous qui êtes chargé et travaillé.

À qui regarderai-je sinon à celui qui a le cœur froissé, et qui tremble à ma parole!

Montez avec courage, mon cher frère; le ciel est pour ceux qui craignent par amour.

Montez avec la joie de l'espérance chrétienne, avec la confiance dans la miséricorde de celui qui vous appelle. Ses Anges montent avec vous et vous soutiennent.

Montez sans relâche et en priant.


Et vous dont tous les traits sont ceux du désespoir et des passions les plus dévorantes, qui êtes-vous?

Des peines sans fin! Mon état est donc sans ressources. Je me suis livré à mes passions, rendu esclave de mes habitudes. Je suis sans goût pour la piété, sans amour pour le ciel, sans foi dans ses compassions. Jamais, non jamais de pardon, de salut, de repos. Qu’ai-je à faire, si ce n’est à jouir en désespéré du reste de ma vie?

Arrête, infortuné. N’ES-TU PAS ENCORE SUR LE CHEMIN?

Ton Sauveur n’est-il pas encore auprès de toi?

Ne vois-tu pas aussi sa croix qui t’offre un refuge?

Son sang ne plaide-t-il pas et ne plaidera-t-il pas pour toi jusqu’à ton dernier soupir?

S’il n’y avait pas lieu au repentir et au pardon, t’avertirait-il? Te presserait-il?

T’enverrait-il des messagers de paix pour t’éclairer et te donner courage?

Essaie le combat contre le péché, tente la marche vers le ciel, verse les larmes de l'humilité et non pas celles du désespoir, laisse ton cœur battre d'espérance, et accepte au moins une étincelle de l'amour pour ton Dieu:


TU PEUX ENCORE ÊTRE PRÉSERVÉ

DE TOMBER DANS L’ÉTERNELLE CONDAMNATION.


Regarde à ton Sauveur, demande-lui son pardon et son secours, et monte vers ton Dieu!


Et vous qui vous disputez en chemin sur la profondeur de cet abîme, et sur la possibilité ou l’impossibilité d’en sortir, qui êtes-vous?

Des peines sans fin! Qui peut supporter cette idée! En vain l’environne-t-on, l’appuie-t-on de preuves frappantes; je ne puis l’admettre!

Et à cause de cela vous vous arrêtez! VOUS PERDEZ LE TEMPS QUI VOUS EST DONNÉ POUR ÉVITER LE DANGER!

Vous vous provoquez les uns les autres, vous vous heurtez sur ce chemin étroit et glissant! Cet abîme eût-il un fond, fut-il possible d’en remonter, que de brisures et de douleurs avant d’atteindre ce fond et avec ces brisures et ces douleurs que de peines, que de temps pour le remonter, que d’obstacles à vaincre!

Voulez-vous en courir les risques?

Téméraires, respectez-vous les uns les autres, excitez-vous au zèle et à une sainte frayeur, et servez-vous de ce que vous croyez pour avancer, et de ce que les autres croient pour les faire avancer.


Et vous qui plein de joie vous reposez paisiblement en ce lieu, ne craignant rien, dansant plutôt sur ce terrain mouvant, et vous livrant à vos plaisirs, qui êtes-vous?

Des peines sans fin! Je ne les ai pas méritées, je n’ai pas sujet de les craindre. Comment ne coulerais-je pas mes jours avec joie?

Je ne fais point de mal, mes plaisirs sont innocents, je fais du bien quand je le puis, comment ne serais-je pas dans mes faiblesses l'objet des compassions de mon Dieu et de l'intercession de mon Sauveur?

Quoi donc:

VOUS SAVEZ que les peines seront sans fin et le gage du péché;

 VOUS SAVEZ que sans la sainteté vous ne pouvez entrer dans le royaume des cieux;

 VOUS SAVEZ qu'il faut passer par la porte étroite, renoncer au monde et à soi-même, porter sa croix à la suite de Jésus, tendre à la perfection, sentir votre misère y veiller et prier sans relâche;

 VOUS SAVEZ qu'un seul péché peut vous jeter dans la mort, et que l'amour du monde est inimitié avec Dieu;


VOUS SAVEZ CES CHOSES, et vous, vous jouez sur le bord de l'abîme!


Vous oubliez le prix de votre âme, le prix de sa rançon, et ce que vaut le salut! Voulez-vous donc périr? Vous suffit-il de descendre doucement dans l'enfer, ou voulez-vous, comme des voyageurs imprudents au milieu des glaces, céder au sommeil perfide qui vous gagne et vous tue?

Êtes-vous sûr de vivre encore demain, et de pouvoir sacrifier demain les jouets que Dieu vous demande aujourd’hui? Plus qu'un moment de jour; et dans les ténèbres qui obscurcissent déjà votre âme, précurseurs de celles dont la mort va vous envelopper, plus qu’un faux pas, et vous pouvez, être perdu!

Hâtez-vous donc de vous humilier, de vous repentir au pied de la croix de votre Sauveur, de demander à grands cris son secours.

Humiliez-vous pour tout le bien que vous avez négligé de faire.

Humiliez-vous pour cet amour des plaisirs terrestres qui l’emporte dans votre cœur sur l’amour de ceux du ciel.

Demandez à connaître tout le mal qui est en vous, et tout celui que vous avez fait par votre tiédeur.

Commencez à craindre, ce sera votre salut.

Et vous qui, pressé par la crainte, vous efforcez de dépasser ce passage difficile, et vous hâtez de tendre vers la cime la montagne, portant alternativement vos regards sur cet abîme qui vous effraie et sur la cime désirée qui vous attire, qui êtes-vous? Un pécheur que l'idée des peines sans fin aiguillonne sans relâche.

Comment pourrais-je perdre de vue le but vers lequel je dois tendre? Aussi longtemps que je serai sur le chemin de la vie, que de dangers pour mon âme! Et je ne puis les éviter qu’en me tenant en garde contre les ennemis qui se tiennent en embuscade pour me saisir et me jeter dans le précipice d’où l'on ne remonte jamais. Comment compter sur moi-même et abuser des miséricordes de mon Dieu? Si je n’étais pas doué d’une capacité qui doit être un jour immense, et d’une sensibilité qui peut croître à l'infini, si je n’étais pas destiné à quelque chose de céleste, de glorieux, d’éternel en bénédictions divines, serais-je aussi capable d’affreuses misères?

Plus je dois être inondé de joie dans le ciel, plus aussi, privé de ces biens par ma faute, serais-je malheureux dans les enfers.

Non, point de fausse paix, point de tiédeur. Enfant de Dieu, vrai disciple de Jésus, poursuis ta course, crains avec espérance, réjouis-toi avec circonspection, serre de près ton Guide et glorifie ton Sauveur,


Mais vous qui avertissez vos frères et qui cherchez à leur inspirer une salutaire frayeur, qui êtes-vous?

Je ne suis comme eux qu’un pauvre mortel exposé aux mêmes tentations, menacé des mêmes dangers; je ne suis qu’un pauvre voyageur sorti comme eux du sentier de la paix et obligé d’y rentrer.

Comme eux je ne suis qu’un pécheur qui dois m’humilier dans le sentiment de ma misère, reconnaître ce que je mérite en tant que rebelle envers mon Dieu, enfant ingrat, brebis lâche, pasteur plus ou moins coupable de mille fautes funestes à l’édification des brebis qui me sont confiées. Autant et plus quelles, je dois craindre les peines sans fin.

Oui, vous le devez, puisque nos âmes vous ont été confiées et que vous en répondrez.

Vous le devez, puisque vous avez été plus que nous à portée de connaître les hauteurs du ciel où vous devez nous conduire, et les profondeurs de l’enfer dont vous devez nous préserver. Prenez garde qu'après avoir prêché aux autres, vous ne soyez vous-même rejeté. Des peines sans fin!

Élevez vos regards vers les cieux, et contemplez la gloire qui y brille.

Là sont des pareils, des amis qui étaient chers ici-bas au pasteur tiède et infidèle; il ne les verra jamais.

Là est le Sauveur qui étale les trésors de sa charité; il ne le verra jamais.

Là est le tendre Père de la famille humaine, distribuant aux Saints ses intarissables richesses; il ne le verra jamais.

Ce qu’il verra, c’est un abîme dans lequel il sera précipité;

Ce qu’il verra, ce sont les instruments et les ministres de la Justice divine;

Ce qu’il verra, ce sont les pécheurs qu’il aura laissé tomber par sa faute dans cet horrible – abîme, et qui lui feront partager leurs tourments;

Ce qu’il verra, ce sont les déplorables victimes de l’expiation;

Ce qu’il sentira, c’est l’expiation même, ce sont des peines sans fin.

Voyez là-bas ces êtres perdus qui fondent de toute part sur les pasteurs infidèles et leur redemandent leur salut.

Voyez ceux-là dans leur fureur, et ceux-ci dans leur confusion. Pussent-ils ceux-ci quelque espoir de sortir de cette prison, de ce gouffre, de cette fournaise, il leur serait dit, au nom de la Justice du ciel: réparez auparavant le mal que vous avez fait, rendez, si vous le pouvez, à CES HOMMES QUI SONT PERDUS PAR VOTRE FAUTE, les vertus que vous leur avez enlevées par vos scandales, ou dont vous les avez privés par votre négligence.

Convertissez-les, sanctifiez-les, consolez-les, souffrez pour eux et par eux, et délivrez-les avant que vous soyez délivrés vous-mêmes. Ce n’est qu'après eux que vous pourriez être reçus en grâce: voilà l’ordre de la justice. Des peines sans fin!



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